La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

25/10/2023 | FRANCE | N°22PA02927

France | France, Cour administrative d'appel de Paris, 2ème chambre, 25 octobre 2023, 22PA02927


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

L'Eurl Toanui Pearls Tahiti a demandé au Tribunal administratif de la Polynésie française de prononcer la décharge des impositions supplémentaires, intérêts, pénalités et/ou sanctions réclamés et toutes sommes en découlant suite à la proposition de rectification n° 960 du 10 juillet 2020 et au titre des rôles nos 6434, 6433 et n° 6432 du 1er décembre 2020 pour les exercices 2017 et 2018.

Par un jugement n° 2100444 du 29 mars 2022, le Tribunal administratif de la Polynésie française a déc

hargé l'Eurl Toanui Pearls Tahiti de la somme, en droits et pénalités,

de 22 580 550 F ...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

L'Eurl Toanui Pearls Tahiti a demandé au Tribunal administratif de la Polynésie française de prononcer la décharge des impositions supplémentaires, intérêts, pénalités et/ou sanctions réclamés et toutes sommes en découlant suite à la proposition de rectification n° 960 du 10 juillet 2020 et au titre des rôles nos 6434, 6433 et n° 6432 du 1er décembre 2020 pour les exercices 2017 et 2018.

Par un jugement n° 2100444 du 29 mars 2022, le Tribunal administratif de la Polynésie française a déchargé l'Eurl Toanui Pearls Tahiti de la somme, en droits et pénalités,

de 22 580 550 F CFP au titre de l'impôt sur les sociétés (IS), de l'impôt sur les revenus des capitaux mobiliers (IRCM) et de la contribution de solidarité territoriale à l'impôt sur les revenus des capitaux mobiliers pour les exercices 2017 et 2018 et a mis à la charge de la Polynésie française la somme de 100 000 F CFP au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Procédure devant la Cour :

Par une requête et des mémoires enregistrés les 25 juin et 16 novembre 2022, la Polynésie française, représentée par Me François Quinquis, demande à la Cour :

1°) d'annuler ce jugement du Tribunal administratif de la Polynésie française du 29 mars 2022 ;

2°) de remettre à la charge de l'Eurl Toanui Pearls Tahiti les impositions dont les premiers juges ont prononcé la décharge ;

3°) de mettre à la charge de l'Eurl Toanui Pearls Tahiti une somme de 2 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- sa requête n'est pas tardive ;

- les moyens qu'elle invoquait devant les premiers juges n'ont pas été détaillés en méconnaissance de l'article R. 741-2 du code de justice administrative ;

- le jugement est insuffisamment motivé ;

- la comptabilité de la société n'était pas probante ;

- la preuve de l'exagération des impositions n'est pas apportée.

Par un mémoire en défense enregistré le 11 septembre 2022, la société Eurl Toanui Pearls Tahiti, représentée par Me Arcus Usang, conclut au rejet de la requête, à la décharge des impositions en litige et à ce que soit mise à la charge de la Polynésie française une somme de 5 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- la requête est tardive au regard du délai d'appel de deux mois ;

- les moyens de la Polynésie française ne sont pas fondés ;

- l'agent vérificateur n'a pas justifié de sa compétence ;

- le conseil des ministres était incompétent pour réglementer la procédure fiscale ;

- le président de la commission des impôts était incompétent pour décider seul de l'irrecevabilité de la saisine de la commission et pour créer de ce fait une redevance en nature et une sanction disproportionnée ;

- le recours à la procédure de taxation d'office est illégal dans la mesure où la comptabilité a été reconnue probante ;

- la balance espèces établie par l'administration est erronée ;

- elle bénéficie de la franchise de taxe sur la valeur ajoutée ;

- la facture de 812 000 F CFP figure déjà dans le résultat ;

- les mêmes sommes sont imposées deux fois à l'IRCM ;

- la rémunération normale du gérant aurait dû être prise en compte pour le calcul des sommes taxables à l'IS et à l'IRCM ;

- le procès-verbal pour non présentation de comptabilité n'a pas été établi ;

- il n'y a pas eu d'envoi de la mise en demeure prévue à l'article Lp 423-1 du code des impôts, ni de la demande de justification prévue à l'article Lp 411-2 ; en conséquence, les droits de la défense ont été méconnus et la notification de redressement aurait dû utiliser la formule " en tout état de cause ".

