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27/09/2024 | FRANCE | N°24PA02015

France | France, Cour administrative d'appel de PARIS, 9ème chambre, 27 septembre 2024, 24PA02015


Vu la procédure suivante : Procédure contentieuse antérieure : M. A... B... a demandé au tribunal administratif de Paris d'annuler l'arrêté du 25 janvier 2024 par lequel le préfet de police a décidé son transfert aux autorités croates responsables du traitement de sa demande d'asile. Par un jugement n° 2402280 du 29 mars 2024, la magistrate désignée par le président du tribunal administratif de Paris a annulé l'arrêté du 25 janvier 2024 et enjoint au préfet de police de procéder à un nouvel examen de la situation de M. A... B... et de

lui délivrer une autorisation provisoire de séjour dans le délai de...

Vu la procédure suivante : Procédure contentieuse antérieure : M. A... B... a demandé au tribunal administratif de Paris d'annuler l'arrêté du 25 janvier 2024 par lequel le préfet de police a décidé son transfert aux autorités croates responsables du traitement de sa demande d'asile. Par un jugement n° 2402280 du 29 mars 2024, la magistrate désignée par le président du tribunal administratif de Paris a annulé l'arrêté du 25 janvier 2024 et enjoint au préfet de police de procéder à un nouvel examen de la situation de M. A... B... et de lui délivrer une autorisation provisoire de séjour dans le délai de trois mois à compter de la date de notification du jugement. Procédure devant la Cour : Par une requête enregistrée le 3 mai 2024, le préfet de police demande à la Cour : 1°) d'annuler les articles 2, 3 et 4 du jugement n° 2402280 du 29 mars 2024 par lequel la magistrate désignée par le président du tribunal administratif de Paris a annulé son arrêté du 25 janvier 2024 portant transfert aux autorités croates de M. A... B... en vue de l'examen de sa demande d'asile, lui enjoignant de procéder à un nouvel examen de la situation de l'intéressé et de lui délivrer une autorisation provisoire de séjour dans le délai de trois mois de à compter de la date de notification du présent jugement ; 2°) de rejeter la demande présentée par M. C... A... B... devant le tribunal administratif. Il soutient que : - l'entretien dont a bénéficié M. A... B... dans les locaux de la préfecture de police de Paris le 7 novembre 2023 a, contrairement à ce qu'a estimé le tribunal, été mené par un agent qualifié en vertu du droit national, au sens des dispositions de l'article 5 du règlement (UE) n° 604/2013 du 26 juin 2013 ; - les autres moyens soulevés en première instance ne sont pas fondés. La requête a été transmise à M. A... B... qui n'a pas produit d'observations. Vu les autres pièces du dossier. Vu : - la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ; - la Charte des droits fondamentaux de l'Union européenne ; - le règlement (CE) n° 1560/2003 de la Commission du 2 septembre 2003 ; - le règlement (UE) n° 603/2013 du Parlement européen et du Conseil du 26 juin 2013 ; - le règlement (UE) n° 604/2013 du Parlement européen et du Conseil du 26 juin 2013 ; - l'arrêt de la Cour de justice de l'Union européenne du 30 novembre 2023, Ministero dell'Interno, aff. C-228/21, C-254/21, C-297/21, C-315/21 et C-328/21 ; - le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ; - le code des relations entre le public et l'administration ; - le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ; - le code de justice administrative. Le président de la formation de jugement a décidé de dispenser le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience. Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience. Le rapport de Mme Boizot a été entendu au cours de l'audience publique.

