Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
Mme B... A... a demandé au tribunal administratif de Paris de condamner l'Etat à lui verser la somme de 650 000 euros en réparation des préjudices subis du fait des travaux réalisés sur le parvis du Palais de Chaillot à Paris.
Par un jugement n° 2006902/5-1 du 17 février 2023, le tribunal administratif de Paris a condamné l'Etat à lui verser la somme de 63 000 euros.
Procédure devant la cour :
Par une requête et des mémoires enregistrés le 17 avril 2023 et les 12 février et 10 avril 2024, Mme A..., représentée par Me Descoubès, demande à la cour, dans le dernier état de ses écritures :
1°) de réformer le jugement du 17 février 2023 du tribunal administratif de Paris en tant qu'il n'a que partiellement fait droit à ses conclusions indemnitaires ;
2°) de condamner l'Etat à lui verser les sommes de 117 445 euros au titre du manque à gagner résultant de la baisse du chiffre d'affaires de son commerce, de 50 000 euros en réparation du préjudice lié au placement de son activité commerciale sous procédure de redressement judiciaire et de 50 000 euros au titre de son préjudice moral, causés par les travaux réalisés sur le parvis du Palais de Chaillot à Paris ;
3°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 5 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle soutient que :
- dès lors qu'elle était dans l'impossibilité d'agir par elle-même pendant la période comprise entre le 26 octobre 2016, date du jugement par lequel le tribunal de commerce de Paris a ouvert une procédure de redressement judiciaire à son encontre, et le 4 mai 2018, date du jugement par lequel il a arrêté un plan de redressement d'une durée de neuf ans, la prescription quadriennale a été interrompue pendant cette période ;
- la demande de remise partielle de la redevance au titre de 2015/2016 adressée par l'administrateur judiciaire à la direction régionale des finances publiques Ile-de-France, c'est-à-dire à l'Etat, constitue une demande indemnitaire préalable tendant à obtenir la compensation du préjudice résultant de la baisse du chiffre d'affaires de son commerce due aux travaux, qui a nécessairement également interrompu le cours de la prescription ; dans ces conditions, ses créances au titre des années 2014 et 2015 ne sont pas prescrites ;
- les conditions de l'engagement de la responsabilité sans faute de l'Etat à son égard sont réunies ;
- son préjudice financier, évalué à partir du résultat net de son activité commerciale, s'établit à 117 445 euros pour la période comprise entre 2014 et 2017 ;
- le placement de son activité commerciale sous procédure collective a généré des contraintes et des frais et lui a ainsi causé un préjudice qui doit être évalué à 50 000 euros ;
- elle a subi un préjudice moral résultant de l'important stress causé par l'impossibilité de poursuivre normalement son activité et des problèmes de santé en découlant, préjudice dont les premiers juges ont fait une appréciation insuffisante et qui doit être évalué à 50 000 euros.
Par des mémoires en défense enregistrés les 11 janvier et 11 mars 2024, la ministre de la culture conclut au rejet de la requête.
Elle soutient que :
- les créances dont se prévaut la requérante nées au cours des exercices 2014 et 2015 sont prescrites ;
- les conditions d'engagement de la responsabilité sans faute de l'Etat ne sont pas réunies ;
- la requérante n'est pas fondée à solliciter l'indemnisation de la perte de chiffre d'affaires de son commerce alors que seul le bénéfice net peut être indemnisé ; eu égard à la baisse de la fréquentation touristique à la suite des attentats de novembre 2015 et de son état de santé, Mme A... ne peut pas être indemnisée de l'intégralité de la perte du bénéfice net au titre de l'année 2016 et du premier semestre 2017 ;
- la matérialité du préjudice lié au placement de l'activité commerciale sous procédure collective n'est pas établie ; ce préjudice n'est pas chiffré ;
- le préjudice moral subi par Mme A... n'est pas établi ; elle ne démontre pas, en tout état de cause, que la somme de 3 000 euros allouée par les premiers juges serait insuffisante.
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu :
- la loi n° 68-1250 du 31 décembre 1968 ;
- le code de commerce ;
- le code de justice administrative ;
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de Mme Larsonnier,
- et les conclusions de Mme Bernard, rapporteure publique.
