La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

22/07/2024 | FRANCE | N°23PA02445

France | France, Cour administrative d'appel de PARIS, 3ème chambre, 22 juillet 2024, 23PA02445


Vu la procédure suivante :



Procédure contentieuse antérieure :



M. B... F... a demandé au tribunal administratif de Melun d'annuler l'arrêté du 26 décembre 2019 par lequel le maire de Meaux a accordé à M. A... E... une autorisation de stationnement en vue de l'exploitation d'une place de taxi, de condamner la commune de Meaux à lui verser la somme de 50 000 euros en réparation du préjudice qu'il estime avoir subi, et d'enjoindre à la commune de Meaux de lui délivrer une autorisation de stationnement en vue de l'exploitation de la place d

e taxi n° 14 située dans l'enceinte de la gare routière de Meaux.



Par un ju...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. B... F... a demandé au tribunal administratif de Melun d'annuler l'arrêté du 26 décembre 2019 par lequel le maire de Meaux a accordé à M. A... E... une autorisation de stationnement en vue de l'exploitation d'une place de taxi, de condamner la commune de Meaux à lui verser la somme de 50 000 euros en réparation du préjudice qu'il estime avoir subi, et d'enjoindre à la commune de Meaux de lui délivrer une autorisation de stationnement en vue de l'exploitation de la place de taxi n° 14 située dans l'enceinte de la gare routière de Meaux.

Par un jugement n° 2003406 du 4 avril 2023, le tribunal administratif de Melun a annulé l'arrêté du 26 décembre 2019 du maire de Meaux et a rejeté le surplus des conclusions de la demande.

Procédure devant la cour :

I) Par une requête et deux mémoires enregistrés les 2 juin 2023, 11 décembre 2023 et 16 février 2024 sous le numéro 23PA02445, la commune de Meaux, représentée par Me de Faÿ, demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement du tribunal administratif de Melun du 4 avril 2023 en tant qu'il a annulé l'arrêté du 26 décembre 2019 du maire de Meaux ;

2°) de rejeter les conclusions de première instance et d'appel de M. F... ;

3°) de mettre à la charge de M. F... la somme de 2 000 euros en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- le jugement attaqué est entaché d'une contradiction de motifs ;

- c'est à tort que les premiers juges ont estimé que le maire de Meaux avait commis une erreur de droit en accordant à M. E... une autorisation de stationnement ;

- les moyens soulevés par M. F... devant le tribunal et en appel ne sont pas fondés.

Par trois mémoires en défense enregistrés les 24 octobre 2023, 19 décembre 2023 et 14 mars 2024, M. F..., représenté par Me Velasco, demande à la cour :

1°) de rejeter la requête ;

2°) de faire droit à l'ensemble de ses conclusions de première instance ;

3°) de mettre à la charge de la commune de Meaux la somme de 2 500 euros à verser à Me Velasco, en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991.

Il soutient que :

- les moyens soulevés par la commune de Meaux ne sont pas fondés ;

- l'arrêté du maire de Meaux du 26 décembre 2019 est discriminatoire.

II) Par une requête enregistrée le 2 juin 2023 sous le numéro 23PA02446, la commune de Meaux, représentée par Me de Faÿ, demande à la cour :

1°) de prononcer le sursis à exécution du jugement du tribunal administratif de Melun du 4 avril 2023 en tant qu'il a annulé l'arrêté du 26 décembre 2019 du maire de Meaux ;

2°) de mettre à la charge de M. F... la somme de 2 000 euros en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que les moyens qu'elle invoque à l'appui de sa requête d'appel contre le jugement du tribunal administratif de Melun du 4 avril 2023 sont de nature à justifier son annulation ainsi que l'infirmation de la solution retenue par les premiers juges.

Par un mémoire en défense enregistré le 24 octobre 2023, M. F..., représenté par Me Velasco, demande à la cour :

1°) de rejeter la requête ;

2°) de mettre à la charge de la commune de Meaux la somme de 2 000 euros à verser à Me Velasco, en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991.

Il soutient que les moyens soulevés par la commune de Meaux ne sont pas fondés.

Par une décision du 9 août 2023, le bureau d'aide juridictionnelle du tribunal judiciaire de Paris a accordé l'aide juridictionnelle totale à M. F....

Vu les autres pièces des dossiers.

La clôture de l'instruction a été fixée au 16 avril 2024.

Vu :

- le code des transports,

- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991,

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme C...,

- les conclusions de Mme Dégardin, rapporteure publique,

- les observations de Me Lesure, représentant la commune de Meaux,

- et les observations de Me Velasco, représentant M. F....

