Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
Mme B... A... a demandé au tribunal administratif de Paris :
- de condamner l'Etat à lui verser une somme de 37 167 euros en réparation des préjudices qu'elle estime avoir subis du fait de l'absence d'intégration de la part résultat de sa prime de fonctions et de résultats dans son indemnité de fonctions, de sujétions et d'expertise entre 2017 et 2020 et de la sous-évaluation de son complément indemnitaire annuel ;
- d'annuler la décision du 28 août 2020 par laquelle le garde des sceaux, ministre de la justice a refusé d'intégrer dans sa rémunération mensuelle, depuis le 1er janvier 2015, le montant de la part résultat de la prime de fonctions et de résultats auquel elle avait droit et de reclasser son poste dans le groupe de fonctions 1 pour le calcul du montant de l'indemnité de fonctions, de sujétions et d'expertise qui lui est attribuée depuis le 1er janvier 2020 ;
- d'enjoindre au garde des sceaux, ministre de la justice, de se prononcer à nouveau sur l'intégration de la part résultat de la prime de fonctions et de résultats dans sa rémunération depuis le 1er janvier 2015, le classement de son poste dans le groupe de fonctions 1 et la réévaluation du montant de l'indemnité de fonctions, de sujétions et d'expertise qui lui est attribuée depuis le 1er janvier 2020.
Par un jugement n° 2017304 du 31 mars 2023, le tribunal administratif de Paris a annulé la décision du garde des sceaux, ministre de la justice du 28 août 2020 en tant qu'elle refuse d'intégrer dans la rémunération mensuelle de Mme A... le montant de la part résultat de la prime de fonctions et de résultats depuis le 1er janvier 2015 et de réévaluer le montant de l'indemnité de fonctions, de sujétions et d'expertise qui lui est attribué depuis le 1er janvier 2020, a enjoint au garde des sceaux, ministre de la justice de réexaminer le montant de l'indemnité de fonctions de sujétions et d'expertise attribué à Mme A... depuis le 1er janvier 2020, a condamné l'Etat à lui verser une somme de 22 900 euros au titre de cette indemnité pour les années 2017 à 2020, augmentée des intérêts au taux légal à compter du 15 juin 2020, et a rejeté le surplus de sa demande.
Procédure devant la Cour :
Par une requête et un mémoire enregistrés les 31 mai et 15 décembre 2023, Mme A..., représentée par Me Senejean, demande à la Cour :
1°) d'annuler le jugement du tribunal administratif de Paris en tant qu'il a rejeté le surplus de sa demande ;
2°) d'annuler la décision du 28 aout 2020 par laquelle le garde des sceaux, ministre de la justice a refusé de reclasser son poste dans le groupe de fonctions 1 ;
3°) de condamner l'Etat à lui verser une somme de 7 100 euros assortie des intérêts de retard à compter de la date de réception de sa demande indemnitaire ;
4°) d'enjoindre au garde des sceaux, ministre de la justice de régulariser son dossier de paie depuis le 1er janvier 2015 en y intégrant la part résultats de la prime de fonctions et de résultats qu'elle aurait dû percevoir en 2015 et de statuer à nouveau sur sa demande tendant au classement de son poste dans le groupe de fonctions 1 à compter du 9 juin 2020, le tout sous astreinte de 1 000 euros par jour de retard ;
5°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 3 000 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle soutient que :
- le jugement attaqué est entaché de contradictions de motifs ;
- il est insuffisamment motivé ;
- le classement de son poste dans le groupe de fonctions 3 est entaché d'une erreur manifeste d'appréciation ;
- elle a subi une perte de revenus en raison de la sous-évaluation de son complément indemnitaire annuel, lui-même lié au groupe de fonctions dans lequel est classé son poste ;
- la réparation purement financière des pertes de primes qu'elle a subies au titre des années 2015 à 2019 ne permet pas de régulariser, pour l'avenir, le montant de l'indemnité de fonctions, de sujétions et d'expertise auquel elle a droit.
