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25/10/2023 | FRANCE | N°23PA01273

France | France, Cour administrative d'appel de Paris, 2ème chambre, 25 octobre 2023, 23PA01273


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme B... A... a demandé au Tribunal administratif de Paris d'annuler l'arrêté du 27 octobre 2022 par lequel le préfet de police a déclaré caduc son droit au séjour, l'a obligée à quitter le territoire français sans délai, a fixé le pays à destination duquel elle pourra être éloignée et lui a interdit de circuler sur le territoire français pour une durée de 24 mois.

Par un jugement n° 2222658/3-1 du 28 février 2023, le Tribunal administratif de Paris a annulé l'arrêté du 27 octobre 20

22 et mis à la charge de l'Etat une somme de 1 000 euros au titre des frais d'instance.

P...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme B... A... a demandé au Tribunal administratif de Paris d'annuler l'arrêté du 27 octobre 2022 par lequel le préfet de police a déclaré caduc son droit au séjour, l'a obligée à quitter le territoire français sans délai, a fixé le pays à destination duquel elle pourra être éloignée et lui a interdit de circuler sur le territoire français pour une durée de 24 mois.

Par un jugement n° 2222658/3-1 du 28 février 2023, le Tribunal administratif de Paris a annulé l'arrêté du 27 octobre 2022 et mis à la charge de l'Etat une somme de 1 000 euros au titre des frais d'instance.

Procédure devant la Cour :

Par une requête, enregistrée le 28 mars 2023, le préfet de police demande à la Cour :

1°) d'annuler les articles 2 et 3 du jugement n° 2222658/3-1 du 28 février 2023 du Tribunal administratif de Paris ;

2°) de rejeter la demande présentée par Mme A... devant le tribunal.

Il soutient que :

- l'arrêté litigieux ne méconnaît pas les dispositions de l'article L. 251-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- les autres moyens soulevés au soutien de la demande de Mme A... doivent être écartés.

Par un mémoire en défense enregistré le 4 mai 2023, Mme A..., représentée par

Me Hind Sarhane, conclut au rejet de la requête et demande à la Cour de l'admettre provisoirement à l'aide juridictionnelle et de mettre à la charge de l'Etat la somme de 1 500 euros à verser à son conseil en application de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 et de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient qu'aucun des moyens de la requête n'est fondé.

Par une décision du bureau d'aide juridictionnelle près du Tribunal judiciaire de Paris du 4 juillet 2023, Mme A... a été admise au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale.

Par une ordonnance du 14 juin 2023, la clôture de l'instruction a été fixée au 3 juillet 2023.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridique et son décret d'application n° 91-1266 du 19 décembre 1991 ;

- le code de justice administrative.

Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Le rapport de Mme Fullana a été entendu au cours de l'audience publique.

Considérant ce qui suit :

1. Mme A..., ressortissante portugaise née le 11 janvier 1977, a vu son droit au séjour déclaré caduc, par un arrêté du préfet de police du 27 octobre 2022 lui faisant également obligation de quitter le territoire français sans délai, fixant son pays de renvoi et lui interdisant de circuler sur le territoire français pour une durée de 24 mois. Le préfet de police relève appel du jugement du 28 février 2023 par lequel le Tribunal administratif de Paris a annulé cet arrêté.

Sur l'admission provisoire à l'aide juridictionnelle :

2. Mme A... a été admise au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du 4 juillet 2023. Il n'y a pas lieu, par suite, de l'admettre à titre provisoire au bénéfice de l'aide juridictionnelle.

Sur le motif d'annulation retenu par le Tribunal administratif de Paris :

3. D'une part, aux termes de l'article L. 251-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " L'autorité administrative compétente peut, par décision motivée, obliger les étrangers dont la situation est régie par le présent livre, à quitter le territoire français lorsqu'elle constate les situations suivantes : / (...) / 2° Leur comportement personnel constitue, du point de vue de l'ordre public ou de la sécurité publique, une menace réelle, actuelle et suffisamment grave à l'encontre d'un intérêt fondamental de la société ; (...) / L'autorité administrative compétente tient compte de l'ensemble des circonstances relatives à leur situation, notamment la durée du séjour des intéressés en France, leur âge, leur état de santé, leur situation familiale et économique, leur intégration sociale et culturelle en France, et l'intensité des liens avec leur pays d'origine ". En application de ces dispositions, il appartient à l'autorité administrative, qui ne saurait se fonder sur la seule existence d'une infraction à la loi, d'examiner, d'après l'ensemble des circonstances de l'affaire, si la présence de l'intéressé sur le territoire français est de nature à constituer une menace réelle, et suffisamment grave pour un intérêt fondamental de la société française, ces conditions étant appréciées en fonction de sa situation individuelle, notamment de la durée de son séjour en France, de sa situation familiale et économique et de son intégration.