Par une ordonnance du 17 novembre 2022, la clôture de l'instruction a été fixée au 8 décembre 2022.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la loi organique n° 2004-192 du 27 février 2004 ;

- la délibération n° 2011-13 APF du 5 mai 2011 ;

- le code des impôts de la Polynésie française ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. Magnard,

- les conclusions de M. Segretain, rapporteur public,

- et les observations de Me Usang, représentant la société Eurl Toanui Pearls Tahiti.

Considérant ce qui suit :

1. L'administration a mis à la charge de l'Eurl Toanui Pearls Tahiti, dans le cadre de la procédure de taxation d'office, des cotisations supplémentaires au titre de l'impôt sur les sociétés, de l'impôt sur les revenus des capitaux mobiliers et de la contribution territoriale sur le revenu des capitaux mobiliers pour les exercices clos en 2017 et 2018. Par le jugement attaqué, dont la Polynésie française relève appel, le Tribunal administratif de la Polynésie française a déchargé l'Eurl Toanui Pearls Tahiti de la somme de 22 580 550 F CFP au titre de ces impositions.

Sur la fin-de non-recevoir opposée par l'Eurl Toanui Pearls Tahiti :

2. D'une part, aux termes de l'article R. 811-2 du code de justice administrative : " Sauf disposition contraire, le délai d'appel est de deux mois. (...) ". Aux termes de l'article R. 811-5 du même code : " Les délais supplémentaires de distance prévus à l'article R. 421-7 s'ajoutent aux délais normalement impartis. (...) ". Et aux termes de l'article R. 421-7 de ce même code : " Lorsque la demande est portée devant un tribunal administratif qui a son siège en France métropolitaine ou devant le Conseil d'Etat statuant en premier et dernier ressort, le délai de recours (...) est augmenté d'un mois pour les personnes qui demeurent en Guadeloupe, en Guyane, à la Martinique, à La Réunion, à Saint-Barthélemy, à Saint-Martin, à Mayotte, à Saint-Pierre-et-Miquelon, en Polynésie française, dans les îles Wallis et Futuna, en Nouvelle-Calédonie et dans les Terres australes et antarctiques françaises. (...) " En application de ces dispositions, la Polynésie française disposait d'un délai d'appel de trois mois.

3. D'autre part, aux termes de l'article R. 772-4 du code de justice administrative : " Devant les tribunaux administratifs de la Polynésie française, de Wallis-et-Futuna et de Nouvelle-Calédonie, les requêtes en matière fiscale dont le contentieux ressortit à la juridiction administrative sont, présentées et instruites par le tribunal administratif dans les formes prévues dans le présent code ". Aux termes de l'article R. 772-1 du même code : " Les requêtes en matière d'impôts directs et de taxe sur le chiffre d'affaires ou de taxes assimilées dont l'assiette ou le recouvrement est confié à la direction générale des impôts sont présentées, instruites et jugées dans les formes prévues par le livre des procédures fiscales ". Enfin, aux termes de l'article R* 200-18 du livre des procédures fiscales : " A compter de la notification du jugement du tribunal administratif qui a été faite au directeur du service de la direction générale des finances publiques ou de la direction générale des douanes et droits indirects qui a suivi l'affaire, celui-ci dispose d'un délai de deux mois pour transmettre, s'il y a lieu, le jugement et le dossier au ministre chargé du budget ".

4. En vertu des articles précités R. 772-4 et R. 772-1 du code de justice administrative, les dispositions de l'article R* 200-18 du livre des procédures fiscales, instituant un délai supplémentaire de transmission au profit de l'administration fiscale, sont en principe applicables aux appels formés contre les décisions rendues en matière fiscale par le Tribunal administratif de la Polynésie française. Toutefois, l'article R* 200-18 du livre des procédures fiscales n'étant pas transposable à la Polynésie française dès lors qu'il n'envisage que la situation de l'administration fiscale placée sous la hiérarchie du ministre chargé du budget, il y a lieu de se référer, pour déterminer le délai d'appel de l'administration fiscale polynésienne, aux dispositions mentionnées au point 2. du présent arrêt, qui instituent, en ce qui concerne la Polynésie française, un délai d'appel de trois mois. Le moyen tiré de ce que la requête serait tardive au regard d'un délai d'appel de deux mois ne peut par suite qu'être écarté.

Sur la régularité du jugement attaqué :

5. Les premiers juges, qui n'étaient pas tenus de répondre à tous les arguments soulevés par les parties, ont régulièrement statué sur le moyen qui leur était soumis tiré de ce que la comptabilité produite ne justifiait pas la mise en œuvre de la procédure de taxation d'office. La circonstance qu'ils n'aient pas détaillé dans ses visas les moyens de défense de la Polynésie française, ni expressément répondu à certains arguments de cette dernière développés en défense, dont certains étaient d'ailleurs dépourvus de portée pour apprécier le caractère régulier et probant de la comptabilité, ainsi que les erreurs de droit qu'ils auraient pu commettre à cet égard, ne révèlent aucune irrégularité du jugement et notamment aucune méconnaissance de l'article R. 742-2 du code de justice administrative.

