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11/10/2023 | FRANCE | N°23PA01447

France | France, Cour administrative d'appel de Paris, 7ème chambre, 11 octobre 2023, 23PA01447


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. D... a demandé au Tribunal administratif de Paris d'annuler l'arrêté du 15 février 2023 par lequel le préfet de police lui a fait obligation de quitter le territoire français, a refusé de lui accorder un délai de départ volontaire et a fixé le pays à destination duquel il doit être éloigné, ainsi que l'arrêté par lequel il a prononcé à son encontre une interdiction de retour sur le territoire français pendant une durée de trois ans.

Par un jugement n° 2303351/8 du 22 février 2023, le

Tribunal administratif de Paris a annulé la décision portant interdiction de retour sur l...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. D... a demandé au Tribunal administratif de Paris d'annuler l'arrêté du 15 février 2023 par lequel le préfet de police lui a fait obligation de quitter le territoire français, a refusé de lui accorder un délai de départ volontaire et a fixé le pays à destination duquel il doit être éloigné, ainsi que l'arrêté par lequel il a prononcé à son encontre une interdiction de retour sur le territoire français pendant une durée de trois ans.

Par un jugement n° 2303351/8 du 22 février 2023, le Tribunal administratif de Paris a annulé la décision portant interdiction de retour sur le territoire français et a rejeté le surplus des conclusions de M. C....

Procédure devant la Cour :

Par une requête et un mémoire, enregistrés respectivement le 9 avril 2023 et le 21 septembre 2023 M. C..., représenté par Me De Sa-Pallix, demande à la Cour :

1°) d'annuler l'article 2 du jugement n° 2303351/8 du 22 février 2023 du Tribunal administratif de Paris ;

2°) d'annuler, pour excès de pouvoir, l'arrêté du 15 février 2023 par lequel le préfet de police lui a fait obligation de quitter le territoire français, a refusé de lui accorder un délai de départ volontaire et a fixé le pays à destination duquel il doit être éloigné ;

3°) de prononcer sa remise en liberté immédiate ;

4°) d'enjoindre, à titre principal, au préfet de police ou à tout préfet territorialement compétent, de lui délivrer une carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " dans un délai de deux mois à compter de la notification de l'arrêt à intervenir et de lui délivrer pendant cet examen une autorisation provisoire de séjour avec autorisation de travail dans un délai de quinze jours, sous astreinte de 100 euros par jour de retard ;

5°) à titre subsidiaire, de lui enjoindre de réexaminer sa situation administrative dans le délai d'un mois à compter de la notification de l'arrêt à intervenir et de lui délivrer pendant cet examen une autorisation provisoire de séjour avec autorisation de travail dans un délai de quinze jours ;

6°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 1 500 euros à verser à Me De Sa-Pallix sur le fondement des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991 ou, en cas de refus de l'aide juridictionnelle, à verser à lui-même.

Il soutient que :

- le jugement a omis de statuer sur les moyens tirés de l'irrecevabilité de certaines des pièces produites par le préfet, de la violation du secret de l'instruction pénale, de la méconnaissance du principe du contradictoire, de la méconnaissance du champ d'application de la loi, de l'erreur de droit, de ce que le préfet devait examiner s'il peut prétendre de plein droit à la délivrance d'un titre de séjour, de la violation par la décision de refus de départ volontaire des articles L. 612-2 et L. 612-3 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et du détournement de pouvoir ;

- pour les mêmes motifs le jugement n'est pas motivé ;

- la décision portant obligation de quitter le territoire français a été prise par une autorité incompétente ;

- elle est insuffisamment motivée en fait et en droit ;

- elle a été prise à l'issue d'une procédure irrégulière faute de remise au requérant du dossier prévu par l'article 1er de l'arrêté du 27 décembre 2016 ;

- elle a été prise en méconnaissance de son droit d'être entendu ;

- elle a été prise à l'issue d'une procédure irrégulière, le préfet ayant violé le secret de l'instruction pénale protégé par l'article 11 du code procédure pénale ;

- elle a été prise à l'issue d'une procédure irrégulière faute de preuve que les fichiers ont été consultés par un agent de la préfecture habilité à le faire ;

- elle a été prise en méconnaissance du principe du contradictoire ;

- elle est entachée de détournement de pouvoir ;

- le préfet, qui disposait de tous les éléments sur ce point, n'a pas pris en considération son état de santé ;

- elle méconnaît l'article L. 611-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile dès lors qu'il était protégé contre l'éloignement par l'effet du 9° de l'article L. 611-3 du même code ;

