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25/04/2024 | FRANCE | N°22PA03410

France | France, Cour administrative d'appel de PARIS, 7ème chambre, 25 avril 2024, 22PA03410


Vu la procédure suivante :



Procédure contentieuse antérieure :



La SARL Le Latin Saint-André a demandé au tribunal administratif de Paris de prononcer la décharge des rappels de taxe sur la valeur ajoutée réclamés au titre de la période du 1er janvier 2013 au 31 décembre 2015 et des compléments d'impôt sur les sociétés mis à sa charge au titre des exercices clos en 2013, 2014 et 2015, ainsi que les pénalités correspondantes.



Par un jugement no 1904303/1-3 du 8 juin 2022, le tribunal administratif de Paris a reje

té sa demande.

Procédure devant la Cour :



Par une requête, enregistrée le 22 juille...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

La SARL Le Latin Saint-André a demandé au tribunal administratif de Paris de prononcer la décharge des rappels de taxe sur la valeur ajoutée réclamés au titre de la période du 1er janvier 2013 au 31 décembre 2015 et des compléments d'impôt sur les sociétés mis à sa charge au titre des exercices clos en 2013, 2014 et 2015, ainsi que les pénalités correspondantes.

Par un jugement no 1904303/1-3 du 8 juin 2022, le tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête, enregistrée le 22 juillet 2022, la SARL Le Latin Saint-André, représentée par Me Oliel, demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement no 1904303/1-3 du 8 juin 2022 du tribunal administratif de Paris ;

2°) de prononcer la décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur les sociétés au titre des exercices clos en 2013, 2014 et 2015 et des rappels de taxe sur la valeur ajoutée au titre de la période du 1er janvier 2013 au 31 décembre 2015 et des pénalités correspondantes ;

3°) de condamner l'Etat aux entiers dépens ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- la proposition de rectification du 19 décembre 2016 est insuffisamment motivée ;

- le panel de produits retenu par le service n'est pas représentatif des recettes réalisées ;

- le service aurait dû, en lieu et place des cafés et bières, prendre en compte les ventes de boissons fraîches ;

- le vérificateur aurait pu reconstituer le chiffre d'affaires réalisé en appliquant la méthode dite " des solides " ;

- la quantité de café par tasse retenue par le service n'est pas justifiée dès lors qu'elle n'est pas fondée sur les données de l'exploitation et que le service a seulement tenu compte des usages de la profession ;

- elle justifie utiliser 9 grammes de café par tasse ;

- l'abattement appliqué sur les ventes de vins au titre des pertes, offerts et consommation du personnel est minoré.

Par un mémoire en défense, enregistré le 7 novembre 2022, le ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique conclut au rejet de la requête.

Il soutient que les moyens de la requête ne sont pas fondés.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme Zeudmi Sahraoui,

- et les conclusions de Mme Jurin, rapporteure publique.

Considérant ce qui suit :

1. La SARL Le Latin Saint-André, qui exploite un restaurant de type brasserie sous l'enseigne le " Bistrot Saint-André ", a fait l'objet d'une vérification de comptabilité à l'issue de laquelle l'administration lui a notifié des cotisations supplémentaires d'impôt sur les sociétés au titre des exercice clos en 2013, 2014 et 2015, des rappels de taxe sur la valeur ajoutée au titre de la période du 1er janvier 2013 au 31 décembre 2015, assortis des intérêts de retard et de la majoration pour manquement délibéré. La SARL Le Latin Saint-André fait appel du jugement par lequel le tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande tendant à la décharge de ces impositions et pénalités.

Sur la régularité de la procédure d'imposition :

2. Aux termes de l'article L. 57 du livre des procédures fiscales : " L'administration adresse au contribuable une proposition de rectification qui doit être motivée de manière à lui permettre de formuler ses observations ou de faire connaître son acceptation. (...) ". Il résulte de ces dispositions que, pour être régulière, une proposition de rectification doit comporter, outre la désignation de l'impôt concerné, de l'année d'imposition et de la base des redressements, ceux des motifs sur lesquels l'administration entend se fonder pour justifier les redressements envisagés qui sont nécessaires pour permettre au contribuable de formuler utilement ses observations.

