Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
M. A... C... B... a demandé au Tribunal administratif de Paris d'annuler l'arrêté du 11 mai 2023 par lequel le préfet de police a refusé de lui délivrer un titre de séjour, l'a obligé à quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays de renvoi.
Par un jugement n° 2313553/8 du 31 octobre 2023, le Tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande.
Procédure devant la Cour :
Par une requête, enregistrée le 27 novembre 2023, M. B..., représenté par Me Celeste, demande à la Cour :
1°) d'annuler ce jugement du 31 octobre 2023 ;
2°) d'annuler l'arrêté du préfet de police du 11 mai 2023 ;
3°) d'enjoindre au préfet de police de lui délivrer un titre de séjour portant la mention " vie privée et familiale " ou " salarié " ou, à titre subsidiaire, de réexaminer sa situation ;
4°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 1 500 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Il soutient que :
S'agissant de la décision de refus de titre de séjour :
- elle n'est pas suffisamment motivée ;
- elle est entachée d'un défaut d'examen de sa situation ;
- elle est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation de sa situation ;
- elle méconnaît les dispositions de l'article L. 423-23 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- elle méconnaît les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- elle méconnaît les stipulations de l'article 3-1 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant ;
S'agissant de la décision portant obligation de quitter le territoire français :
- elle est, par voie d'exception, illégale du fait de l'illégalité de la décision de refus de titre de séjour ;
- elle méconnaît les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- elle méconnaît les stipulations de l'article 3-1 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant.
Par un mémoire en défense, enregistré le 26 janvier 2024, le préfet de police conclut au rejet de la requête.
Il soutient que les moyens soulevés par le requérant ne sont pas fondés.
Par une ordonnance du 9 janvier 2024, la clôture de l'instruction a été fixée au 6 février 2024 à 12 heures.
Un mémoire, présenté pour M. B..., a été enregistré le 20 mars 2024, soit postérieurement à la clôture de l'instruction, et n'a pas été communiqué.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- la convention relative aux droits de l'enfant, signée à New-York le 26 janvier 1990 ;
- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- le code des relations entre le public et l'administration ;
- le code de justice administrative.
Le président de la formation de jugement a dispensé la rapporteure publique, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Le rapport de M. Desvigne-Repusseau a été entendu au cours de l'audience publique.
Considérant ce qui suit :
1. M. B..., ressortissant comorien, né en 1984, a sollicité le 22 juin 2022 la délivrance d'un titre de séjour sur le fondement des dispositions des articles L. 423-23 et L. 435-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. Par un arrêté du 11 mai 2023, le préfet de police a refusé de lui délivrer un titre de séjour, l'a obligé à quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays de renvoi. M. B... fait appel du jugement du 31 octobre 2023 par lequel le Tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande tendant à l'annulation de cet arrêté.
Sur la décision de refus de titre de séjour :
2. En premier lieu, aux termes de l'article L. 211-2 du code des relations entre le public et l'administration : " Les personnes physiques ou morales ont le droit d'être informées sans délai des motifs des décisions administratives individuelles défavorables qui les concernent / A cet effet, doivent être motivées les décisions qui : / 1° Restreignent l'exercice des libertés publiques ou, de manière générale, constituent une mesure de police / (...) ". Aux termes de l'article L. 211-5 de ce code : " La motivation exigée par le présent chapitre doit être écrite et comporter l'énoncé des considérations de droit et de fait qui constituent le fondement de la décision ".
3. L'arrêté attaqué, qui vise notamment les dispositions de l'article L. 423-23 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ainsi que, d'ailleurs, les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, mentionne de manière précise et circonstanciée les conditions d'entrée et du séjour en France de M. B... ainsi que sa situation personnelle et familiale. L'autorité administrative n'étant pas tenue de préciser tous les éléments de la situation d'un ressortissant étranger, la décision attaquée est motivée au sens des dispositions précitées du code des relations entre le public et l'administration. Par suite, le moyen tiré d'une insuffisance de motivation de cette décision doit être écarté.
4. En deuxième lieu, il résulte des motifs de la décision attaquée comme des pièces du dossier que le préfet de police n'a pas entaché l'arrêté attaqué d'un défaut d'examen de la situation de M. B.... Ce moyen doit, dès lors, être écarté.
