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04/07/2024 | FRANCE | N°24PA00624

France | France, Cour administrative d'appel de PARIS, 7ème chambre, 04 juillet 2024, 24PA00624


Vu la procédure suivante :



Procédure contentieuse antérieure :



M. B... A... a demandé au Tribunal administratif de Paris d'annuler l'arrêté du 10 octobre 2023 par lequel le préfet de police l'a obligé à quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays à destination duquel il est susceptible d'être éloigné.



Par un jugement n° 2325204/8 du 11 janvier 2024, la magistrate désignée par le président du Tribunal administratif de Paris l'a admis à l'aide juridictionnelle provisoire et a

rejeté le surplus des conclusions de sa demande.



Procédure devant la Cour :



Par une...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. B... A... a demandé au Tribunal administratif de Paris d'annuler l'arrêté du 10 octobre 2023 par lequel le préfet de police l'a obligé à quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays à destination duquel il est susceptible d'être éloigné.

Par un jugement n° 2325204/8 du 11 janvier 2024, la magistrate désignée par le président du Tribunal administratif de Paris l'a admis à l'aide juridictionnelle provisoire et a rejeté le surplus des conclusions de sa demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête, enregistrée le 9 février 2024, M. A..., représenté par Me Pafundi, demande à la Cour :

1°) de l'admettre provisoirement au bénéfice de l'aide juridictionnelle ;

2°) d'annuler l'article 2 de ce jugement du 11 janvier 2024 ;

3°) d'annuler l'arrêté du préfet de police du 10 octobre 2023 ;

4°) d'enjoindre au préfet de police de lui délivrer une autorisation provisoire de séjour dans un délai d'un mois à compter de la notification de l'arrêt à intervenir, sous astreinte de 100 euros par jour de retard, et de procéder au réexamen de sa situation administrative ;

5°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 1 500 euros hors taxes à verser à son conseil en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991.

Il soutient que l'arrêté attaqué méconnaît les stipulations des articles 2 et 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et est entaché d'une erreur manifeste d'appréciation au regard de ces stipulations.

Par un mémoire en défense, enregistré le 26 avril 2024, le préfet de police conclut au rejet de la requête.

Il soutient que :

- les moyens tirés de la méconnaissance des stipulations des articles 2 et 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales sont inopérants à l'encontre de l'obligation de quitter le territoire français qui n'a ni pour objet, ni pour effet de fixer le pays à destination le requérant est susceptible d'être éloigné ;

- les autres moyens soulevés par le requérant ne sont pas fondés.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- le code des relations entre le public et l'administration ;

- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;

- le décret n° 2020-1717 du 28 décembre 2020 ;

- le code de justice administrative.

Le président de la formation de jugement a dispensé la rapporteure publique, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Le rapport de M. Desvigne-Repusseau a été entendu au cours de l'audience publique.

Considérant ce qui suit :

1. M. A..., ressortissant afghan né le 15 mai 1996, est entré en France le 25 décembre 2020 selon ses déclarations afin d'y solliciter l'asile. Sa demande d'asile a été rejetée par une décision du 16 décembre 2021 du directeur général de l'Office français de protection des réfugiés et apatrides (OFPRA), confirmée par une décision du 27 avril 2023 de la Cour nationale du droit d'asile (CNDA). Ayant constaté que la demande de réexamen de la demande d'asile de M. A... avait été rejetée, pour irrecevabilité, par une décision du directeur général de l'OFPRA du 30 juin 2023, notifiée le 10 juillet 2023, le préfet de police, par un arrêté du 10 octobre 2023, l'a obligé à quitter le territoire français en application des dispositions du 4° de l'article L. 611-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, lui a octroyé un délai de départ volontaire de trente jours et a fixé le pays à destination duquel il est susceptible d'être éloigné. M. A... fait appel du jugement du 11 janvier 2024 en tant que la magistrate désignée par le président du Tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande tendant à l'annulation de cet arrêté.

Sur la demande d'admission provisoire à l'aide juridictionnelle :

2. Aux termes de l'article 20 de la loi du 10 juillet 1991 : " Dans les cas d'urgence, (...) l'admission provisoire à l'aide juridictionnelle peut être prononcée par la juridiction compétente ou son président / (...) ". Aux termes de l'article 61 du décret du 28 décembre 2020 : " L'admission provisoire peut être accordée dans une situation d'urgence (...) / [Elle] est accordée par la juridiction compétente ou son président (...), soit sur une demande présentée sans forme par l'intéressé, soit d'office si celui-ci a présenté une demande d'aide juridictionnelle sur laquelle il n'a pas encore été statué ".

