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04/03/2024 | FRANCE | N°23PA00199

France | France, Cour administrative d'appel, 8ème chambre, 04 mars 2024, 23PA00199


Vu la procédure suivante :



Procédure contentieuse antérieure :



Mme A... D... a demandé à la commission départementale d'aide sociale du Val-de-Marne d'annuler la décision du 22 mai 2017 par laquelle le conseil départemental du Val-de-Marne a admis Mme C... B... à l'aide sociale à l'hébergement pour personnes âgées pour la période comprise entre le 1er avril 2017 et le 31 mars 2020 en tant que cette décision a fixé la participation globale mensuelle des obligées alimentaires à 825 euros.



Par une décision du

13 février 2018, la commission départementale d'aide sociale du Val-de-Marne a fixé le montant de la p...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme A... D... a demandé à la commission départementale d'aide sociale du Val-de-Marne d'annuler la décision du 22 mai 2017 par laquelle le conseil départemental du Val-de-Marne a admis Mme C... B... à l'aide sociale à l'hébergement pour personnes âgées pour la période comprise entre le 1er avril 2017 et le 31 mars 2020 en tant que cette décision a fixé la participation globale mensuelle des obligées alimentaires à 825 euros.

Par une décision du 13 février 2018, la commission départementale d'aide sociale du Val-de-Marne a fixé le montant de la participation globale mensuelle des obligées alimentaires de Mme B..., Mme D... et Mme E..., à 440 euros et le montant de la prise en charge mensuelle du département du Val-de-Marne à 1 149 euros à compter du 1er avril 2017.

Procédure devant la cour :

Par un arrêt du 6 janvier 2023, la cour d'appel de Paris a transmis à la cour, en application de l'article 12 de la loi n° 2016-1547 du 18 novembre 2016 de modernisation de la justice du XXIème siècle, la requête de Mme D..., enregistrée au greffe de la commission centrale d'aide sociale le 3 août 2018, et le mémoire en défense du département du Val-de-Marne enregistré le 5 octobre 2021.

Par sa requête, enregistrée sous le n° 23PA00199 le 10 janvier 2023, Mme D... doit être regardée comme demandant à la cour :

1°) d'annuler la décision du 13 février 2018 de la commission départementale d'aide sociale du Val-de-Marne en tant qu'elle a fixé le montant de la participation globale mensuelle des obligées alimentaires de Mme B... à 440 euros ;

2°) d'annuler la décision du 22 mai 2017 du conseil départemental du Val-de-Marne en tant qu'il a fixé à 825 euros le montant de la participation globale mensuelle des obligées alimentaires de Mme B... ;

3°) de réduire le montant de la participation globale mensuelle des obligées alimentaires de Mme B..., et, par voie de conséquence, de réduire sa participation mensuelle aux frais d'hébergement en EHPAD de Mme B....

Elle soutient que les revenus à prendre en considération pour fixer le montant de sa participation mensuelle aux frais d'hébergement de Mme B... sont ses propres revenus de retraitée et non ceux du couple, comme cela fut le cas pour sa sœur, Mme E....

Par un mémoire en défense, enregistré le 7 avril 2023, le département du Val-de-Marne conclut au rejet de la requête.

Il soutient que :

- le moyen soulevé par la requérante n'est pas fondé ;

- eu égard aux revenus de M. D... qui s'élevaient à la date de la décision contestée à 3 905,25 euros par mois et aux revenus mensuels de Mme D... qui percevait en moyenne 842,58 euros par mois, les ressources mensuelles du couple s'élevaient à 4 747,83 euros ; les charges du ménage étant de 598 euros par mois, le montant de la participation mensuelle de Mme D... aux frais d'hébergement de Mme B... a été évalué à bon droit à 340 euros.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code civil ;

- le code de l'action sociale et des familles ;

- la loi n° 2016-1547 du 18 novembre 2016 ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme Larsonnier,

- et les conclusions de Mme Bernard, rapporteure publique.