Sur le motif retenu par les premiers juges :

6. Aux termes de l'article LP. 423-1 du code des impôts de la Polynésie française : " 1. Sont taxés d'office, les contribuables qui n'ont pas fourni dans les délais réglementaires les déclarations prévues par le présent code, sous réserve de régularisation prévue au 3 / 2 - Sont également taxés d'office, les contribuables qui n'ont pas présenté la comptabilité ou dont la comptabilité n'a pas été reconnue régulière et probante. (...) ". Aux termes de l'article Lp. 424-1 du même code : " La taxation d'office consiste en l'établissement de la base imposable par l'administration à partir des seules informations en sa possession (...). Aux termes de l'article Lp. 365-1 du même code : " Les redevables des impôts, droits et taxes prévus par le présent code doivent présenter, à toute réquisition des agents assermentés de la direction des impôts et des contributions publiques, les documents comptables, inventaires, copies de lettres, pièces de recettes et de dépenses de nature à justifier l'exactitude des résultats indiqués dans les déclarations souscrites auprès de la direction des impôts et des contributions publiques. " Aux termes de l'article 410-6 de la délibération du 5 mai 2011 relative au plan comptable général applicable en Polynésie française : " Toute entité tient un livre journal, un grand livre et un livre d'inventaire. / (...) Des documents informatiques écrits peuvent tenir lieu de livre journal et de livre d'inventaire s'ils sont identifiés, numérotés et datés dès leur établissement par des moyens offrant toute garantie en matière de preuve ".

7. Ces dispositions exigent que la comptabilité ait tout à la fois un caractère régulier et probant et permettent précisément de recourir à la procédure de taxation d'office dès lors que l'une de ces deux conditions n'est pas remplie.

8. Il est constant que le livre journal et le livre d'inventaire n'ont pas été présentés au cours des opérations de vérification. Si la société requérante a présenté le grand livre, lequel reprendrait, selon elle, toutes les opérations qui auraient dû figurer dans le livre journal mais les présente différemment, en classant les opérations par compte, tandis que le livre-journal enregistre les opérations jour par jour, il n'est pas contesté que plusieurs versions de ce grand livre ont été présentées. En outre, les écritures de la société ont été passées en fonction des mouvements figurant dans les extraits de son compte bancaire et cette méthode, basée sur les encaissements et décaissements et donc sur la trésorerie, n'est pas conforme au plan comptable général applicable en Polynésie française, qui requiert la tenue d'une comptabilité d'engagement. Par suite, et alors même que des inventaires ont pu être produits au cours du contrôle, que des pièces justificatives de dépenses et de recettes ont été présentées, et que l'administration en a fait usage, la comptabilité ne saurait être regardée comme régulière.

9. Au surplus, il résulte de l'instruction que les ventes comptabilisées de la société ne correspondaient pas au montant des factures de vente produites.

10. Au regard de ces éléments, et alors même que les autres irrégularités invoquées par l'administration, telles que les pratiques de prélèvement sur le compte courant d'associé, ne justifieraient pas d'écarter la comptabilité, ladite comptabilité ne saurait être regardée comme à la fois régulière et probante. C'est par suite à tort que les premiers juges ont accordé la décharge des impositions en litige au motif que l'administration fiscale ne pouvait être regardée comme apportant la preuve du caractère non probant de la comptabilité de l'Eurl Toanui Pearls Tahiti pour les exercices clos en 2017 et 2018.

11. Il y a lieu par l'effet dévolutif de l'appel, de statuer sur les autres moyens présentés par l'Eurl Toanui Pearls Tahiti tant devant le Tribunal administratif que devant la Cour.

Sur la régularité de la procédure d'imposition :

12. En premier lieu, aux termes de l'article 411-1 code des impôts de la Polynésie française : " Les agents assermentés de la direction des impôts et des contributions publiques ont le pouvoir d'assurer le contrôle de l'ensemble des impôts et taxes dus par les contribuables (...) ". Il résulte de l'instruction que M. A... appartenait à la catégorie 1 des agents de l'administration polynésienne et était assermenté depuis le 24 septembre 1997. Il avait le pouvoir d'assurer le contrôle de l'ensemble des impositions dont s'agit.

