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29/03/2024 | FRANCE | N°22PA05395

France | France, Cour administrative d'appel de PARIS, 9ème chambre, 29 mars 2024, 22PA05395


Vu la procédure suivante :



Procédure contentieuse antérieure :



M. B... A... a demandé au tribunal administratif de Paris d'annuler la décision implicite par laquelle le directeur général de l'Assistance publique-Hôpitaux de Paris (AP-HP) a refusé de lui accorder le bénéfice de la protection fonctionnelle et d'enjoindre au directeur général de l'AP-HP de lui octroyer le bénéfice de la protection fonctionnelle et de prendre toutes mesures utiles afin de le protéger.



Par un jugement n° 2019244 du 18 octobre 2022, l

e tribunal administratif de Paris a rejeté la demande M. A....



Procédure devant la Cour :
...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. B... A... a demandé au tribunal administratif de Paris d'annuler la décision implicite par laquelle le directeur général de l'Assistance publique-Hôpitaux de Paris (AP-HP) a refusé de lui accorder le bénéfice de la protection fonctionnelle et d'enjoindre au directeur général de l'AP-HP de lui octroyer le bénéfice de la protection fonctionnelle et de prendre toutes mesures utiles afin de le protéger.

Par un jugement n° 2019244 du 18 octobre 2022, le tribunal administratif de Paris a rejeté la demande M. A....

Procédure devant la Cour :

Par une requête et un mémoire en réplique, enregistrés les 19 décembre 2022 et 28 août 2023, M. A..., représenté par Me Taulet, demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 2019244 du 18 octobre 2022 par lequel le tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande tendant à l'annulation de la décision implicite du directeur général de l'AP-HP refusant de lui accorder le bénéfice de la protection fonctionnelle ;

2°) d'annuler cette décision ;

3°) d'enjoindre au directeur de l'AP-HP de lui accorder le bénéfice de la protection fonctionnelle et de prendre toutes les mesures pour le protéger ;

4°) de mettre à la charge de l'AP-HP une somme de 1 500 euros au titre de l'article

L. 761-1 du code de justice administrative.

Il doit être regardé comme soutenant que :

- le tribunal a renversé la charge de la preuve en estimant que les faits ne laissaient pas présumer l'existence d'un harcèlement moral, alors qu'il reconnaît l'existence de ces faits ;

- la décision attaquée méconnaît les dispositions des articles 6, 6 quinquies et 11 de la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983 dès lors qu'il est victime de harcèlement moral et de discrimination syndicale de la part de sa supérieure hiérarchique, responsable du service du transport de patients de l'hôpital Cochin ;

- l'AP-HP, en ne réagissant pas à ses alertes concernant la dégradation de sa situation professionnelle, a manqué à son obligation de sécurité institué par l'article 23 de la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983 ;

- la décision attaquée est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation.

Par un mémoire en défense, enregistré le 12 juillet 2023, l'AP-HP, représentée par Me Lacroix, conclut au rejet de la requête et demande de mettre à la charge de M. A... la somme de 1 800 euros au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle fait valoir que les moyens soulevés par le requérant ne sont pas fondés.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code général de la fonction publique ;

- le code du travail ;

- la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983 portant droits et obligations des fonctionnaires ;

- la loi n° 86-33 du 9 janvier 1986 portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique ;

- la loi n° 2008-496 du 27 mai 2008 portant diverses dispositions d'adaptation au droit communautaire dans le domaine de la lutte contre les discriminations ;

- le décret n° 82-453 du 28 mai 1982 relatif à l'hygiène et à la sécurité du travail ainsi qu'à la prévention médicale dans la fonction publique ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme Boizot ;

- les conclusions de M. Sibilli, rapporteur public ;

- les observations de Me Taulet pour M. A... ;

- et les observations de Me Rajbenbach pour l'AP-HP.