Considérant ce qui suit :
1. Depuis 2005, Mme A... bénéficie d'une autorisation accordée par la ville de Paris à fin d'exploiter, dans les jardins du Trocadéro attenants au Palais de Chaillot, un chalet de vente de denrées alimentaires dans lequel elle exerce en son nom propre une activité de restauration rapide à emporter sous le nom commercial " Au sourire de Paris ". A partir de juin 2014, le Palais de Chaillot, propriété de l'Etat, a connu d'importants travaux d'accessibilité et de sécurité pendant lesquels, notamment, l'escalier d'accès aux jardins du Trocadéro du côté Est a été fermé. La campagne de travaux du parvis bas, côté Est du Palais de Chaillot s'est achevée au printemps 2017. Par un jugement du 26 octobre 2016, le tribunal de commerce de Paris a ouvert une procédure de redressement judiciaire au bénéfice de Mme A... et a notamment désigné un administrateur judiciaire. Par un jugement du 4 mai 2018, il a arrêté un plan de redressement pour une durée de neuf ans. Par un courrier du 6 janvier 2020, reçu le 7 janvier suivant, Mme A... a adressé au ministre de la culture une demande indemnitaire tendant à la réparation des préjudices financier et moral qu'elle estime avoir subis du fait des travaux réalisés sur le parvis et sur l'escalier côté Est menant au Palais de Chaillot. Sa demande a été implicitement rejetée. Par un jugement du 17 février 2023, le tribunal administratif de Paris a condamné l'Etat à lui verser la somme globale de 63 000 euros. Mme A... relève appel de ce jugement en tant qu'il n'a pas entièrement fait droit à sa demande indemnitaire.
Sur la prescription :
2. Aux termes de l'article 1er de la loi du 31 décembre 1968 relative à la prescription des créances sur l'Etat, les départements, les communes et les établissements publics : " Sont prescrites, au profit de l'Etat, des départements et des communes, sans préjudice des déchéances particulières édictées par la loi, et sous réserve des dispositions de la présente loi, toutes créances qui n'ont pas été payées dans un délai de quatre ans à partir du premier jour de l'année suivant celle au cours de laquelle les droits ont été acquis. (...) ". Aux termes de l'article 2 de la même loi : " La prescription est interrompue par : / Toute demande de paiement ou toute réclamation écrite adressée par un créancier à l'autorité administrative, dès lors que la demande ou la réclamation a trait au fait générateur, à l'existence, au montant ou au paiement de la créance, alors même que l'administration saisie n'est pas celle qui aura finalement la charge du règlement. (...) / Un nouveau délai de quatre ans court à compter du premier jour de l'année suivant celle au cours de laquelle a eu lieu l'interruption. (...) ". Aux termes de l'article 3 de la même loi : " La prescription ne court ni contre le créancier qui ne peut agir, soit par lui-même ou par l'intermédiaire de son représentant légal, soit pour une cause de force majeure, ni contre celui qui peut être légitimement regardé comme ignorant l'existence de sa créance ou de la créance de celui qu'il représente légalement ". Lorsque la responsabilité d'une personne publique est recherchée, les droits de créance invoqués en vue d'obtenir l'indemnisation des préjudices doivent être regardés comme acquis, au sens de ces dispositions, à la date à laquelle la réalité et l'étendue de ces préjudices ont été entièrement révélées, ces préjudices étant connus et pouvant être exactement mesurés. La créance indemnitaire relative à la réparation d'un préjudice présentant un caractère continu et évolutif doit être rattachée à chacune des années au cours desquelles ce préjudice a été subi. Dans ce cas, le délai de prescription de la créance relative à une année court, sous réserve des cas visés à l'article 3 précité, à compter du 1er janvier de l'année suivante, à la condition qu'à cette date le préjudice subi au cours de cette année puisse être mesuré.
3. Il résulte de l'instruction que les préjudices subis par Mme A... du fait de la diminution de fréquentation du stand de restauration rapide qu'elle exploitait dans les jardins du Trocadéro résultant de la fermeture de l'escalier d'accès au parvis du Palais de Chaillot situé côté Est et de la déviation du trajet des piétons traversant les jardins du Trocadéro vers le côté Ouest dûes aux travaux du Palais de Chaillot réalisés de juin 2014 à juin 2017 présentent un caractère continu et évolutif. Par suite, la créance de Mme A... doit être rattachée à chacune des années au cours desquelles ces préjudices ont été subis.
