Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
M. B... A... a demandé au Tribunal administratif de Montreuil de prononcer la réduction de la cotisation primitive d'impôt sur le revenu à laquelle il a été assujetti au titre de l'année 2015.
Par un jugement n° 1914181/10 du 22 février 2022, le Tribunal administratif de Montreuil a rejeté cette demande.
Procédure devant la Cour :
Par une requête et un mémoire enregistrés les 21 juin et 18 octobre 2022, M. A..., représenté par Me Cédric de Kervenoaël, demande à la Cour :
1°) d'annuler le jugement du 22 février 2022 du Tribunal administratif de Montreuil ;
2°) de lui accorder la déduction des frais réels pour le calcul de l'impôt sur le revenu 2015 pour un montant de 133 365,95 euros et de prononcer en conséquence le remboursement du trop versé d'impôt sur le revenu ;
3°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 4 000 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ainsi que les entiers dépens.
Il soutient que :
- les justificatifs adressés à la société civile de droit allemand Scorpions GbR qui est une société civile de personnes, fiscalement transparente, doivent être regardés comme des frais déductibles du revenu imposable au nom de ses associés ;
- les frais dont la déduction est demandée ont un caractère nécessaire ;
- il a fourni la copie des factures, la méthode de répartition par concert pour les factures qui concernaient plusieurs concerts, la preuve du paiement desdites factures, et le récapitulatif intégral des postes de charges de l'année 2015, pour les concerts en France et à l'étranger ;
- le montant total des revenus générés par l'activité sur le sol français en 2015 de la société civile de droit allemand Scorpions GbR s'élève à 2 287 224 euros et les charges pour l'exercice de l'activité en 2015 s'élèvent à 436 607,85 euros ;
- cette société a respecté ses obligations comptables et fiscales en Allemagne ;
- les recettes perçues en France et les charges y afférentes étant exclues pour la détermination du résultat de la société Scorpions GbR imposable à son nom en Allemagne, la prise en compte des charges litigieuses à son niveau n'entraîne pas de double déduction des dépenses réalisées pour les concerts en France ;
- l'égalité de traitement des contribuables face à l'administration lorsque ceux-ci sont dans une situation identique a été méconnue.
Par un mémoire en défense enregistré le 20 septembre 2022, le ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique conclut au rejet de la requête.
Il soutient que :
- les moyens soulevés par M. A... ne sont pas fondés.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- la Constitution et la Déclaration des droits de l'homme et du citoyen ;
- le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de M. Magnard,
- et les conclusions de M. Segretain, rapporteur public.
Considérant ce qui suit :
1. M. A..., ressortissant et résident allemand, est musicien, membre du groupe " Scorpions ", et détient un tiers des parts de la société civile de droit allemand " Scorpions GbR ". L'intéressé a déclaré des revenus de source française, dans la catégorie des traitements et salaires, d'un montant de 828 516 euros au titre de l'année 2015. Ces revenus ont été soumis à la retenue à la source, sur le fondement de l'article 182 A bis du code général des impôts, ainsi qu'à l'impôt sur le revenu à l'exception de la fraction libératoire, d'un montant de 41 867 euros. La cotisation d'impôt sur le revenu, d'un montant total de 244 979 euros, établie selon les déclarations de l'intéressé, a été mise en recouvrement le 31 octobre 2017. Par une réclamation du 19 décembre 2017, M. A... a sollicité la déduction des frais réels exposés au cours de l'année 2015, s'élevant, selon la déclaration rectificative déposée, à 165 653 euros. L'administration fiscale a rejeté cette réclamation le 21 août 2019. Par la présente requête M. A... relève appel du jugement par lequel le Tribunal administratif de Montreuil a rejeté sa demande tendant à la réduction de la cotisation d'impôt sur le revenu à laquelle il a été assujetti au titre de l'année 2015.
2. Aux termes de l'article 83 du code général des impôts : " Le montant net du revenu imposable est déterminé en déduisant du montant brut des sommes payées et des avantages en argent ou en nature accordés : (...) 3° Les frais inhérents à la fonction ou à l'emploi lorsqu'ils ne sont pas couverts par des allocations spéciales. La déduction à effectuer du chef des frais professionnels est calculée forfaitairement en fonction du revenu brut, après défalcation des cotisations, contributions et intérêts mentionnés aux 1° à 2° quinquies et à l'article 83 bis ; elle est fixée à 10 % du montant de ce revenu. Elle est limitée à 12 170 € pour l'imposition des rémunérations perçues en 2015 (...) Les bénéficiaires de traitements et salaires sont également admis à justifier du montant de leurs frais réels, soit dans la déclaration visée à l'article 170, soit sous forme de réclamation adressée au service des impôts dans le délai prévu aux articles R* 196-1 et R* 196-3 du livre des procédures fiscales (...) ". Il résulte de ces dispositions que, pour pouvoir déduire ses frais réels, le contribuable doit fournir des éléments justificatifs suffisamment précis pour permettre d'apprécier le montant des frais effectivement exposés par lui à l'occasion de l'exercice de sa profession. Il ne peut ni se borner à présenter un calcul théorique de ces frais, ni à faire état de dépenses réelles sans établir qu'elles constituent une charge inhérente à son activité professionnelle.