3. La proposition de rectification du 19 décembre 2016 précise les impositions dont la rectification est envisagée en mentionnant les années auxquelles elles se rapportent, la base des impositions et le fondement des redressements, ainsi que les motifs pour lesquels l'administration a considéré que la comptabilité de la société devait être rejetée et qu'après reconstitution du chiffre d'affaires des recettes non déclarées devaient être soumises à l'impôt sur les sociétés et à la taxe sur la valeur ajoutée. Contrairement à ce que soutient la société requérante, la proposition de rectification n'avait pas à mentionner expressément l'ensemble des observations qu'elle a formulées au cours du contrôle. Par ailleurs, en indiquant que le dosage du café, retenu pour l'évaluation des recettes tirées des ventes de cafés, a été établi conformément aux usages de la profession, l'administration a indiqué avec une précision suffisante les motifs pour lesquels elle a retenu un dosage de 7 grammes de café par tasse. Dès lors, le moyen tiré de ce que la proposition de rectification serait insuffisamment motivée doit être écarté.

Sur le bien-fondé des impositions :

En ce qui concerne la charge de la preuve :

4. Aux termes de l'article L. 192 du livre des procédures fiscales : " Lorsque l'une des commissions ou le comité mentionnés à l'article L. 59 ou le comité prévu à l'article L. 64 est saisi d'un litige ou d'une rectification, l'administration supporte la charge de la preuve en cas de réclamation, quel que soit l'avis rendu par la commission ou le comité. / Toutefois, la charge de la preuve incombe au contribuable lorsque la comptabilité comporte de graves irrégularités et que l'imposition a été établie conformément à l'avis de la commission ou du comité. La charge de la preuve des graves irrégularités invoquées par l'administration incombe, en tout état de cause, à cette dernière lorsque le litige ou la rectification est soumis au juge. (...) ".

5. La SARL Le Latin Saint-André ne conteste pas les graves irrégularités affectant sa comptabilité ayant conduit le service à écarter celle-ci et à procéder à une reconstitution de recettes. Dès lors que les rectifications en cause ont été établies conformément à l'avis rendu par la commission départementale des impôts le 20 novembre 2017, il lui appartient d'apporter la preuve de l'exagération des impositions en litige.

En ce qui concerne la reconstitution de recettes :

6. Il résulte de l'instruction que le vérificateur a mis en œuvre la méthode basée sur le rapport existant entre le chiffre d'affaires global déclaré et les ventes de cafés, bières et vins. Après avoir déterminé le coefficient résultant de ce rapport, et reconstitué, à partir des factures d'achats, les recettes tirées des ventes de cafés, bières et vins, au cours de l'année 2015, il a appliqué le coefficient obtenu à ces recettes afin de déterminer le chiffre d'affaires global reconstitué.

7. En premier lieu, la société requérante soutient que le panel de produits retenu par le vérificateur n'est pas représentatif de ses recettes totales et qu'il aurait dû tenir compte des ventes de boissons fraîches en lieu et place de celles des cafés et bières et que le vérificateur aurait pu faire application de la méthode dites des solides. Il y a lieu d'écarter ces moyens par adoption des motifs retenus par les premiers juges au point 3 du jugement attaqué.