13. En deuxième lieu, aux termes de l'article 433-2 du code des impôts, issu de l'article 7 de la délibération n° 83-198 du 15 décembre 1983 de l'assemblée de la Polynésie française : " La commission des impôts est régulièrement saisie soit par lettre recommandée, motivée et signée du contribuable ou de son représentant, adressée au président de la commission, soit par la transmission à celui-ci d'un mémoire de la direction des impôts et des contributions publiques ". Aux termes de l'article 89 de la loi statutaire du 27 février 2004 : " le conseil des ministres prend les règlements nécessaires à la mise en œuvre des actes dénommés " lois du pays " ainsi que des autres délibérations de l'assemblée de la Polynésie française ou de sa commission permanente ". Il résulte de ces dispositions que, contrairement à ce que fait valoir l'Eurl Toanui Pearls Tahiti, le conseil des ministres a pu légalement prendre les règlements nécessaires à la mise en œuvre de l'article 433-2 du code des impôts par l'arrêté n° 1586 CM du 20 octobre 2011 portant mesure d'application de cet article de ce code et qui dispose dans son article 1er que " La lettre ou le mémoire de saisine de la commission des impôts visé à l'article 433-2 du code des impôts, doit être accompagné des copies contresignées par le demandeur, en nombre égal à celui des membres de la commission (huit), augmenté de deux (une copie de la partie adverse et un original)/ Lorsque le nombre de copies n'est pas égal à celui visé au premier alinéa, le demandeur est averti par le président de la commission des impôts que si la production n'est pas faite dans un délai de trente jours à partir de cet avertissement, la saisine pourra être rejetée comme irrecevable ".

14. En troisième lieu, l'article Lp 433-2-1 du code des impôts de la Polynésie française dispose que " Lorsque le président de la commission ou, en son absence le vice-président, constate l'irrecevabilité de la saisine, il en avise le demandeur ". Il résulte de ces dispositions que le président de la commission ou, en son absence le vice-président, était compétent pour déclarer la saisine de la commission irrecevable. Par suite, le moyen tiré de ce qu'il appartenait à la commission des impôts de statuer collégialement sur la recevabilité de la saisine doit être écarté.

15. En quatrième lieu, il résulte de ce qui a été dit plus haut que l'Eurl Toanui Pearls Tahiti a été à bon droit taxée d'office sur le fondement du 2. de l'article Lp 423-1 du code des impôts pour défaut de présentation d'une comptabilité régulière et probante. La circonstance que l'administration n'ait adressé à la société ni la mise en demeure prévue au 1 de l'article Lp 423-1 de ce code ni la demande de justification prévue à l'article Lp. 411-2 dudit code est par suite sans influence sur la régularité de la procédure mise en œuvre. Les droits de la défense ne sauraient en conséquence être regardés comme ayant été méconnus de ce chef.

16. Enfin, il résulte de ce qui a été dit ci-dessus que l'Eurl Toanui Pearls Tahiti a présenté une comptabilité. Elle ne saurait par suite, et en tout état de cause, se prévaloir utilement de ce que le procès-verbal pour défaut de présentation de comptabilité prévu au IV de l'article Lp 412-1 du code des impôts n'a pas été établi.

Sur le bien-fondé de l'imposition :

17. En premier lieu, il résulte de l'instruction que l'administration a déterminé le chiffre d'affaires à partir du montant de la caisse " négative " qu'elle a calculé à partir des ressources en espèces identifiées ainsi que des recettes employées au titre des années 2017 et 2018, ainsi, en ce qui concerne l'année 2018, d'une seule facture de vente de biens non destinés à l'exportation pour un montant de 812 000 F CFP. Il résulte de l'instruction et il n'est pas sérieusement contesté par la Polynésie française, qu'ainsi que le fait valoir la société Toanui Pearls Tahiti, le contrôleur n'a pas pris en compte, au titre des ressources en espèces, des retraits, correspondants à des chèques délivrés à la banque de Tahiti en échange de la remise du montant équivalent en espèces, ni au titre des ressources en espèces de l'exercice 2018, le solde des espèces disponibles à la clôture de l'exercice précédent, et que par suite aucune caisse " négative " ne peut être constatée au titre de la période. La société produit à l'appui de son argumentation les documents bancaires attestant de la réalité des retraits invoqués. Il y a lieu en conséquence de réduire le résultat de la société Eurl Toanui Pearls Tahiti pris en compte pour l'établissement de l'impôt sur les sociétés, de l'IRCM et de la contribution territoriale sur le revenu des capitaux mobiliers au titre de l'exercice 2018, aucun résultat n'ayant été taxé à cet égard au titre de l'exercice clos 2017, procédant du montant de 6 470 345 F CFP constaté par l'administration fiscale au titre de la caisse " négative ".

