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12/07/2024 | FRANCE | N°23PA03716

France | France, Cour administrative d'appel de PARIS, 4ème chambre, 12 juillet 2024, 23PA03716


Vu la procédure suivante :



Procédure contentieuse antérieure :



M. B... A... a demandé au tribunal administratif de Paris d'annuler l'arrêté du 30 janvier 2023 par lequel le préfet de police a refusé de lui délivrer un titre de séjour, l'a obligé à quitter le territoire français dans un délai de trente jours, en fixant le pays de renvoi, et a prononcé à son encontre une interdiction de retour sur le territoire français pour une durée de deux ans.



Par un jugement n° 2304472 du 13 juillet 2023, le tribunal admin

istratif de Paris a annulé l'arrêté du préfet de police en tant qu'il porte interdiction de retour sur...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. B... A... a demandé au tribunal administratif de Paris d'annuler l'arrêté du 30 janvier 2023 par lequel le préfet de police a refusé de lui délivrer un titre de séjour, l'a obligé à quitter le territoire français dans un délai de trente jours, en fixant le pays de renvoi, et a prononcé à son encontre une interdiction de retour sur le territoire français pour une durée de deux ans.

Par un jugement n° 2304472 du 13 juillet 2023, le tribunal administratif de Paris a annulé l'arrêté du préfet de police en tant qu'il porte interdiction de retour sur le territoire français.

Procédure devant la cour :

Par une requête et des pièces, enregistrées le 15 août 2023 et le 27 octobre 2023, M. A..., représenté par Me Monconduit, demande à la Cour :

1°) d'annuler l'article 2 de ce jugement ;

2°) d'annuler cet arrêté en tant qu'il lui refuse l'admission au séjour et l'oblige à quitter le territoire français ;

3°) d'enjoindre au préfet de police de lui délivrer une carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " ou, à défaut, de réexaminer sa situation, dans un délai d'un mois à compter de la notification de l'arrêt à intervenir et de lui délivrer une autorisation provisoire de séjour avec autorisation de travail dans un délai de sept jours à compter de cette même notification ;

4°) de mettre à la charge de l'État la somme de 2 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Il soutient que :

Sur la décision portant refus de titre de séjour :

- elle est entachée d'une insuffisance de motivation ;

- elle est entachée d'un défaut d'examen de sa situation personnelle ;

- elle est entachée d'une erreur d'appréciation au regard des dispositions de l'article

L. 425-9 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- elle méconnaît les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- elle est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation au regard de sa situation personnelle.

Sur la décision portant obligation de quitter le territoire français :

- elle méconnaît les dispositions de l'article L. 611-3 9° du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- elle méconnaît les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales.

Par un mémoire enregistré le 25 octobre 2023, le préfet de police conclut au rejet de la requête.

Il soutient que les moyens soulevés par le requérant ne sont pas fondés.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- le code des relations entre le public et l'administration ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

La présidente de la formation de jugement a dispensé la rapporteure publique, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

Le rapport de M. Mantz a été entendu au cours de l'audience publique.

Considérant ce qui suit :

1. M. A..., ressortissant marocain né le 25 octobre 1987, entré en France le

3 juillet 2004 selon ses déclarations, a sollicité, le 28 juillet 2022, la délivrance d'un titre de séjour pour soins. Par un arrêté du 30 janvier 2023, le préfet de police a rejeté sa demande, l'a obligé à quitter le territoire français dans un délai de trente jours, en fixant le pays de renvoi, et a prononcé à son encontre une interdiction de retourner sur le territoire français pour une durée de deux ans. Par un jugement du 13 juillet 2023, le tribunal administratif de Paris a annulé cet arrêté en tant uniquement qu'il a prononcé à l'encontre de M. A... une interdiction de retour sur le territoire français d'une durée de deux ans. M. A... relève appel de ce jugement en tant qu'il a rejeté ses conclusions dirigées contre les décisions portant refus d'admission au séjour et obligation de quitter le territoire français.

