Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
La société à responsabilité limitée M. A... a demandé au tribunal administratif de Melun d'annuler la décision du 3 février 2021 par laquelle le directeur général de l'Office français de l'immigration et de l'intégration (OFII) a mis à sa charge la contribution spéciale alors mentionnée à l'article L. 8253-1 du code du travail pour un montant de 7 300 euros et la contribution forfaitaire alors prévue à l'article L. 626-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile pour un montant de 2 553 euros, la décision du 15 avril 2021 rejetant son recours gracieux et les deux titres de perception émis le 16 février 2021 pour avoir paiement de ces contributions.
Par jugement n° 2105776 et 2105917 du 20 octobre 2023, le tribunal administratif de Melun a rejeté ses demandes.
Procédure devant la cour :
Par une requête et des mémoires enregistrés les 9 décembre 2023 et 11 juin et 10 août 2024, la société M. A..., représentée par Me Chevalier, demande à la cour :
1°) d'annuler le jugement n° 2105776 et 2105917 du 20 octobre 2023 du tribunal administratif de Melun ;
2°) d'annuler la décision du 3 février 2021, ensemble la décision du 15 avril 2021 rejetant son recours gracieux ;
3°) d'annuler les deux titres de perception émis le 16 février 2021 à son encontre pour le recouvrement de ces contributions ;
4°) de la décharger des contributions mises à sa charge ou, à titre subsidiaire, d'en réduire le montant ;
5°) de mettre à la charge de l'OFII la somme de 2 500 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle soutient que :
- la décision du 3 février 2021 du directeur général de l'OFII est insuffisamment motivée ;
- les décisions attaquées des 3 février et 15 avril 2021 sont entachées d'une erreur manifeste d'appréciation dès lors que les faits qui lui sont reprochés ne sont pas constitués, qu'elle est de bonne foi, que les documents qui lui ont été présentés l'ont induite en erreur, qu'elle n'a fait l'objet d'aucune poursuite ni sanction pénale ;
- elles méconnaissent le principe de la présomption d'innocence et le droit à un procès équitable ;
- elles sont entachées d'une erreur manifeste d'appréciation au regard des dispositions de l'article L. 8251-1 du code du travail ;
- aucune sanction ne peut lui être infligée sur le fondement des articles L. 8253-1 du code du travail et L. 626-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile dès lors qu'elle s'est acquittée des obligations qui lui incombent en vertu de l'article L. 5221-8 du code du travail et, d'autre part, qu'elle n'était pas en mesure de savoir que les documents qui lui étaient présentés revêtaient un caractère frauduleux ou procédaient d'une usurpation d'identité ;
- dès lors qu'elle est de bonne foi, que les faits qui lui sont reprochés ne sont pas caractérisés dans la mesure où elle n'a pas sciemment commis d'infraction et qu'elle a versé au ressortissant malien qu'elle employait les salaires dus mensuellement et que son contrat de travail a été rompu, les contributions mises à sa charge doivent être minorées ;
- par décision du 17 juillet 2024, l'OFII a annulé la contribution forfaitaire mise à sa charge pour un montant de 2 553 euros, la cour devra en prendre acte ;
- aucun recours administratif préalable obligatoire ne devait être formé contre les titres de perception émis le 16 février 2021 ;
- les titres de perception émis le 16 février 2021 ont été pris par une autorité incompétente ;
- ils doivent être annulés compte tenu de l'illégalité des décisions des 3 février et 15 avril 2021.
Par un courrier du 4 juin 2024, les parties ont été informées, en application de l'article R. 611-7 du code de justice administrative, de ce que la cour était susceptible de soulever d'office un moyen d'ordre public tiré de l'irrecevabilité des conclusions tendant à l'annulation des deux titres de perception émis le 16 février 2021 à l'encontre de la société M. A... pour le recouvrement des contributions mises à sa charge en l'absence d'introduction du recours administratif préalable obligatoire prévu par les dispositions de l'article 118 du décret du 7 novembre 2012 relatif à la gestion budgétaire et comptable publique.
