Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
M. B... a demandé au tribunal administratif de Melun de prononcer la décharge en droits et pénalités, des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu et des prélèvements sociaux auxquelles il a été assujetti au titre des années 2011 et 2012.
Par un jugement n° 1910646 du 24 février 2022, le tribunal administratif de Melun a rejeté sa demande.
Procédure devant la Cour :
Par une requête et un mémoire complémentaire enregistrés les 29 avril et 3 mai 2022 M. B..., représenté par Me Vailhen, avocat, demande à la Cour :
1°) d'annuler le jugement n° 1910646 du 24 février 2022 par lequel le tribunal administratif de Melun a rejeté sa demande tendant à la décharge, en droits et pénalités, des cotisations supplémentaires d'impôts sur le revenu et des prélèvements sociaux auxquels il a été assujetti au titre des années 2011 et 2012 ;
2°) d'annuler la décision de rejet de la direction départementale des finances publiques en date du 24 septembre 2019 ;
3°) de prononcer la décharge des impositions en litige ;
4°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 2 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ainsi que les entiers dépens.
Il soutient que :
- la proposition de rectification du 22 septembre 2014 est insuffisamment motivée dès lors que la proposition de rectification du 11 août 2014 concernant la société Bacotrel à laquelle elle fait référence n'y était pas jointe ; le service vérificateur a méconnu le principe de la loyauté des débats ;
- les revenus distribués au titre d'un profit sur le Trésor, de factures fictives et de charges et abandons de créances injustifiés ou non engagés dans l'intérêt de la SARL Bacotrel ne sont pas justifiés par l'administration ;
- la majoration pour manquement délibéré n'est pas justifiée.
Par un mémoire en défense, enregistré le 3 août 2022, le ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et économique conclut au rejet de la requête.
Il fait valoir que les moyens soulevés par le requérant ne sont pas fondés.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de Mme Boizot ;
- et les conclusions de M. Sibilli, rapporteur public.
Considérant ce qui suit :
1. La SARL Bacotrel Génie Climatique, qui exerce dans le secteur d'activité des travaux d'installation d'équipements thermiques et de climatisation a fait l'objet d'une vérification de comptabilité concernant la période du 1er janvier 2011 au 31 décembre 2013, à l'issue de laquelle elle a été rendue destinataire d'une proposition de rectification en date du 11 août 2014. Parallèlement, M. B..., en sa qualité de gérant de cette société, a fait l'objet d'un contrôle sur pièces et a reçu une proposition de rectification en date du 22 septembre 2014. Des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu et des prélèvements sociaux au titre des années 2011 et 2012 ont été mis en recouvrement à son encontre le 30 avril 2015. La réclamation présentée le 22 novembre 2016 a été rejetée par une décision du directeur départemental des finances publiques du Val-de-Marne du 24 septembre 2019. Par un jugement n° 1910646 du 24 février 2022 dont M. B... interjette régulièrement appel, le tribunal administratif de Melun a rejeté sa demande tendant à la décharge, en droits et pénalités, des cotisations supplémentaires d'impôts sur le revenu et des prélèvements sociaux auxquels il a été assujetti au titre des années 2011 et 2012.
Sur la procédure d'imposition :
2. Aux termes de l'article L. 57 du livre des procédures fiscales : " L'administration adresse au contribuable une proposition de rectification qui doit être motivée de manière à lui permettre de formuler ses observations ou de faire connaître son acceptation (...) ". Aux termes de l'article R. 57-1 du même livre : " La proposition de rectification prévue par l'article L. 57 fait connaître au contribuable la nature et les motifs de la rectification envisagée. / (...) ".
3. Il résulte de ces dispositions que l'administration doit indiquer au contribuable, dans la proposition de rectification, les motifs et le montant des rehaussements envisagés, leur fondement légal et la catégorie de revenus dans laquelle ils sont opérés, ainsi que les années d'imposition concernées. Hormis le cas où elle se réfère à un document qu'elle joint à la proposition de rectification ou à la réponse aux observations du contribuable, l'administration peut satisfaire cette obligation en se bornant à se référer aux motifs retenus dans une proposition de rectification, ou une réponse aux observations du contribuable, consécutive à un autre contrôle et qui lui a été régulièrement notifiée, à la condition qu'elle identifie précisément la proposition ou la réponse en cause et que celle-ci soit elle-même suffisamment motivée.
4. M. B... soutient que la proposition de rectification du 22 septembre 2014 est insuffisamment motivée dès lors que la proposition de rectification du 11 août 2014 concernant la SARL Bacotrel Génie Climatique à laquelle elle fait référence n'y était pas jointe. Il en conclut que le service vérificateur a méconnu le principe de la loyauté des débats.