Par un mémoire en défense enregistré le 20 novembre 2023, le garde des sceaux, ministre de la justice conclut au non-lieu à statuer s'agissant des conclusions tendant à la régularisation du dossier de paie de Mme A... depuis le 1er janvier 2015 et au rejet du surplus des conclusions de la requête.
Il soutient que :
- il a fait droit à la demande de réexamen de l'indemnité de fonctions, de sujétions et d'expertise de Mme A... ;
- Mme A... ne peut prétendre au classement de son poste au sein du groupe de fonctions 1.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- le décret n° 2014-513 du 20 mai 2014 ;
- l'arrêté du 3 juin pris pour l'application au corps interministériel des attachés d'administration de l'Etat des dispositions du décret n° 2014-513 du 20 mai 2014 ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de Mme Saint-Macary,
- les conclusions de Mme Lipsos, rapporteure publique,
- et les observations de Me Senejean, représentant Mme A....
Considérant ce qui suit :
Sur le non-lieu à statuer :
1. Il résulte de l'instruction que, par une décision du 12 avril 2024, le garde des sceaux, ministre de la justice a fixé le montant de la part résultat de la prime de fonctions et de résultats auquel Mme A... pouvait prétendre au titre de l'année 2015. Dès lors que le montant de l'indemnité de fonctions, de sujétions et d'expertise de Mme A... à compter de l'année 2016 a été fixé en référence au montant de sa prime de fonctions et de résultats au titre de l'année 2015, le garde des sceaux, ministre de la justice doit être regardé comme ayant, par cette décision, régularisé le dossier de paie de Mme A.... Les conclusions de cette dernière tendant à ce qu'il soit enjoint sous astreinte au garde des sceaux, ministre de la justice de procéder à cette régularisation ont, par suite, perdu leur objet. Il n'y a, dès lors, plus lieu d'y statuer.
Sur la régularité du jugement :
2. En premier lieu, aux termes de l'article L. 9 du code de justice administrative : " Les jugements sont motivés ". Le tribunal, qui n'était pas tenu de répondre à l'ensemble des arguments invoqués par Mme A..., a suffisamment exposé, au point 9 du jugement attaqué, les motifs pour lesquels il estimait que le classement du poste occupé par l'intéressée au sein du groupe de fonctions 3 pour le calcul du montant de son indemnité de fonctions, de sujétions et d'expertise n'était pas entaché d'une erreur manifeste d'appréciation.
3. En second lieu, le moyen tiré de la contradiction de motifs concerne le bien-fondé du jugement attaqué et non sa régularité.
Sur le bien-fondé du jugement :
4. D'une part, aux termes de l'article 2 du décret du 20 mai 2014 portant création d'un régime indemnitaire tenant compte des fonctions, des sujétions, de l'expertise et de l'engagement professionnel dans la fonction publique de l'Etat : " (...) Les fonctions occupées par les fonctionnaires d'un même corps ou statut d'emploi sont réparties au sein de différents groupes au regard des critères professionnels suivants : / 1° Fonctions d'encadrement, de coordination, de pilotage ou de conception ; / 2° Technicité, expertise, expérience ou qualification nécessaire à l'exercice des fonctions ; / 3° Sujétions particulières ou degré d'exposition du poste au regard de son environnement professionnel. / Le nombre de groupes de fonctions est fixé pour chaque corps ou statut d'emploi par arrêté du ministre chargé de la fonction publique et du ministre chargé du budget et, le cas échéant, du ministre intéressé (...) ". L'article 2 de l'arrêté du 3 juin pris pour l'application au corps interministériel des attachés d'administration de l'Etat des dispositions du décret n° 2014-513 du 20 mai 2014 fixe à quatre le nombre de groupes pour le corps interministériel des attachés d'administration de l'Etat. La circulaire du garde des sceaux, ministre de la justice du 14 novembre 2017 relative à la gestion de cette indemnité pour les corps interministériels et corps à statut commun relevant du ministère de la justice prise pour la mise en œuvre de ce nouveau régime indemnitaire précise, dans son annexe 4, les fonctions-types pour chaque groupe.
