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15/05/2024 | FRANCE | N°23PA00339

France | France, Cour administrative d'appel de PARIS, 2ème chambre, 15 mai 2024, 23PA00339


Vu la procédure suivante :



Procédure contentieuse antérieure :



M. B... A... a demandé au Tribunal administratif de Montreuil d'annuler la décision du 11 juin 2019 du maire des Pavillons-sous-Bois, d'une part, en ce que la date de la guérison de l'accident de service dont il a été victime le 10 avril 2017 y a été fixée au 3 juin 2019 et, d'autre part, en ce que la reconnaissance de l'imputabilité au service de la pathologie dont il a souffert à compter du 2 juin 2017 a été refusée, d'annuler, par voie de conséquence, l'arrêté du 20

juin 2019 par lequel le maire des Pavillons-sous-Bois a tiré les conséquences administrati...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. B... A... a demandé au Tribunal administratif de Montreuil d'annuler la décision du 11 juin 2019 du maire des Pavillons-sous-Bois, d'une part, en ce que la date de la guérison de l'accident de service dont il a été victime le 10 avril 2017 y a été fixée au 3 juin 2019 et, d'autre part, en ce que la reconnaissance de l'imputabilité au service de la pathologie dont il a souffert à compter du 2 juin 2017 a été refusée, d'annuler, par voie de conséquence, l'arrêté du 20 juin 2019 par lequel le maire des Pavillons-sous-Bois a tiré les conséquences administratives de la date de guérison de l'accident de service et qualifié de congés de maladie ordinaire les arrêts et soins pour la période du 4 au 30 juin 2019, et d'enjoindre à la commune des Pavillons-sous-Bois de reconnaître l'imputabilité au service de sa pathologie et de prendre en compte, au titre de l'accident de service, les arrêts et soins postérieurs au 4 juin 2019 jusqu'à ce que sa guérison soit médicalement constatée.

Par un jugement n° 1908677/4 du 25 novembre 2022, le Tribunal administratif de Montreuil a annulé la décision du 11 juin 2019 du maire des Pavillons-sous-Bois en ce qu'elle refuse de faire droit à la demande de reconnaissance de la maladie professionnelle de M. A... et a rejeté le surplus des demandes des parties.

Procédure devant la Cour :

Par une requête et des mémoires, enregistrés les 24 janvier, 9 juin, 14 septembre et 2 novembre 2023, M. B... A..., représenté Me François Grenier, demande à la Cour :

1°) d'annuler ce jugement n° 1908677/4 du 25 novembre 2022 du Tribunal administratif de Montreuil en tant qu'il rejette sa demande relative à la fixation de la date de guérison de l'accident de service du 10 avril 2017 ;

2°) d'annuler la décision du 11 juin 2019 du maire des Pavillons-sous-Bois en tant qu'elle fixe au 3 juin 2019 la date de guérison de l'accident de service du 10 avril 2017 ;

3°) d'annuler l'arrêté du 20 juin 2019 du maire des Pavillons-sous-Bois ;

4°) d'enjoindre à la commune des Pavillons-sous-Bois de prendre en compte au titre de l'accident de service du 10 avril 2017, les arrêts et soins postérieurs au 4 juin 2019, jusqu'à ce que sa guérison soit médicalement constatée ;

5°) d'enjoindre à la commune des Pavillons-sous-Bois de reconnaitre l'imputabilité au service de sa maladie psychique ;

6°) de mettre à la charge de la commune des Pavillons-sous-Bois une somme de 3 000 euros au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ainsi que les dépens, en ce compris les droits de plaidoirie à hauteur de 13 euros.