5. En l'espèce, il résulte de l'instruction que la proposition de rectification du 22 septembre 2014 comporte les motifs des rehaussements envisagés, leur fondement légal, la catégorie de revenus et les années d'imposition concernées et, dans son corps, des extraits pertinents de la proposition de rectification du 11 août 2014 adressée à la SARL Bacotrel Génie Climatique conformément aux exigences de motivation de l'article L. 57 précité. Ainsi, alors au demeurant que M. B..., gérant et associé unique de la SARL, avait nécessairement eu connaissance des motifs des redressements notifiés à la société et dont la proposition de rectification en litige se bornait à tirer les conséquences dans son chef, le requérant a été mis en mesure de formuler ses observations, ce qu'il a d'ailleurs fait le 13 novembre 2014, en joignant en annexe à ses observations, celles adressées le 17 octobre 2014, en réponse à la proposition de rectification adressée à la société Bacotrel Génie Climatique. La proposition de rectification est suffisamment motivée, aucune déloyauté de l'administration n'étant, en conséquence, établie. Par suite, le moyen doit être écarté.
Sur le bien-fondé des impositions :
6. D'une part, aux termes de l'article 109 du code général des impôts : " 1. Sont considérés comme revenus distribués : / 1° Tous les bénéfices ou produits qui ne sont pas mis en réserve ou incorporés au capital (...) ". D'autre part, aux termes de l'article 111 du code général des impôts : " Sont notamment considérés comme revenus distribués : / (...) c. Les rémunérations et avantages occultes ; (...) ".
7. M. B... soutient que les revenus distribués au titre de la rémunération et des frais du gérant, de factures fictives et de charges et abandons de créances injustifiés ou non engagés dans l'intérêt de la SARL Bacotrel Génie Climatique ne sont pas justifiés par l'administration.
S'agissant des rémunérations :
8. M B... fait valoir que si l'administration fiscale, au regard des procès-verbaux d'assemblée générale produits dans ses observations du 17 octobre 2014, a retenu, au titre de l'année 2012, un passif injustifié inscrit à son compte-courant d'un montant égal à 22 594 euros au lieu de la somme de 52 594 euros rejetée initialement dans la proposition de rectification du 11 août 2014 adressée à la société, soit une diminution de 30 000 euros pour tenir compte du montant de sa rémunération fixée par l'assemblée générale de la SARL Bacotrel Génie Climatique, il n'en demeure pas moins qu'il a bien perçu une rémunération de 52 000 euros qui a été déclarée dans sa totalité lors de l'établissement de sa déclaration de revenus au titre de l'année 2012 et inscrite dans la comptabilité de la SARL. Il estime, par conséquent, que cette somme ne peut constituer une rémunération occulte.
9. Or, contrairement à ce que soutient le requérant, il résulte de l'instruction que le service n'a pas réhaussé les revenus perçus au titre des salaires par M. B... au titre de l'année 2012. Les montants des distributions de bénéfice ou rémunérations ou avantages occultes notifiés par la proposition de rectification en date du 22 septembre 2014 correspondent au profit sur le Trésor consécutif aux rappels de taxe sur la valeur ajoutée notifiés à la SARL Bacotrel Génie Climatique pour un montant de 31 612 euros, à des charges non engagées dans l'intérêt de l'entreprise pour un montant de 1 184 euros et à un rehaussement pour factures fictives d'un montant de 15 000 euros. Ainsi, la somme en cause non justifiée au passif du compte-courant de M. B... pour un montant de 22 594 euros n'a pas été considérée comme une distribution. Dans ces conditions, le requérant ne saurait utilement contester une imposition qui n'a matériellement pas été établie.
S'agissant des frais de déplacement :
10. En l'espèce, le service a remis en cause le caractère déductible des frais kilométriques inscrits au compte courant d'associé de M. B.... Les sommes inscrites au crédit d'un compte courant d'associé ont, sauf preuve contraire apportée par l'associé titulaire du compte, le caractère de revenus distribués et sont imposables dans la catégorie des revenus de capitaux mobiliers. Si le requérant fait valoir que la SARL Bacotrel Génie Climatique a fourni des tableaux récapitulant les indemnités kilométriques établies pour chaque exercice ainsi que les cartes grises des véhicules immatriculés au nom de la SARL dans sa réclamation contentieuse en date 22 novembre 2016, et qu'il rapporte ainsi la preuve du caractère professionnel des déplacements, aucun justificatif produit ne permet d'établir l'effectivité de l'utilisation par M. B... de son véhicule personnel dans le cadre des déplacements professionnels allégués ou l'engagement pour ce faire de frais justifiant les remboursements effectués. Dans ces conditions, et alors que M. B... ne conteste pas avoir appréhendé les sommes en cause, c'est à bon droit que l'administration a taxé entre ses mains la distribution de bénéfices résultant de la réintégration de ces sommes.