Considérant ce qui suit :

1. MM. E... et F... étaient inscrits sur la liste d'attente en vue de la délivrance d'une autorisation de stationnement sur la voie publique pour l'exercice de la profession de chauffeur de taxi, sur le territoire de la commune de Meaux. Un emplacement situé dans l'enceinte de la gare routière étant disponible, le maire de Meaux l'a attribué à M. E... à compter du 1er janvier 2020, par un arrêté du 26 décembre 2019. M. F... a formé un recours administratif contre cette attribution par un courrier du 6 janvier 2020, reçu le 7 janvier 2020, qui a été implicitement rejeté. La commune de Meaux relève appel du jugement du 4 avril 2023 par lequel le tribunal administratif de Melun a annulé l'arrêté du 26 décembre 2019.

Sur la jonction :

2. Les requêtes susvisées concernent le même jugement et ont fait l'objet d'une instruction commune. Il y a lieu par suite de les joindre pour qu'il y soit statué par un seul arrêt.

Sur le moyen retenu par le tribunal administratif de Melun :

3. Aux termes de l'article L. 3121-1 du code des transports : " Les taxis sont des véhicules automobiles comportant, outre le siège du conducteur, huit places assises au maximum, munis d'équipements spéciaux et d'un terminal de paiement électronique, et dont le propriétaire ou l'exploitant est titulaire d'une autorisation de stationnement sur la voie publique, en attente de la clientèle, afin d'effectuer, à la demande de celle-ci et à titre onéreux, le transport particulier des personnes et de leurs bagages. ". Aux termes de l'article L. 3121-2 du même code : " L'autorisation de stationnement prévue à l'article L. 3121-1 et délivrée postérieurement à la promulgation de la loi n° 2014-1104 du 1er octobre 2014 relative aux taxis et aux voitures de transport avec chauffeur est incessible et a une durée de validité de cinq ans, renouvelable dans des conditions fixées par décret. / (...) ". Aux termes de l'article L. 3121-5 dudit code : " (...) / Les nouvelles autorisations sont délivrées en fonction de listes d'attente rendues publiques. Nul ne peut s'inscrire sur plus d'une liste d'attente. Les candidats à l'inscription sur liste d'attente doivent être titulaires d'une carte professionnelle prévue à l'article L. 3120-2-2 en cours de validité, délivrée par le représentant de l'Etat dans le département où l'autorisation de stationnement est demandée, et ne pas être déjà titulaires d'une autorisation de stationnement. / Seuls peuvent se voir délivrer une autorisation de stationnement les titulaires d'une carte professionnelle en cours de validité, délivrée par le représentant de l'Etat dans le département où l'autorisation de stationnement est délivrée. En outre, la délivrance est effectuée en priorité aux titulaires qui peuvent justifier de l'exercice de l'activité de conducteur de taxi pendant une période minimale de deux ans au cours des cinq ans précédant la date de délivrance. ". Enfin, aux termes de l'article R. 3121-13 de ce code : " I.- Les listes d'attente en vue de la délivrance des autorisations sont établies par l'autorité compétente pour les délivrer. Ces listes mentionnent la date de dépôt et le numéro d'enregistrement de chaque demande. Elles sont communicables dans les conditions prévues par l'article L. 311-9 du code des relations entre le public et l'administration. / Les demandes de délivrance sont valables un an. / II.- Cessent de figurer sur la liste d'attente d'une zone géographique : / - les demandes formées par un candidat qui figure déjà sur une autre liste d'attente ; / - les demandes qui ne sont pas renouvelées, par tout moyen permettant d'en accuser réception, avant la date anniversaire de l'inscription initiale ; / - les demandes formées par un candidat qui ne dispose pas de la carte professionnelle, en cours de validité, prévue à l'article L. 3121-10. / Les demandes formées par un candidat qui détient déjà, à la date de sa demande, une autorisation de stationnement. / III.- Les autorisations sont proposées dans l'ordre chronologique d'enregistrement des demandes établi conformément à la liste d'attente. En cas de demandes simultanées, il est procédé par tirage au sort. Chaque nouvelle autorisation est délivrée au premier demandeur qui l'accepte. / Toutefois, aucune autorisation n'est délivrée à un candidat qui ne peut justifier de l'exercice de l'activité de conducteur de taxi conformément au troisième alinéa de l'article L. 3121-5, sauf si aucun autre candidat ne peut non plus justifier de cet exercice. (...) ".

