Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
La société AP2R a demandé au tribunal administratif de Melun d'annuler le décompte qui lui a été notifié le 22 mai 2017 ainsi que la décision du 5 août 2017 par laquelle la commune de Noisiel a implicitement rejeté son mémoire en réclamation du 21 juin 2017 et de condamner la commune de Noisiel à lui payer la somme de 70 833,51 euros TTC, outre les intérêts moratoires d'un montant de 23 463,91 euros.
Par un jugement n° 1800879 du 16 mars 2022, le tribunal administratif de Melun a rejeté sa demande.
Procédure devant la Cour :
Par une requête, enregistrée le 17 mai 2022, la société AP2R représentée par Me Metais-Mouries, demande à la Cour :
1°) d'annuler ce jugement du 16 mars 2022 du tribunal administratif de Melun ;
2°) d'annuler le décompte notifié le 22 mai 2017 ;
3°) de condamner la commune de Noisiel à lui verser la somme de 70 833,51 euros TTC, outre les intérêts moratoires d'un montant de 23 463,91 euros, arrêtés au jour de sa requête et à parfaire au jour du versement du solde restant dû ;
4°) de mettre à la charge de la commune de Noisiel la somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle soutient que :
- le jugement attaqué est irrégulier pour insuffisance de motivation ;
- la procédure de substitution est irrégulière dès lors qu'elle n'a pas été destinataire d'une décision de résiliation du marché litigieux, de la mise en demeure préalable à la mise en régie ou de la notification du marché de substitution dans le cadre de la résiliation du marché, prévues par l'article 48 du CCAG Travaux de 2009, ni convoquée à un constat contradictoire de l'état des lieux préalable à la reprise de ses ouvrages ;
- cette irrégularité a été soulevée dans son mémoire en réclamation du 21 juin 2017 ;
- les pénalités de retard sont injustifiées dès lors qu'elle n'a commis aucun retard ;
- le solde du marché est erroné dès lors qu'elle a réalisé l'ensemble des prestations qui lui avaient été confiées ;
- elle est fondée à demander le règlement de son entier marché, soit une somme de 59 225,34 euros HT (70 833,51 euros TTC) ;
- elle demande également le versement des intérêts moratoires correspondant au solde lui restant dû, soit une somme de 23 463,91 euros arrêtée au jour de sa requête, et à parfaire au jour du versement du solde restant dû.
Par un mémoire en défense, enregistré le 9 mars 2023, la commune de Noisiel, représentée par la SELARL Symchowicz-Weissberg et associés, conclut au rejet de la requête et demande en outre qu'une somme de 5 000 euros soit mise à la charge de la société AP2R au titre de l'article L.761-1 du code de justice administrative.
Elle fait valoir que :
- le moyen tiré de l'irrégularité du marché de substitution est irrecevable ;
- les autres moyens soulevés par la société AP2R sont infondés.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- le code des marchés publics ;
- le code de la commande publique ;
- l'arrêté du 8 septembre 2009 portant approbation du cahier des clauses administratives générales applicables aux marchés publics de travaux ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de M. Pagès,
- les conclusions de Mme Naudin, rapporteure publique,
- et les observations de Me Dumas pour la commune de Noisiel.
Considérant ce qui suit :
1. La commune de Noisiel a, par une délibération du 21 juin 2013, attribué à la société AP2R un marché de travaux, ayant pour objet la réfection du revêtement de sol sportif de la grande salle du gymnase du COSEC, pour un montant global et forfaitaire de 59 225,34 euros HT (70 833,51 euros TTC). Les travaux devaient être effectués entre le 12 juillet et le 8 août 2013. Des désordres affectant le sol sportif ayant été constatés lors des opérations préalables à la réception, intervenue le 27 août suivant, il a été demandé au titulaire d'y remédier avant le 16 septembre 2013. Par lettre du 20 septembre 2013, le maire de la commune de Noisiel a procédé à la réception des travaux assortie d'une réserve totale à effet au 16 septembre 2013 et a une nouvelle fois demandé à la société AP2R d'exécuter les travaux prescrits avant le 8 novembre 2013. Malgré la mise en demeure qui lui a été adressée le 25 novembre 2013, la société n'a pas réalisé les travaux visés par les réserves dans le délai qui lui avait été imparti. Aussi, par décision du 11 décembre 2013, le conseil municipal a autorisé le maire à conclure un marché de substitution avec une autre société pour un montant de 73 956,75 euros TTC. Par lettre du 21 février 2014, la commune a procédé à une réception partielle définitive du marché, arrêtant le solde restant dû à la société à 5 583,59 euros TTC. En réponse, la société AP2R a adressé à la commune, le 26 mars 2014, un projet de décompte final portant le montant du marché à 66 575,74 euros qui a été refusé par la collectivité le 16 avril 2014. La société a, par ailleurs, saisi le comité consultatif interrégional de règlement amiable des litiges relatifs aux marchés publics de Paris (CCIRA) qui, le 17 février 2015, a rendu un avis favorable au versement à la société d'une indemnité d'un montant de 37 000 euros HT. Cet avis n'a pas été suivi par la commune qui a adressé, le 16 janvier 2017, à la société AP2R un décompte alors non signé qui a été contesté dans le cadre d'un premier mémoire en réclamation le 31 janvier suivant. Un second décompte a été notifié le 22 mai 2017 à la société qui a donné lieu à un second mémoire en réclamation, reçu par la commune le 21 juin 2017, et est resté sans réponse. La société AP2R a demandé au tribunal administratif de Melun d'annuler ce décompte et de condamner la commune de Noisiel à lui verser la somme de 70 833,51 euros TTC, outre les intérêts moratoires d'un montant de 23 463,91 euros arrêtés au jour de sa requête, et à parfaire au jour du versement du solde restant dû. Par un jugement du 16 mars 2022, dont la société AP2R relève appel, le tribunal administratif de Melun a rejeté sa demande.