Par un mémoire en défense, enregistré le 18 juillet 2024, l'OFII, représenté par Me de Froment conclut au rejet de la requête de la société M. A... et à ce que la somme de 2 500 euros soit mise à sa charge en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Il soutient que :
- par décision du 17 juillet 2024, l'OFII a annulé la contribution forfaitaire mise à la charge de la société pour un montant de 2 553 euros ;
- en l'absence de recours administratif préalable obligatoire formé contre les titres de perception émis le 16 février 2021, les conclusions à fin d'annulation dirigées contre ces titres sont irrecevables ;
- les moyens soulevés par la société M. A... ne sont pas fondés.
Par un courrier du 2 août 2024, les parties ont été informées, en application de l'article R. 611-7 du code de justice administrative, de ce que la cour était susceptible de soulever d'office un moyen d'ordre public tiré de ce que les conclusions de la requête d'appel de la société M. A... tendant à l'annulation de la décision du 3 février 2021 du directeur général de l'OFII mettant à sa charge la contribution forfaitaire représentative des frais de réacheminement d'un étranger dans son pays d'origine pour un montant de 2 553 euros, décision qui a été annulée par une décision du 17 juillet 2024 du directeur général de l'OFII, sont devenues sans objet, ainsi que les conclusions tendant à la décharge de cette contribution forfaitaire.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- le code du travail ;
- le décret n° 2012-1246 du 7 novembre 2012 ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de Mme Collet,
- et les conclusions de Mme Bernard, rapporteure publique.
Considérant ce qui suit :
1. Le 9 novembre 2020, les services de police ont contrôlé un entrepôt de vente de denrées alimentaires exploité par la société M. A... à Orly (94) et ont constaté la présence d'un ressortissant malien en action de travail dépourvu de titre l'autorisant à séjourner et à exercer une activité salariée en France. Un procès-verbal d'infraction a été dressé le 10 novembre 2020 et transmis à l'Office français de l'immigration et de l'intégration (OFII) en application de l'article L. 8271-17 du code du travail. Par une décision du 3 février 2021, le directeur général de l'OFII a appliqué à la société M. A..., à raison de l'emploi de ce ressortissant étranger, la contribution spéciale alors mentionnée à l'article L. 8253-1 du code du travail pour un montant de 7 300 euros et la contribution forfaitaire alors prévue par l'article L. 626-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile pour un montant de 2 553 euros. Par décision du 15 avril 2021, le directeur général de l'OFII a rejeté le recours gracieux formé par la société M. A... le 2 avril 2021 contre cette décision. Deux titres de perception ont été émis le 16 février 2021 à l'encontre de la société M. A... pour le recouvrement de ces contributions. Par jugement du 20 octobre 2023, dont la société M. A... relève appel, le tribunal administratif de Melun a rejeté sa demande tendant à l'annulation de la décision du 3 février 2021, de la décision rejetant son recours gracieux puis des deux titres de perception émis le 16 février 2021 à son encontre. Par décision du 17 juillet 2024, l'OFII a annulé la contribution forfaitaire pour frais de réacheminement mise à la charge de la société M. A... pour un montant de 2 553 euros.
Sur la contribution spéciale :
2. Aux termes des dispositions de l'article L. 8251-1 du code du travail : " Nul ne peut, directement ou indirectement, embaucher, conserver à son service ou employer pour quelque durée que ce soit un étranger non muni du titre l'autorisant à exercer une activité salariée en France (...) ". Aux termes de l'article L. 8253-1 de ce même code dans sa version alors en vigueur : " Sans préjudice des poursuites judiciaires pouvant être intentées à son encontre, l'employeur qui a employé un travailleur étranger en méconnaissance des dispositions du premier alinéa de l'article L. 8251-1 acquitte, pour chaque travailleur étranger non autorisé à travailler, une contribution spéciale. Le montant de cette contribution spéciale est déterminé dans des conditions fixées par décret en Conseil d'Etat. Il est, au plus, égal à 5 000 fois le taux horaire du minimum garanti prévu à l'article L. 3231-12. Ce montant peut être minoré en cas de non-cumul d'infractions ou en cas de paiement spontané par l'employeur des salaires et indemnités dus au salarié étranger non autorisé à travailler mentionné à l'article R. 8252-6. Il est alors, au plus, égal à 2 000 fois ce même taux. Il peut être majoré en cas de réitération et est alors, au plus, égal à 15 000 fois ce même taux. (...) ". Aux termes de l'article R. 8253-3 du code du travail dans sa rédaction applicable au litige : " Au vu des procès-verbaux qui lui sont transmis en application de l'article L. 8271-17, le directeur général de l'Office français de l'immigration et de l'intégration indique à l'employeur, par lettre recommandée avec avis de réception ou par tout autre moyen permettant de faire la preuve de sa date de réception par le destinataire, que les dispositions de l'article L. 8253-1 sont susceptibles de lui être appliquées et qu'il peut présenter ses observations dans un délai de quinze jours ". Aux termes de l'article R. 8253-4 de ce même code dans sa rédaction applicable au litige : " A l'expiration du délai fixé, le directeur général de l'Office français de l'immigration et de l'intégration décide, au vu des observations éventuelles de l'employeur, de l'application de la contribution spéciale prévue à l'article L. 8253-1. (...) ".