4. Il résulte de l'instruction que le 7 janvier 2020, Mme A... a présenté au ministre de la culture une demande indemnitaire tendant à la réparation des préjudices financier et moral qu'elle estime avoir subis du fait des travaux réalisés sur le parvis et l'escalier côté Est menant au Palais de Chaillot entre juin 2014 et juin 2017. L'erreur de plume du tribunal qui a mentionné que cette demande avait été adressée à la ville de Paris n'a eu aucune incidence sur l'appréciation portée par celui-ci quant à la prescription des créances de Mme A... nées antérieurement à l'année 2016. Il ne résulte pas de l'instruction, contrairement à ce que soutient Mme A..., qu'elle n'aurait pas été en mesure de constater la diminution du chiffre d'affaires mensuel de son activité commerciale pendant la mise en place du chantier et le déroulement des travaux en 2014 et 2015. En tout état de cause, la baisse du chiffre d'affaires de son commerce et le manque à gagner pour chacune des années pour lesquelles elle a sollicité une indemnité ont pu être mesurés dès le 31 décembre, à la date de clôture de chacun des exercices comptables, c'est-à-dire les 31 décembre 2014 et 2015 pour les préjudices subis respectivement au titre des années 2014 et 2015. Il s'ensuit que la demande indemnitaire présentée par l'intéressée le 7 janvier 2020 l'a été plus de quatre ans après la connaissance et la mesure des préjudices subis au titre de 2014 et 2015.
5. Aux termes de l'article L. 631-12 du code du commerce : " Outre les pouvoirs qui leur sont conférés par le présent titre, la mission du ou des administrateurs est fixée par le tribunal. / Ce dernier les charge ensemble ou séparément d'assister le débiteur pour tous les actes relatifs à la gestion ou certains d'entre eux, ou d'assurer seuls, entièrement ou en partie, l'administration de l'entreprise. (...) ".
6. Pour contester l'exception de prescription opposée par la ministre de la culture, Mme A... soutient que du fait de la désignation, par le tribunal de commerce de Paris le 26 octobre 2016, d'un administrateur judiciaire dans le cadre de la procédure de redressement judiciaire de son activité commerciale, elle était dans l'impossibilité de présenter une demande indemnitaire pendant la période comprise entre le 26 octobre 2016 et le 4 mai 2018, date du jugement par lequel le tribunal de commerce de Paris a arrêté un plan de redressement d'une durée de neuf ans et a désigné l'administrateur judiciaire en tant que commissaire à l'exécution du plan. Toutefois, il ressort des mentions du jugement du 4 mai 2018 que l'administrateur judiciaire s'est vu attribuer une simple mission d'assistance. Eu égard à la nature de cette mission, Mme A... pouvait agir par elle-même et était ainsi en mesure d'exercer une action contre l'Etat pendant la procédure de redressement judiciaire, notamment pendant la période comprise entre le 26 octobre 2016 et le 4 mai 2018. Dans ces conditions, Mme A... n'est pas fondée à soutenir que le délai de prescription aurait été interrompu pendant la période du 26 octobre 2016 au 4 mai 2018.
7. Par ailleurs, le courrier en date du 28 juillet 2017 par lequel Me Perdereau, administrateur judiciaire du commerce de Mme A..., a sollicité auprès de la direction régionale des finances publiques Ile-de-France, une remise partielle gracieuse de la redevance due pour l'exploitation du stand de restauration rapide pour l'année de 2015/2016 ne porte pas sur l'existence et le paiement des créances de Mme A... du fait des préjudices subis et, par suite, ne saurait être regardé comme une demande indemnitaire tendant à la réparation des préjudices financier et moral subis par l'intéressée du fait des travaux effectués sur le parvis du Palais de Chaillot, quand bien même la demande de remise gracieuse de la redevance est motivée par les difficultés économiques rencontrées par le commerce de Mme A.... Dans ces conditions, ce courrier n'a pas interrompu le cours de la prescription quadriennale. Au vu de l'ensemble de ces éléments, les créances dont Mme A... se prévaut en lien avec les travaux du Palais de Chaillot au titre de 2014 et 2015 étaient prescrites à la date de sa demande indemnitaire adressée au ministre de la culture et ne peuvent donner lieu à une indemnisation.
Sur la responsabilité sans faute de l'Etat :
8. La mise en jeu de la responsabilité sans faute d'une collectivité publique pour dommages de travaux publics à l'égard d'un justiciable qui est tiers par rapport à un ouvrage public ou une opération de travaux publics est subordonnée à la démonstration par cet administré de l'existence d'un dommage anormal et spécial directement en lien avec cet ouvrage ou cette opération.