Considérant ce qui suit : 1. Par un arrêté du 25 janvier 2024, le préfet de police a décidé du transfert de M. A... B..., ressortissant népalais né le 17 septembre 1995, aux autorités croates aux fins d'examen de sa demande d'asile. Par un jugement n° 2402280 du 29 mars 2024, dont le préfet de police relève régulièrement appel, la magistrate désignée par le président du tribunal administratif de Paris a annulé cet arrêté, enjoint au préfet de police de procéder à un nouvel examen de sa situation et de lui délivrer une attestation de demande d'asile en procédure normale dans un délai de trois mois suivant la notification du jugement et, enfin, mis à la charge de l'Etat une somme de 1 000 euros à verser à son conseil en application des dispositions des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991. Sur le motif d'annulation retenu par le tribunal administratif : 2. Aux termes de l'article 5 du règlement (UE) n° 604/2013 du 26 juin 2013 : " 1. Afin de faciliter le processus de détermination de l'Etat membre responsable, l'Etat membre procédant à cette détermination mène un entretien individuel avec le demandeur. Cet entretien permet également de veiller à ce que le demandeur comprenne correctement les informations qui lui sont fournies conformément à l'article 4. / (...) / 4. L'entretien individuel est mené dans une langue que le demandeur comprend ou dont on peut raisonnablement supposer qu'il la comprend et dans laquelle il est capable de communiquer. Si nécessaire, les États membres ont recours à un interprète capable d'assurer une bonne communication entre le demandeur et la personne qui mène l'entretien individuel. / 5. L'entretien individuel a lieu dans des conditions garantissant dûment la confidentialité. Il est mené par une personne qualifiée en vertu du droit national (...) ". Aux termes de l'article L. 111-8 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Lorsqu'il est prévu aux livres II, V et VI et à l'article L. 742-3 du présent code qu'une décision ou qu'une information doit être communiquée à un étranger dans une langue qu'il comprend, cette information peut se faire soit au moyen de formulaires écrits, soit par l'intermédiaire d'un interprète. L'assistance de l'interprète est obligatoire si l'étranger ne parle pas le français et qu'il ne sait pas lire. En cas de nécessité, l'assistance de l'interprète peut se faire par l'intermédiaire de moyens de télécommunication. Dans une telle hypothèse, il ne peut être fait appel qu'à un interprète inscrit sur l'une des listes mentionnées à l'article L. 111-9 ou à un organisme d'interprétariat et de traduction agréé par l'administration. Le nom et les coordonnées de l'interprète ainsi que le jour et la langue utilisée sont indiqués par écrit à l'étranger ". 3. Pour annuler l'arrêté portant transfert de M. A... B... aux autorités croates, la magistrate désignée par le président du tribunal administratif de Paris a relevé que le compte-rendu d'entretien individuel ne présentait aucune indication permettant d'identifier l'agent ayant conduit l'entretien et que l'administration n'apportait en défense aucun élément de nature à établir sa qualité. Il a, par conséquent, estimé que l'entretien ne peut être regardé comme ayant été mené par une personne qualifiée en vertu du droit national au sens de l'article 5 du règlement du 26 juin 2013. Toutefois, alors qu'il ne résulte ni des dispositions citées au point 2 ni d'aucun principe que devrait figurer sur le compte-rendu de l'entretien individuel la mention de l'identité de l'agent qui a mené l'entretien, il ressort des pièces du dossier, en particulier des mentions portées sur le compte rendu de l'entretien signé par M. A... B..., du tampon de la préfecture apposé sur ce compte rendu et de la teneur de l'entretien, que l'intéressé a bénéficié d'un entretien mené par un agent qualifié du bureau de l'accueil de la demande d'asile de la préfecture qui, en l'absence de tout élément qui conduirait à remettre en doute sa qualification, doit être regardé comme étant une personne qualifiée en vertu du droit national au sens des dispositions citées au point précédent. La circonstance que l'identité de cet agent ne serait pas portée au compte-rendu n'a pas privé l'intéressé de la garantie tenant au bénéfice de cet