4. Il ressort des pièces du dossier que M. E... a été initialement inscrit le 10 septembre 2018 sur la liste d'attente en vue de la délivrance d'une autorisation de stationnement à Meaux, et qu'il était classé après M. F.... Par un courrier daté du 3 septembre 2019, M. E... a sollicité le renouvellement de son inscription. Ce courrier n'a toutefois été reçu par la commune de Meaux que le 30 septembre 2019, au-delà de la date anniversaire de son inscription initiale, et ne pouvait donc être enregistrée comme un renouvellement de l'inscription. En revanche, contrairement à ce que soutient M. F..., cette circonstance n'impliquait pas, au regard des dispositions citées au point 3 du présent arrêt, la radiation de M. E... de la liste d'attente, nonobstant la modification, par le décret du

30 décembre 2014 relatif au transport public particulier de personnes, de la rédaction de l'article R. 3121-13 du code des transports, qui n'exclut pas la requalification d'une demande de renouvellement tardivement reçue en demande nouvelle d'inscription. La commune de Meaux a ainsi pu légalement estimer qu'il y avait lieu de regarder la demande de M. E..., reçue le 30 septembre 2019, comme une nouvelle demande initiale. Par suite, si ce dernier était en seconde position sur la liste d'attente, derrière M. F..., il était le seul à justifier de l'exercice de l'activité de conducteur de taxi pendant une période minimale de deux ans au cours des cinq dernières années, et devait donc bénéficier de la priorité instituée par l'article L. 3121-5 précité du code des transports. Il s'ensuit que c'est à tort que les premiers juges ont estimé que le maire de Meaux avait commis une erreur de droit et ont annulé, pour ce motif, l'arrêté du 26 décembre 2019 attribuant une autorisation de stationnement à M. E... à compter du 1er janvier 2020.

5. Il appartient à la cour, saisie par l'effet dévolutif de l'appel, d'examiner l'autre moyen soulevé par M. F... devant le tribunal administratif de Melun et la cour.

Sur l'autre moyen soulevé par M. F... :

6. Si M. F... soutient que l'arrêté litigieux est discriminatoire et méconnaît le principe d'égalité devant la loi, dès lors qu'il aurait lui-même formé une demande de renouvellement d'inscription sur la liste d'attente tardivement parvenue à la commune de Meaux en octobre 2022, et non prise en compte par cette dernière, il ressort en tout état de cause des pièces du dossier que la réception d'une telle demande par la commune n'est pas justifiée par les pièces produites, et qu'à la supposer établie, cette circonstance est postérieure à l'arrêté du 26 décembre 2019.

7. Il résulte de tout ce qui précède que la commune de Meaux est fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Melun a annulé l'arrêté du 26 décembre 2019 du maire de Meaux, que ce jugement doit être annulé et que les demandes de première instance et d'appel de M. F... doivent être rejetées.

Sur les conclusions à fin de sursis à exécution du jugement attaqué :

8. La cour se prononçant, par le présent arrêt, sur la requête n° 23PA02445 de la commune de Meaux tendant à l'annulation du jugement du tribunal administratif de Melun du 4 avril 2023, il n'y a plus lieu de statuer sur la requête n° 23PA02446 par laquelle l'appelante sollicite que soit ordonné le sursis à exécution dudit jugement.

Sur les frais liés au litige :

9. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge de la commune de Meaux, qui n'est pas partie perdante dans la présente instance, le versement d'une somme au titre des frais exposés par M. F... et non compris dans les dépens. Il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de ce dernier le versement d'une somme à la commune de Meaux sur le fondement des mêmes dispositions.

D É C I D E :

Article 1er : Le jugement n° 2003406 du 4 avril 2023 du tribunal administratif de Melun est annulé.

Article 2 : Les demandes de première instance et les conclusions d'appel de M. F... sont rejetées.

Article 3 : Les conclusions de la commune de Meaux tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.

Article 4 : Il n'y a pas lieu de statuer sur la requête n° 23PA02446 de la commune de Meaux.

Article 5 : Le présent arrêt sera notifié à la commune de Meaux, à M. B... F... et à M. A... E....

Délibéré après l'audience du 6 juin 2024, à laquelle siégeaient :

- Mme Marianne Julliard, présidente,

- Mme Marie-Isabelle Labetoulle, première conseillère,

- Mme Gaëlle Mornet, première conseillère.

Rendu public par mise à disposition au greffe le 22 juillet 2024.

La rapporteure,

G. C...La présidente,

M. D...

Le greffier,

É. MOULIN

La République mande et ordonne au préfet de Seine-et-Marne, en ce qui le concerne, ou à tous commissaires de justice à ce requis, en ce qui concerne les voies de droit commun, contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

2

N°s 23PA02445, 23PA02446


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de PARIS
Formation : 3ème chambre
Numéro d'arrêt : 23PA02445
Date de la décision : 22/07/2024
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : Mme JULLIARD
Rapporteur ?: Mme Gaëlle MORNET
Rapporteur public ?: Mme DÉGARDIN
Avocat(s) : CABINET BARDON & DE FAY

Origine de la décision
Date de l'import : 27/07/2024
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel;arret;2024-07-22;23pa02445 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award