S'agissant des factures fictives :
11. Il ressort de la proposition de rectification du 22 septembre 2014 adressée à M. B..., laquelle reprend de larges extraits de la proposition de rectification du 11 août 2014 adressée à la SARL Bacotrel Génie Climatique, qu'à l'issue des opérations de vérification de cette dernière, l'administration a remis en cause la déduction de factures émises au cours des années 2011, 2012 et 2013 par l'EURL B... et Cie compte tenu de leur caractère fictif. L'administration a notamment relevé que les factures adressées par I'EURL B... et Cie à la SARL au titre de " prestations de coordination et d'honoraires " présentaient un caractère fictif dès lors que les montants facturés étaient imprécis et non définis contractuellement, que M. B... était l'unique détenteur du capital et gérant de ces deux sociétés, que dans le cadre du débat oral et contradictoire l'expert-comptable de la société avait affirmé qu'il s'agissait de factures de sous-traitance sans objet réel qui permettaient à M. B... de se rémunérer, et qu'enfin la taxe sur la valeur ajoutée collectée à raison de ces factures n'avait pas été déclarée par l'EURL B... et Cie.
12. Si M. B... fait valoir que le service n'apporte pas la démonstration de l'absence de services rendus par l'EURL B... et Cie à la SARL Bacotrel Génie Climatique en se bornant à relever des éléments non probants, tels que le libellé insuffisamment précis des factures, alors que l'EURL B... et Cie a réalisé, sur les chantiers confiés par la SARL, les études d'ingénierie et les études techniques pour le compte de cette dernière tandis que celle-ci exécutait les travaux, l'ensemble des éléments retenus par le service, mentionnés ci-dessus, permet d'établir le caractère fictif des factures en litige et le bien-fondé du rappel de taxe sur la valeur ajoutée correspondant. C'est donc à bon droit que l'administration a taxé le profit de taxe correspondant réalisé par la SARL Bacotrel Génie Climatique comme bénéfice distribué entre les mains de M. B..., qui, en qualité de maître de l'affaire, doit être regardé comme ayant appréhendé le revenu correspondant.
Sur les pénalités :
13. Aux termes de l'article 1729 du code général des impôts : " Les inexactitudes ou les omissions relevées dans une déclaration ou un acte comportant l'indication d'éléments à retenir pour l'assiette ou la liquidation de l'impôt ainsi que la restitution d'une créance de nature fiscale dont le versement a été indûment obtenu de l'Etat entraînent l'application d'une majoration de : / a. 40 % en cas de manquement délibéré (...) ".
14. Pour justifier l'application de la majoration de 40 % aux suppléments d'impôt sur le revenu et aux prélèvements sociaux auxquels M. B... a été assujetti, l'administration a notamment relevé que M. B... était le maître de l'affaire de la SARL Bacotrel Génie Climatique, et qu'en cette qualité, il ne pouvait ignorer le manque de justification du caractère déductible de certaines charges et l'importance des montants d'impôt éludés par la SARL. Dans ces conditions, l'administration établit le caractère délibéré des manquements commis, justifiant l'application de la majoration de 40 % prévue par les dispositions de l'article 1729 du code général des impôts.
15. Il résulte de tout ce qui précède que M. B... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Melun a rejeté sa demande. Par voie de conséquence, les conclusions relatives aux frais liés au litige et aux dépens doivent être rejetées.
D E C I D E :
Article 1er : La requête de M. B... est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. A... C... B... et au ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique.
Copie en sera adressée à l'administratrice des finances publiques chargée de la direction régionale des finances publiques d'Île-de-France et de Paris (service du contentieux d'appel déconcentré - SCAD).
Délibéré après l'audience du 5 avril 2024, à laquelle siégeaient :
- M. Carrère, président,
- Mme Boizot, première conseillère,
- Mme Hamdi, première conseillère.
Rendu public par mise à disposition au greffe de la Cour, le 26 avril 2024.
La rapporteure,
S. BOIZOTLe président,
S. CARRERE
La greffière,
C. DABERT
La République mande et ordonne au ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique en ce qui le concerne, ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
N° 22PA01956 2