Considérant ce qui suit :

1. M. B... A... a été recruté par l'Assistance publique-Hôpitaux de Paris

(AP-HP) le 1er juin 2005, et a été affecté au service du transport de patients de l'hôpital Cochin. Par un courrier en date du 29 juillet 2020, M. A... a sollicité l'octroi de la protection fonctionnelle. Par un courrier en date du 7 août 2020, l'adjointe à la cheffe du département du droit des personnels, de la législation du travail et des baux lui a demandé d'étayer ses allégations par tout élément utile. Par un courrier en date du 9 septembre 2020, M. A... a réitéré sa demande de protection fonctionnelle en apportant au soutien de sa demande des précisions complémentaires. Du silence gardé par l'administration pendant deux mois est née une décision implicite de rejet. Par un jugement n° 2019244 du 18 octobre 2022 dont il interjette régulièrement appel, le tribunal administratif de Paris a rejeté ses demandes tendant d'une part, à annuler la décision implicite par laquelle le directeur général de l'AP-HP a refusé de lui accorder le bénéfice de la protection fonctionnelle et, d'autre part, à enjoindre au directeur général de l'AP-HP de lui octroyer le bénéfice de la protection fonctionnelle et de prendre toutes mesures utiles afin de le protéger.

Sur la régularité du jugement :

2. Si M. A... soutient que le tribunal a inversé la charge de la preuve s'agissant du harcèlement moral, un tel moyen se rattache non à la régularité mais au bien-fondé du jugement attaqué dont la Cour a à connaître uniquement par la voie de l'effet dévolutif.

Sur les conclusions à fin d'annulation :

En ce qui concerne la situation de harcèlement moral :

3. Aux termes de l'article 6 quinquies de la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983 dont les dispositions ont été reprises depuis à l'article L. 133-2 du code général de la fonction publique : " Aucun fonctionnaire ne doit subir les agissements répétés de harcèlement moral qui ont pour objet ou pour effet une dégradation des conditions de travail susceptible de porter atteinte à ses droits et à sa dignité, d'altérer sa santé physique ou mentale ou de compromettre son avenir professionnel. / Aucune mesure concernant notamment le recrutement, la titularisation, la rémunération, la formation, l'évaluation, la notation, la discipline, la promotion, l'affectation et la mutation ne peut être prise à l'égard d'un fonctionnaire en prenant en considération : / 1° Le fait qu'il ait subi ou refusé de subir les agissements de harcèlement moral visés au premier alinéa ; / 2° Le fait qu'il ait exercé un recours auprès d'un supérieur hiérarchique ou engagé une action en justice visant à faire cesser ces agissements ; / 3° Ou bien le fait qu'il ait témoigné de tels agissements ou qu'il les ait relatés. / (...) ". Aux termes de l'article 11 de la loi précitée dans sa version applicable aux faits de l'espèce dont les dispositions ont été notamment reprises à l'article L. 134-1 du code général de la fonction publique : " (...) IV.- La collectivité publique est tenue de protéger le fonctionnaire contre les atteintes volontaires à l'intégrité de la personne, les violences, les agissements constitutifs de harcèlement, les menaces, les injures, les diffamations ou les outrages dont il pourrait être victime sans qu'une faute personnelle puisse lui être imputée. Elle est tenue de réparer, le cas échéant, le préjudice qui en est résulté. (...) ".

4. D'une part, il appartient à un agent public qui soutient avoir été victime d'agissements constitutifs de harcèlement moral, de soumettre au juge des éléments de fait susceptibles de faire présumer l'existence d'un tel harcèlement. Il incombe à l'administration de produire, en sens contraire, une argumentation de nature à démontrer que les agissements en cause sont justifiés par des considérations étrangères à tout harcèlement. La conviction du juge, à qui il revient d'apprécier si les agissements de harcèlement sont ou non établis, se détermine au vu de ces échanges contradictoires, qu'il peut compléter, en cas de doute, en ordonnant toute mesure d'instruction utile. D'autre part, pour apprécier si des agissements dont il est allégué qu'ils sont constitutifs d'un harcèlement moral revêtent un tel caractère, le juge administratif doit tenir compte des comportements respectifs de l'agent auquel il est reproché d'avoir exercé de tels agissements et de l'agent qui estime avoir été victime d'un harcèlement moral. En revanche, la nature même des agissements en cause exclut, lorsque l'existence d'un harcèlement moral est établie, qu'il puisse être tenu compte du comportement de l'agent qui en a été victime pour atténuer les conséquences dommageables qui en ont résulté pour lui.

