Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
M. B... A... a demandé au tribunal administratif de Montreuil d'annuler l'arrêté du 22 juin 2022 par lequel le préfet de la Seine-Saint-Denis a refusé de renouveler son titre de séjour, lui a fait obligation de quitter le territoire français sans lui accorder de délai de départ volontaire, a fixé le pays de destination et a prononcé à son encontre une interdiction de retour d'une durée de deux ans.
Par un jugement n° 2212030 du 28 juin 2023, le tribunal administratif de Montreuil a rejeté sa demande.
Procédure devant la Cour :
Par une requête enregistrée le 27 juillet 2023, M. A..., représenté par Me Chauvin-Hameau-Madeira, demande à la Cour :
1°) d'annuler le jugement n° 2212030 du 28 juin 2023 du tribunal administratif de Montreuil ;
2°) d'annuler l'arrêté du préfet de la Seine-Saint-Denis du 22 juin 2022 ;
3°) d'enjoindre au préfet territorialement compétent de lui délivrer un titre de séjour, dans un délai de sept jours à compter de la notification de la décision à intervenir et sous astreinte de 150 euros par jour de retard ou, à titre subsidiaire, de réexaminer sa situation, dans le délai d'un mois à compter de la décision à intervenir et sous la même astreinte, en lui délivrant, en tout état de cause, sans délai et sous la même astreinte, une autorisation provisoire de séjour avec autorisation de travail ;
4°) de mettre à la charge de l'Etat le versement de la somme de 2 000 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Il soutient que :
- le jugement litigieux est insuffisamment motivé ;
- la décision de refus de séjour est entachée d'un défaut de motivation et d'examen sérieux de sa situation personnelle ;
- cette décision est entachée d'erreur de droit, dès lors que le préfet a méconnu l'étendue de sa compétence ;
- elle méconnaît l'article L. 421-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et d'erreur manifeste d'appréciation de ses conséquences sur sa situation personnelle ;
- la décision l'obligeant à quitter le territoire français est illégale en raison de la décision de refus de séjour qui en constitue le fondement ;
- elle est entachée d'erreur manifeste d'appréciation de ses conséquences sur sa situation personnelle ;
- la décision refusant de lui accorder un délai de départ volontaire est insuffisamment motivée et a été prise en violation de l'article L. 612-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- la décision fixant le pays de destination est illégale en raison de la décision l'obligeant à quitter le territoire français qui en constitue le fondement ;
- l'interdiction de retour sur le territoire français est insuffisamment motivée ;
- cette décision est illégale en raison de la décision l'obligeant à quitter le territoire français qui en constitue le fondement ;
- elle a été prise en violation de l'article L. 612-6 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et est entachée d'erreur d'appréciation.
La requête a été communiquée au préfet de la Seine-Saint-Denis qui n'a pas présenté de mémoire en défense.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- le code de justice administrative.
Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Le rapport de Mme Jasmin-Sverdlin a été entendu au cours de l'audience publique.
Considérant ce qui suit :
1. M. A..., ressortissant camerounais né le 10 juin 1986, est entré en France le 19 octobre 2011 selon ses déclarations et a bénéficié de plusieurs titres de séjour pour raisons de santé et en qualité de salarié entre 2013 et 2022, dont le dernier était valable du 15 janvier 2021 au 14 janvier 2022. Par un arrêté du 22 juin 2022, le préfet de la Seine-Saint-Denis a refusé de renouveler son titre de séjour, lui a fait obligation de quitter le territoire français sans délai, a fixé le pays à destination duquel il pourra être éloigné et a prononcé à son encontre une interdiction de retour d'une durée de deux ans. M. A... relève appel du jugement du 28 juin 2023 par lequel le tribunal administratif de Montreuil a rejeté sa demande tendant à l'annulation de cet arrêté.
Sur la régularité du jugement :
2. Il ressort des termes du jugement attaqué que le tribunal administratif a écarté, par une motivation suffisante, le moyen soulevé devant lui par M. A..., tiré de la méconnaissance de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, en estimant que le requérant résidait en France depuis près de dix ans, qu'il avait occupé plusieurs emplois salariés depuis 2013 et qu'il avait commis plusieurs infractions pénales, dont certaines ont entraîné des condamnations. Par suite, le moyen tiré de l'insuffisante motivation du jugement litigieux ne peut qu'être écarté.