Il soutient que :

- le jugement est irrégulier faute de signature de sa minute, conformément à l'article R. 741-7 du code de justice administrative ;

- le tribunal a par ailleurs entaché son jugement d'erreurs de droit et d'appréciation des faits ;

- la décision fixant la date de consolidation de son état de santé au 3 juin 2019 suite à l'accident de service du 10 avril 2017 est insuffisamment motivée ;

- l'absence de rapport écrit du médecin de service préventive ou, le cas échéant, de celui de l'expert agréé mandaté par la commune en méconnaissance de l'article 16 du décret du 30 juillet 1987 pris pour l'application de la loi du 26 janvier 1984 relatif à l'organisation des comités médicaux, aux conditions d'aptitude physique et au régime des congés de maladie des fonctionnaires territoriaux, vicie la consultation de la commission de réforme, l'a privé d'une garantie ;

- la procédure est également irrégulière pour méconnaissance de l'article 15 de l'arrêté du 4 août 2004, faute d'information du médecin du service de médecine professionnelle et préventive ;

- elle l'est encore pour méconnaissance de l'article 18 du décret du 14 mars 1986 relatif à la désignation des médecins agréés, à l'organisation des comités médicaux et des commissions de réforme, aux conditions d'aptitude physique pour l'admission aux emplois publics et au régime de congés de maladie des fonctionnaires ;

- il n'a pas été informé de la possibilité de se faire entendre par le comité médical ou de faire entendre par ce dernier le médecin de son choix, en méconnaissance de l'article 16 de l'arrêté du 4 août 2004 ;

- l'absence d'un médecin expert rhumatologue au sein de la commission de réforme entache également la procédure d'irrégularité dès lors que la commission de réforme n'a pu se prononcer en faveur de la consolidation de son état de santé en connaissance de cause, faute de disposer d'éléments médicaux pertinents, d'une expertise médicale y compris s'agissant des effets psychologiques consécutifs à l'accident de service ; ce vice l'a privé d'une garantie ;

- la commission de réforme n'était pas composée conformément aux dispositions de l'article 3 de l'arrêté du 4 août 2004 ;

- la décision contestée est entachée d'erreur d'appréciation s'agissant de la fixation au 3 juin 2019 de la date de consolidation de son état de santé suite à l'accident de service du 10 avril 2017 ;

- la pathologie psychique dont il a souffert est par ailleurs imputable au service ;

- les premiers juges auraient dû enjoindre à la commune de reconnaitre l'imputabilité au service de la pathologie psychique dont il a souffert alors même que celle-ci est tenue d'une obligation de sécurité ;

- l'arrêté du 20 juin 2019 est illégal en raison de l'illégalité de celui du 11 juin 2019.

Par des mémoires en défense enregistrés les 24 juillet et 12 octobre 2023, la commune des Pavillons-sous-Bois, représentée par Me Xavier Loiré, conclut au rejet de la requête et à ce que la somme de 3 000 euros soit mise la charge du requérant sur le fondement des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que les moyens de la requête ne sont pas fondés.

Un mémoire présenté pour la commune des Pavillons-sous-Bois, enregistré le 21 novembre 2023, n'a pas été communiqué.

Par une ordonnance du 6 novembre 2023, la clôture de l'instruction a été fixée au 22 novembre 2023.

Un mémoire présenté pour M. A..., enregistré le 19 mars 2024, n'a pas été communiqué.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983 ;

- la loi n° 84-53 du 26 janvier 1984 ;

- l'arrêté du 4 août 2004 relatif aux commissions de réforme des agents de la fonction publique territoriale et de la fonction publique hospitalière ;

- le code des relations entre le public et l'administration ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme Jayer,

- les conclusions de M. Segretain, rapporteur public,

- et les observations de Me Grenier représentant M. A... et de Me Stass substituant Me Henochsberg représentant la commune des Pavillons-sous-Bois.

