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17/10/2023 | FRANCE | N°23PA03314

France | France, Cour administrative d'appel de Paris, 6ème chambre, 17 octobre 2023, 23PA03314


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. A... C... a demandé au Tribunal administratif de Montreuil d'annuler l'arrêté du 9 décembre 2022 par lequel le préfet de la Seine-Saint-Denis a refusé de lui délivrer un titre de séjour, l'a obligé à quitter le territoire français dans un délai de trente jours, et a fixé le pays à destination duquel il est susceptible d'être éloigné.

Par un jugement n° 2218427 du 4 juillet 2023, le Tribunal administratif de Montreuil a rejeté sa demande.

Procédure devant la Cour :

Par une

requête, enregistrée le 25 juillet 2023, M. C..., représenté par Me Loehr, demande à la Cour :

1°)...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. A... C... a demandé au Tribunal administratif de Montreuil d'annuler l'arrêté du 9 décembre 2022 par lequel le préfet de la Seine-Saint-Denis a refusé de lui délivrer un titre de séjour, l'a obligé à quitter le territoire français dans un délai de trente jours, et a fixé le pays à destination duquel il est susceptible d'être éloigné.

Par un jugement n° 2218427 du 4 juillet 2023, le Tribunal administratif de Montreuil a rejeté sa demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête, enregistrée le 25 juillet 2023, M. C..., représenté par Me Loehr, demande à la Cour :

1°) de l'admettre provisoirement au bénéfice de l'aide juridictionnelle ;

2°) d'annuler ce jugement du Tribunal administratif de Montreuil du 4 juillet 2023 ;

3°) d'annuler, pour excès de pouvoir, l'arrêté du 9 décembre 2022 par lequel le préfet de la Seine-Saint-Denis a refusé de lui délivrer un titre de séjour, l'a obligé à quitter le territoire français dans un délai de trente jours, et a fixé le pays à destination duquel il est susceptible d'être éloigné ;

4°) d'enjoindre au préfet de la Seine-Saint-Denis, à titre principal, de lui délivrer une carte de séjour temporaire, dans un délai d'un mois à compter de la notification de l'arrêt à intervenir et sous astreinte de 150 euros par jour de retard, ou, à titre subsidiaire, de procéder au réexamen de sa situation, dans les mêmes conditions de délai et d'astreinte et, en tout état de cause, de lui délivrer, dans cette attente, une autorisation provisoire de séjour l'autorisant à travailler ;

5°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 2 000 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991.

Il soutient que :

Le refus de titre de séjour :

- est insuffisamment motivé ;

- est entaché d'un défaut d'examen sérieux de sa situation ;

- méconnaît l'article L. 423-7 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- méconnaît l'article L. 423-8 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- est entaché d'une erreur manifeste d'appréciation ;

- méconnaît l'article 3-1 de la convention internationale des droits de l'enfant ;

- méconnaît l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales.

L'obligation de quitter le territoire français :

- méconnaît l'article L. 611-3, 5°) du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile.

La requête a été communiquée au préfet de la Seine-Saint-Denis, qui n'a pas produit de mémoire en défense.

M. C... a été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du 11 septembre 2023

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- la convention internationale des droits de l'enfant ;

- le code civil ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;

- le code de justice administrative.

La présidente de la formation de jugement a dispensé la rapporteure publique, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. Niollet,

- et les observations de Me Loehr, pour M. C....

Considérant ce qui suit :

1. M. C..., ressortissant ivoirien né le 15 décembre 1981 à Abobo (Côte d'Ivoire), entré en France en 2012 selon ses déclarations, a présenté, le 28 septembre 2022, une demande de titre de séjour en qualité de parent d'enfant français sur le fondement de l'article L. 423-7 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. Il a demandé au Tribunal administratif de Montreuil l'annulation de l'arrêté du 9 décembre 2022 par lequel le préfet de la Seine-Saint-Denis a refusé de lui délivrer un titre de séjour, l'a obligé à quitter le territoire français dans un délai de trente jours, et a fixé le pays à destination duquel il pourra être éloigné. M. C... fait appel du jugement du 4 juillet 2023 par lequel le Tribunal administratif de Montreuil a rejeté sa demande.

En ce qui concerne l'admission à l'aide juridictionnelle provisoire :

2. Si M. C... sollicite, dans le cadre de sa requête, son admission à titre provisoire au bénéfice de l'aide juridictionnelle, il ressort des pièces du dossier que son admission au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale a été prononcée par une décision du bureau d'aide juridictionnelle en date du 11 septembre 2023. Dès lors, ses conclusions tendant à ce que la Cour l'admette à titre provisoire au bénéfice de l'aide juridictionnelle sont devenues sans objet.

Sur les conclusions à fin d'annulation :

3. Aux termes de l'article L. 423-7 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " L'étranger qui est père ou mère d'un enfant français mineur résidant en France et qui établit contribuer effectivement à l'entretien et à l'éducation de l'enfant dans les conditions prévues par l'article 371-2 du code civil, depuis la naissance de celui-ci ou depuis au moins deux ans, se voit délivrer une carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " d'une durée d'un an, sans que soit opposable la condition prévue à l'article L. 412-1 ". Selon l'article L. 423-8 du même code : " Pour la délivrance de la carte de séjour prévue à l'article L. 423-7, lorsque la filiation est établie à l'égard d'un parent en application de l'article 316 du code civil, le demandeur, s'il n'est pas l'auteur de la reconnaissance de paternité ou de maternité, doit justifier que celui-ci contribue effectivement à l'entretien et à l'éducation de l'enfant, dans les conditions prévues à l'article 371-2 du code civil, ou produire une décision de justice relative à la contribution à l'éducation et à l'entretien de l'enfant. / Lorsque le lien de filiation est établi mais que la preuve de la contribution n'est pas rapportée ou qu'aucune décision de justice n'est intervenue, le droit au séjour du demandeur s'apprécie au regard du respect de sa vie privée et familiale et au regard de l'intérêt supérieur de l'enfant ".