entretien et à la possibilité de faire valoir toutes observations utiles. Dans ces conditions, le préfet de police est fondé à soutenir que c'est à tort que le tribunal a annulé son arrêté du 25 janvier 2024. Sur les autres moyens soulevés par M. A... B... : 4. En premier lieu, par un arrêté n° 2023-01598 du 28 décembre 2023 régulièrement publié le même jour au recueil des actes administratifs spécial, le préfet de police a donné délégation à Mme E... D..., attachée d'administration de l'Etat, signataire des arrêtés attaqués, pour signer tous les actes dans la limite de ses attributions, au nombre desquelles figurent les demandes d'asile. Dès lors, le moyen tiré de l'incompétence de l'auteur de l'arrêté du 25 janvier 2024 2023 doit être écarté. 5. En deuxième lieu, la décision attaquée qui précise notamment que la comparaison des empreintes digitales de M. A... B... au moyen du système Eurodac, effectuée conformément au règlement n° 603/2013, a permis de constater que l'intéressé a sollicité l'asile auprès des autorités croates le 29 juillet 2023, qu'au regard des articles 3 et 18-1 b les autorités croates doivent être regardées comme étant responsables de la demande d'asile de M. A... B..., que, saisies le 28 novembre 2023 d'une demande de prise en charge, ces autorités l'ont expressément acceptée le 12 décembre 2023, et que M. A... B... ne relève pas des dérogations prévues par les articles 3-2 ou 17 du règlement n° 604/2013, est suffisamment motivée en droit et en fait. 6. En troisième lieu, aux termes de l'article 4 du règlement (UE) n° 604/2013 du 26 juin 2013 : " 1. Dès qu'une demande de protection internationale est introduite au sens de l'article 20, paragraphe 2, dans un État membre, ses autorités compétentes informent le demandeur de l'application du présent règlement (...) / 2. Les informations visées au paragraphe 1 sont données par écrit, dans une langue que le demandeur comprend ou dont on peut raisonnablement supposer qu'il la comprend. Les États membres utilisent la brochure commune rédigée à cet effet en vertu du paragraphe 3 (...) / 3. Si c'est nécessaire à la bonne compréhension du demandeur, les informations lui sont également communiquées oralement, par exemple lors de l'entretien individuel visé à l'article 5. (...) ". Aux termes de l'article 5 du même règlement : " 1. Afin de faciliter le processus de détermination de l'État membre responsable, l'État membre procédant à cette détermination mène un entretien individuel avec le demandeur. Cet entretien permet également de veiller à ce que le demandeur comprenne correctement les informations qui lui sont fournies conformément à l'article 4 ". 7. Il résulte de ces dispositions que le demandeur d'asile auquel l'administration entend faire application du règlement (UE) n° 604/2013 du 26 juin 2013 doit se voir remettre, en temps utile pour lui permettre de faire valoir ses observations lors de l'entretien prévu par les dispositions de l'article 5 du même règlement, entretien qui doit également permettre de s'assurer qu'il a compris correctement ces informations, l'ensemble des éléments prévus au paragraphe 1 de l'article 4 du règlement, par écrit et dans une langue qu'il comprend. 8. Il ressort des pièces du dossier que M. A... B... s'est vu remettre par les services préfectoraux le 7 novembre 2023, contre signature, deux documents rédigés en anglais et traduits oralement en népalais via le concours d'ISM interprétariat en népalais, langue que le requérant a déclaré comprendre, dont l'un est intitulé " J'ai demandé l'asile dans l'Union européenne - quel pays sera responsable de l'analyse de ma demande ' " (Brochure A), l'autre " Je suis sous procédure Dublin - qu'est-ce que cela signifie ' " (Brochure B). Il suit de là que le moyen tiré de ce que la décision querellée aurait été prise en méconnaissance de l'article 4 du règlement 604/2013, en raison de ce que le requérant ne se serait pas vu remettre les brochures prévues par ces dispositions, dans une langue comprise par lui, doit être écarté comme manquant en fait. 9. En quatrième lieu, aux termes de l'article L. 121-1 du code des relations entre le public et l'administration : " Exception faite des cas où il est statué sur une demande, les décisions individuelles qui doivent être motivées en application de l'article L. 211-2, ainsi que les décisions qui, bien que non mentionnées à cet article, sont prises en considération de la personne, sont soumises au respect d'une procédure contradictoire préalable ". Aux termes de l'article L. 121-2 du même code : " Les dispositions de l'article L. 121-1 ne sont pas applicables : / (...) 