Sur la régularité du jugement attaqué :
2. Les premiers juges ont répondu de façon circonstanciée à l'ensemble des moyens soulevés en première instance par la société AP2R. Le moyen tiré de l'irrégularité du jugement attaqué pour insuffisance de sa motivation doit donc être écarté.
Sur les conclusions tendant à la contestation du solde du décompte du marché :
En ce qui concerne les conclusions indemnitaires relatives au caractère irrégulier du marché de substitution :
3. Aux termes de l'article 50 du cahier des clauses administratives générales applicables aux marchés publics de travaux de 2009 (" CCAG travaux de 2009 "), applicable au litige en vertu de l'article 2.2 du document unique : " (...) Dans son mémoire en réclamation, le titulaire expose les motifs de son différend, indique, le cas échéant, les montants de ses réclamations et fournit les justifications nécessaires correspondant à ces montants. (...) / 50.3.1. A l'issue de la procédure décrite à l'article 50.1, si le titulaire saisit le tribunal administratif compétent, il ne peut porter devant cette juridiction que les chefs et motifs énoncés dans les mémoires en réclamation ".
4. Il résulte de l'instruction que, dans son mémoire en réclamation en date du 20 juin 2017, la société requérante a entendu contester tant le montant du solde lui restant dû que les pénalités de retard qui lui ont été infligées. Si la société a alors soutenu que le marché de substitution ne lui a pas été régulièrement notifié, elle n'a nullement remis en cause la régularité de la procédure de passation de ce marché, ni d'ailleurs indiqué le montant du préjudice que lui aurait occasionné la passation d'un tel marché. Dans ces conditions, la société AP2R ne peut être regardée comme ayant contesté sur ce point le décompte de liquidation avant de saisir le juge administratif, en méconnaissance de l'article 50 du CCAG Travaux précité. Dès lors, la commune de Noisiel est fondée à soutenir que la demande formée à ce titre par la société AP2R n'est pas recevable.
En ce qui concerne les pénalités de retard :
5. L'article 1.2.1 du document unique portant CCAP et CCTP stipule que le délai d'exécution est de dix-neuf jours ouvrés à compter de l'ordre de service délivré par la maîtrise d'œuvre. Aux termes de l'article 1.2.2 du document unique : " Par dérogation à l'article 20.1 du C.C.A.G. travaux, en cas de retard dans l'exécution des prestations, l'entrepreneur subira par jour calendaire de retard une pénalité de 1/500ème du montant de l'ensemble du marché ".
6. La société AP2R s'est vu appliquer un montant de pénalités de 1 539,86 euros, au titre du retard constaté pour l'exécution du marché. Ces pénalités concernent treize jours de retard, pour la période du 8 au 20 août 2013. Il résulte de l'instruction que, par un ordre de service du 10 juillet 2013, le démarrage des travaux était fixé au 12 juillet et que ce même ordre de service rappelait la durée d'exécution des travaux dont la fin était prévue pour le 7 août 2013. Or, d'une part, la société AP2R qui se borne à soutenir qu'elle a réalisé les travaux dans les délais prévus, sans autres précisions, ne produit aucun élément permettant d'établir qu'elle avait terminé les travaux à la date prévue. D'autre part, il résulte du procès-verbal des opérations préalables à la réception du 27 août 2013 que les prestations étaient non conformes, ce que la société requérante a reconnu en signant et acceptant sans remarque ce procès-verbal. Par suite, la société AP2R n'est pas fondée à contester le montant des pénalités de retard.
En ce qui concerne le solde du marché :
7. La commune a fixé le solde du marché en faveur de la société AP2R à la somme de 5 583,59 euros TTC alors que cette dernière revendique le prix forfaitaire initial de 70 833,51 euros TTC. Il résulte toutefois de l'instruction que la société requérante n'avait pas exécuté tous les travaux prévus en dépit de la mise en demeure infructueuse du 25 novembre 2013 et elle n'apporte aucun élément probant de nature à justifier qu'elle aurait droit au titre des travaux effectués à un montant supérieur à la somme de 5 583,59 euros TTC.
8. Il résulte de tout ce qui précède que les conclusions indemnitaires de la société AP2R doivent être rejetées. Il en va de même, par voie de conséquence, des conclusions accessoires relatives au paiement des intérêts moratoires.
9. Il résulte de tout ce qui précède que la société AP2R n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que par, le jugement attaqué, le tribunal administratif de Melun a rejeté sa demande.
Sur les frais liés au litige :
10. D'une part, les dispositions de l'article L.761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que la commune de Noisiel, qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance, verse une somme à la société AP2R. D'autre part, il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de cette dernière une somme de 1 500 euros au titre des frais exposés par la commune de Noisiel et non compris dans les dépens.
DÉCIDE :
Article 1er : La requête de la société AP2R est rejetée.
Article 2 : La société AP2R versera la somme de 1 500 euros à la commune de Noisiel au titre de l'article L.761-1 du code de justice administrative.
Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à la société AP2R et à la commune de Noisiel.
Délibéré après l'audience du 23 avril 2024 à laquelle siégeaient :
- Mme Bonifacj, présidente de chambre,
- M. Niollet, président assesseur,
- M. Pagès, premier conseiller.
Rendu public par mise à disposition au greffe, le 7 mai 2024.
Le rapporteur,
D. PAGES
La présidente,
J. BONIFACJ
La greffière,
E. TORDO
La République mande et ordonne au préfet de Seine-et-Marne en ce qui le concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
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N° 22PA02298