4. D'autre part, aux termes de l'article L. 233-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Les citoyens de l'Union européenne ont le droit de séjourner en France pour une durée supérieure à trois mois s'ils satisfont à l'une des conditions suivantes :

/ (...) 2° Ils disposent pour eux et pour leurs membres de famille de ressources suffisantes afin de

ne pas devenir une charge pour le système d'assistance sociale, ainsi que d'une assurance maladie ; (...) ".

5. Pour annuler l'arrêté du 27 octobre 2022 contesté devant lui par Mme A..., le tribunal a relevé que le préfet de police avait entaché sa décision d'une erreur d'appréciation en considérant que sa présence sur le territoire français était de nature à constituer, du point de vue de l'ordre public ou de la sécurité publique, une menace réelle, actuelle et suffisamment grave pour un intérêt fondamental de la société française, justifiant une mesure d'éloignement prise sur le fondement des dispositions précitées de l'article L. 251-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile.

6. Pour contester le jugement attaqué, le préfet de police fait valoir que Mme A... a été interpelée pour avoir tenté de s'introduire dans un local avec l'aide de deux personnes sans domicile fixe qu'elle a sollicitées contre une somme de 50 euros. Ces faits qu'elle a reconnus lors de son audition, tout en contestant la qualification de tentative de vol, ont conduit, postérieurement à l'arrêté attaqué, à sa condamnation à une peine de quatre mois d'emprisonnement avec sursis pour dégradation ou détérioration du bien d'autrui commise en réunion et pour refus de se soumettre aux opérations de relevés signalétiques intégrés dans un fichier de police. Ainsi que l'a relevé le tribunal, il ne ressort pas des pièces du dossier que Mme A... aurait commis d'autres infractions ou faits susceptibles de caractériser une menace à l'ordre public ou à la sécurité publique, celle-ci s'étant contentée de préciser lors de son audition, pour expliquer son refus de se faire signaliser, qu'elle avait précédemment tenté de déposer plainte en raison d'un conflit avec un ancien employeur et que les services de police lui auraient alors répondu qu'elle " allait rester dans le logiciel ". Mme A... justifie par ailleurs qu'elle était, à la date de l'arrêté attaqué, employée en intérim comme travailleur social auprès de la société Eve assistance, emploi à raison duquel elle bénéficiait d'une couverture sociale et a perçu des rémunérations nettes de 1 661 euros et 1 296 euros. Dans ces circonstances, compte tenu de la nature des faits commis par Mme A... et de leur caractère isolé, c'est à bon droit que le tribunal a estimé que le préfet de police avait méconnu les dispositions du 2° de l'article L. 251-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. Par ailleurs, eu égard à la situation professionnelle de Mme A... à la date de l'arrêté attaqué, il ne résulte pas de l'instruction que le préfet de police aurait pu légalement prendre la même décision s'il n'avait retenu que l'autre motif mentionné " au surplus " dans son arrêté du 27 octobre 2022, tiré de ce que la présence sur le territoire de Mme A... constituait une charge déraisonnable pour l'Etat français.

7. Il résulte de ce qui précède que le préfet de police n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Paris a annulé son arrêté du 27 octobre 2022. Sa requête ne peut dès lors qu'être rejetée.

Sur les frais liés à l'instance :

8. Il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de faire application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 et de mettre à la charge de l'Etat le versement au conseil de Mme A..., Me Sarhane, d'une somme de 1 500 euros au titre des frais exposés et non compris dans les dépens, sous réserve que Me Sarhane renonce à percevoir la part contributive de l'Etat au titre de l'aide juridictionnelle.

DÉCIDE :

Article 1er : La requête du préfet de police est rejetée.

Article 2 : L'Etat versera au conseil de Mme A..., Me Sarhane, une somme de 1 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991, sous réserve que celui-ci renonce à percevoir la somme correspondant à la part contributive de l'Etat au titre de l'aide juridictionnelle.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié au ministre de l'intérieur et des outre-mer, au préfet de police et à Mme B... A...

Copie en sera adressée à Me Hind Sarhane.

Délibéré après l'audience du 11 octobre 2023, à laquelle siégeaient :

- Mme Brotons, président de chambre,

- M. Magnard, premier conseiller,

- Mme Fullana, première conseillère.

Rendu public par mise à disposition au greffe, le 25 octobre 2023.

La rapporteure,

M. FULLANA Le président,

I. BROTONS

Le greffier,

C. MONGIS

La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur et des outre-mer en ce qui le concerne, ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

2

N° 23PA01273


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Paris
Formation : 2ème chambre
Numéro d'arrêt : 23PA01273
Date de la décision : 25/10/2023
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : Mme BROTONS
Rapporteur ?: Mme Maguy FULLANA
Rapporteur public ?: M. SEGRETAIN
Avocat(s) : SARHANE

Origine de la décision
Date de l'import : 29/10/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.paris;arret;2023-10-25;23pa01273 ?
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