Considérant ce qui suit :

1. M. A... a été recruté par la commune des Pavillons-sous-Bois en qualité d'agent non-titulaire pour occuper les fonctions de gardien référent de sites, à compter du 29 mars 2013. A partir du 15 avril suivant, il a été nommé responsable du pôle des gardiens de sécurité incendie et d'assistance à personnes (SSIAP). A compter du 1er avril 2015, il a ensuite été nommé adjoint technique territorial stagiaire puis titularisé, le 1er avril 2016, au grade d'adjoint technique de 2ème classe. Il a également exercé les fonctions de régisseur en qualité de suppléant à partir du 22 octobre 2013, puis en qualité de titulaire à compter du 28 octobre 2014. Le 10 avril 2017, il a été victime d'un accident dont l'imputabilité au service a été reconnue par arrêté du 13 octobre 2017 du maire des Pavillons-sous-Bois. Le 5 septembre 2017, M. A... a par ailleurs adressé à son employeur une demande de prise en charge d'une maladie liée à un épuisement professionnel dont il a estimé qu'elle était imputable au service. Après avoir recueilli l'avis de la commission de réforme interdépartementale de la petite couronne le 3 juin 2019, par une décision du 11 juin suivant, le maire des Pavillons-sous-Bois, d'une part, a fixé au 3 juin 2019 la date de consolidation de l'état de santé de M. A... suite à l'accident de service survenu le 10 avril 2017 et, d'autre part, a refusé de reconnaître l'imputabilité au service de la maladie déclarée le 2 juin 2017. Par un arrêté du 20 juin suivant, la commune a confirmé la décision du 13 octobre 2017 s'agissant de la prise en charge des arrêts de maladie consécutifs à l'accident de service du 10 avril 2017, a mis fin à celle-ci à compter du 4 juin 2019, a placé M. A... en congés de maladie ordinaire pour la période du 4 au 30 juin 2019 durant laquelle il a été médicalement arrêté et a rejeté la demande d'imputabilité au service de la maladie au-delà de cette date. Par jugement du 25 novembre 2022, le Tribunal administratif de Montreuil a annulé la décision du 11 juin 2019 du maire des Pavillons-sous-Bois en ce qu'elle refuse de faire droit à la demande de reconnaissance d'imputabilité au service de la maladie de M. A..., a rejeté le surplus des demandes de l'intéressé relatives à la fixation de la date de consolidation de l'accident du 10 juin 2017 et tendant à l'annulation de l'arrêté du 20 juin 2019. M. A... en relève appel en tant qu'il ne fait pas droit à l'intégralité de ses demandes.

Sur la régularité du jugement :

2. En premier lieu, la minute du jugement attaqué, produite devant le juge d'appel, a été signée par le président, le rapporteur et le greffier d'audience. Le moyen tiré de la méconnaissance des dispositions de l'article R. 741-7 du code de justice administrative ne peut donc qu'être écarté.

3. En second lieu, hormis dans le cas où les juges de première instance ont méconnu les règles de compétence, de forme ou de procédure qui s'imposaient à eux et ont ainsi entaché leur jugement d'irrégularité, il appartient au juge d'appel, non d'apprécier le bien-fondé des motifs par lesquels les juges de première instance se sont prononcés sur les moyens qui leur étaient soumis, mais de se prononcer directement sur les moyens dirigés contre la décision administrative contestée dont il est saisi dans le cadre de l'effet dévolutif de l'appel. Par suite, M. A... ne peut, en tout état de cause, utilement se prévaloir de ce que le jugement attaqué serait entaché d'erreurs de droit ou d'appréciation.

Sur les conclusions à fin d'annulation :

En ce qui concerne la décision du 11 juin 2019 en ce qu'elle fixe la date de consolidation de l'accident du 10 avril 2017 imputé au service :

4. En premier lieu, aux termes de l'article L. 211-2 du code des relations entre le public et l'administration : " Les personnes physiques ou morales ont le droit d'être informées sans délai des motifs des décisions administratives individuelles défavorables qui les concernent. / A cet effet, doivent être motivées les décisions qui : (...) / 6° Refusent un avantage dont l'attribution constitue un droit pour les personnes qui remplissent les conditions légales pour l'obtenir ; (...) ". L'article L. 211-5 du même code dispose : " La motivation exigée par le présent chapitre doit être écrite et comporter l'énoncé des considérations de droit et de fait qui constituent le fondement de la décision ".