5. En troisième lieu, aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " 1. Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance / 2. Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale, ou à la protection des droits et libertés d'autrui ". Aux termes de l'article 3 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant du 26 janvier 1990 : " 1. Dans toutes les décisions qui concernent les enfants, qu'elles soient le fait d'institutions publiques ou privées de protection sociale, des tribunaux, des autorités administratives ou des organes législatifs, l'intérêt supérieur de l'enfant doit être une considération primordiale / (...) ". Il résulte de ces dernières stipulations, qui peuvent être utilement invoquées à l'appui d'un recours pour excès de pouvoir, que, dans l'exercice de son pouvoir d'appréciation, l'autorité administrative doit accorder une attention primordiale à l'intérêt supérieur des enfants dans toutes les décisions les concernant. Enfin, aux termes de l'article L. 423-23 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " L'étranger qui n'entre pas dans les catégories prévues aux articles L. 423-1, L. 423-7, L. 423-14, L. 423-15, L. 423-21 et L. 423-22 ou dans celles qui ouvrent droit au regroupement familial, et qui dispose de liens personnels et familiaux en France tels que le refus d'autoriser son séjour porterait à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée au regard des motifs du refus, se voit délivrer une carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " d'une durée d'un an, sans que soit opposable la condition prévue à l'article L. 412-1 / Les liens mentionnés au premier alinéa sont appréciés notamment au regard de leur intensité, de leur ancienneté et de leur stabilité, des conditions d'existence de l'étranger, de son insertion dans la société française ainsi que de la nature de ses liens avec sa famille restée dans son pays d'origine / L'insertion de l'étranger dans la société française est évaluée en tenant compte notamment de sa connaissance des valeurs de la République ".
6. Il ressort des pièces du dossier que M. B... est le père de deux enfants, issus de son union avec une compatriote dont il est séparé, que ses enfants, nés en 2013 et 2018, sont scolarisés en France depuis le 1er septembre 2020, qu'ils résident au domicile de leur mère et que, par un jugement du 30 septembre 2021, le juge aux affaires familiales du Tribunal judiciaire de Bobigny lui a accordé le droit de visiter et d'héberger ses deux enfants et a fixé une contribution mensuelle globale de 100 euros pour leur entretien et leur éducation. Si M. B... produit trois attestations émanant de personnes se présentant comme des membres de sa famille, selon lesquelles il s'occupe régulièrement de ses enfants, ces attestations, qui ont été établies au demeurant postérieurement à l'arrêté attaqué, sont insuffisamment circonstanciées pour en justifier, et pour établir qu'il a effectivement exercé son droit d'hébergement, alors qu'il ressort des pièces du dossier que l'intéressé loue un logement personnel depuis le 1er mars 2020. Par ailleurs, si la mère de ses enfants indique, par deux attestations en date des 19 décembre 2021 et 9 octobre 2023, que le requérant lui a versé une pension alimentaire mensuelle de 100 euros entre octobre 2021 et décembre 2021 puis entre janvier 2023 et mai 2023, la réalité du versement de ces sommes n'est pas établie par les pièces fournies par l'intéressé, alors qu'il ressort des pièces du dossier que celui-ci perçoit un salaire mensuel moyen d'environ 1 300 euros depuis le 1er janvier 2019. Ainsi, dans les circonstances de l'espèce, M. B... ne peut être regardé comme ayant contribué effectivement ou, à tout le moins, régulièrement à l'entretien et à l'éducation de ses deux enfants à la date de l'arrêté attaqué. Enfin, il ne ressort pas des pièces du dossier que le requérant, qui est célibataire en France, serait dépourvu de toutes attaches familiales dans son pays d'origine où il a vécu jusqu'à l'âge d'au moins 31 ans. Dans ces conditions, et alors même qu'il exerce, de manière continue, une activité salariée d'employé de restaurant depuis le 1er janvier 2019, la décision attaquée n'a pas porté au droit du requérant au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée par rapport aux buts en vue desquels elle a été prise, ni n'a porté atteinte à l'intérêt supérieur de ses enfants. Par suite, les moyens tirés de la méconnaissance des stipulations de l'article 3-1 de la convention internationale des droits de l'enfant du 26 janvier 1990 et de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, ainsi que des dispositions de l'article L. 423-23 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, doivent être écartés.
7. En dernier lieu, le moyen tiré d'une erreur manifeste d'appréciation de la situation de M. B... dont serait entachée la décision attaquée, doit être écarté pour les mêmes motifs que ceux retenus au point précédent.
Sur la décision portant obligation de quitter le territoire français :
8. Les moyens soulevés par M. B... à l'encontre de l'obligation de quitter le territoire français attaquée doivent être écartés pour les mêmes motifs que ceux exposés aux points 2 à 7.
9. Il résulte de tout ce qui précède que M. B... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande. Par voie de conséquence, ses conclusions à fin d'injonction ainsi que celles tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative doivent également être rejetées.
D E C I D E :
Article 1er : La requête de M. B... est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. A... C... B... et au ministre de l'intérieur et des outre-mer.
Copie en sera adressée au préfet de police.
Délibéré après l'audience du 26 mars 2024, à laquelle siégeaient :
- M. Auvray, président de chambre,
- Mme Hamon, présidente-assesseure,
- M. Desvigne-Repusseau, premier conseiller,
Rendu public par mise à disposition au greffe le 11 avril 2024.
Le rapporteur,
M. DESVIGNE-REPUSSEAULe président,
B. AUVRAY
La greffière,
C. BUOT
La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur et des outre-mer en ce qui le concerne, ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
2
N° 23PA04863