Sur le bien-fondé du jugement :
En ce qui concerne la décision de refus de renouvellement de titre de séjour :
3. En premier lieu, M. A... reprend en appel, avec la même argumentation qu'en première instance, les moyens tirés de l'insuffisante motivation de la décision contestée et du défaut d'examen sérieux de sa situation. Il y a lieu d'écarter ce moyen par adoption des motifs retenus à bon droit par les premiers juges au point 5 du jugement attaqué.
4. En deuxième lieu, si la décision contestée ne mentionne pas l'expérience professionnelle du requérant, elle précise, en revanche, que l'intéressé ne justifie pas de sa résidence habituelle en France depuis plus de dix ans et qu'il conserve des attaches privées et familiales dans son pays d'origine, où réside son enfant mineur. Par suite, le requérant n'est pas fondé à soutenir que le préfet de la Seine-Saint-Denis se serait cru en situation de compétence liée au regard des antécédents judiciaires et de la condamnation dont a été l'objet M. A....
5. En troisième lieu, aux termes du premier alinéa de l'article L. 421-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " L'étranger qui exerce une activité salariée sous contrat de travail à durée indéterminée se voit délivrer une carte de séjour temporaire portant la mention " salarié " d'une durée maximale d'un an. ". Aux termes de l'article L. 432-1 du même code : " La délivrance d'une carte de séjour temporaire ou pluriannuelle ou d'une carte de résident peut, par une décision motivée, être refusée à tout étranger dont la présence en France constitue une menace pour l'ordre public. ".
6. Il ressort des termes mêmes de l'arrêté litigieux que la décision de refus de renouvellement de titre de séjour est fondée sur la menace que représente la présence en France de M. A... au regard de l'ordre public et non sur les dispositions précitées de l'article L. 421-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. Par suite, le requérant ne peut utilement soulever le moyen tiré de la méconnaissance de ces dispositions.
7. En dernier lieu, M. A... soutient qu'il justifie de sa résidence en France depuis octobre 2012, que, depuis 2013, il a bénéficié de titres de séjour régulièrement renouvelés et a occupé plusieurs emplois déclarés et qu'il ne constitue aucunement une menace pour l'ordre public, son titre de séjour ayant été renouvelé en 2015 et en 2020, postérieurement aux faits reprochés. Il ressort toutefois des pièces du dossier que le requérant ne conteste pas la matérialité des faits commis, notamment en ce qui concerne les plus récents, de vol à l'étalage, le 5 juillet 2019 et de récidive de conduite d'un véhicule sous l'empire d'un état alcoolique le 26 septembre 2020, nonobstant la circonstance que seule cette dernière infraction ait donné lieu à une condamnation. Par ailleurs, le requérant est célibataire et son enfant mineur réside au Cameroun. Ainsi, M. A... n'est pas fondé à soutenir que cette décision serait entachée d'une erreur manifeste d'appréciation de ses conséquences sur sa situation personnelle.
En ce qui concerne la décision d'obligation de quitter le territoire français :
8. En premier lieu, la décision portant refus de titre de séjour n'étant entachée d'aucune illégalité, le moyen tiré de l'exception d'illégalité de cette décision, invoqué à l'appui des conclusions dirigées contre la décision obligeant M. A... à quitter le territoire français doit, en conséquence, être écarté.
9. En second lieu, pour les motifs exposés au point 7 du présent arrêt, le moyen tiré de l'erreur manifeste d'appréciation des conséquences de la décision attaquée sur la situation de M. A... sera écarté.
En ce qui concerne la décision de refus de délai de départ volontaire :
10. En premier lieu, la décision attaquée mentionne l'article L. 432-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et les infractions commises par le requérant et la condamnation dont il a fait l'objet. Elle comporte ainsi les considérations de droit et de fait qui en constituent le fondement.
11. En second lieu, aux termes de l'article L. 612-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Par dérogation à l'article L. 612-1, l'autorité administrative peut refuser d'accorder un délai de départ volontaire dans les cas suivants : 1° Le comportement de l'étranger constitue une menace pour l'ordre public ; (...). ".