5. Il résulte des dispositions législatives précitées que la décision, qui fixe la date de consolidation d'une maladie imputée au service, refuse, à compter de cette date, à un fonctionnaire le bénéfice de l'article 21 bis de la loi du 13 juillet 1983. Elle est ainsi au nombre des décisions qui doivent être regardées comme refusant un avantage dont l'attribution constitue un droit pour les personnes qui remplissent les conditions légales pour l'obtenir au sens du 6° précité de l'article L. 211-2 du code des relations entre le public et l'administration et doit, dès lors, être motivée.

6. En l'espèce, faute pour la décision contestée, ou l'avis auquel elle se réfère, de viser les dispositions dont il est fait application, ni d'évoquer les considérations de droit qui en constituent le fondement, le moyen tiré du défaut de motivation en droit de la décision contestée doit être accueilli.

7. En second lieu et en outre, d'une part, aux termes de l'article 3 de l'arrêté du 4 août 2004 relatif aux commissions de réforme des agents de la fonction publique territoriale et de la fonction publique hospitalière, la commission de réforme comprend " (...) 1. Deux praticiens de médecine générale, auxquels est adjoint, s'il y a lieu, pour l'examen des cas relevant de sa compétence, un médecin spécialiste qui participe aux débats mais ne prend pas part aux votes (...) ". D'autre part, aux termes de l'article 16 du même arrêté : " La commission de réforme doit être saisie de tous témoignages, rapports et constatations propres à éclairer son avis. Elle peut faire procéder à toutes mesures d'instructions, enquêtes et expertises qu'elle estime nécessaires. /Dix jours au moins avant la réunion de la commission, le fonctionnaire est invité à prendre connaissance, personnellement ou par l'intermédiaire de son représentant, de son dossier, dont la partie médicale peut lui être communiquée, sur sa demande, ou par l'intermédiaire d'un médecin ; il peut présenter des observations écrites et fournir des certificats médicaux. /La commission entend le fonctionnaire, qui peut se faire assister d'un médecin de son choix. Il peut aussi se faire assister par un conseiller ". Il résulte de ces dispositions que, dans les cas où il est manifeste, au vu des éléments dont dispose la commission de réforme, que la présence d'un médecin spécialiste de la pathologie invoquée par un agent est nécessaire pour éclairer l'examen de son cas lorsque les membres de la commission n'avaient pas déjà été éclairés par un médecin spécialiste, l'absence d'un tel spécialiste doit être regardée comme privant l'intéressé d'une garantie et comme entachant la procédure devant la commission d'une irrégularité justifiant l'annulation de la décision attaquée.

8. Il ressort des pièces du dossier, et notamment du rapport du 26 juillet 2017 du docteur E..., expert agréé spécialisé en réparation du préjudice corporel alors mandaté par la commune, que si l'accident dont a été victime M. A... le 10 avril 2017 était imputable au service, un tel accident a servi de révélateur de la pathologie dont souffrait déjà l'intéressé qui présentait un état pathologique antérieur consistant en une hernie discale L4 L5 et L5 S1 et un canal lombaire étroit " constitutionnel " évoluant pour son propre compte et relevant de la maladie ordinaire. Selon ce médecin, cette pathologie aurait continué d'évoluer de façon silencieuse pour se manifester au bout d'un certain temps par des épisodes de lombalgies chroniques, mais a été aggravée par l'accident de service. L'existence d'une telle prédisposition à la survenance de crises de lombalgie chronique est corroborée par les pièces médicales émanant du médecin traitant du requérant dont il résulte que celui-ci a été traité pour des lombalgies antérieures à l'accident de service. Au terme de son rapport, le docteur E... a cependant estimé que la date de consolidation de l'état de santé de M. A... consécutif au seul accident de service du 10 avril 2017 n'était pas acquise au 26 juillet 2017 et qu'elle devait être réévaluée au terme d'un délai de trois mois. Pour autant, il est constant d'une part, qu'aucun médecin rhumatologue agréé n'a été consulté en amont de la réunion de la commission de réforme pour se prononcer sur la date de consolidation de la pathologie liée à l'accident du travail et, d'autre part, que la commission ne comprenait en son sein aucun médecin rhumatologue en mesure d'éclairer utilement ses membres et les mettre ainsi à même de se prononcer, au-delà de la date du 31 juillet 2017, sur la persistance du lien de causalité entre l'accident de service du 10 avril 2017 et la lombalgie dont M. A... a continué de souffrir. Dans ces conditions, celui-ci est fondé à soutenir que l'avis rendu par la commission de réforme relatif à la date de consolidation de son accident de service est vicié et que ce vice l'a privé d'une garantie.