3° Aux décisions pour lesquelles des dispositions législatives ont instauré une procédure contradictoire particulière ". Aux termes de l'article L. 122-1 de ce code : " Les décisions mentionnées à l'article L. 211-2 n'interviennent qu'après que la personne intéressée a été mise à même de présenter des observations écrites et, le cas échéant, sur sa demande, des observations orales. Cette personne peut se faire assister par un conseil ou représenter par un mandataire de son choix (...) ". 10. Il résulte des dispositions du livre V du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, notamment des articles L. 571-1 et suivants, que le législateur a entendu déterminer l'ensemble des règles de procédure administrative et contentieuse auxquelles sont soumises l'intervention et l'exécution des décisions de transfert. Dès lors, les dispositions précitées du code des relations entre le public et l'administration ne sauraient être utilement invoquées à l'encontre de la décision de transfert en litige. En tout état de cause, si M. A... B... allègue qu'il n'aurait pas été en mesure de faire valoir ses observations avant l'intervention de la décision contestée et se prévaut par erreur de l'article " L. 211-5 " du code des relations entre le public et l'administration, il résulte de ce qui a été dit au point 3 qu'il a été mis à même de présenter ses observations avant l'intervention de la décision de transfert en litige. Par suite, le moyen tiré de la méconnaissance des dispositions précitées ne peut qu'être écarté. 11. En cinquième lieu, aux termes de l'article 21 du règlement (UE) n° 604/2013 du 26 juin 2013 : " 1. L'Etat membre auprès duquel une demande de protection internationale a été introduite et qui estime qu'un autre Etat membre est responsable de l'examen de cette demande peut, dans les plus brefs délais et, en tout état de cause, dans un délai de trois mois à compter de la date de l'introduction de la demande au sens de l'article 20, paragraphe 2, requérir cet autre Etat membre aux fins de prise en charge du demandeur. / Nonobstant le premier alinéa, en cas de résultat positif (" hit ") Eurodac avec des données enregistrées en vertu de l'article 14 du règlement (UE) n° 603/2013, la requête est envoyée dans un délai de deux mois à compter de la réception de ce résultat positif en vertu de l'article 15, paragraphe 2, dudit règlement (...) ". Aux termes de l'article 22 du même règlement : " 1. L'État membre requis procède aux vérifications nécessaires et statue sur la requête aux fins de prise en charge d'un demandeur dans un délai de deux mois à compter de la réception de la requête. / (...) 7. L'absence de réponse à l'expiration du délai de deux mois mentionné au paragraphe 1 et du délai d'un mois prévu au paragraphe 6 équivaut à l'acceptation de la requête et entraîne l'obligation de prendre en charge la personne concernée, y compris l'obligation d'assurer une bonne organisation de son arrivée ". Et aux termes de l'article 15 du règlement (CE) n° 1560/2003 du 2 septembre 2003 : " Les requêtes et les réponses, ainsi que toutes les correspondances écrites entre Etats membres visant à l'application du règlement (UE) n° 604/2013, sont, autant que possible, transmises via le réseau de communication électronique " DubliNet " établi au titre II du présent règlement (...). / 2. Toute requête, réponse ou correspondance émanant d'un point d'accès national (...) est réputée authentique. / 3. L'accusé de réception émis par le système fait foi de la transmission et de la date et de l'heure de réception de la requête ou de la réponse ". 