3. Il ressort des pièces du dossier que M. A..., qui a sollicité l'admission provisoire à l'aide juridictionnelle lors de l'enregistrement de sa requête d'appel, n'a accompli, depuis lors, aucune démarche auprès du bureau d'aide juridictionnelle en vue de la compléter. Dans ces circonstances, la situation d'urgence au sens de l'article 20 de la loi du 10 juillet 1991 n'est pas caractérisée. Par suite, il n'y a pas lieu d'admettre à titre provisoire M. A... au bénéfice de l'aide juridictionnelle.

Sur les conclusions à fin d'annulation :

4. Aux termes de l'article 2 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " 1. Le droit de toute personne à la vie est protégé par la loi (...) ". Aux termes de l'article 3 de cette convention : " Nul ne peut être soumis à la torture ni à des peines ou traitements inhumains ou dégradants ".

5. En premier lieu, les moyens tirés de ce que la décision portant obligation de quitter le territoire français attaquée méconnaîtrait les stipulations précitées des articles 2 et 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et de ce qu'elle serait entachée d'une erreur manifeste d'appréciation au regard de ces stipulations, sont inopérants dès lors que cette décision n'a ni pour objet ni pour effet de fixer le pays à destination où M. A... devrait être reconduit. Par suite, ces moyens doivent être écartés.

6. En second lieu, M. A..., à qui il appartient de fournir l'ensemble des éléments propres à sa situation personnelle permettant d'apprécier la réalité et la teneur des risques, susceptibles d'être courus à titre personnel en cas de retour en Afghanistan, du fait de son " occidentalisation " effective ou imputée, ne produit aucun élément personnalisé et pertinent permettant de considérer que des opinions politiques et religieuses lui seraient imputées pour ce motif par les Talibans, en se bornant à se prévaloir du rapport de l'Organisation suisse d'aide aux réfugiés (OSAR) publié le 26 mars 2021 et intitulé " Afghanistan : risques au retour liés à l'occidentalisation ", d'une part, et en indiquant seulement qu'il a quitté l'Afghanistan depuis plusieurs années et qu'il réside en Europe depuis longtemps, d'autre part. Par ailleurs, si M. A... soutient qu'il serait également vulnérable à la situation de violence aveugle prévalant dans la province de Kaboul par laquelle il serait contraint de transiter pour rejoindre Kunar, sa région d'origine, et qu'il encourrait également des risques du fait de la désorganisation générale du pays, il résulte cependant du rapport de l'Agence de l'Union européenne pour l'asile, publié le 24 janvier 2023 et intitulé " Country Guidance : Afghanistan ", dont il se prévaut, que la violence aveugle prévalant actuellement dans la province de Kaboul, au demeurant comme dans celle de Kunar, n'est pas telle qu'il existe des motifs sérieux et avérés de croire que chaque civil qui y retourne court, du seul fait de sa présence dans cette ville, un risque réel de menace grave contre sa vie ou sa personne. Or, le requérant n'apporte aucun élément de nature à considérer que sa situation personnelle l'exposerait à des attaques ciblées au cours de son transit par la province de Kaboul. Dans ces conditions, les moyens tirés de ce que la décision fixant, outre tout pays où il établirait être légalement admissible, l'Afghanistan comme pays à destination duquel M. A... est susceptible d'être éloigné méconnaîtrait les stipulations des articles 2 et 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et de ce que cette décision serait entachée d'une erreur manifeste d'appréciation au regard de ces stipulations, doivent être écartés.

7. Il résulte de tout ce qui précède que M. A... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par l'article 2 du jugement attaqué, la magistrate désignée par le président du Tribunal administratif de Paris a rejeté le surplus des conclusions de sa demande. Par voie de conséquence, ses conclusions à fin d'injonction sous astreinte ainsi que celles tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 doivent également être rejetées.

D E C I D E :

Article 1er : M. A... n'est pas admis, à titre provisoire, au bénéfice de l'aide juridictionnelle.

Article 2 : Le surplus des conclusions de la requête de M. A... est rejeté.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à M. B... A... et au ministre de l'intérieur et des outre-mer.

Copie en sera adressée au préfet de police.

Délibéré après l'audience du 18 juin 2024, à laquelle siégeaient :

- M. Auvray, président de chambre,

- Mme Hamon, présidente-assesseure,

- M. Desvigne-Repusseau, premier conseiller,

Rendu public par mise à disposition au greffe le 4 juillet 2024.

Le rapporteur,

M. DESVIGNE-REPUSSEAULe président,

B. AUVRAY

La greffière,

C. BUOT

La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur et des outre-mer en ce qui le concerne, ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

2

N° 24PA00624


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de PARIS
Formation : 7ème chambre
Numéro d'arrêt : 24PA00624
Date de la décision : 04/07/2024
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : M. AUVRAY
Rapporteur ?: M. Marc DESVIGNE-REPUSSEAU
Rapporteur public ?: Mme JURIN
Avocat(s) : ANGLADE & PAFUNDI A.A.R.P.I

Origine de la décision
Date de l'import : 07/07/2024
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel;arret;2024-07-04;24pa00624 ?
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