4. Il résulte de ces dispositions que l'étranger qui sollicite la délivrance d'une carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " au motif qu'il est parent d'un enfant français doit justifier, outre de sa contribution effective à l'entretien et à l'éducation de l'enfant, de celle de l'autre parent, de nationalité française, lorsque la filiation à l'égard de celui-ci a été établie par reconnaissance en application de l'article 316 du code civil. Le premier alinéa de l'article L. 423-8 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile prévoit que cette condition de contribution de l'autre parent doit être regardée comme remplie dès lors qu'est rapportée la preuve de sa contribution effective ou qu'est produite une décision de justice relative à celle-ci. Dans ce dernier cas, il appartient seulement au demandeur de produire la décision de justice intervenue, quelles que soient les mentions de celle-ci, peu important notamment qu'elles constatent l'impécuniosité ou la défaillance du parent français auteur de la reconnaissance. La circonstance que cette décision de justice ne serait pas exécutée est également sans incidence.

5. Il ressort des pièces du dossier que M. C... et Mme B..., ressortissante française, ont reconnu leur enfant, D... C..., né le 2 novembre 2017, de manière anticipée, le 24 août 2017. Par un jugement du 21 juin 2022, la juge aux affaires familiales du Tribunal judiciaire de Bobigny, saisie par M. C... le 28 février 2022 à la suite de sa séparation d'avec Mme B..., survenue en 2018, leur a accordé l'exercice conjoint de l'autorité parentale, a fixé la résidence principale D... C... chez sa mère, a accordé à M. C..., à défaut d'accord avec Mme B..., un droit de visite un dimanche sur deux de dix à dix-huit heures, et lui a imposé un versement mensuel de 100 euros au profit de son enfant. Il est constant que M. C..., qui établit avoir versé cette somme de juin 2022 à juillet 2023, s'est conformé à cette décision juridictionnelle. Il ressort en outre des pièces du dossier, et notamment de photographies, de témoignages et de diverses factures, que, contrairement à ce que le préfet a estimé, M. C... contribuait déjà à l'entretien et l'éducation de son fils pendant les années qui ont précédé ce jugement. Enfin, contrairement à ce que le préfet a estimé, M. C..., établit, par la production du même jugement de la juge aux affaires familiales, que la mère de l'enfant contribue également à son entretien et à son éducation. M. C... est donc fondé à soutenir que l'arrêté attaqué a été pris en méconnaissance de l'article L. 423-7 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile.

6. Il résulte de ce qui précède, sans qu'il y ait lieu d'examiner les autres moyens de la requête, que M. C... est fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Montreuil a rejeté sa demande.

Sur les conclusions aux fins d'injonction :

7. L'annulation de l'arrêté attaqué, pour le motif exposé ci-dessus, implique qu'il soit enjoint au préfet de la Seine-Saint-Denis de délivrer un titre de séjour portant la mention " vie privée et familiale " à M. C..., dans un délai de deux mois à compter de la notification du présent arrêt, et de lui délivrer, dans cette attente, une autorisation provisoire de séjour l'autorisant à travailler. Il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, d'assortir cette injonction d'une astreinte.

Sur les conclusions présentées sur le fondement des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991 :

8. Il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce et sous réserve que Me Loehr renonce à percevoir la somme correspondant à la part contributive de l'Etat, de mettre à la charge de l'Etat le versement d'une somme de 1 000 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridique.

D E C I D E :

Article 1er : Il n'y a pas lieu de statuer sur les conclusions de M. C... tendant au bénéfice de l'aide juridictionnelle provisoire.

Article 2 : Le jugement n°2218427 du Tribunal administratif de Montreuil du 4 juillet 2023 et l'arrêté du préfet de la Seine-Saint-Denis du 9 décembre 2022 sont annulés.

Article 3 : Il est enjoint au préfet de la Seine-Saint-Denis de délivrer à M. C... un titre de séjour dans un délai de deux mois à compter de la notification du présent arrêt et de lui délivrer, dans cette attente, une autorisation provisoire de séjour.

Article 4 : L'Etat versera à Me Loehr une somme de 1 000 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991, sous réserve que Me Loehr renonce à percevoir la somme correspondant à la part contributive de l'Etat.

Article 5 : Le présent arrêt sera notifié à M. A... C..., à Me Loehr et au ministre de l'intérieur et des outre-mer.

Copie en sera adressée au préfet de la Seine-Saint-Denis.

Délibéré après l'audience du 3 octobre 2023, à laquelle siégeaient :

Mme Bonifacj, présidente de chambre,

M. Niollet, président-assesseur,

M. Pagès, premier conseiller.

Rendu public par mise à disposition au greffe, le 17 octobre 2023.

Le rapporteur,

J-C. NIOLLETLa présidente,

J. BONIFACJ La greffière,

Z. SAADAOUI

La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur et des outre-mer en ce qui le concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

2

N° 23PA03314


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Paris
Formation : 6ème chambre
Numéro d'arrêt : 23PA03314
Date de la décision : 17/10/2023
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : Mme BONIFACJ
Rapporteur ?: M. Jean-Christophe NIOLLET
Rapporteur public ?: Mme NAUDIN
Avocat(s) : LOEHR

Origine de la décision
Date de l'import : 22/10/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.paris;arret;2023-10-17;23pa03314 ?
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