Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
Mme A... B... a demandé au Tribunal administratif de Melun d'annuler l'arrêté du 8 juillet 2022 par lequel la préfète du Val-de-Marne l'a obligée à quitter le territoire français sans délai, a fixé le pays à destination duquel elle pourra être éloignée d'office et a prononcé à son encontre une interdiction de retour d'une durée de deux ans.
Par un jugement n° 2206828 du 28 juillet 2023, le Tribunal administratif de Melun a rejeté sa demande.
Procédure devant la Cour :
Par une requête enregistrée le 22 août 2023, Mme B..., représentée par Me Dahhan, demande à la Cour :
1°) d'annuler le jugement n° 2206828 du 28 juillet 2023 du Tribunal administratif de Melun ;
2°) d'annuler, pour excès de pouvoir, l'arrêté du 8 juillet 2022 de la préfète du Val-de-Marne ;
3°) de mettre à la charge de l'Etat le versement d'une somme de 1 200 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle soutient que :
- la décision d'obligation de quitter le territoire français méconnaît l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- elle est entachée d'erreur manifeste d'appréciation ;
- le refus de lui octroyer un délai de départ volontaire n'est pas justifié ;
- la décision d'interdiction de retour sur le territoire français est insuffisamment motivée ;
- elle n'est pas justifiée compte tenu de son intégration professionnelle et familiale en France.
La requête a été communiquée à la préfète du Val de Marne, qui n'a pas présenté de mémoire en défense.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- le code de justice administrative.
Le président de la formation de jugement a dispensé la rapporteure publique, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Le rapport de Mme Hamon a été entendu au cours de l'audience publique.
Considérant ce qui suit :
1. Mme B..., ressortissante chinoise née en 1976, a fait l'objet d'un arrêté du 8 juillet 2022 par lequel la préfète du Val-de-Marne l'a obligée à quitter le territoire français sans délai, a fixé le pays de destination et a prononcé à son encontre une interdiction de retour d'une durée de deux ans. Elle fait appel du jugement par lequel le Tribunal administratif de Melun a rejeté sa demande tendant à l'annulation de cet arrêté.
Sur la décision portant obligation de quitter le territoire français :
2. Aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " 1. Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance. / 2. Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale, ou à la protection des droits et libertés d'autrui. ".
3. Pas plus en appel qu'en première instance, Mme B... n'établit l'ancienneté de son concubinage avec un ressortissant français en produisant un bail commun daté de juillet 2021, une facture d'électricité à leurs deux noms établie en 2021 et un rendez-vous relatif à un dossier de mariage fixé le 21 juillet 2023 pour le 26 septembre 2023 alors qu'elle a été, dans le cadre de sa mise en examen dans une instruction pénale, placée sous contrôle judiciaire en résidence chez une tierce personne par une ordonnance de mise en liberté du tribunal judiciaire d'Aix-en-Provence du 6 mai 2022. Par suite, elle n'est pas fondée à soutenir que la décision attaquée aurait porté à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée aux buts en vue desquels la décision a été prise et ainsi méconnu les stipulations précitées de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales. Pour les mêmes motifs, elle n'est pas plus fondée à soutenir que cette décision serait entachée d'une erreur manifeste dans l'appréciation de ses conséquences sur sa vie privée et familiale en France.