3. M. A... a été imposé en France sur les salaires perçus en contrepartie des prestations artistiques qu'il a personnellement réalisées sur le territoire et peut donc seulement déduire les frais qu'il a personnellement exposés et qui sont inhérents à l'exercice de son activité professionnelle en France. Il résulte de l'instruction que les factures produites sont libellées au nom de la société " Scorpions GbR ", qui s'est acquittée de leur paiement ainsi qu'en attestent les relevés bancaires produits qui se rapportent au compte ouvert au nom de cette société. Il appartient à M. A... d'établir dans quelle proportion ces factures ont été payées pour son compte et dans quelle mesure elles sont nécessaires à l'activité salariée personnelle de l'intéressé sur le territoire français. En se bornant à fournir l'intégralité des factures supportées par la société " Scorpions GbR " et la preuve de leur paiement par cette dernière, un tableau de répartition de l'ensemble des factures non assorti des éléments permettant à la Cour de vérifier la justesse de la clé de répartition utilisée, la copie des factures afférentes à un seul des concerts donné en France, sans qu'il soit possible d'identifier les dépenses spécifiquement imputables à l'activité salariée personnelle de M. A..., M. A... n'apporte pas la preuve qui lui incombe. Par suite, M. A..., qui ne saurait utilement se prévaloir, pour justifier du caractère déductible des sommes litigieuses en application des dispositions précitées du code général des impôts, de ce que les recettes perçues en France et les charges y afférentes étaient exclues pour la détermination du résultat de la " Scorpions GbR " imposable à son nom en Allemagne et de ce que la prise en compte des charges litigieuses à son niveau n'entraine pas de double déduction des dépenses réalisées pour les concerts en France, n'établit pas avoir personnellement exposé, à l'occasion de l'exercice de sa profession, au titre des représentations données en France en 2015, des frais excédant le montant de 12 170 euros, déduit forfaitairement en application du 3° de l'article 83 du code général des impôts. Le requérant étant taxé en France en qualité de salarié, dans la catégorie des traitements et salaires et selon les règles applicables à cette catégorie de revenus, les modalités d'imposition, au niveau de ses associés, des résultats de la société Scorpions GbR en Allemagne et la circonstance que cette société y aurait respecté ses obligations comptables et fiscales sont sans influence sur l'issue du litige.
4. En dernier lieu, il résulte de ce qui a été dit aux points précédents que l'imposition contestée a été établie conformément à la loi fiscale. Par suite, M. A..., qui ne soulève par mémoire distinct aucune question prioritaire de constitutionnalité, ne peut utilement se prévaloir du principe d'égalité des citoyens devant la loi, garanti par l'article 6 de la Déclaration des droits de l'homme et du citoyen. M. A... n'ayant pas fait l'objet d'un rehaussement d'impositions antérieures, la décision par laquelle l'administration fiscale a partiellement admis la réclamation présentée par un autre associé de Scorpions GbR ne constitue en tout état de cause pas une prise de position formelle invocable sur le fondement de l'article L. 80 B du livre des procédures fiscales.
5. Il résulte de tout ce qui précède que M. A... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Montreuil a rejeté sa demande. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mis à la charge de l'Etat, qui n'est pas dans la présente instance la partie perdante, le versement de la somme que le requérant demande au titre des frais exposés par lui et non compris dans les dépens.
DECIDE :
Article 1er : La requête de M. A... est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. B... A... et au ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique.
Copie en sera adressée à la direction des impôts des non-résidents.
Délibéré après l'audience du 8 novembre 2023, à laquelle siégeaient :
- Mme Topin, présidente,
- M. Magnard, premier conseiller,
- Mme Fullana, première conseillère.
Rendu public par mise à disposition du greffe le 22 novembre 2023.
Le rapporteur,
F. MAGNARDLa présidente,
E. TOPIN
Le greffier,
C. MONGIS
La République mande et ordonne au ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique en ce qui le concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
N° 22PA02889 2