9. Si, comme le soutient la ministre de la culture, l'implantation exacte du chalet exploité par Mme A... n'a pas été expressément précisée par cette dernière, il ressort cependant des nombreuses pièces versées aux débats, notamment des attestations de la responsable du bureau des kiosques et attractions à la direction de l'attractivité et de l'emploi de la ville de Paris, du courrier du 16 mai 2014 de la ville de Paris informant Mme A... de la date, de la nature des travaux qui devaient avoir lieu sur le parvis du Palais de Chaillot et de leur impact sur l'activité des concessions situées dans les jardins du Trocadéro, ainsi que du bilan économique et social de l'activité commerciale de l'intéressée comportant un projet de plan de redressement présenté par l'administrateur judiciaire le 12 février 2018, que le stand de restauration rapide exploité par Mme A... était situé dans la partie Est supérieure des jardins du Trocadéro. Il n'est pas contesté que ce stand est resté accessible au public, l'allée dans laquelle il se trouvait n'ayant pas été fermée à la circulation des piétons. Toutefois, il résulte de l'instruction, notamment du courrier du 16 mai 2014 de la ville de Paris et des photographies versées au dossier que pendant les importants travaux du Palais de Chaillot, l'escalier d'accès à la partie Est des jardins du Trocadéro a été fermé par des grilles et des palissades, que le parvis du Palais de Chaillot était ainsi devenu inaccessible du côté Est, que les toilettes situées dans les jardins côté Est ont été transférées dans la partie Ouest et que le flux des piétons a été dévié. Il s'ensuit que le stand de Mme A... s'est trouvé isolé et que le passage des piétons devant ce dernier s'est considérablement réduit entraînant une chute importante de son chiffre d'affaires, laquelle est établie par l'arrêté du 8 janvier 2015 de la maire de Paris, les attestations de la responsable du bureau des kiosques et attractions à la direction de l'attractivité et de l'emploi de la mairie de Paris et les pièces comptables produites par l'intéressée. Cette diminution importante du chiffre d'affaires a d'ailleurs conduit la ville de Paris, à autoriser Mme A... à se déplacer sur un autre site lui appartenant, " Les jardins d'Eole " (18ème arrondissement), et à y exploiter temporairement le chalet de vente alimentaire de la coursive. Si la ministre de la culture ne conteste pas devant la cour que le chiffre d'affaires de l'activité de Mme A... a diminué de plus de 30 %, elle soutient que le lien de causalité entre les travaux en cause et cette diminution du chiffre d'affaires n'est pas établi dès lors que, d'une part, la fréquentation touristique a fortement diminué en 2016, à la suite des attentats du 13 novembre 2015 et que notamment l'aquarium du Trocadéro a connu une baisse de sa fréquentation de l'ordre de 70 % en février 2016, et, d'autre part, que Mme A... a connu des problèmes de santé. Il ressort des études de l'INSEE de mai 2016 et mai 2017, versées au dossier, que la fréquentation touristique a diminué en Ile-de-France durant la période comprise entre novembre 2015 et octobre 2016 et que la plupart des musées et des monuments parisiens ont connu une baisse du nombre de visiteurs. Toutefois, alors même que certains sites, comme le centre Pompidou et la cité des sciences et de l'industrie, ont néanmoins connu au cours de cette même période une augmentation du nombre de leurs visiteurs, la ministre de la culture n'apporte aucune indication quant à une baisse éventuelle en 2016 du nombre de visiteurs de la Tour Eiffel, monument le plus visité de la capitale, à laquelle mènent les jardins du Trocadéro . En outre, il ne résulte pas de l'instruction, alors que Mme A... avait recruté un salarié qui pouvait la suppléer, que son état de santé serait à l'origine de l'importante baisse de son chiffre d'affaires. En tout état de cause, à supposer établies les circonstances invoquées par la ministre de la culture, la cause principale de l'importante diminution du chiffre d'affaires de l'activité commerciale de Mme A... réside dans les travaux de grande ampleur réalisés sur le parvis du Palais de Chaillot qui ont isolé son commerce. Eu égard à l'ampleur de la diminution du chiffre d'affaires, de plus de 30 %, c'est à juste titre que les premiers juges ont estimé que Mme A... justifiait avoir subi un préjudice anormal et spécial de nature à lui ouvrir droit à réparation. Par suite, la responsabilité sans faute de l'Etat est engagée à son égard.
Sur les préjudices :
10. En premier lieu, le manque à gagner subi par une entreprise commerciale du fait de la réalisation de travaux publics ne saurait être calculé en fonction de la perte du chiffre d'affaires de cette entreprise, mais doit l'être en fonction de sa marge nette, le manque à gagner indemnisable étant égal à la perte de bénéfice net subie du fait des travaux.