Considérant ce qui suit :

1. Il résulte de l'instruction que Mme C... F... veuve B..., née le 30 juin 1919 et décédée le 29 décembre 2017, était hébergée au sein de l'établissement d'hébergement pour personnes âgées dépendantes (EHPAD) résidence la cité verte à Sucy-en-Brie (Val-de-Marne). Par une décision du 22 mai 2017, le président du conseil départemental du Val-de-Marne a accordé à Mme F... veuve B... une prise en charge partielle de ses frais d'hébergement pour la période du 1er avril 2017 au 31 mars 2020, sous réserve de la récupération de ses ressources, et a fixé le montant global de la participation financière mensuelle laissée à la charge de ses obligées alimentaires, Mme D... et Mme E..., à 825 euros à compter du 1er avril 2017. Il a joint à sa décision une proposition de répartition de la participation financière des obligées alimentaires à hauteur de 356 euros pour Mme E... et de 469 euros pour Mme D.... Par des demandes distinctes des 29 et 30 mai 2017, Mme D... et Mme E... ont contesté devant la commission départementale d'aide sociale du Val-de-Marne le montant de leur contribution aux frais d'hébergement de Mme F... veuve B... proposé par le président du conseil départemental du Val-de-Marne. Par une décision du 13 février 2018, notifiée par un courrier en date du 25 juillet 2018, la commission départementale d'aide sociale du Val-de-Marne a révisé la décision du 22 mai 2017 du président du conseil départemental du Val-de-Marne en fixant la participation globale des obligées alimentaires à 440 euros par mois à compter du 1er avril 2017 et la prise en charge du département à 1 149 euros. Le 3 août 2018, Mme D... a saisi la commission centrale d'aide sociale d'une demande par laquelle elle contestait le montant de sa contribution financière aux frais d'hébergement de Mme B... qu'elle estimait devoir être fixée à 340 euros par mois. Par un arrêt du 6 janvier 2023, la cour d'appel de Paris a transmis à la cour, en application de l'article 12 de la loi du 18 novembre 2016 de modernisation de la justice du XXIème siècle, la requête de Mme D.... Cette dernière doit être regardée comme demandant à la cour d'annuler la décision du 13 février 2018 de la commission départementale d'aide sociale du Val-de-Marne en tant qu'elle a fixé le montant de la participation globale mensuelle des obligées alimentaires de Mme B... à 440 euros.

2. Aux termes de l'article 205 du code civil : " Les enfants doivent des aliments à leurs père et mère ou autres ascendants qui sont dans le besoin ". Aux termes de l'article 206 du même code : " Les gendres et belles-filles doivent également, et dans les mêmes circonstances, des aliments à leur beau-père et belle-mère, mais cette obligation cesse lorsque celui des époux qui produisait l'affinité et les enfants issus de son union avec l'autre époux sont décédés ". L'article 208 du même code précise que : " Les aliments ne sont accordés que dans la proportion du besoin de celui qui les réclame, et de la fortune de celui qui les doit ".

3. Aux termes de l'article L. 132-6 du code de l'action sociale et des familles : " Les personnes tenues à l'obligation alimentaire instituée par les articles 205 et suivants du code civil sont, à l'occasion de toute demande d'aide sociale, invitées à indiquer l'aide qu'elles peuvent allouer aux postulants et à apporter, le cas échéant, la preuve de leur impossibilité de couvrir la totalité des frais. / (...) / (...) / La proportion de l'aide consentie par les collectivités publiques est fixée en tenant compte du montant de la participation éventuelle des personnes restant tenues à l'obligation alimentaire. La décision peut être révisée sur production par le bénéficiaire de l'aide sociale d'une décision judiciaire rejetant sa demande d'aliments ou limitant l'obligation alimentaire à une somme inférieure à celle qui avait été envisagée par l'organisme d'admission. La décision fait également l'objet d'une révision lorsque les débiteurs d'aliments ont été condamnés à verser des arrérages supérieurs à ceux qu'elle avait prévus. ". Et aux termes de l'article L. 132-7 du même code : " En cas de carence de l'intéressé, le représentant de l'Etat ou le président du conseil départemental peut demander en son lieu et place à l'autorité judiciaire la fixation de la dette alimentaire et le versement de son montant, selon le cas, à l'Etat ou au département qui le reverse au bénéficiaire, augmenté le cas échéant de la quote-part de l'aide sociale ". Cette action, exercée par le représentant de l'Etat ou le président du conseil départemental, au besoin à titre conservatoire, aux lieu et place du créancier en cas de carence de celui-ci vis-à-vis des personnes tenues à l'obligation alimentaire à son égard sur le fondement des articles 205 et suivants du code civil, emprunte tous ses caractères à l'action alimentaire. Enfin, sauf si le demandeur prouve son état de besoin et établit qu'il n'est pas resté inactif ou qu'il a été dans l'impossibilité d'agir, il résulte de l'article 208 du code civil que le juge civil n'impose, le cas échéant, le versement d'une pension par le créancier d'aliments que pour la période postérieure à la demande en justice.