- elle est entachée d'erreur de fait quant à sa situation personnelle ;

- il ne constitue pas une menace pour l'ordre public ;

-il peut prétendre de plein droit à la délivrance d'un titre de séjour sur le fondement de l'article L. 423-23 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- la décision méconnaît les stipulations de l'article 7 de la Charte des droits fondamentaux de l'Union européenne et de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- elle est entachée d'erreur manifeste d'appréciation ;

- la décision de refus de délai de départ volontaire est privée de base légale par l'illégalité de l'obligation de quitter le territoire français ;

- elle n'est pas motivée en fait et en droit ;

- elle est entachée d'erreur de fait sur sa situation personnelle ;

- elle méconnaît les articles L. 612-2 et L. 612-3 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- elle est entachée d'erreur manifeste d'appréciation ;

- la décision d'interdiction de retour sur le territoire français n'est pas motivée en fait et en droit.

Par un mémoire en défense, enregistré le 12 septembre 2023, le préfet de police conclut au rejet de la requête.

Il soutient que les moyens soulevés par M. C... ne sont pas fondés.

M. C... a été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du bureau d'aide juridictionnelle près le Tribunal judiciaire de Paris du 17 mai 2023.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;

- le code de justice administrative.

Le président de la formation de jugement a dispensé la rapporteure publique, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Le rapport de Mme Hamon a été entendu au cours de l'audience publique.

Considérant ce qui suit :

1. M. C..., ressortissant sénégalais né le 22 mai 1986, a fait l'objet, à la suite du rejet de sa demande d'asile par une décision de l'office français de protection des réfugiés et apatrides (OFPRA) du 31 janvier 2020, confirmée par un arrêt de la Cour nationale du droit d'asile (CNDA) du 7 juillet 2020, d'un arrêté du préfet de police du 15 février 2023 l'obligeant à quitter le territoire français, lui refusant l'octroi d'un délai de départ volontaire et fixant le pays de destination vers lequel il sera éloigné, ainsi que d'un arrêté du même jour prononçant à son encontre une interdiction de retour sur le territoire français d'une durée de trente-six mois. Par un jugement du 22 février 2023 le magistrat désigné par le président du Tribunal administratif de Paris a annulé la décision d'interdiction de retour sur le territoire français et rejeté le surplus des conclusions de M. C... dirigé contre les décisions l'obligeant à quitter le territoire français, lui refusant l'octroi d'un délai de départ volontaire et fixant le pays de destination vers lequel il sera éloigné. M. C... fait appel de ce jugement en tant qu'il a rejeté le surplus de ses conclusions.

Sur la régularité du jugement :

2. Si le requérant soutient que le jugement est intervenu à l'issue d'une procédure irrégulière, compte tenu de la violation de l'article R. 40-29 du code de procédure pénale qui protège le secret de l'instruction, un tel moyen est inopérant dès lors que le juge administratif comme le préfet de police, auquel il n'est pas opposable, peut se fonder sur des pièces provenant d'une instruction pénale, qu'elles soient ou non couvertes par ce secret de l'instruction. Il n'y a dès lors pas lieu d'écarter ces pièces des débats.

3. Il ressort par ailleurs des termes du jugement attaqué, qui est suffisamment motivé, que le Tribunal, qui n'est pas tenu de répondre aux moyens inopérants ni aux arguments développés au soutien des moyens, a répondu en son point 9 aux moyens tirés de l'irrecevabilité de certaines pièces, de la violation du secret de l'instruction et du détournement de pouvoir, en son point 10 au moyen tiré de la violation du principe du contradictoire, en son point 7 au moyen tiré de l'erreur de droit, en son point 15 au moyen tiré de la violation des articles L. 612-2 et L. 612-3 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. Il n'était pas tenu de répondre au moyen, qui n'est pas opérant, tiré de ce que le préfet aurait omis de vérifier s'il entrait dans l'un des cas permettant de lui délivrer un titre de séjour de plein droit.

Sur le bien-fondé du jugement :

En ce qui concerne l'obligation de quitter le territoire français :

4. En premier lieu, par un arrêté n° 2023-00059 du 23 janvier 2023 régulièrement publié au recueil spécial des actes administratifs de la préfecture de police n° 75-2023-056 du 23 janvier 2023, le préfet de police a donné au préfet délégué à l'immigration délégation de signature à l'effet de signer tous actes et décisions relatifs à l'exercice des missions fixées par les articles R.*122-1 et R.*122-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, au nombre desquelles figurent les décisions d'éloignement des étrangers en situation irrégulière, et à M. A... B..., attaché de l'administration de l'Etat, délégation à l'effet de signer les décisions dans la limite de ses attributions, dont relève la police des étrangers, en cas d'absence ou d'empêchement d'autorités dont il ne ressort pas des pièces du dossier qu'elles n'ont pas été absentes ou empêchées lors de la signature de l'acte attaqué. Par suite, le moyen tiré de ce que l'arrêté attaqué aurait été signé par une autorité incompétente doit être écarté comme manquant en fait.