5. Enfin, pour être qualifiés de harcèlement moral, de tels faits répétés doivent excéder les limites de l'exercice normal du pouvoir hiérarchique. Dès lors que la répétition de faits n'excède pas ces limites, une simple diminution des attributions justifiée par l'intérêt du service, en raison d'une manière de servir inadéquate ou de difficultés relationnelles, n'est pas constitutive de harcèlement moral.

6. M. A... fait valoir être victime d'un harcèlement moral depuis l'arrivée en 2018 d'une nouvelle cadre de santé chargée de l'encadrement du service du transport de patients à l'hôpital Cochin, ayant eu pour effet une dégradation de ses conditions de travail et une altération importante de son état de santé psychique.

7. En premier lieu, il soutient avoir été victime de faits répétées d'agressivité et de dénigrement systématique de la part de sa supérieure hiérarchique qui aurait adopté depuis son arrivée un comportement inapproprié avec le collectif de travail générateur de conflits et manifesté à de nombreuses reprises un comportement agressif à l'égard de lui et ses collègues et instauré un climat de méfiance. L'intéressé fait également mention de réactions imprévisibles, d'intimidation, de menaces et de peur qui seraient notamment établies par les différents courriels d'alerte rédigés par le syndicat CGT et adressés à la direction de l'hôpital. Il fait également état de refus ou de restrictions de congés à raison de jours de grève, alors que les agents en cause avaient été réquisitionnés. Cependant, les propos ou le comportement dont M. A... dit avoir fait l'objet de la part de sa supérieure hiérarchique ne peuvent pas être regardés comme établis par les seules déclarations de l'intéressé ou les témoignages produits par M. A... émanant d'agents travaillant au sein du service brancardage et qui évoquent en termes peu circonstanciés des propos colériques de la cadre de santé se limitent à évoquer le ressenti des agents sous l'autorité de la cadre encadrant le service de transport des patients de l'hôpital Cochin. L'ensemble des éléments précités permet seulement de caractériser l'existence de relations sociales dégradées au sein de l'établissement qui ne résultent pas des seuls agissements de la cadre de santé chargée de l'encadrement du service mais également des agents de ce service mais nullement de caractériser des agissements malveillants et répétés à l'encontre de M. A.... Enfin, s'il se plaint de propos dévalorisants tenus par sa supérieure au regard de son affiliation syndicale, il ne l'établit pas. Dans un tel contexte, le comportement général de la cadre de santé, qui a pu recueillir le soutien de la direction de l'hôpital, ne saurait être regardé comme ayant excédé les limites de l'exercice normal du pouvoir hiérarchique au point de devoir être qualifié, à l'endroit de M. A..., de harcèlement moral.