9. Par suite, et sans qu'il soit besoin de se prononcer sur les autres moyens de la requête, M. A... est fondé à soutenir que la décision du 11 juin 2019, en tant qu'elle fixe la date de consolidation de son accident de service, doit être annulée.

En ce qui concerne la décision du 11 juin 2019 en ce qu'elle refuse de reconnaître l'imputabilité au service de la maladie liée à l'épuisement :

10. Lorsque le juge de l'excès de pouvoir annule une décision administrative alors que plusieurs moyens sont de nature à justifier l'annulation, il lui revient, en principe, de choisir de fonder l'annulation sur le moyen qui lui paraît le mieux à même de régler le litige, au vu de l'ensemble des circonstances de l'affaire. Mais, lorsque le requérant choisit de présenter, outre des conclusions à fin d'annulation, des conclusions à fin d'injonction tendant à ce que le juge enjoigne à l'autorité administrative de prendre une décision dans un sens déterminé, il incombe au juge de l'excès de pouvoir d'examiner prioritairement les moyens qui seraient de nature, étant fondés, à justifier le prononcé de l'injonction demandée. Il en va également ainsi lorsque des conclusions à fin d'injonction sont présentées à titre principal sur le fondement de l'article L. 911-1 du code de justice administrative et à titre subsidiaire sur le fondement de l'article L. 911-2 du même code.

11. Dans le cas où il ne juge fondé aucun des moyens assortissant la demande principale du requérant mais retient un moyen assortissant sa demande subsidiaire, le juge de l'excès de pouvoir n'est tenu de se prononcer explicitement que sur le moyen qu'il retient pour annuler la décision attaquée : statuant ainsi, son jugement écarte nécessairement les moyens qui assortissaient la demande principale. Si le jugement est susceptible d'appel, le requérant est recevable à relever appel en tant que le jugement n'a pas fait droit à sa demande principale. Il appartient alors au juge d'appel, statuant dans le cadre de l'effet dévolutif, de se prononcer sur les moyens, soulevés devant lui, susceptibles de conduire à faire droit à la demande principale.

12. M. A..., qui avait demandé à titre principal au tribunal d'enjoindre à la commune de reconnaître l'imputabilité au service de sa pathologie psychique, en réitérant ses conclusions en appel, doit être regardé comme demandant la réformation du jugement de première instance en tant que le tribunal a annulé la décision du 11 juin 2019 en ce qu'elle refuse de faire droit à sa demande de reconnaissance de sa maladie pour un motif de légalité externe, tiré du défaut de motivation en droit de cet acte.

13. Le requérant soutient que le refus d'imputabilité au service de sa maladie est entaché d'une erreur d'appréciation, dès lors que sa pathologie est en lien direct avec les conditions de l'exercice de ses fonctions depuis 2013, et qu'elle constitue, en outre, une suite de l'accident de service dont il a été victime le 10 avril 2017.