5. En deuxième lieu, il ressort des termes de la décision attaquée, qui n'a pas à mentionner tous les éléments relatifs à la situation individuelle de M. C..., qu'elle énonce les considérations de droit et de fait sur lesquelles elle se fonde et est, par suite, suffisamment motivée.

6. En troisième lieu, aux termes de l'article L. 611-3 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Ne peuvent faire l'objet d'une décision portant obligation de quitter le territoire français : / (...) 9° L'étranger résidant habituellement en France si son état de santé nécessite une prise en charge médicale dont le défaut pourrait avoir pour lui des conséquences d'une exceptionnelle gravité et si, eu égard à l'offre de soins et aux caractéristiques du système de santé du pays de renvoi, il ne pourrait pas y bénéficier effectivement d'un traitement approprié. (...) ". L'article R. 611-1 du même code précise que : " Pour constater l'état de santé de l'étranger mentionné au 9° de l'article L. 611-3, l'autorité administrative tient compte d'un avis émis par un collège de médecins à compétence nationale de l'Office français de l'immigration et de l'intégration (...) ".

7. Il résulte de ces dispositions que, dès lors qu'elle dispose d'éléments d'information suffisamment précis permettant d'établir qu'un étranger, résidant habituellement en France, présente un état de santé susceptible de le faire entrer dans la catégorie qu'elles prévoient des étrangers qui ne peuvent faire l'objet d'une mesure d'éloignement, l'autorité préfectorale doit, lorsqu'elle envisage de prendre une telle mesure à son égard, recueillir préalablement l'avis du collège de médecins de l'office français de l'immigration et de l'intégration (OFII).

8. Par ses seules affirmations, qui ne sont assorties d'aucune précision quant à son état de santé et à la prise en charge médicale qu'il nécessiterait, M. C... n'établit nullement qu'il aurait porté à la connaissance du préfet de police un quelconque élément d'information sur son état de santé, qui aurait dû conduire cette autorité à solliciter l'avis du collège de médecins de l'OFII. Par suite, le moyen tiré de ce que la décision d'obligation de quitter le territoire français aurait été prise à l'issue d'une procédure irrégulière, faute de consultation de ce collège, doit être écarté.

9. Il découle de la jurisprudence de la Cour de justice de l'Union européenne que le droit d'être entendu fait partie intégrante du respect des droits de la défense, principe général du droit de l'Union, et se définit comme celui de toute personne de faire connaître, de manière utile et effective, son point de vue au cours d'une procédure administrative avant l'adoption de toute décision susceptible d'affecter de manière défavorable ses intérêts. Ce droit implique ainsi que l'autorité préfectorale, avant de prendre à l'encontre d'un étranger une décision portant obligation de quitter le territoire français, mette l'intéressé à même de présenter ses observations écrites et lui permette, sur sa demande, de faire valoir des observations orales, de telle sorte qu'il puisse faire connaître, de manière utile et effective, son point de vue sur la mesure envisagée avant qu'elle n'intervienne. Ce droit n'implique pas systématiquement l'obligation, pour l'administration, d'organiser, de sa propre initiative, un entretien avec l'intéressé, ni même d'inviter ce dernier à produire ses observations, mais suppose seulement que, informé de ce qu'une décision lui faisant grief est susceptible d'être prise à son encontre, il soit en mesure de présenter spontanément des observations écrites ou de solliciter un entretien pour faire valoir ses observations orales. Une atteinte à ce droit n'est susceptible d'affecter la régularité de la procédure à l'issue de laquelle la décision faisant grief est prise que si la personne concernée a été privée de la possibilité de présenter des éléments pertinents qui auraient pu influer sur le contenu de la décision, ce qu'il lui revient, le cas échéant, d'établir devant la juridiction saisie.

10. Dès lors que la décision attaquée fait suite au rejet de la demande d'asile présentée par M. C..., et que celui-ci ne fait état d'aucun élément, notamment de nature médicale, qu'il aurait été empêché de porter à la connaissance du préfet de police et qui aurait pu influer sur le contenu de la décision, le moyen tiré de la méconnaissance du principe général du droit d'être entendu doit être écarté.