8. En deuxième lieu, le requérant fait valoir que systématiquement la cadre de santé en charge notamment d'établir les plannings ne respectait pas les dispositions de l'arrêté du 1er avril 2016 relatif à l'organisation du travail et aux temps de repos à l'AP-HP qui prévoient qu'ils soient établis sur des périodes trimestrielles et portés à la connaissance des personnels, ou refusait des permutations entre brancardiers. Il précise également que cette dernière a d'une part, mis fin sans raison à son planning qui alternait chaque mois entre horaire du matin et horaire de l'après-midi en le positionnant automatiquement l'après-midi pendant plus de six mois alors que ses autres collègues de travail bénéficiaient d'une alternance de leurs horaires de travail et, d'autre part, régulièrement refusé de lui accorder des jours de congés et de RTT. S'agissant de l'établissement des plannings, l'arrêté du 1er avril 2016 précité précise au sein de son article 3 que le tableau de service est porté à la connaissance du personnel au plus tard 15 jours avant son application et que toute modification donnera lieu à une rectification du tableau de service établi au moins 48 heures avant sa mise en vigueur, sauf contrainte impérative liée à la nécessité d'assurer la continuité des soins, et à une information immédiate des agents concernés par cette modification. Or, il ne ressort pas des pièces du dossier qu'une modification du planning global ait été opérée sans respecter les dispositions précitées et, à supposer que ce fût le cas, cette seule circonstance qui constitue un acte isolé ne permet pas de démontrer qu'il aurait été victime de harcèlement moral. De même, il ressort des pièces du dossier qu'au cours de la période comprise entre le 1er juillet 2015, soit avant l'arrivée de la nouvelle cadre de santé et le 20 février 2019, M. A... a été placé en organisation de travail de dix heures par jour et trente-cinq heures par semaine avec un créneau unique de 10 heures à 20 heures sans possibilité d'effectuer de roulement puis, à compter du 21 février 2019, il est passé en horaire de 7h36 par jour en alternance sur des créneaux matin, après-midi et jour répartis équitablement. Ainsi, M. A... n'apporte pas suffisamment d'éléments pour étayer ses allégations selon lesquelles la cadre de santé aurait cherché à lui nuire en élaborant son planning. S'agissant des refus de congés et de RTT, l'AP-HP produit un récapitulatif des jours de congés et RTT du requérant qui établit qu'il a pu bénéficier de l'intégralité de ses congés et RTT au cours des années 2018 à 2020. En outre, au cours de l'années 2020, la crise sanitaire a conduit les hôpitaux à annuler une partie des congés ou RTT de son personnel au motif de nécessités de service et de mobilisation du personnel en raison de la crise sanitaire. Au regard de ce qui précède, les seules considérations de M. A... sont insuffisantes pour remettre en cause la réalité du motif de refus de ses congés, lequel n'excède pas les limites de l'exercice normal du pouvoir hiérarchique.

9. En troisième lieu, pour justifier l'existence de faits constitutifs de harcèlement moral, le requérant fait valoir que le service de brancardage rencontrait d'importantes difficultés liées à l'organisation du travail en raison notamment d'une mauvaise configuration du logiciel PTAH qui est chargé de gérer et d'optimiser les flux des brancardages au sein de l'établissement de santé en permettant l'attribution de courses en fonction de la localisation des brancardiers afin d'éviter un retour systématique au centre de régulation ainsi éviter des pas et de la fatigue aux personnels. Il ressort des pièces du dossier qu'au printemps 2019, les instances syndicales ont alerté la direction sur les dysfonctionnements rencontrés lors de l'utilisation du logiciel PTAH qui alertait avec beaucoup de retard les brancardiers des courses qui leur étaient affectées. Face à cette situation qui a présenté un caractère ponctuel, une modification du paramétrage du logiciel a été effectuée et la direction a procédé à une vérification des zones blanches au sein de l'hôpital afin de s'assurer que la réception des courses soit effective sur tous les lieux de travail des agents. En outre, il ressort des pièces du dossier qu'à la suite de plaintes croissantes pour causes de retards ou annulations de courses de différents services ou de patients et de l'accroissement des tensions entre les personnels qui ont conduit la cadre de santé chargée de l'encadrement du service a déposé plainte les 15, 19 juillet et 3 août 2019 pour des faits de harcèlement moral à son encontre et de dénonciation calomnieuse, le directeur du groupe hospitalo-universitaire AP-HP Centre a souhaité que soit menée une étude organisationnelle afin que soit proposé un plan d'action permettant de rétablir un fonctionnement normal et pérenne du service. Les résultats de cette étude qui ont été présentés le 1er octobre 2020 devant le comité d'hygiène, de sécurité et des conditions de travail (CHSCT) ont notamment préconisé l'élaboration d'une charte de fonctionnement interne régissant les liens et modalités de travail en équipe, la nécessité d'un projet fédérateur pour redonner une dynamique et une motivation à l'équipe avec notamment un renouvellement du matériel de travail des brancardiers, une réorganisation par antennes permettant de regrouper ensemble un ou plusieurs plateaux techniques de l'hôpital et un rattachement hiérarchique et fonctionnel au cadre du secteur, visant à créer un collectif solidaire entre les soignants du secteur et les brancardiers. Par ailleurs, le tableau des mouvements de personnels communiqué par l'AP-HP indique que le taux de rotation des personnels est passé de 24 % en 2017 à 16 % en 2020 pour les brancardiers ce qui suppose une amélioration des conditions de travail au sein du service des transports de l'hôpital Cochin. Au regard de ce qui précède, il apparaît que les difficultés liées à l'organisation du service ne peuvent être imputées à la cadre de santé mais qu'elles trouvent leur origine dans une organisation défaillante du service.