5. D'autre part, aux termes de l'article 4 du décret du 20 mai 2014 : " Les fonctionnaires mentionnés à l'article 1er peuvent bénéficier d'un complément indemnitaire annuel qui tient compte de l'engagement professionnel et de la manière de servir, appréciée dans les conditions fixées en application de l'article 55 de la loi du 11 janvier 1984 susvisée. / Il est compris entre 0 et 100 % d'un montant maximal par groupe de fonctions fixé par arrêté du ministre chargé de la fonction publique et du ministre chargé du budget et, le cas échéant, du ministre intéressé. / Le complément indemnitaire fait l'objet d'un versement annuel, en une ou deux fractions, non reconductible automatiquement d'une année sur l'autre ".
6. Il ressort des pièces du dossier qu'à la date de la décision en litige, Mme A... occupait les fonctions de " cheffe de projet module formation Harmonie " au sein du pôle métier de l'équipe projet Harmonie, le pôle métier comprenant huit agents dont six chefs de projet et l'équipe projet comprenant elle-même vingt-huit personnes. La circonstance que ses fonctions comportaient des missions de conception et d'animation de réseau ne faisait pas obstacle à ce qu'elles soient classées dans le troisième groupe, alors qu'il ne ressort pas de sa fiche de poste qu'elles impliquaient un niveau d'expertise ou de technicité élevé ou des sujétions particulière, ni qu'elles incluaient des fonctions d'encadrement. Enfin, si la circulaire du 14 novembre 2017 inclut les fonctions de chefs de projet dans le premier groupe, ces fonctions concernent les fonctions de directeur de projet ou de chef d'équipe projet. Ainsi, en classant les fonctions de Mme A... au sein du troisième groupe, lequel inclut, notamment, les rédacteurs ou chargés d'étude qualifié en charge de dossiers complexes nécessitant une technicité particulière, le garde des sceaux, ministre de la justice n'a pas commis d'erreur manifeste d'appréciation. Il en découle que c'est à bon droit qu'il a rejeté sa demande tendant à la réévaluation de son complément indemnitaire annuel.
7. Il résulte de ce qui précède que Mme A... n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Paris a rejeté ses conclusions tendant à l'annulation du refus du classement de son poste dans le groupe de fonctions 1 ainsi que celles tendant à la condamnation de l'Etat à l'indemniser au titre du complément indemnitaire annuel qu'elle aurait dû percevoir si ses fonctions avaient été classées dans le groupe de fonctions 1. Ses conclusions aux fins d'injonction et d'astreinte tendant au classement de ses fonctions dans le groupe 1 doivent également, par voie de conséquence, être rejetées.
Sur les frais du litige :
8. Dans les circonstances de l'espèce, il n'y a pas lieu de faire droit aux conclusions de Mme A... présentées sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
D É C I D E :
Article 1er : Il n'y a pas lieu de statuer sur les conclusions aux fins d'injonction et d'astreinte de Mme A... tendant à la régularisation de son dossier de paie.
Article 2 : Le surplus des conclusions de la requête de Mme A... est rejeté.
Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à Mme B... A... et au garde des sceaux, ministre de la justice.
Délibéré après l'audience du 21 juin 2024, à laquelle siégeaient :
- Mme Bruston, présidente,
- M. Mantz, premier conseiller,
- Mme Saint-Macary, première conseillère.
Rendu public par mise à disposition au greffe le 5 juillet 2024.
La rapporteure,
M. SAINT-MACARY
La présidente,
S. BRUSTON
La greffière,
A. LOUNIS
La République mande et ordonne au garde des sceaux, ministre de la justice ce qui le concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
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N° 23PA02425