Sur la décision portant refus de titre de séjour :

2. En premier lieu, il ressort des mentions de l'arrêté en litige que le préfet de police, après avoir rappelé le parcours administratif antérieur de M. A..., a examiné sa demande d'admission au séjour au regard de l'article L. 425-9 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile en mentionnant la teneur de l'avis du collège de médecins de l'Office français de l'immigration et de l'intégration du 5 décembre 2022. Il a ensuite examiné, au vu des éléments dont il avait connaissance, l'ensemble de sa situation personnelle et familiale. La décision de refus de titre de séjour en litige comporte ainsi l'ensemble des considérations de fait et de droit qui en constituent le fondement. Cette motivation révèle également que le préfet a procédé à un examen particulier de la situation personnelle de l'intéressé, notamment au regard de sa vie privée et familiale. Par suite, les moyens tirés de l'insuffisante motivation de l'arrêté en litige et du défaut d'examen particulier de la situation de M. A... doivent être écartés.

3. En second lieu, aux termes de l'article L. 425-9 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " L'étranger, résidant habituellement en France, dont l'état de santé nécessite une prise en charge médicale dont le défaut pourrait avoir pour lui des conséquences d'une exceptionnelle gravité et qui, eu égard à l'offre de soins et aux caractéristiques du système de santé dans le pays dont il est originaire, ne pourrait pas y bénéficier effectivement d'un traitement approprié, se voit délivrer une carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " d'une durée d'un an. (...) / La décision de délivrer cette carte de séjour est prise par l'autorité administrative après avis d'un collège de médecins du service médical de l'Office français de l'immigration et de l'intégration, dans des conditions définies par décret en Conseil d'Etat. ". Pour déterminer si un étranger peut bénéficier effectivement dans le pays dont il est originaire d'un traitement médical approprié, au sens des dispositions précitées, il convient de s'assurer, eu égard à la pathologie de l'intéressé, de l'existence d'un traitement approprié et de sa disponibilité dans des conditions permettant d'y avoir accès, et non de rechercher si les soins dans le pays d'origine sont équivalents à ceux offerts en France ou en Europe.

4. Le collège des médecins de l'Office français de l'immigration et de l'intégration, par un avis du 5 décembre 2022, a considéré que l'état de santé de M. A... nécessitait une prise en charge médicale, dont le défaut pouvait entraîner des conséquences d'une exceptionnelle gravité, mais qu'eu égard à l'offre de soins et aux caractéristiques du système de santé dans le pays dont il est originaire, il pouvait y bénéficier effectivement d'un traitement approprié.

5. Il ressort des pièces du dossier que M. A..., qui déclare être entré en France en 2014, souffre de la maladie de Behçet, une maladie auto-immune systémique rare, se manifestant dans son cas par une aphtose bipolaire, un érythème noueux, une thrombose veineuse superficielle et une uvéite intermédiaire et postérieure avec vascularité rétinienne, ainsi qu'il résulte des deux certificats médicaux du 4 avril 2022 et du 22 février 2023 émanant de deux praticiens de l'hôpital Pitié-Salpêtrière, qui mentionnent notamment que le suivi dont l'intéressé a besoin et que le traitement à base de perfusion d'Infliximab qui lui est prescrit ne sont pas disponibles au Maroc. M. A... fait valoir à cet égard, d'une part, que cette indisponibilité résulte du coût très important de ce dernier médicament, ainsi qu'il résulte du courrier électronique du 10 février 2022 du laboratoire marocain Maphar qui le commercialise, soit environ 1 288 euros à régler toutes les cinq semaines, qui s'ajoute au coût de l'Imurel, autre médicament indispensable de son traitement, qui représente un coût annuel d'environ un mois de salaire marocain. Toutefois, M. A... n'apporte aucun élément relatif à ses ressources propres au Maroc ou à celles de sa famille et n'établit en tout état de cause pas qu'il ne pourrait avoir accès à un traitement générique moins coûteux. D'autre part, si M. A..., au soutien de ses allégations selon lesquelles il ne pourrait avoir effectivement accès à un traitement approprié au Maroc, produit une attestation de non-affiliation à la sécurité sociale marocaine, en date du 18 janvier 2022, une telle pièce ne permet pas de justifier de l'impossibilité d'obtenir une telle affiliation en cas de résidence effective au Maroc et ne renseigne pas sur le coût du traitement que devrait supporter M. A... dans le cas où il pourrait bénéficier d'une telle affiliation au Maroc. Enfin, les considérations d'ordre général invoquées par M. A... à partir de divers rapports, revues spécialisées ou déclarations d'autorités médicales, qu'elles soient relatives aux carences des infrastructures de prise en charge des maladies rares et auto-immunes au Maroc, à l'absence de centre de référence sur ces maladies proposant un accompagnement pluridisciplinaire ainsi qu'à la faiblesse du nombre d'ophtalmologues dans ce pays, ne sont pas davantage de nature à démontrer qu'il ne pourrait bénéficier effectivement d'un traitement et d'un suivi appropriés à sa pathologie au Maroc. Par suite, le moyen tiré de ce que le préfet aurait commis une erreur d'appréciation de sa situation au regard des dispositions de l'article