14. Aux termes de l'article 57 de la loi susvisée du 26 janvier 1984 dans sa rédaction applicable au litige : " Le fonctionnaire en activité a droit : (...) 2° A des congés de maladie dont la durée totale peut atteindre un an pendant une période de douze mois consécutifs en cas de maladie dûment constatée mettant l'intéressé dans l'impossibilité d'exercer ses fonctions. Celui-ci conserve alors l'intégralité de son traitement pendant une durée de trois mois ; ce traitement est réduit de moitié pendant les neuf mois suivants. (...) / Toutefois, si la maladie provient de l'une des causes exceptionnelles prévues à l'article L. 27 du code des pensions civiles et militaires de retraite ou d'un accident survenu dans l'exercice ou à l'occasion de l'exercice de ses fonctions, le fonctionnaire conserve l'intégralité de son traitement jusqu'à ce qu'il soit en état de reprendre son service ou jusqu'à la mise à la retraite. / Dans le cas visé à l'alinéa précédent, l'imputation au service de l'accident ou de la maladie est appréciée par la commission de réforme instituée par le régime des pensions des agents des collectivités locales. (...) ".

15. Une maladie contractée par un fonctionnaire, ou son aggravation, doit être regardée comme imputable au service si elle présente un lien direct avec l'exercice des fonctions ou avec des conditions de travail de nature à susciter le développement de la maladie en cause, sauf à ce qu'un fait personnel de l'agent ou toute autre circonstance particulière conduisent à détacher la survenance ou l'aggravation de la maladie du service.

16. S'il ressort des pièces du dossier que M. A..., qui a versé aux débats des arrêts maladie dont la prescription jusqu'au 29 avril 2021 est au demeurant uniquement justifiée par un lumbago d'effort et non à une maladie en lien avec un épuisement d'origine professionnelle, a effectué régulièrement des heures supplémentaires durant sa période d'emploi en qualité de responsable du SSIAP, celui-ci n'établit pas la réalité du nombre d'heures de travail allégué alors que, d'une part, il est constant que la demande de rémunération qu'il a formée à ce titre pour les années 2013 et 2014 a été rejetée en dernier lieu par arrêt définitif n° 19VE00515 du 27 mai 2021 de la Cour administrative d'appel de Versailles à défaut de preuve de ce qu'elles auraient été effectuées à la demande de la hiérarchie, et que, d'autre part, les témoignages qu'il a produit dans le cadre de la présente instance, notamment celui de son ancien supérieur hiérarchique, sont insuffisamment probants dès lors qu'ils se rapportent à des faits survenus plusieurs années auparavant ou insuffisamment circonstanciés. Il ne ressort par ailleurs pas des pièces du dossier que le requérant n'aurait pu prendre de congés à la demande de son employeur, entre 2013 et 2015, ainsi qu'il le soutient. La preuve du lien de causalité invoqué ne saurait davantage résulter de la seule production de certificats médicaux -rédigés dans les mêmes termes-, notamment ceux du médecin traitant de M. A..., le docteur D..., et du docteur C..., médecin psychiatre et psychothérapeute, qui se bornent à reprendre les doléances de ce dernier relatives à ses conditions de travail et à l'impact de l'accident de service dont il a été victime sur sa santé mentale. Le comité médical interdépartemental du centre interdépartemental de gestion, qui a émis un avis le 7 janvier 2021 sur l'octroi à l'intéressé d'un congé de longue maladie, ne s'est, quant à lui, pas prononcé sur le lien de causalité entre le service et la maladie et son avis est donc sans incidence sur la décision attaquée. M. A... n'est dès lors pas fondé à soutenir que la pathologie constatée à compter du 2 juin 2017 doit être regardée comme présentant un lien direct avec l'exercice de ses fonctions. Par suite, le moyen tiré de ce que la décision contestée serait entachée d'une erreur d'appréciation doit être écarté.