12. Il ressort des pièces du dossier que le préfet de police a produit, en première instance, l'accusé de réception " DubliNet " généré par le point d'accès national de l'Etat requis, établissant qu'il a saisi, le 28 novembre 2023, soit dans le délai de deux mois à compter de la date du résultat positif (" hit ") Eurodac, le 19 octobre 2023, prévu par les dispositions précitées de l'article 21 du règlement (UE) n° 604/2013 du 26 juin 2013, les autorités croates d'une requête aux fins de prise en charge de M. A... B.... Le préfet de police a également produit l'accord des autorités croates à cette demande, en date du 12 décembre 2023. Par suite, le moyen tiré de l'existence d'un retard dans le processus de détermination de l'Etat responsable doit être écarté. 13. En sixième lieu, aux termes de l'article 26 du règlement (UE) n° 604/2013 : " 2. La décision visée au paragraphe 1 contient des informations sur les voies de recours disponibles, y compris sur le droit de demander un effet suspensif, le cas échéant, et sur les délais applicables à l'exercice de ces voies de recours et à la mise œuvre du transfert et comporte, si nécessaire, des informations relatives au lieu et à la date auxquels la personne concernée doit se présenter si cette personne se rend par ses propres moyens dans l'État membre responsable ". 14. Si M. A... B... soutient qu'il n'a pas été informé de ce qu'il pouvait se rendre en Croatie par ses propres moyens, les dispositions précitées de l'article 26 du règlement (UE) n° 604/2013 du 26 juin 2013 n'imposaient pas au préfet de préciser à l'intéressé l'ensemble des modalités de transfert, notamment la possibilité d'un transfert volontaire. Dès lors, un tel moyen, qui concerne les conditions d'exécution de la mesure de transfert, est inopérant et doit, par suite, être écarté. 15. En dernier lieu, aux termes du paragraphe 2, de l'article 3 du règlement (UE) n° 604/2013/UE du 26 juin 2013 susvisé : " (...) Lorsqu'il est impossible de transférer un demandeur vers l'État membre initialement désigné comme responsable parce qu'il y a de sérieuses raisons de croire qu'il existe dans cet État membre des défaillances systémiques dans la procédure d'asile et les conditions d'accueil des demandeurs, qui entraînent un risque de traitement inhumain ou dégradant au sens de l'article 4 de la charte des droits fondamentaux de l'Union européenne, l'État membre procédant à la détermination de l'État membre responsable poursuit l'examen des critères énoncés au chapitre III afin d'établir si un autre État membre peut être désigné comme responsable. Lorsqu'il est impossible de transférer le demandeur en vertu du présent paragraphe vers un État membre désigné sur la base des critères énoncés au chapitre III ou vers le premier État membre auprès duquel la demande a été introduite, l'État membre procédant à la détermination de l'État membre responsable devient l'État membre responsable ". Aux termes de l'article 17 du même règlement : " Par dérogation à l'article 3, paragraphe 1, chaque Etat membre peut décider d'examiner une demande de protection internationale qui lui est présentée par un ressortissant de pays tiers ou un apatride, même si cet examen ne lui incombe pas en vertu des critères fixés dans le présent règlement. / L'Etat membre qui décide d'examiner une demande de protection internationale en vertu du présent paragraphe devient l'Etat membre responsable et assume les obligations qui sont liées à cette responsabilité. (...) ". Aux termes de l'article 4 de la Charte des droits fondamentaux de l'Union européenne : " Nul ne peut être soumis à la torture, ni à des peines ou traitements inhumains ou dégradants ". Enfin, aux termes de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " Nul ne peut être soumis à la torture ni à des peines ou traitements inhumains ou dégradants ". 16. Ces dispositions doivent être appliquées dans le respect des droits garantis par la Charte des droits fondamentaux de l'Union européenne et la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales. Par ailleurs, eu égard au niveau de protection des libertés et des droits fondamentaux dans les Etats membres de l'Union européenne, lorsque la demande de protection internationale a été introduite dans un Etat autre que la France, que cet Etat a accepté de prendre ou de reprendre en charge le demandeur et en l'absence de sérieuses raisons de croire qu'il existe dans cet Etat membre des défaillances systémiques dans la procédure d'asile et les conditions d'accueil des demandeurs, qui entraînent un risque de traitement inhumain ou dégradant au sens de l'article 4 de la Charte des droits fondamentaux de l'Union européenne, les craintes dont le demandeur fait état quant au défaut de protection dans cet Etat membre doivent en principe être présumées non fondées, sauf à ce que l'intéressé apporte, par tout moyen, la preuve contraire. La seule circonstance qu'à la suite du rejet de sa demande de protection par cet Etat membre l'intéressé serait susceptible de faire l'objet d'une mesure d'éloignement ne saurait caractériser la méconnaissance par cet Etat de ses obligations. 