L. 425-9 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile doit être écarté.

6. Enfin, aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " 1. Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance. / 2. Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale, ou à la protection des droits et libertés d'autrui ".

7. M. A... se prévaut d'une ancienneté de séjour en France de neuf années, période au cours de laquelle il a travaillé sans interruption. Il ressort toutefois des pièces du dossier que l'intéressé est célibataire sans charge de famille et n'établit pas être dépourvu d'attaches familiales dans son pays d'origine où réside notamment son frère et où il a vécu jusqu'à l'âge de vingt-sept ans. La seule circonstance que plusieurs cousins, cousines, oncles et tantes de M. A..., de nationalité française ou titulaires d'un titre de séjour, sont présents sur le territoire français, n'est pas de nature à faire regarder la décision attaquée comme ayant porté une atteinte disproportionnée à son droit au respect de sa vie privée et familiale. Par suite, les moyens tirés de la violation des stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et de l'erreur manifeste d'appréciation dont serait entachée la décision attaquée doivent être écartés.

Sur la décision portant obligation de quitter le territoire français :

8. En premier lieu, les moyens dirigés contre la décision de refus de titre de séjour ayant été écartés, l'exception d'illégalité de cette décision invoquée par M. A... à l'appui de ses conclusions dirigées contre l'obligation de quitter le territoire français ne peut qu'être écartée.

9. En second lieu, pour les mêmes motifs que ceux énoncés au point 5, il y a lieu d'écarter le moyen tiré de la méconnaissance des dispositions du 9° de l'article L. 611-3 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile.

10. Enfin, pour les mêmes motifs que ceux exposés au point 7, les moyens tirés de la violation de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et de l'erreur manifeste d'appréciation doivent être écartés.

11. Il résulte de l'ensemble de ce qui précède que M. A... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande. Par voie de conséquence, sa requête, y compris les conclusions à fin d'injonction et celles présentées sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, doivent être rejetées.

D É C I D E :

Article 1er : La requête de M. A... est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. B... A... et au ministre de l'intérieur et des outre-mer.

Copie en sera adressée au préfet de police.

Délibéré après l'audience du 1er juillet 2024 à laquelle siégeaient :

- Mme Bruston, présidente,

- M. Mantz, premier conseiller,

- Mme Saint-Macary, première conseillère.

Rendu public par mise à disposition au greffe le 12 juillet 2024.

Le rapporteur,

P. MANTZLa présidente,

S. BRUSTON

La greffière,

A. GASPARYAN

La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur, en ce qui le concerne, et à tous commissaires de justice à ce requis, en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

N° 23PA03716 2


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de PARIS
Formation : 4ème chambre
Numéro d'arrêt : 23PA03716
Date de la décision : 12/07/2024
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : Mme BRUSTON
Rapporteur ?: M. Pascal MANTZ
Rapporteur public ?: Mme LIPSOS
Avocat(s) : LEXGLOBE

Origine de la décision
Date de l'import : 21/07/2024
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel;arret;2024-07-12;23pa03716 ?
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