Sur la décision portant refus de délai de départ volontaire :
4. Aux termes de l'article L. 612-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " L'étranger faisant l'objet d'une décision portant obligation de quitter le territoire français dispose d'un délai de départ volontaire de trente jours à compter de la notification de cette décision. / L'autorité administrative peut accorder, à titre exceptionnel, un délai de départ volontaire supérieur à trente jours s'il apparaît nécessaire de tenir compte de circonstances propres à chaque cas ". L'article L. 612-2 de ce code dispose que " Par dérogation à l'article L. 612-1, l'autorité administrative peut refuser d'accorder un délai de départ volontaire dans les cas suivants : / (...) 3° Il existe un risque que l'étranger se soustraie à la décision portant obligation de quitter le territoire français dont il fait l'objet. ". Selon l'article L. 612-3 du même code : " Le risque mentionné au 3° de l'article L. 612-2 peut être regardé comme établi, sauf circonstance particulière, dans les cas suivants : / 1° L'étranger, qui ne peut justifier être entré régulièrement sur le territoire français, n'a pas sollicité la délivrance d'un titre de séjour ; / 2° L'étranger s'est maintenu sur le territoire français au-delà de la durée de validité de son visa ou, s'il n'est pas soumis à l'obligation du visa, à l'expiration d'un délai de trois mois à compter de son entrée en France, sans avoir sollicité la délivrance d'un titre de séjour ; / 3° L'étranger s'est maintenu sur le territoire français plus d'un mois après l'expiration de son titre de séjour, du document provisoire délivré à l'occasion d'une demande de titre de séjour ou de son autorisation provisoire de séjour, sans en avoir demandé le renouvellement ; / 4° L'étranger a explicitement déclaré son intention de ne pas se conformer à son obligation de quitter le territoire français ; / 5° L'étranger s'est soustrait à l'exécution d'une précédente mesure d'éloignement ; (...) ".
5. Pas plus en appel qu'en première instance Mme B..., qui se borne à critiquer les termes de la question qui lui a été posée lors de son audition, ne conteste qu'elle a déclaré, lors de cette audition, son intention de ne pas quitter le territoire français en cas d'édiction d'une mesure d'éloignement. Par suite, elle n'est pas fondée à soutenir que la préfète du Val-de-Marne ne pouvait légalement refuser de lui octroyer un délai de départ volontaire.
Sur la décision portant interdiction de retour sur le territoire français :
6. Aux termes de l'article L. 612-6 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Lorsqu'aucun délai de départ volontaire n'a été accordé à l'étranger, l'autorité administrative assortit la décision portant obligation de quitter le territoire français d'une interdiction de retour sur le territoire français. Des circonstances humanitaires peuvent toutefois justifier que l'autorité administrative n'édicte pas d'interdiction de retour. ". Aux termes de l'article L. 612-10 du même code : " Pour fixer la durée des interdictions de retour mentionnées aux articles L. 612-6 et L. 612-7, l'autorité administrative tient compte de la durée de présence de l'étranger sur le territoire français, de la nature et de l'ancienneté de ses liens avec la France, de la circonstance qu'il a déjà fait l'objet ou non d'une mesure d'éloignement et de la menace pour l'ordre public que représente sa présence sur le territoire français. Il en est de même pour l'édiction et la durée de l'interdiction de retour mentionnée à l'article L. 612-8 ainsi que pour la prolongation de l'interdiction de retour prévue à l'article L. 612-11. ".
7. Mme B... reprend en appel le moyen tiré de ce que la décision d'interdiction de retour sur le territoire français, qui est par ailleurs suffisamment motivée, méconnaît les dispositions précitées compte tenu des conditions de son séjour en France, sans apporter d'élément de fait ou de droit nouveau de nature à remettre en cause l'appréciation portée sur ce moyen par les premiers juges. Par suite, il y a lieu de l'écarter par adoption des motifs retenus à bon droit par le Tribunal.
8. Il résulte dès lors de tout ce qui précède que Mme B... n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Melun a rejeté sa demande. Par voie de conséquence, ses conclusions présentées sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ne peuvent qu'être rejetées.
DÉCIDE :
Article 1er : La requête de Mme B... est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. A... B... et au ministre de l'intérieur et des outre-mer.
Copie en sera adressée à la préfète du Val-de-Marne.
Délibéré après l'audience du 9 janvier 2024, à laquelle siégeaient :
- M. Auvray, président de chambre,
- Mme Hamon, présidente-assesseure,
- M. Desvigne-Repusseau, premier conseiller,
Rendu public par mise à disposition au greffe le 24 janvier 2024.
La rapporteure,
P. HAMONLe président,
B. AUVRAY
La greffière,
C. BUOT La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur et des outre-mer en ce qui le concerne, ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
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N° 23PA03786