17. Par la seule production de rapports généraux et d'articles de presse, M. A... B... n'établit ni l'existence de défaillances systémiques dans la procédure d'asile et les conditions d'accueil des demandeurs d'asile en Croatie à la date de l'arrêté litigieux, alors que ce pays est un Etat membre de l'Union européenne, partie tant à la convention de Genève du 28 juillet 1951 sur le statut des réfugiés, complétée par le protocole de New-York, qu'à la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, ni qu'il ne pourrait y faire valoir tout nouvel élément concernant sa situation personnelle. Par suite, et dès lors que les autorités croates ont explicitement accepté la demande de transfert de M. A... B... le 12 décembre 2023, il ne peut être tenu pour établi que sa demande d'asile serait exposée à un risque sérieux de ne pas être traitée par les autorités croates dans des conditions conformes à l'ensemble des garanties exigées par le respect du droit d'asile. Il n'est pas davantage établi que les autorités croates n'évalueront pas d'office les risques de mauvais traitements auxquels il serait exposé en cas de renvoi dans son pays d'origine. Enfin, il résulte de l'arrêt de la Cour de justice de l'Union européenne du 30 novembre 2023, visé ci-dessus, que le risque de refoulement vers un Etat tiers à l'Union n'a pas à être examiné en l'absence de constat de défaillance systémique. Par suite, les moyens tirés de ce que la décision litigieuse serait contraire au §2 de l'article 3 du règlement (UE) n° 604/2013 du 26 juin 2013, à l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et à l'article 4 de la Charte des droits fondamentaux de l'Union européenne et serait entachée d'erreur manifeste d'appréciation au regard des dispositions de l'article 17 du règlement (UE) n° 604/2013 du 26 juin 2013 doivent être écartés. 18. Il résulte de tout ce qui précède que le préfet de police est fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, la magistrate désignée par le président du tribunal administratif de Paris a annulé son arrêté du 25 janvier 2024 décidant le transfert de M. A... B... aux autorités croates, lui a enjoint de procéder à un nouvel examen de sa situation et de lui délivrer une attestation de demande d'asile en procédure normale dans un délai de trois mois suivant la notification du jugement et, enfin, mis à la charge de l'Etat une somme de 1 000 euros à verser à son conseil en application des dispositions des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991. D E C I D E :Article 1er : Les articles 2, 3 et 4 du jugement n° 2402280 du 29 mars 2024 du tribunal administratif de Paris sont annulés.Article 2 : La demande présentée par M. A... B... devant le tribunal administratif de Paris est rejetée.Article 3 : Le présent arrêt sera notifié au ministre de l'intérieur et à M. C... A... B....Copie en sera adressée au préfet de police.Délibéré après l'audience du 13 septembre 2024 à laquelle siégeaient :- M. Carrère, président,- M. Soyez, président assesseur,- Mme Boizot, première conseillère.Rendu public par mise à disposition au greffe de la Cour, le 27 septembre 2024.La rapporteure,S. BOIZOTLe président,S. CARRERE La greffière,C. DABERTLa République mande et ordonne au ministre de l'intérieur en ce qui le concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.N° 24PA02015 2


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de PARIS
Formation : 9ème chambre
Numéro d'arrêt : 24PA02015
Date de la décision : 27/09/2024
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : M. CARRERE
Rapporteur ?: Mme Sabine BOIZOT
Rapporteur public ?: M. SIBILLI

Origine de la décision
Date de l'import : 22/11/2024
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel;arret;2024-09-27;24pa02015 ?
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