12. Dès lors que le requérant a commis des infractions dont il ne conteste pas la matérialité, bien que seule l'une ait fait l'objet d'une condamnation, le préfet de la Seine-Saint-Denis pouvait légalement lui refuser un délai de départ volontaire pour ce seul motif. Par suite, il n'a pas méconnu les dispositions précitées en refusant d'accorder à M. A... un délai de départ volontaire.
En ce qui concerne la décision fixant le pays de destination :
13. La décision portant obligation de quitter le territoire français n'étant entachée d'aucune illégalité, le moyen tiré de l'exception d'illégalité de cette décision, invoqué à l'appui des conclusions dirigées contre la décision fixant le pays de destination, doit, en conséquence, être écarté.
En ce qui concerne la décision d'interdiction de retour sur le territoire français :
14. Aux termes de l'article L. 612-6 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Lorsqu'aucun délai de départ volontaire n'a été accordé à l'étranger, l'autorité administrative assortit la décision portant obligation de quitter le territoire français d'une interdiction de retour sur le territoire français. Des circonstances humanitaires peuvent toutefois justifier que l'autorité administrative n'édicte pas d'interdiction de retour. (...) ". Aux termes de l'article L. 612-10 du même code : " Pour fixer la durée des interdictions de retour mentionnées aux articles L. 612-6 et L. 612-7, l'autorité administrative tient compte de la durée de présence de l'étranger sur le territoire français, de la nature et de l'ancienneté de ses liens avec la France, de la circonstance qu'il a déjà fait l'objet ou non d'une mesure d'éloignement et de la menace pour l'ordre public que représente sa présence sur le territoire français. (...) ".
15. En premier lieu, la décision attaquée mentionne l'article L. 612-6 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et indique, notamment, que le requérant a été titulaire de plusieurs titres de séjour entre 2013 et 2022, qu'il n'établit pas de manière suffisamment probante sa résidence habituelle en France pour les années antérieures à 2013 et que son comportement est constitutif d'une menace pour l'ordre public. Elle comporte ainsi les considérations de droit et de fait qui en constituent le fondement.
16. En deuxième lieu, la décision portant obligation de quitter le territoire français n'étant entachée d'aucune illégalité, le moyen tiré de l'exception d'illégalité de cette décision, invoqué à l'appui des conclusions dirigées contre la décision d'interdiction de retour sur le territoire français, doit, en conséquence, être écarté.
17. En dernier lieu, d'une part, le préfet de la Seine-Saint-Denis a pu légalement prononcer une interdiction de retour à l'encontre de M. A... dès lors qu'aucun délai de départ ne lui a été accordé pour se conformer à l'obligation de quitter le territoire national prononcée à son encontre. D'autre part, comme exposé au point 7, le requérant ne conteste pas la matérialité des faits commis, notamment en ce qui concerne les infractions les plus récentes et est célibataire, son enfant mineur résidant au Cameroun. Dès lors, le préfet de la Seine-Saint-Denis a pu, sans méconnaître les dispositions précitées ni commettre d'erreur d'appréciation, décider de prononcer à l'encontre de l'intéressé une interdiction de retour d'une durée de deux ans.
18. Il résulte de tout ce qui précède que M. A... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Montreuil a rejeté sa demande. Par voie de conséquence, ses conclusions à fin d'injonction sous astreinte et celles présentées sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ne peuvent qu'être rejetées.
DÉCIDE :
Article 1er : La requête de M. A... est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. B... A... et au ministre de l'intérieur et des Outre-mer.
Copie en sera adressée au préfet de la Seine-Saint-Denis.
Délibéré après l'audience du 21 mars 2024, à laquelle siégeaient :
- M. Lapouzade, président de chambre,
- M. Diémert, président-assesseur,
- Mme Jasmin-Sverdlin, première conseillère.
Rendu public par mise à disposition au greffe, le 4 avril 2024.
La rapporteure,
I. JASMIN-SVERDLINLe président,
J. LAPOUZADE
La greffière,
Y. HERBER
La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur et des Outre-mer en ce qui le concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
N° 23PA03413 2