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23/04/2024 | FRANCE | N°23PA03315

France | France, Cour administrative d'appel de PARIS, 6ème chambre, 23 avril 2024, 23PA03315


Vu la procédure suivante :



Procédure contentieuse antérieure :



M. A... B... a demandé au tribunal administratif de Montreuil d'annuler l'arrêté du 10 octobre 2022 par lequel le préfet de la Seine-Saint-Denis l'a obligé à quitter le territoire français sans délai, a fixé le pays à destination duquel il pourra être renvoyé et lui a fait interdiction de circuler sur le territoire français pendant une durée de deux ans.



Par une ordonnance n° 2215249 du 27 juin 2023, la présidente de la 2ème chambre du tribunal ad

ministratif de Montreuil a rejeté sa demande.



Procédure devant la Cour :



Par une re...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. A... B... a demandé au tribunal administratif de Montreuil d'annuler l'arrêté du 10 octobre 2022 par lequel le préfet de la Seine-Saint-Denis l'a obligé à quitter le territoire français sans délai, a fixé le pays à destination duquel il pourra être renvoyé et lui a fait interdiction de circuler sur le territoire français pendant une durée de deux ans.

Par une ordonnance n° 2215249 du 27 juin 2023, la présidente de la 2ème chambre du tribunal administratif de Montreuil a rejeté sa demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête enregistrée le 25 juillet 2023, M. B..., représenté par Me Ivanovic, demande à la Cour :

1°) d'annuler l'ordonnance n° 2215249 du 27 juin 2023 de la présidente de la 2ème chambre du tribunal administratif de Montreuil ;

2°) d'annuler, pour excès de pouvoir, cet arrêté ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat le versement de la somme de 1 500 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Il soutient que :

- l'arrêté du 10 octobre 2022 du préfet de la Seine-Saint-Denis est insuffisamment motivé ;

- il méconnait les dispositions de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile devenu, dans sa version applicable au litige, l'article L. 435-1 du même code ;

- il méconnait les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- l'arrêté du 10 octobre 2022 en tant qu'il porte refus de délai de départ volontaire est entaché d'une erreur manifeste d'appréciation des faits.

La requête a été communiquée au préfet de la Seine-Saint-Denis qui n'a pas produit de mémoire en défense.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

La présidente de la formation de jugement a dispensé la rapporteure publique, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

Ont été entendu au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme d'Argenlieu,

- les observations de Me Ivanovic, avocat de M. B....

Considérant ce qui suit :

1. M. B..., ressortissant tchèque né le 31 mai 1978 à Kragujevaç (Serbie), est entré en France en 2003, selon ses déclarations. Par un arrêté du 10 octobre 2022, le préfet de la Seine-Saint-Denis l'a obligé à quitter le territoire sans délai, a fixé le pays à destination duquel il pourra être reconduit et lui a interdit de circuler sur le territoire français pendant une durée de deux ans. Par une ordonnance du 27 juin 2023, dont M. B... fait appel, la présidente de la 2ème chambre du tribunal administratif de Montreuil a rejeté sa demande sur le fondement des dispositions de l'article R. 222-1 7° du code de justice administrative.

Sur la légalité de la décision portant obligation de quitter le territoire français :

2. En premier lieu, M. B... reprend en appel son moyen de première instance tiré d'une insuffisante motivation de la décision contestée. Toutefois, le requérant ne développe au soutien de ce moyen aucun argument de droit ou de fait complémentaire et pertinent de nature à remettre en cause l'analyse et la motivation retenues par le tribunal administratif quant à la légalité de la décision portant obligation de quitter le territoire français. Il y a donc lieu de l'écarter par adoption des motifs retenus par les premiers juges.

3. En deuxième lieu, le moyen tiré de la méconnaissance des dispositions de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour relatives à l'admission exceptionnelle au séjour, re-codifié depuis le 26 août 2021, à l'article L. 435-1 du même code, est inopérant à l'encontre d'une décision portant obligation de quitter le territoire français. Le moyen doit donc être écarté.

4. En troisième lieu, aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " 1. Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale (...) 2. Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale, ou à la protection des droits et libertés d'autrui ".

5. M. B... soutient qu'il vit de manière habituelle en France depuis plus de cinq ans et qu'il ne représente pas une charge pour le système d'assistance sociale. Toutefois, ces seules allégations, à les supposer établies, ne sauraient suffire à caractériser l'existence d'un vie privée et familiale en France. M. B... n'est par suite pas fondé à soutenir que le préfet de la Seine-Saint-Denis en lui faisant obligation de quitter le territoire français a méconnu les stipulations précitées de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales. Le moyen doit donc être écarté.