10. En dernier lieu, si M. A... soutient que les comportements sus-décrits de la cadre de santé à son égard ont entraîné des conséquences néfastes sur sa santé physique et mentale, il ne produit aucun élément au soutien de ses allégations.

11. Il résulte de ce qui précède que les actes invoqués, qu'ils soient considérés isolément ou dans leur ensemble, ne sont pas susceptibles de faire présumer l'existence de harcèlement moral contre M. A..., dès lors qu'ils ne sont soit pas matériellement établis, soit ponctuels ou justifiés par l'intérêt du service ou encore n'excèdent pas l'exercice normal du pouvoir hiérarchique. Dans ces conditions, le requérant n'est pas fondé à soutenir que les premiers juges ont inversé la dialectique de la preuve.

En ce qui concerne la discrimination syndicale :

12. Aux termes de l'article 6 de la loi du 13 juillet 1983, dont les dispositions ont été reprises depuis à l'article L. 131-1 du code général de la fonction publique : " (...) Aucune distinction, directe ou indirecte, ne peut être faite entre les fonctionnaires en raison de leurs opinions (...) syndicales (...) ". Aux termes de l'article 4 de la loi du 27 mai 2008 portant diverses dispositions d'adaptation au droit communautaire dans le domaine de la lutte contre les discriminations : " Toute personne qui s'estime victime d'une discrimination directe ou indirecte présente devant la juridiction compétente les faits qui permettent d'en présumer l'existence. Au vu de ces éléments, il appartient à la partie défenderesse de prouver que la mesure en cause est justifiée par des éléments objectifs étrangers à toute discrimination. Le juge forme sa conviction après avoir ordonné, en cas de besoin, toutes les mesures d'instruction qu'il estime utiles (...) ".

13. En premier lieu, si M. A... soutient qu'il est régulièrement entravé dans l'exercice de son engagement syndical et précise que sa supérieure hiérarchique le positionne régulièrement sur le planning sur ses jours de permanences syndicales et qu'elle lui a même demandé de renoncer à ses permanences au cours du mois d'août 2019, il ne produit aucun élément au soutien de ses allégations. A supposer que ce fût le cas, il ne démontre pas que le refus qui lui aurait été opposé reposerait sur des motifs autres que la nécessité d'assurer la continuité du service hospitalier et de garantir le fonctionnement des services. Ainsi, l'intéressé ne démontre pas avoir fait l'objet d'une discrimination syndicale.

14. En deuxième lieu, si le requérant fait valoir que sa cadre de santé lui reproche régulièrement ses obligations liées à l'exercice de son mandat de représentant du personnel au comité d'hygiène, de sécurité et des conditions de travail, il ne produit aucun élément pour étayer ses dires.

