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25/04/2024 | FRANCE | N°23PA05282

France | France, Cour administrative d'appel de PARIS, 1ère chambre, 25 avril 2024, 23PA05282


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :



M. C... A... B... a demandé au tribunal administratif de Melun d'annuler l'arrêté du 27 janvier 2023 par lequel le préfet des Hauts-de-Seine l'a obligé à quitter sans délai le territoire français, a fixé le pays de destination et a pris à son encontre une interdiction de retour sur le territoire français d'une durée d'un an.



Par un jugement n° 2300889 du 5 décembre 2023, le magistrat désigné par la présidente du tribunal administratif de Melun a annulé c

et arrêté en tant qu'il prive M. A... B... de délai de départ volontaire et qu'il lui interdit de ...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. C... A... B... a demandé au tribunal administratif de Melun d'annuler l'arrêté du 27 janvier 2023 par lequel le préfet des Hauts-de-Seine l'a obligé à quitter sans délai le territoire français, a fixé le pays de destination et a pris à son encontre une interdiction de retour sur le territoire français d'une durée d'un an.

Par un jugement n° 2300889 du 5 décembre 2023, le magistrat désigné par la présidente du tribunal administratif de Melun a annulé cet arrêté en tant qu'il prive M. A... B... de délai de départ volontaire et qu'il lui interdit de retourner en France et a rejeté le surplus des conclusions de la requête.

Procédure devant la Cour :

Par une requête et un mémoire complémentaire, enregistrés le 20 décembre 2023 et le 22 janvier 2024, le préfet des Hauts-de-Seine demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 2300889 du 5 décembre 2023 du magistrat désigné par la présidente du tribunal administratif de Melun en tant qu'il a annulé les décisions du 27 janvier 2023 refusant au requérant un délai de départ volontaire et portant interdiction de retour sur le territoire ;

2°) de rejeter la requête présentée par M. A... B... devant le tribunal administratif de Melun.

Il soutient que :

- le premier juge a commis une erreur de droit et une erreur d'appréciation, en estimant que la décision de refus de départ volontaire avait été prise en méconnaissance du 2° de l'article L. 612-3 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- la décision portant interdiction de retour sur le territoire français n'a pas été prise en méconnaissance de l'article L. 613-6 de ce code.

La requête a été communiquée à M. A... B... qui n'a pas présenté de mémoire en défense.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

Le rapport de Mme Jasmin-Sverdlin a été entendu au cours de l'audience publique.

Considérant ce qui suit :

1. M. A... B..., ressortissant colombien né le 23 mai 1997, entré en France le 5 octobre 2016 selon ses déclarations, a demandé au tribunal administratif de Melun l'annulation de l'arrêté du 27 janvier 2023 par lequel le préfet des Hauts-de-Seine l'a obligé à quitter le territoire français sans lui accorder de délai de départ volontaire et a prononcé à son encontre une interdiction de retour sur le territoire français d'une durée d'un an. Le préfet des Hauts-de-Seine relève appel du jugement du magistrat désigné par la présidente du tribunal administratif de Melun en tant qu'il a annulé ses décisions du 27 janvier 2023 refusant au requérant un délai de départ volontaire et portant interdiction de retour sur le territoire.

Sur le moyen d'annulation retenu par le magistrat désigné :

2. D'une part, aux termes de l'article L. 612-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " L'étranger faisant l'objet d'une décision portant obligation de quitter le territoire français dispose d'un délai de départ volontaire de trente jours à compter de la notification de cette décision. (...). ". Aux termes de l'article L. 612-2 de ce code : " Par dérogation à l'article L. 612-1, l'autorité administrative peut refuser d'accorder un délai de départ volontaire dans les cas suivants : (...) 3° Il existe un risque que l'étranger se soustraie à la décision portant obligation de quitter le territoire français dont il fait l'objet ". Selon les dispositions de l'article L. 612-3 du même code : " Le risque mentionné au 3° de l'article L. 612-2 peut être regardé comme établi, sauf circonstance particulière, dans les cas suivants : (...) 2° L'étranger s'est maintenu sur le territoire français au-delà de la durée de validité de son visa ou, s'il n'est pas soumis à l'obligation du visa, à l'expiration d'un délai de trois mois à compter de son entrée en France, sans avoir sollicité la délivrance d'un titre de séjour ; (...) ".

3. D'autre part, aux termes de l'article L. 612-6 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Lorsqu'aucun délai de départ volontaire n'a été accordé à l'étranger, l'autorité administrative assortit la décision portant obligation de quitter le territoire français d'une interdiction de retour sur le territoire français. Des circonstances humanitaires peuvent toutefois justifier que l'autorité administrative n'édicte pas d'interdiction de retour. Les effets de cette interdiction cessent à l'expiration d'une durée, fixée par l'autorité administrative, qui ne peut excéder trois ans à compter de l'exécution de l'obligation de quitter le territoire français. ".