En ce qui concerne la motivation de la décision du 3 février 2021 :
3. La décision du 3 février 2021 mentionne les articles L. 8251-1, L. 8253-1 et R. 8253-4 du code du travail, le procès-verbal établi à la suite du contrôle le 9 novembre 2020, ainsi que le montant des sommes dues. Elle mentionne également que la sanction a été infligée à la société requérante pour l'emploi irrégulier d'un travailleur, M. B..., dont le nom est mentionné en annexe. Par suite, contrairement à ce que soutient la société M. A..., cette décision est suffisamment motivée.
En ce qui concerne le bien-fondé de la contribution :
4. Il résulte des dispositions précitées de l'article L. 8253-1 du code du travail et suivants que la contribution qu'ils prévoient ont pour objet de sanctionner les faits d'emploi d'un travailleur étranger séjournant irrégulièrement sur le territoire français ou démuni de titre l'autorisant à exercer une activité salariée, sans qu'un élément intentionnel soit nécessaire à la caractérisation du manquement. Toutefois, un employeur ne saurait être sanctionné sur le fondement de ces articles, qui assurent la transposition des articles 3, 4 et 5 de la directive 2009/52/CE du Parlement européen et du Conseil du 18 juin 2009 prévoyant des normes minimales concernant les sanctions et les mesures à l'encontre des employeurs de ressortissants de pays tiers en séjour irrégulier, lorsque tout à la fois, d'une part, et sauf à ce que le salarié ait justifié avoir la nationalité française, il s'est acquitté des obligations qui lui incombent en vertu de l'article L. 5221-8 du code du travail et que, d'autre part, il n'était pas en mesure de savoir que les documents qui lui étaient présentés revêtaient un caractère frauduleux ou procédaient d'une usurpation d'identité. En outre, lorsqu'un salarié s'est prévalu lors de son embauche de la nationalité française ou de sa qualité de ressortissant d'un Etat pour lequel une autorisation de travail n'est pas exigée, l'employeur ne peut être sanctionné s'il s'est assuré que ce salarié disposait d'un document d'identité de nature à en justifier et s'il n'était pas en mesure de savoir que ce document revêtait un caractère frauduleux ou procédait d'une usurpation d'identité.
5. En premier lieu, il résulte de l'instruction, et notamment du procès-verbal du 10 novembre 2020 d'audition du gérant de la société M. A..., qui fait foi jusqu'à preuve du contraire et des déclarations de M. B... faites le même jour, que ce dernier a présenté lors de son recrutement un récépissé de demande d'asile l'autorisant à travailler délivré le 13 avril 2017 et valable jusqu'au 12 octobre 2020 qui était ainsi expiré à la date du contrôle alors qu'il incombait à son employeur, conformément aux dispositions précitées de l'article L. 8251-1 du code du travail de vérifier que le titre autorisant ce dernier à travailler n'était pas parvenu au terme de sa validité en cours d'exécution du contrat de travail. La société M. A... ne peut dès lors utilement se prévaloir de sa bonne foi et contester la matérialité des faits qui lui sont reprochés, qui sont établis. Par suite, c'est sans commettre d'erreur d'appréciation au regard des dispositions des articles L. 8253-1 et L. 8251-1 du code du travail que le directeur général de l'OFII a, par la décision du 3 février 2021 confirmée sur recours gracieux le 15 avril 2021, mis à la charge de la société M. A..., la contribution spéciale contestée.