8. En deuxième lieu, il résulte de l'instruction que l'administration a, pour reconstituer les ventes de cafés, considéré que la préparation d'une tasse de café nécessitait 7 grammes de café conformément aux usages de la profession. La SARL Le Latin Saint-André soutient qu'elle utilise 8 à 9 grammes de café par tasse et que sa machine à café est réglée pour délivrer une telle quantité par tasse. Toutefois, le constat d'huissier produit par la société requérante établi le 28 novembre 2016, bien après les années d'imposition en litige et alors que les opérations de contrôle avaient débuté, n'est pas de nature à établir qu'entre 2013 et 2015, elle utilisait une telle quantité de café. Le courrier établi par la société Cafés Richard, qui se borne à indiquer qu'il est admis une amplitude allant de 7 à 8/9 grammes selon les cas et le rendu gustatif souhaité, et confirme par ailleurs qu'il est recommandé d'utiliser un dosage de 7 grammes de café par tasse, n'est pas davantage de nature à établir que le dosage retenu par le vérificateur était sous-évalué. Contrairement à ce que soutient la société, celui-ci a pu, en l'absence d'élément pertinent, retenir les données propres aux usages de la profession.

9. Enfin, il résulte de l'instruction que le service a appliqué aux ventes de vins un abattement de 10 % correspondant aux pertes de vin vendu au verre et en pichet. La société requérante soutient que cet abattement est sous-évalué dès lors que l'administration aurait dû tenir compte de la consommation du personnel qui est de 818 cl par an, soit deux verres de vin par chacun des 8 salariés de la société, 365 jours par an. Toutefois, d'une part, il ressort des termes de la proposition de rectification qu'au cours des opérations de contrôle, le gérant n'a pas été en mesure d'évaluer la consommation du personnel. D'autre part, la société n'établit pas qu'au cours de la période en litige, ses huit salariés consommaient quotidiennement deux verres de vins, y compris les jours où ils ne travaillent pas. Elle n'établit pas davantage que les pertes liées aux restes de bouteille non consommés seraient supérieures à celles retenues par le service. Par ailleurs, en se bornant à produire la carte des plats proposés et des documents établis par elle, indiquant la quantité de vins utilisée pour la confection des plats, et alors que ministre soutient en défense qu'il résulte des factures d'achats que la société servait régulièrement des plats ou des sauces surgelés ou préparés, la société n'établit pas que les pertes liées au vin de cuisson auraient dû donner lieu à l'application d'un abattement supplémentaire.

10. Il résulte de tout ce qui précède que la SARL Le Latin Saint-André n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande tendant à la décharge des rappels de taxe sur la valeur ajoutée et des cotisations supplémentaires d'impôt sur les sociétés, assortis des intérêts de retard et des majorations, mis à sa charge. Ses conclusions présentées au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative doivent, par voie de conséquence, être rejetées.

Sur les dépens :

11. Dans la présente instance, les dépens sont inexistants. Les conclusions présentées à ce titre par la société Le latin Saint-André ne peuvent dès lors qu'être rejetées.

DÉCIDE :

Article 1er : La requête présentée par la SARL Le Latin Saint-André est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à la SARL Le Latin Saint-André et au ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique.

Copie sera adressée à la direction spécialisée de contrôle fiscal Île-de-France

Délibéré après l'audience du 9 avril 2024, à laquelle siégeaient :

- M. Auvray, président de chambre,

- Mme Hamon, présidente-assesseure ;

- Mme Zeudmi Sahraoui, première conseillère.

Rendu public par mise à disposition au greffe le 25 avril 2024.

La rapporteure,

N. ZEUDMI SAHRAOUILe président,

B. AUVRAY

La greffière,

L. CHANA

La République mande et ordonne au ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique en ce qui le concerne, ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

2

N° 22PA03410


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de PARIS
Formation : 7ème chambre
Numéro d'arrêt : 22PA03410
Date de la décision : 25/04/2024
Type de recours : Plein contentieux

Composition du Tribunal
Président : M. AUVRAY
Rapporteur ?: Mme Nadia ZEUDMI-SAHRAOUI
Rapporteur public ?: Mme JURIN
Avocat(s) : WAN AVOCATS

Origine de la décision
Date de l'import : 28/04/2024
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel;arret;2024-04-25;22pa03410 ?
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