Sur la légalité de la décision portant refus de délai de départ volontaire :

6. Aux termes de l'article L. 251-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " L'autorité administrative compétente peut, par décision motivée, obliger les étrangers dont la situation est régie par le présent livre, à quitter le territoire français lorsqu'elle constate les situations suivantes : (...) 2° Leur comportement personnel constitue, du point de vue de l'ordre public ou de la sécurité publique, une menace réelle, actuelle et suffisamment grave à l'encontre d'un intérêt fondamental de la société ". L'article L. 251-3 du même code prévoit : " Les étrangers dont la situation est régie par le présent livre disposent, pour satisfaire à l'obligation qui leur a été faite de quitter le territoire français, d'un délai de départ volontaire d'un mois à compter de la notification de la décision. L'autorité administrative ne peut réduire le délai prévu au premier alinéa qu'en cas d'urgence et ne peut l'allonger qu'à titre exceptionnel ".

7. Pour refuser l'octroi d'un délai de départ volontaire, le préfet de la Seine-Saint-Denis s'est fondé sur le fait que M. B... s'est rendu coupable de faits de conduite d'un véhicule en état d'ivresse manifeste, de délit de fuite après un accident par conducteur de véhicule terrestre et de conduite sans permis, que son comportement constitue ainsi une menace réelle, actuelle et suffisamment grave à l'encontre d'un intérêt fondamental de la société et qu'il y a dès lors une urgence à l'éloigner du territoire français.

8. Cependant, ces faits, dont M. B... ne conteste pas être l'auteur, ne sauraient caractériser l'existence d'une menace à un intérêt fondamental de la société au sens des dispositions citées au point 6 de l'article L. 251-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, justifiant qu'aucun délai n'ait été accordé à l'intéressé pour quitter la France. Du reste, l'appelant indique, sans être contredit par le préfet de la Seine-Saint-Denis qui n'a pas produit d'écritures en défense, qu'il a été condamné pour ces faits par une ordonnance pénale, soit une procédure simplifiée sans audience, à seulement cent-vingt jours-amende d'un montant unitaire de dix euros. Dans ces conditions, l'appelant est fondé à soutenir que le préfet de la Seine-Saint-Denis en refusant de lui accorder un délai de départ volontaire a inexactement apprécié les faits de l'espèce.

9. Il résulte de ce qui précède que M. B... est seulement fondé à soutenir que c'est à tort que par l'ordonnance attaquée, la présidente de la 2ème chambre du tribunal administratif de Montreuil a rejeté sa demande tendant à l'annulation de la décision refusant de lui accorder un délai de départ volontaire. Par voie de conséquence, l'ordonnance sera annulée dans cette mesure, le surplus de la requête sera rejeté.

Sur les frais liés à l'instance :

10. Il n'y a pas lieu dans les circonstances de l'espèce de mettre à la charge de l'Etat le versement de la somme demandée par M. B... au titre des frais exposés et non compris dans les dépens.

DÉCIDE :

Article 1er : L'ordonnance n° 2215249 du 27 juin 2023 de la présidente de la 2ème chambre du tribunal administratif de Montreuil en tant qu'elle a rejeté les conclusions de M. B... dirigées contre la décision du préfet de la Seine-Saint-Denis portant refus de délai de départ volontaire et cette décision sont annulées.

Article 2 : Le surplus des conclusions de la requête, y compris les conclusions présentées au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, est rejeté.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié au ministre de l'intérieur et des outre-mer et à M. A... B....

Copie en sera adressée au préfet de la Seine-Saint-Denis.

Délibéré après l'audience du 2 avril 2024, à laquelle siégeaient :

- Mme Bonifacj, présidente,

- M. Niollet, président-assesseur,

- Mme d'Argenlieu, première conseillère,

Rendu public par mise à disposition au greffe le 23 avril 2024.

La rapporteure,

L. d'ARGENLIEU

La présidente,

J. BONIFACJ La greffière,

E. TORDO

La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur et des outre-mer en ce qui le concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

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N° 23PA03315


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de PARIS
Formation : 6ème chambre
Numéro d'arrêt : 23PA03315
Date de la décision : 23/04/2024
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : Mme BONIFACJ
Rapporteur ?: Mme Lorraine D'ARGENLIEU
Rapporteur public ?: Mme NAUDIN
Avocat(s) : IVANOVIC

Origine de la décision
Date de l'import : 28/04/2024
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel;arret;2024-04-23;23pa03315 ?
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