6. En deuxième lieu, la circonstance que la société M. A... n'aurait fait l'objet d'aucune poursuite ni sanction pénale est sans incidence sur le bien-fondé de l'application de la contribution spéciale mise à sa charge dès lors que le directeur général de l'OFII peut sanctionner l'employeur d'un étranger en situation irrégulière indépendamment de toutes poursuites pénales, lorsqu'après avoir recueilli les observations de l'intéressé, il estime que les faits sont établis. Par suite, le moyen tiré de l'atteinte au principe de la présomption d'innocence doit être écarté.
7. En troisième lieu, aux termes de l'article 6 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " Droit à un procès équitable. / 1. Toute personne a droit à ce que sa cause soit entendue équitablement, publiquement et dans un délai raisonnable, par un tribunal indépendant et impartial, établi par la loi, qui décidera, soit des contestations sur ses droits et obligations de caractère civil, soit du bien-fondé de toute accusation en matière pénale dirigée contre elle (...) ". Ces stipulations ne sont applicables, en principe, qu'aux procédures contentieuses suivies devant les juridictions lorsqu'elles statuent sur des accusations en matière pénale et ne peuvent être invoquées pour critiquer la régularité d'une procédure administrative, alors même qu'elle conduirait au prononcé d'une sanction. Il ne peut en aller autrement que dans l'hypothèse où la procédure d'établissement de cette sanction pourrait, eu égard à ses particularités, emporter des conséquences de nature à porter atteinte de manière irréversible au caractère équitable d'une procédure ultérieurement engagée devant le juge. Mais tel n'est pas le cas lorsque les éléments du dossier peuvent être débattus notamment devant le juge de plein contentieux opérant un entier contrôle.
8. Dès lors que l'ensemble des renseignements détenus par l'administration, et notamment le procès-verbal effectué suite au contrôle du 9 novembre 2020 pouvaient de nouveau être discutés devant le juge administratif de pleine juridiction, qui opère un entier contrôle sur la sanction prononcée, garantissant ainsi le caractère équitable de la procédure, le moyen tiré de la violation de des stipulations de l'article 6 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ne peut qu'être écarté.
En ce qui concerne le montant de la contribution spéciale :
9. Aux termes de l'article R. 8253-2 du code du travail dans sa rédaction applicable au litige : " I- Le montant de la contribution spéciale prévue à l'article L. 8253-1 est égal à 5 000 fois le taux horaire, à la date de la constatation de l'infraction, du minimum garanti prévu à l'article L. 3231-12. / II.- Ce montant est réduit à 2 000 fois le taux horaire du minimum garanti dans l'un ou l'autre des cas suivants : / 1° Lorsque le procès-verbal d'infraction ne mentionne pas d'autre infraction commise à l'occasion de l'emploi du salarié étranger en cause que la méconnaissance des dispositions du premier alinéa de l'article L. 8251-1 ; / 2° Lorsque l'employeur s'est acquitté des salaires et indemnités mentionnés à l'article L. 8252-2 dans les conditions prévues par les articles R. 8252-6 et R. 8252-7. / III.- Dans l'hypothèse mentionnée au 2° du II, le montant de la contribution spéciale est réduit à 1 000 fois le taux horaire du minimum garanti lorsque le procès-verbal d'infraction ne mentionne l'emploi que d'un seul étranger sans titre l'autorisant à exercer une activité salariée en France (...) ". Selon l'article R. 8252-6 du même code dans sa rédaction applicable au litige : " L'employeur d'un étranger non autorisé à travailler s'acquitte par tout moyen, dans le délai mentionné à l'article L. 8252-4, des salaires et indemnités déterminés à l'article L. 8252-2. / Il remet au salarié étranger sans titre les bulletins de paie correspondants, un certificat de travail ainsi que le solde de tout compte. Il justifie, auprès de l'Office français de l'immigration et de l'intégration, par tout moyen, de l'accomplissement de ses obligations légales ". L'article R. 8252-7 du même code énonce que : " Lorsque le salarié étranger est placé en rétention administrative, est assigné à résidence ou n'est déjà plus sur le territoire national, son employeur s'acquitte des sommes déterminées à l'article L. 8252-2, dans le délai mentionné à l'article L. 8252-4, auprès de l'Office français de l'immigration et de l'intégration, lequel les reverse à l'intéressé. (...) ". L'article L. 8252-4 du même code prévoit que : " Les sommes dues à l'étranger non autorisé à travailler, dans les cas prévus aux 1° à 3° de l'article L. 8252-2, lui sont versées par l'employeur dans un délai de trente jours à compter de la constatation de l'infraction. / (...) ".