4. Il résulte de ces dispositions et des articles L. 134-1 et L. 134-3 du code de l'action sociale et des familles que le juge administratif, à qui il appartient de déterminer dans quelle mesure les frais d'hébergement dans un établissement d'hébergement pour personnes âgées dépendantes sont pris en charge par les collectivités publiques au titre de l'aide sociale, est compétent pour fixer, au préalable, le montant de la participation aux dépenses laissée à la charge du bénéficiaire de l'aide sociale et, le cas échéant, de ses débiteurs alimentaires. En revanche, il n'appartient qu'à l'autorité judiciaire d'assigner à chacune des personnes tenues à l'obligation alimentaire le montant et la date d'exigibilité de leur participation à ces dépenses ou, le cas échéant, de décharger le débiteur de tout ou partie de la dette alimentaire lorsque le créancier a manqué gravement à ses obligations envers celui-ci. Dans le cas où cette autorité a, par une décision devenue définitive, statué avant que le juge administratif ne se prononce sur le montant de la participation des obligés alimentaires, ce dernier est lié par la décision de l'autorité judiciaire. S'agissant de la période antérieure à la date à laquelle la décision de l'autorité judiciaire contraint les obligés alimentaires à verser une participation, il revient au juge administratif, en sa qualité de juge de plein contentieux, de s'assurer qu'il ne résulte pas manifestement des circonstances de fait existant à la date à laquelle il statue que la contribution postulée par le département n'a pas été ou ne sera pas versée spontanément par les obligés alimentaires.

5. Il ressort des écritures de la requérante qu'elle doit être regardée, ainsi qu'il a déjà été dit, comme contestant la décision du 13 février 2018 de la commission départementale d'aide sociale du Val-de-Marne en tant qu'elle a fixé le montant de la participation globale des obligées alimentaires de Mme F... veuve B... à 440 euros par mois à compter du 1er avril 2017. Mme D... soutient que seules ses ressources personnelles, et non celles du couple, devaient être prises en compte pour fixer le montant de la participation globale des obligées alimentaires. Toutefois, il ressort des dispositions de l'article 206 du code civil citées au point 2 que le gendre de Mme F... veuve B... est également tenu à l'obligation alimentaire vis-à-vis de sa belle-mère. Dans ces conditions, le département du Val-de-Marne pouvait légalement calculer le montant de la participation globale des obligées alimentaires de Mme F... veuve B... en retenant les ressources de Mme D... et celles de son mari. La requérante ne conteste pas le montant des ressources du couple retenu par la commission départementale d'aide sociale. Il ne résulte pas de l'instruction que Mme D..., qui s'est acquittée spontanément de la contribution financière postulée par le département, aurait saisi le juge aux affaires familiales pour qu'il fixe le montant de sa participation aux frais d'hébergement de sa mère en EHPAD. Dans ces conditions, Mme D... n'est pas fondée à soutenir que le département du Val-de-Marne aurait commis une erreur de droit en prenant en compte les ressources de son mari lors de l'évaluation du montant de la participation globale des obligées alimentaires de Mme F... veuve B....

6. Il résulte de tout ce qui précède que Mme D... n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par la décision attaquée, la commission départementale d'aide sociale du Val-de-Marne a fixé le montant de la participation globale des obligées alimentaires de Mme F... veuve B... à 440 euros par mois à compter du 1er avril 2017.

D É C I D E :

Article 1er : La requête de Mme D... est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à Mme A... D... et au président du conseil départemental du Val-de-Marne.

Délibéré après l'audience du 5 février 2024, à laquelle siégeaient :

- Mme Menasseyre, présidente de chambre,

- Mme Vrignon-Villalba, présidente assesseure,

- Mme Larsonnier, première conseillère.

Rendu public par mise à disposition au greffe le 4 mars 2024.

La rapporteure,

V. Larsonnier La présidente,

A. Menasseyre

Le greffier,

P. Tisserand

La République mande et ordonne à la ministre du travail, de la santé et des solidarités en ce qui la concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

N° 23PA00199 2


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de PARIS
Formation : 8ème chambre
Numéro d'arrêt : 23PA00199
Date de la décision : 04/03/2024
Type de recours : Plein contentieux

Composition du Tribunal
Président : Mme MENASSEYRE
Rapporteur ?: Mme Virginie LARSONNIER
Rapporteur public ?: Mme BERNARD

Origine de la décision
Date de l'import : 10/03/2024
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel;arret;2024-03-04;23pa00199 ?
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