11. Aux termes des articles L. 743-1 et R. 733-32 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile alors applicable compte tenu des dates auxquelles l'OFPRA et la CNDA se sont prononcés : " Le demandeur d'asile dont l'examen de la demande relève de la compétence de la France et qui a introduit sa demande auprès de l'Office français de protection des réfugiés et apatrides bénéficie du droit de se maintenir sur le territoire français jusqu'à la notification de la décision de l'office ou, si un recours a été formé, jusqu'à la notification de la décision de la Cour nationale du droit d'asile (...) " et " Le secrétaire général de la cour notifie la décision de la cour au requérant par lettre recommandée avec demande d'avis de réception dans les conditions prévues au premier alinéa de l'article R. 213-6. Il la notifie également au directeur général de l'Office français de protection des réfugiés et des apatrides. ". Par ailleurs, aux termes du paragraphe III de l'article R. 723-19 du même code : " La date de notification de la décision de l'office et, le cas échéant, de la Cour nationale du droit d'asile qui figure dans le système d'information de l'office et est communiquée au préfet compétent et au directeur général de l'Office français de l'immigration et de l'intégration au moyen de traitements informatiques fait foi jusqu'à preuve du contraire ".

12. Il ressort des pièces du dossier, et notamment de la fiche issue du système informatique de l'Office, Telemofpra, produite par le préfet de police, que la décision du 7 juillet 2020 par laquelle la CNDA a rejeté la demande d'asile de l'intéressé lui a été notifiée le 6 août 2020, date qui fait foi jusqu'à preuve du contraire, ainsi qu'il résulte des dispositions du III de l'article R. 723-19 citées au point précédent. Dès lors, le moyen tiré de la violation des articles L. 743-1 et R. 733-32 précités du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, et d'un droit au maintien sur le territoire français faisant obstacle à un éloignement, doit être écarté.

13. Aux termes de l'article L. 611-3 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Ne peuvent faire l'objet d'une décision portant obligation de quitter le territoire français : (...) / 9° L'étranger résidant habituellement en France si son état de santé nécessite une prise en charge médicale dont le défaut pourrait avoir pour lui des conséquences d'une exceptionnelle gravité et si, eu égard à l'offre de soins et aux caractéristiques du système de santé du pays de renvoi, il ne pourrait pas y bénéficier effectivement d'un traitement approprié ".

14. Faute de donner une quelconque précision quant à son état de santé et à la prise en charge médicale qu'il aurait nécessité à la date de la décision attaquée, le requérant n'est pas fondé à soutenir que la décision attaquée aurait méconnu les dispositions précitées de L. 611-3 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. Pour les mêmes motifs, il n'est pas plus fondé à soutenir que le préfet de police aurait commis une erreur manifeste dans l'appréciation de son état de santé.

15. Aux termes de l'article 8 de la convention de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " 1. Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance - 2. Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale, ou à la protection des droits et libertés d'autrui ".

16. Si M. C... fait valoir qu'il est parfaitement intégré à la société française et que des membres de sa famille résident de manière régulière sur le territoire français, il ressort toutefois des pièces du dossier qu'il est célibataire et père de trois enfants, qui résident à l'étranger et dont il assure l'entretien. Dans ces conditions, le préfet de police n'a pas porté au droit de l'intéressé au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée aux buts en vue desquels la décision contestée a été prise. Le moyen tiré de la violation de l'article 8 de la convention de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, ainsi que, pour les mêmes motifs, ceux tirés de l'erreur de fait ainsi que de l'erreur manifeste d'appréciation sur sa situation familiale doivent être écartés.

17. Enfin, dès lors que l'administration peut légalement se fonder sur l'ensemble des informations qui ont été portées à sa connaissance et ce, alors même que ces informations pourraient être couvertes, du point de vue d'une procédure pénale en cours, par le secret de l'instruction, le requérant n'est pas fondé à soutenir que la décision serait entachée d'un détournement de pouvoir à raison de la mention d'éléments provenant d'une instruction pénale.

18. Il résulte de ce qui précède que M. C... n'est pas fondé à demander l'annulation de la décision du 15 février 2023 l'obligeant à quitter le territoire français.

En ce qui concerne le refus de délai de départ volontaire :

19. En premier lieu, compte tenu de ce qui précède M. C... n'est pas fondé à exciper, à l'appui des conclusions dirigées contre le refus de lui octroyer un délai de départ volontaire, de l'illégalité dont serait entachée la décision du 15 février 2023 l'obligeant à quitter le territoire français.