15. En troisième lieu, si l'intéressé soutient avoir reçu lors de son entretien d'évaluation des reproches de sa supérieure hiérarchique sur son engagement syndical, dont l'existence est contestée en défense, son seul témoignage ne permet pas de faire présumer l'existence d'une discrimination en raison de ses engagements syndicaux et de démontrer l'animosité nourrie par la cadre de santé à l'égard des membres du syndicat CGT.

En ce qui concerne la méconnaissance de l'obligation de sécurité :

16. Aux termes de l'article 23 de la loi du 13 juillet 1983 portant droits et obligations des fonctionnaires, aujourd'hui codifié à l'article L. 136-1 du code général de la fonction publique : " Des conditions d'hygiène et de sécurité de nature à préserver leur santé et leur intégrité physique sont assurées aux fonctionnaires durant leur travail ". Aux termes de l'article 2-1 du décret

n° 82-453 du 28 mai 1982 relatif à l'hygiène et à la sécurité du travail ainsi qu'à la prévention médicale dans la fonction publique : " Les chefs de service sont chargés, dans la limite de leurs attributions et dans le cadre des délégations qui leur sont consenties, de veiller à la sécurité et à la protection de la santé des agents placés sous leur autorité ". Selon l'article 3 de ce même décret : " Dans les administrations et établissements mentionnés à l'article 1er, les règles applicables en matière de santé et de sécurité sont, sous réserve des dispositions du présent décret, celles définies aux livres Ier à V de la quatrième partie du code du travail (...) ". Enfin, aux termes de l'article L. 4121-1 du code du travail : " L'employeur prend les mesures nécessaires pour assurer la sécurité et protéger la santé physique et mentale des travailleurs. (...) ".

17. Si M. A... soutient que son employeur a méconnu son obligation de sécurité posée par les dispositions citées au point précédent, il se borne pour ce faire à invoquer le harcèlement moral ou la discrimination dont il prétend avoir été victime. Il résulte toutefois des points 7 à 10 et 13 à 15 du présent arrêt qu'il ne peut être regardé comme ayant été victime, notamment de la part de la cadre de santé, d'agissements relevant d'une situation de harcèlement moral ou de discrimination syndicale. Par suite, un tel moyen ne peut qu'être écarté.

18. Il résulte de tout ce qui précède que M. A... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Paris a rejeté ses conclusions tendant à l'annulation de la décision implicite par laquelle le directeur général de l'AP-HP a refusé de lui accorder le bénéfice de la protection fonctionnelle. Par voie de conséquence, ses conclusions à fin d'injonction et celles présentées sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ne peuvent qu'être rejetées. Enfin, il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, de faire droit aux conclusions présentées au titre du même article par l'AP-HP.

D E C I D E :

Article 1er : La requête de M. A... est rejetée.

Article 2 : Les conclusions présentées par l'AP-HP au titre de l'article L. 761-1 d code de justice administrative sont rejetées.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à M. B... A... et à l'Assistance publique-Hôpitaux de Paris.

Délibéré après l'audience du 8 mars 2024, à laquelle siégeaient :

- M. Carrère, président,

- Mme Boizot, première conseillère,

- Mme Hamdi, première conseillère.

Rendu public par mise à disposition au greffe de la Cour, le 29 mars 2024.

La rapporteure,

S. BOIZOTLe président,

S. CARRERE

La greffière,

C. DABERT

La République mande et ordonne au ministre du travail, de la santé et des solidarités en ce qui le concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

N° 22PA05395 2


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de PARIS
Formation : 9ème chambre
Numéro d'arrêt : 22PA05395
Date de la décision : 29/03/2024
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : M. CARRERE
Rapporteur ?: Mme Sabine BOIZOT
Rapporteur public ?: M. SIBILLI
Avocat(s) : SCP MAUGENDRE MINIER AZRIA LACROIX SCHWAB

Origine de la décision
Date de l'import : 07/04/2024
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel;arret;2024-03-29;22pa05395 ?
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