En ce qui concerne l'arrêté du 20 juin 2019 du maire des Pavillons-sous-Bois :

17. Il résulte de ce qui a été jugé aux point 4 à 9 du présent arrêt que l'arrêté du 20 juin 2019 par lequel le maire de la commune des Pavillons-sous-Bois a, au regard de la date de consolidation de l'accident de service fixée au 3 juin 2019, placé M. A... en congés de maladie ordinaire durant ses arrêts maladie du 4 au 30 juin 2019, doit être annulé par voie de conséquence.

18. Il résulte de tout ce qui précède que M. A... est seulement fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Montreuil a rejeté sa demande tendant à l'annulation de la décision du 11 juin 2019 du maire des Pavillons-sous-Bois, en tant que la date de guérison de l'accident de service du 10 avril 2017 y est fixée au 3 juin 2019 et à l'annulation de l'arrêté du 20 juin 2019.

Sur les conclusions à fin d'injonction :

19. L'exécution du présent arrêt implique seulement que le maire des Pavillons-sous-Bois procède au réexamen de la situation de M. A... s'agissant de son accident reconnu imputable au service par une décision du 13 octobre 2017. Il y a lieu de lui enjoindre de procéder à ce réexamen, dans un délai de trois mois à compter de la notification du présent arrêt.

Sur les frais liés à l'instance et les dépens :

20. Dans les circonstances de l'espèce, il y a lieu de mettre à la charge de la commune des Pavillons-sous-Bois la somme de 1 500 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. En revanche, la présente instance n'ayant donné lieu à aucun dépens, et dès lors que les droits de plaidoirie prévus à l'article L. 723-3 du code de la sécurité sociale ne sont pas au nombre des dépens énumérés par l'article R. 761-1 du code de justice administrative, les conclusions de M. A... présentées à ce titre doivent être rejetées.

21. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font enfin obstacle à ce que soit mise à la charge de M. A..., qui n'est pas dans la présente instance la partie perdante, la somme que demande la commune des Pavillons-sous-Bois au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens.

DÉCIDE :

Article 1er : La décision du 11 juin 2019 du maire des Pavillons-sous-Bois en tant qu'elle fixe la date de la guérison de l'accident de service dont M. A... a été victime le 10 avril 2017 au 3 juin 2019, ainsi que l'arrêté du 20 juin 2019 du maire des Pavillons-sous-Bois qualifiant de congé de maladie ordinaire les arrêts et soins pour la période du 4 au 30 juin 2019, sont annulés.

Article 2 : Il est enjoint au maire des Pavillons-sous-Bois de procéder au réexamen de la situation de M. A... s'agissant de son accident reconnu imputable au service par une décision du 13 octobre 2017 dans un délai de trois mois à compter de la notification du présent arrêt.

Article 3 : Le jugement n°1908677/4 du 25 novembre 2022 du Tribunal administratif de Montreuil est annulé en ce qu'il a de contraire au présent arrêt.

Article 4 : La commune des Pavillons-sous-Bois versera à M. A... la somme de 1 500 euros en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 5 : Le surplus des conclusions des parties est rejeté.

Article 6 : Le présent arrêt sera notifié à M. B... A... et à la commune des Pavillons-sous-Bois.

Délibéré après l'audience du 24 avril 2024, à laquelle siégeaient :

- Mme Topin, présidente,

- M. Magnard, premier conseiller,

- Mme Jayer, première conseillère.

Rendu public par mise à disposition au greffe le 15 mai 2024.

La rapporteure,

M-D. JAYERLa présidente,

E. TOPIN

La greffière,

C. ABDI-OUAMRANELa République mande et ordonne au préfet de la Seine-Saint-Denis en ce qui le concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

N° 23PA00339 2


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de PARIS
Formation : 2ème chambre
Numéro d'arrêt : 23PA00339
Date de la décision : 15/05/2024
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : Mme TOPIN
Rapporteur ?: Mme Marie-Dominique JAYER
Rapporteur public ?: M. SEGRETAIN
Avocat(s) : LOIRE-HENOCHSBERG

Origine de la décision
Date de l'import : 19/05/2024
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel;arret;2024-05-15;23pa00339 ?
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