Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
Mme A... B... a demandé au tribunal administratif de Paris d'annuler la décision implicite par laquelle le garde des sceaux, ministre de la justice a rejeté sa demande de complément de rémunération correspondant au montant de la taxe sur la valeur ajoutée acquittée sur les prestations de traduction effectuées entre le 1er janvier 2014 et le 31 décembre 2016.
Par un jugement n° 2007789 du 21 avril 2022, le tribunal administratif de Paris rejeté la requête présentée par Mme B....
Procédure devant la Cour :
Par une requête et un mémoire complémentaire, enregistrés le 8 juin 2022 et le 5 octobre 2023, Mme B..., représentée par Me Montagnier, demande à la Cour, dans le dernier état de ses écritures :
1°) d'annuler le jugement n° 2007789 du 21 avril 2022 du tribunal administratif de Paris ;
2°) d'annuler la décision implicite par laquelle le garde des sceaux, ministre de la justice a rejeté sa demande de complément de rémunération correspondant au montant de la taxe sur la valeur ajoutée acquittée sur les prestations de traduction effectuées entre le 1er janvier 2014 et le
31 décembre 2016 ;
3°) d'enjoindre aux services administratifs régionaux de la Cour d'appel de Paris de réexaminer sa demande, le cas échéant sous astreinte ;
4°) de mettre à la charge de l'État le versement à son conseil de la somme de 1 500 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle soutient que :
- la décision attaquée n'est pas motivée ;
- cette décision est entachée d'erreur de droit, dès lors qu'elle est fondée à demander le paiement des factures complémentaires émises au titre des années 2014 à 2017, d'un montant total de 33 187,60 euros.
Par un mémoire en défense, enregistré le 4 septembre 2023, le garde des sceaux, ministre de la justice, conclut au rejet de la requête.
Il fait valoir que les moyens soulevés ne sont pas fondés.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- le code général des impôts ;
- le code de procédure pénale ;
- le code des relations entre le public et l'administration ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de Mme Jasmin-Sverdlin,
- et les conclusions de M. Doré, rapporteur public.
Considérant ce qui suit :
1. Mme B..., interprète-traductrice auprès des tribunaux judiciaires a, à la suite d'une vérification de comptabilité portant sur la période du 1er janvier 2014 au 31 décembre 2016 effectuée par les services fiscaux du 6 au 18 septembre 2017, fait l'objet d'une rectification de 22 620 euros, somme assortie de pénalités, au motif qu'elle avait collecté la taxe sur la valeur ajoutée pour le paiement de ses honoraires sans accomplir les formalités relatives au paiement de cette taxe. Par lettre du 14 janvier 2020, Mme B... a demandé au service administratif régional de la Cour d'appel de Paris de lui verser un complément de rémunération équivalent au montant de la taxe sur la valeur ajoutée acquittée sur les prestations de traduction effectuées du
1er janvier 2014 au 31 décembre 2016. La requérante relève appel du jugement n°2007789 du
21 avril 2022 par lequel le tribunal administratif de Paris a rejeté sa requête tendant à l'annulation de la décision implicite de rejet de cette demande.
2. En premier lieu, aux termes de l'article L. 232-4 du code des relations entre le public et l'administration : " Une décision implicite intervenue dans les cas où la décision explicite aurait dû être motivée n'est pas illégale du seul fait qu'elle n'est pas assortie de cette motivation.
Toutefois, à la demande de l'intéressé, formulée dans les délais du recours contentieux, les motifs de toute décision implicite de rejet devront lui être communiqués dans le mois suivant cette demande.(...) ".
3. Il ne ressort pas des pièces du dossier que Mme B... ait présenté, dans les délais du recours contentieux, une demande de communication des motifs de la décision attaquée. Par suite, le moyen tiré du défaut de motivation de cette décision est inopérant et doit être écarté.
4. En second lieu, aux termes de l'article R. 122 du code de procédure pénale : " Les traductions par écrit sont payées à la page de texte en français. Cette page compte 250 mots. /
Les traductions par oral sont payées à l'heure de présence dès que l'interprète est mis à disposition du procureur de la République, des officiers de police judiciaire ou de leurs auxiliaires, des juges d'instruction ou des juridictions répressives. Toute heure commencée est due dans sa totalité. / Le tarif de la première heure de traduction est majoré. / Le tarif de l'heure des traductions par oral fait l'objet de majorations quand ces dernières sont effectuées durant la nuit, le samedi et le dimanche et les jours fériés. / Un arrêté conjoint du ministre de la justice et du ministre chargé du budget fixe le tarif des traductions par oral et par écrit et de leurs majorations. " Les tarifs des traductions sont fixés dans le tableau figurant à l'article A. 43-7 de ce code.
5. La taxe sur la valeur ajoutée dont est redevable un vendeur ou un prestataire de service est, comme les prélèvements de toute nature assis en addition de cette taxe, un élément qui grève le prix convenu avec le client et non un accessoire du prix. Par suite, dans une opération soumise à la taxe sur la valeur ajoutée, un prix stipulé sans mention de la taxe doit être réputé inclure la taxe qui sera due par le vendeur ou le prestataire de service, à moins qu'une stipulation expresse fasse apparaître que les parties sont convenues d'ajouter au prix stipulé un supplément de prix égal à la taxe sur la valeur ajoutée applicable à l'opération.
6. Le tarif de rémunération des interprètes traducteurs est fixé forfaitairement par les dispositions précitées des articles R. 122 et A. 43-7 du code de procédure pénale, qui ne mentionnent pas la taxe sur la valeur ajoutée. Ce tarif est ainsi réputé inclure la taxe qui sera due par le traducteur-interprète, qui est en principe assujetti à cette taxe. Par suite, le garde des sceaux, ministre de la justice n'a pas inexactement appliqué lesdites dispositions en refusant d'accorder à Mme B... une rémunération complémentaire correspondant au montant de la taxe sur la valeur ajoutée qu'elle a acquittée, après redressement fiscal, sur les prestations de traduction effectuées entre le 1er janvier 2014 et le 31 décembre 2016, au motif que cette somme devait être regardée comme ayant été incluse dans les honoraires qui lui ont été versés.
7. Il résulte de tout ce qui précède que Mme B... n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande.
8. L'État n'étant pas la partie perdante dans la présente instance, les conclusions de la requérante tendant à ce qu'une somme soit mise à sa charge sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative doivent être rejetées.
D E C I D E :
Article 1er : La requête de Mme A... B... est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à Mme A... B... et au garde des sceaux, ministre de la justice.
Délibéré après l'audience du 11 janvier 2024, à laquelle siégeaient :
- M. Diémert, président de la formation de jugement en application des articles L. 234-3 (1er alinéa) et R. 222-6 (1er alinéa) du code de justice administrative,
- Mme Jasmin-Sverdlin, première conseillère,
- M. Gobeill, premier conseiller.
Rendu public par mise à disposition au greffe, le 1er février 2024.
La rapporteure, Le président,
I. JASMIN-SVERDLIN S. DIÉMERT
La greffière
Y. HERBER
La République mande et ordonne au garde des sceaux, ministre de la justice, en ce qui le concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
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N° 22PA02655