10. Aux termes de l'article L. 8252-2 du code du travail : " Le salarié étranger a droit au titre de la période d'emploi illicite : / 1° Au paiement du salaire et des accessoires de celui-ci, conformément aux dispositions légales, conventionnelles et aux stipulations contractuelles applicables à son emploi, déduction faite des sommes antérieurement perçues au titre de la période considérée. (...) / 2° En cas de rupture de la relation de travail, à une indemnité forfaitaire égale à trois mois de salaire, à moins que l'application des règles figurant aux articles L. 1234-5, L. 1234-9, L. 1243-4 et L. 1243-8 ou des stipulations contractuelles correspondantes ne conduise à une solution plus favorable. (...) ".
11. Les dispositions précitées des articles L. 8253-1, R. 8253-2, L. 8252-2 et R. 8252-6 du code du travail prévoient la possibilité de minorer le montant de la contribution spéciale à 2 000 fois le taux horaire du minimum garanti en cas de non-cumul d'infractions ou en cas de paiement spontané par l'employeur des salaires et indemnités dus au salarié étranger non autorisé à travailler mentionné à l'article R. 8252-6 du code du travail et même à 1 000 fois le taux horaire du minimum garanti lorsqu'en l'absence de cumul d'infraction l'employeur s'est acquitté des salaires et indemnités mentionnés à l'article L. 8252-2 du code du travail.
12. Il résulte de l'instruction et notamment du procès-verbal d'infraction du 10 novembre 2020, qu'une seule infraction a été relevée à l'encontre de la société M. A... par les services de police, à savoir l'emploi irrégulier d'un ressortissant malien en action de travail, déclaré aux services de l'URSSAF mais dépourvu de titre l'autorisant à séjourner et à exercer une activité salariée en France, ce qui a permis à la société requérante de bénéficier du montant réduit à 2 000 fois le taux horaire du minimum garanti et a ainsi conduit le directeur général de l'OFII à fixer le montant de la contribution spéciale à 7 300 euros. En revanche, la société M. A... ne verse pas au dossier les pièces permettant d'établir qu'elle se serait acquittée des salaires et indemnités mentionnés à l'article L. 8252-2 du code du travail dans les conditions prévues par les articles R. 8252 6 et R. 8252-7 du même code lui permettant de bénéficier du montant réduit à 1 000 fois le taux horaire. Enfin, si elle se prévaut de sa bonne foi, elle n'apporte aucun élément financier ou comptable qui permettrait que lui soit accordée à titre exceptionnel, une décharge des contributions en litige.
Sur la contribution forfaitaire représentative des frais de réacheminement :
13. Par décision du 17 juillet 2024, l'OFII a annulé la contribution forfaitaire pour frais de réacheminement mise à la charge de la société M. A... pour un montant de 2 553 euros. Par suite les conclusions dirigées contre les décisions des 3 février et 15 avril 2021 en tant qu'elles portent sur la contribution forfaitaire représentative des frais de réacheminement de l'étranger sont désormais dépourvues d'objet. Dès lors il n'y a plus lieu, dans cette mesure, d'y statuer.