18. En deuxième lieu, il résulte de l'examen de la proposition de rectification que les factures de 700 000 F CFP et 112 000 F CFP du 27 novembre 2018 ont été prises en compte une première fois dans le résultat taxable au titre des factures produites au cours du contrôle et que leur montant a été rajouté à ce résultat au titre des " ventes effectuées sur le territoire de la Polynésie française ". L'Eurl Toanui Pearls Tahiti est par suite fondée à faire valoir que ces sommes ont été taxées deux fois.

19. En troisième lieu, l'Eurl Toanui Pearls Tahiti, qui a fixé par une décision qui lui est opposable le montant des rémunérations de son dirigeant, ne saurait se prévaloir de ce que ce montant aurait pu être supérieur pour remettre en cause le montant tant du résultat taxable à l'impôt sur les sociétés que celui des distributions reconstitué par l'administration pour la détermination de la base taxable à l'impôt sur les revenus des capitaux mobiliers et de la contribution territoriale sur le revenu des capitaux mobiliers.

20. Enfin, si la société fait valoir que la taxation du compte courant d'associé débiteur sur le fondement du a de l'article 171-1 9° du code des impôts fait double emploi avec celle, sur le fondement du b de cet article, des distributions des résultats reconstitués, elle n'apporte aucun élément concret permettant de regarder les prélèvements effectués par le gérant de la société comme des avances imputables sur les résultats qui lui auraient été attribués par la suite.

21. Il résulte de tout ce qui précède que la Polynésie française n'est pas fondée à se plaindre de ce que, par le jugement attaqué, les premiers juges ont prononcé la décharge, à hauteur d'une réduction en base de 7 282 345 F CFP, des cotisations supplémentaires d'impôt sur les sociétés, d'impôt sur les revenus des capitaux mobiliers et de contribution territoriale sur le revenu des capitaux mobiliers assignées à l'Eurl Toanui Pearls Tahiti au titre de l'exercice clos en 2018. Pour le surplus, il y a lieu de remettre à la charge de l'Eurl Toanui Pearls Tahiti, qui ne saurait dans ce litige relatif aux impositions mentionnées ci-dessus, se prévaloir de moyens relatifs à la taxe sur la valeur ajoutée, les impositions dont les premiers juges ont prononcé la décharge. Il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, de faire droit aux conclusions des parties sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

DECIDE :

Article 1er : Les cotisations supplémentaires d'impôt sur les sociétés, d'impôt sur les revenus des capitaux mobiliers et de contribution territoriale sur le revenu des capitaux mobiliers dont les premiers juges ont prononcé la décharge au titre de l'exercice clos en 2018 sont remises, en droit et pénalités, à la charge de l'Eurl Toanui Pearls Tahiti sur la base du résultat de l'exercice retenu par l'administration fiscale, réduite de la somme de 7 282 345 F CFP.

Article 2 : Les impositions dont les premiers juges ont prononcé la décharge au titre de l'exercice clos en 2017 sont remises, en droit et pénalités, à la charge de l'EURL Toanui Pearls Tahiti.

Article 3 : Le jugement n° 2100444 du 29 mars 2022 du Tribunal administratif de la Polynésie française est réformé en ce qu'il a de contraire au présent arrêt.

Article 4 : Le surplus des conclusions de la Polynésie Française et de l'Eurl Toanui Pearls Tahiti est rejeté.

Article 5 : Le présent arrêt sera notifié à la Polynésie française et à l'Eurl Toanui Pearls Tahiti.

Délibéré après l'audience du 11 octobre 2023 à laquelle siégeaient :

- Mme Brotons, président de chambre,

- M. Magnard, premier conseiller,

- Mme Fullana, première conseillère.

Rendu public par mise à disposition au greffe le 25 octobre 2023.

Le rapporteur,

F. MAGNARDLe président,

I. BROTONS

Le greffier,

C. MONGIS

La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur et des outre-mer en ce qui le concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

7

2

N° 22PA02927


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Paris
Formation : 2ème chambre
Numéro d'arrêt : 22PA02927
Date de la décision : 25/10/2023
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Composition du Tribunal
Président : Mme BROTONS
Rapporteur ?: M. Franck MAGNARD
Rapporteur public ?: M. SEGRETAIN
Avocat(s) : SEP USANG CERAN-JERUSALEMY

Origine de la décision
Date de l'import : 29/10/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.paris;arret;2023-10-25;22pa02927 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award