11. Il résulte du bilan économique et social comportant un projet de plan de redressement présenté par l'administrateur judiciaire le 12 février 2018 qu'au titre des deux années précédant le commencement des travaux sur le parvis du Palais de Chaillot, c'est-à-dire 2012 et 2013, l'activité commerciale de Mme A... avait dégagé un bénéfice net respectivement de 45 205 euros et de 50 056 euros, soit une moyenne annuelle de 47 630,5 euros. Il ressort de ce même document que le bénéfice net dégagé par l'activité commerciale de Mme A... n'a été, au titre de 2016, que de 5 407 euros, soit une perte de 42 223,50 euros. Il ressort des mentions portées sur le bilan simplifié dans le cadre de la déclaration d'impôt sur le revenu au titre des bénéfices industriels et commerciaux pour 2017 que le bénéfice net est de 12 882 euros, ce qui correspond à une perte de 34 748,50 euros, c'est-à-dire à une perte de 17 374,25 euros pour les six premiers mois de l'année 2017. Au vu de l'ensemble de ces éléments, et alors que la période à indemniser couvre 2016 et les six premiers mois de 2017, les premiers juges ont fait une juste appréciation du manque à gagner supporté par Mme A... en le fixant à 60 000 euros.
12. En deuxième lieu, si la requérante se prévaut d'un préjudice lié au placement de son activité commerciale sous procédure collective, elle n'apporte pas plus en appel qu'en première instance de précisions quant à la nature des contraintes dénoncées à ce titre ou sur le montant des frais s'y rapportant. Dans ces conditions, Mme A... n'établit pas la réalité de ce préjudice.
13. En dernier lieu, il résulte de l'instruction que, par un courrier en date du 16 mai 2014, la ville de Paris, en sa qualité d'autorité ayant délivré à Mme A... l'autorisation temporaire d'exploitation commerciale du chalet dont elle est propriétaire, situé dans les jardins du Trocadéro, l'a informée de la date et de la nature des travaux qui devaient avoir lieu sur le parvis du Palais de Chaillot, de leur impact sur l'activité des concessions situées dans les jardins du Trocadéro " du fait de la déviation du flux piéton et de la neutralisation de l'escalier d'accès ", de la communication dès que possible du calendrier des travaux et l'a invitée à contacter ses services de la division du 16ème arrondissement pour obtenir des informations complémentaires. Il ressort, en outre, des termes de ce courrier qu'un entretien entre les services de la ville de Paris et Mme A... et portant sur les travaux à venir avait déjà eu lieu le 19 février 2014. Par ailleurs, ainsi qu'il a déjà été dit, après avoir constaté que les travaux effectués sur le parvis du Palais de Chaillot nuisaient fortement à son activité, la maire de Paris a, par un arrêté du 8 janvier 2015, autorisé Mme A... à exploiter, un chalet de vente alimentaire situé dans les jardins d'Éole. Dans ces conditions, même si elle n'a pas été directement informée par les services du ministre de la culture, la requérante n'est pas fondée à soutenir qu'elle aurait subi un préjudice moral résultant du défaut d'information quant à l'opération de travaux publics réalisés sur le parvis du Palais de Chaillot et de l'absence de propositions de solutions alternatives à l'exploitation du chalet dans les jardins du Trocadéro. Mme A... n'est pas plus fondée à invoquer un préjudice moral tiré de la pose des grilles et des palissades destinées à assurer la sécurité du chantier de travaux, quand bien même elle aurait ressenti un sentiment de mise à l'écart et d'isolement. En revanche, il résulte de l'instruction que Mme A... a subi un préjudice moral résultant du stress important causé par les difficultés économiques rencontrées par son commerce du fait de l'importante baisse du chiffre d'affaires liée aux travaux. Si elle soutient que ces difficultés économiques sont également à l'origine d'importants problèmes de santé, elle n'apporte aucune précision sur ce point et ne verse aucune pièce médicale aux débats. Par suite, les premiers juges ont fait une juste appréciation de ce préjudice en l'évaluant à 3 000 euros au titre de 2016 et des six premiers mois de 2017.
14. Il résulte de tout ce qui précède que Mme A... n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Paris n'a fait que partiellement droit à sa demande indemnitaire.
Sur les frais liés à l'instance :
15. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que l'Etat, qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance, verse à Mme A... la somme qu'elle sollicite au titre des frais exposés dans l'instance.
D É C I D E :
Article 1er : La requête de Mme A... est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à Mme B... A... et à la ministre de la culture.
Délibéré après l'audience du 10 juin 2024, à laquelle siégeaient :
- Mme Menasseyre, présidente de chambre,
- Mme Vrignon-Villalba, présidente assesseure,
- Mme Larsonnier, première conseillère.
Rendu public par mise à disposition au greffe le 4 juillet 2024.
La rapporteure,
V. Larsonnier La présidente,
A. Menasseyre
La greffière,
N. Couty
La République mande et ordonne à la ministre de la culture en ce qui la concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
N° 23PA01597 2