Sur les titres de perception émis le 16 février 2021 pour le recouvrement de la contribution spéciale et de la contribution forfaitaire :
14. D'une part, aux termes de l'article L. 8253-1 de ce même code dans sa version applicable en l'espèce : " (...) L'Office français de l'immigration et de l'intégration est chargé de constater et fixer le montant de cette contribution pour le compte de l'Etat selon des modalités définies par convention. / L'Etat est ordonnateur de la contribution spéciale. A ce titre, il liquide et émet le titre de perception. / Le comptable public compétent assure le recouvrement de cette contribution comme en matière de créances étrangères à l'impôt et aux domaines ". Aux termes du quatrième alinéa de l'article L. 626-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, alors en vigueur : " L'Etat est ordonnateur de la contribution forfaitaire. A ce titre, il liquide et émet le titre de perception. ". D'autre part, aux termes de l'article 117 du décret du 7 novembre 2012 relatif à la gestion budgétaire et comptable publique, applicable aux titres de recettes dont l'Etat est ordonnateur : " Les titres de perception émis en application de l'article L. 252 A du livre des procédures fiscales peuvent faire l'objet de la part des redevables : / 1° Soit d'une opposition à l'exécution en cas de contestation de l'existence de la créance, de son montant ou de son exigibilité ; / (...) ". Aux termes de l'article 118 du même décret : " Avant de saisir la juridiction compétente, le redevable doit adresser une réclamation appuyée de toutes justifications utiles au comptable chargé du recouvrement de l'ordre de recouvrer. (...).
15. Il résulte des dispositions précitées de l'article L. 8253-1 du code du travail de celles de l'article L. 626-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile que la contribution spéciale et la contribution forfaitaires sont recouvrée par l'État comme en matière de créances étrangères à l'impôt et au domaine. Il s'agit ainsi bien d'une créance de l'Etat contrairement à ce que soutient la société M. A.... Les dispositions précitées des articles 117 et suivants du décret du 7 novembre 2012 relatif à la gestion budgétaire et comptable publique applicables aux titres de recettes dont l'Etat est ordonnateur, étaient, dès lors applicables aux titres contestés, de sorte qu'une réclamation préalable devait être formée avant d'introduire un recours contentieux contre les titres émis pour le recouvrement de ces créances.
16. En l'espèce, la société requérante n'a pas introduit le recours administratif préalable obligatoire prévu par les dispositions précitées et mentionnées sur les titres contestés. Par suite, les conclusions dirigées contre ces actes sont irrecevables.
17. Il résulte de tout ce qui précède que la société M. A... n'est pas fondée à se plaindre de ce que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Melun a rejeté ses demandes dirigées contre la contribution spéciale mise à sa charge. Ses conclusions à fin d'annulation et de décharge concernant cette contribution doivent ainsi être rejetées.
Sur les frais liés à l'instance :
18. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge de l'OFII, qui n'est pas la partie perdante, la somme demandée par la société M. A... au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens. Il y a, en revanche, lieu de faire application de ces dispositions et de mettre à la charge de la société M. A... la somme de 1 000 euros à verser à l'OFII au titre des frais liés à l'instance.
D É C I D E :
Article 1er : Il n'y a plus lieu de statuer sur les conclusions tendant à l'annulation de la décision du 3 février 2021 en tant qu'elle condamne la société M. A... au versement d'une contribution forfaitaire représentative des frais de réacheminement de l'étranger sur les conclusions dirigées contre la décision du 15 avril 2021 en tant qu'elle rejette le recours formé contre cette contribution.
Article 2 : Le surplus des conclusions de la requête de la société M. A... est rejeté.
Article 3 : La société M. A... versera à l'Office français de l'immigration et de l'intégration une somme de 1 000 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Article 4 : Le présent arrêt sera notifié à la société M. A..., à l'Office français de l'immigration et de l'intégration et au ministre de l'intérieur.
Copie en sera adressée au directeur départemental des finances publiques de l'Essonne.
Délibéré après l'audience du 9 septembre 2024, à laquelle siégeaient :
- Mme Menasseyre, présidente,
- Mme Vrignon-Villalba, présidente assesseure,
- Mme Collet, première conseillère.
Rendu public par mise à disposition au greffe le 30 septembre 2024.
La rapporteure,
A. Collet La présidente,
A. Menasseyre
La greffière
N. Couty
La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur en ce qui le concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
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N° 23PA05102