4. Pour refuser d'accorder à M. A... B... un délai de départ volontaire, le préfet des Hauts-de-Seine a considéré qu'il existe un risque qu'il se soustraie à l'exécution de la mesure d'éloignement en ce qu'il " ne justifie d'aucune circonstance particulière pour s'être maintenu irrégulièrement sur le territoire français " et qu'il n'a jamais sollicité de titre de séjour. Le premier juge a considéré que ces motifs n'étaient pas établis, le requérant possédant un passeport en cours de validité et justifiant d'un domicile fixe où il habite avec sa compagne et leur enfant. Il a ainsi estimé que les garanties de représentation et les circonstances particulières de la situation du requérant étaient de nature à justifier le bénéfice d'un délai de départ volontaire et que, de ce fait, la décision portant refus de délai de départ volontaire était entachée d'inexacte application du 2° de l'article L. 612-3 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et que, par suite, cette décision devait être annulée ainsi que, par voie de conséquence, la décision portant interdiction de retour sur le territoire français.

5. Toutefois, il ressort des pièces du dossier, notamment du procès-verbal d'audition de l'intéressé, en date du 27 janvier 2023, que M. A... B... a déclaré résider en France depuis 2016, de manière irrégulière et n'avoir pas sollicité la délivrance d'un titre de séjour. En outre, le fait que le requérant vive dans un logement dont il acquitte les loyers, avec sa compagne et leur fille en bas âge, née en France le 26 octobre 2022, ne constitue pas une circonstance particulière au sens des dispositions précitées. Dans ces conditions, le préfet des Hauts-de-Seine pouvait, sans méconnaître ces dispositions et sans entacher sa décision d'une erreur d'appréciation, refuser d'accorder un délai de départ volontaire à M. A... B..., dès lors qu'il existait un risque qu'il se soustraie à la décision portant obligation de quitter le territoire français dont il a fait l'objet. Par suite, le préfet des Hauts-de-Seine est fondé à soutenir que c'est à tort que le premier juge a annulé ses décisions portant refus de délai de départ volontaire et interdiction de retour sur le territoire français.

6. Toutefois, il y a lieu pour la Cour, saisie par l'effet dévolutif de l'appel, d'examiner les autres moyens soulevés par M. A... B... à l'encontre de ces décisions devant le tribunal administratif de Melun.

Sur les autres moyens invoqués à l'encontre de la décision attaquée :

En ce qui concerne la décision portant refus de départ volontaire :

7. Il résulte de ce qui a été exposé au point 5 que M. A... B... n'établit pas disposer de circonstance particulière justifiant que le risque de fuite ne puisse être regardé comme établi. Par suite, le moyen tiré de l'erreur d'appréciation qui entacherait la décision de refus de départ volontaire doit être écarté.

En ce qui concerne la décision portant interdiction de retour sur le territoire français :

8. En premier lieu, il résulte de ce qui précède que M. A... B... n'est pas fondé à soutenir que la décision portant interdiction de retour devrait être annulée par voie de conséquence de l'illégalité de la décision portant refus d'un délai de départ volontaire.

9. En second lieu, si le requérant fait valoir qu'il réside avec sa compagne et leur fille née en France le 26 octobre 2022, il ne ressort pas des pièces du dossier que la décision attaquée porte atteinte à son droit à sa vie privée et familiale et à l'intérêt supérieur de sa fille, alors que le requérant n'établit, ni même n'allègue, que sa compagne serait en situation régulière en France et que la cellule familiale ne pourrait, compte tenu du jeune âge de l'enfant, se reconstituer en Colombie, pays dont sa compagne a également la nationalité.

10. Il résulte de tout ce qui précède que le préfet des Hauts-de-Seine est fondé à soutenir que c'est à tort que, par l'article 1er du jugement attaqué, le magistrat désigné par la présidente du tribunal administratif de Melun a annulé ses décisions de refus de délai de départ volontaire et d'interdiction de retour sur le territoire français pour une durée d'un an prises à l'encontre de M. A... B....

DÉCIDE :

Article 1er : L'article 1er du jugement n° 2300889 du 5 décembre 2023 du tribunal administratif de Melun est annulé.

Article 2 : La requête à fin d'annulation de M. A... B... présentée devant le tribunal administratif de Melun est rejetée dans son intégralité.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié au ministre de l'intérieur et des Outre-mer et à M. C... A... B....

Copie en sera adressée au préfet des Hauts-de-Seine.

Délibéré après l'audience du 4 avril 2024, à laquelle siégeaient :

- M. Lapouzade, président de chambre,

- M. Diémert, président-assesseur,

- Mme Jasmin-Sverdlin, première conseillère.

Rendu public par mise à disposition au greffe, le 25 avril 2024.

La rapporteure,

I. JASMIN-SVERDLINLe président,

J. LAPOUZADE

La greffière,

C. POVSELa République mande et ordonne au ministre de l'intérieur et des Outre-mer en ce qui le concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

2

No 23PA05282


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de PARIS
Formation : 1ère chambre
Numéro d'arrêt : 23PA05282
Date de la décision : 25/04/2024
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : M. LAPOUZADE
Rapporteur ?: Mme Irène JASMIN-SVERDLIN
Rapporteur public ?: M. DORE

Origine de la décision
Date de l'import : 28/04/2024
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel;arret;2024-04-25;23pa05282 ?
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