20. En deuxième lieu, par ses seules affirmations, le requérant n'établit nullement qu'à la date de la décision attaquée, des restrictions sanitaires auraient rendu impossible son départ volontaire, sans délai, du territoire français et, par suite, entaché la décision de refus d'octroi d'un délai de départ volontaire d'une erreur manifeste d'appréciation.

21. En troisième lieu, aux termes de l'article L. 612-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " L'étranger faisant l'objet d'une décision portant obligation de quitter le territoire français dispose d'un délai de départ volontaire de trente jours à compter de la notification de cette décision (...) ". Aux termes de l'article L. 612-2 de ce même code : " Par dérogation à l'article L. 612-1, l'autorité administrative peut refuser d'accorder un délai de départ volontaire dans les cas suivants : 1° Le comportement de l'étranger constitue une menace pour l'ordre public ; (...) 3° Il existe un risque que l'étranger se soustraie à la décision portant obligation de quitter le territoire français dont il fait l'objet ". Et aux termes de l'article L. 612-3 : " Le risque mentionné au 3° de l'article L. 612-2 peut être regardé comme établi, sauf circonstance particulière, dans les cas suivants : (...) ; 8° L'étranger ne présente pas de garanties de représentation suffisantes, notamment parce qu'il ne peut présenter des documents d'identité ou de voyage en cours de validité (...) qu'il ne justifie pas d'une résidence effective et permanente dans un local affecté à son habitation principale (...) ".

22. S'il ressort des pièces du dossier qu'à la date de la décision attaquée M. C..., seulement auditionné dans le cadre d'une procédure pénale, ne faisait l'objet ni d'une mise en examen, ni d'une condamnation pénale et, par suite, ne représentait pas une menace pour l'ordre public, il ressort des termes de la décision attaquée que le préfet de police aurait pris la même décision s'il s'était uniquement fondé sur l'autre motif énoncé dans la décision attaquée, tiré de ce qu'il existe un risque que l'intéressé ne se soustraie à la décision portant obligation de quitter le territoire français dont il fait l'objet, faute de produire un passeport et des preuves de résidence effective et permanente.

23. A cet égard, si M. C... produit en appel une copie de son passeport en cours de validité à la date de la décision attaquée, par les pièces et attestations qu'il produit, relatives à la période antérieure à 2022, il n'établit pas qu'à cette même date du 15 février 2023, il disposait d'une résidence effective et permanente dans un local affecté à son habitation principale. Dans ces conditions, il n'est pas fondé à soutenir qu'en ayant refusé de lui octroyer un délai de départ volontaire, le préfet de police aurait méconnu les dispositions précitées des articles L. 612-2 et L. 612-3 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile.

24. Il résulte de ce qui précède que M. C... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que le Tribunal a rejeté ses conclusions dirigées contre la décision du 15 février 2023 refusant de lui octroyer un délai de départ volontaire.

En ce qui concerne la décision fixant le pays de destination :

25. En l'absence de tout moyen dirigé contre cette décision, les conclusions tendant à son annulation ne peuvent qu'être rejetées.

Sur les conclusions aux fins d'injonction :

26. Le présent arrêt n'impliquant aucune mesure d'exécution, les conclusions aux fins d'injonction présentées par M. C... ne peuvent qu'être rejetées.

Sur les frais de l'instance :

27. L'Etat n'étant pas, en la présente instance, la partie perdante, les conclusions présentées par M. C..., au bénéfice de son conseil, sur le fondement des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991, ne peuvent qu'être rejetées.

DÉCIDE :

Article 1er : La requête de M. C... est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. D... et au ministre de l'intérieur et des outre-mer.

Copie en sera adressée au préfet de police

Délibéré après l'audience du 26 septembre 2023, à laquelle siégeaient :

- M. Auvray, président de chambre,

- Mme Hamon, présidente-assesseure,

- Mme Zeudmi Sahraoui, première conseillère,

Rendu public par mise à disposition au greffe le 11 octobre 2023

La rapporteure,

P. HAMONLe président,

B. AUVRAY

La greffière,

C. BUOT La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur et des outre-mer en ce qui le concerne, ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

5

N° 23PA01447


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Paris
Formation : 7ème chambre
Numéro d'arrêt : 23PA01447
Date de la décision : 11/10/2023
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : M. AUVRAY
Rapporteur ?: Mme Perrine HAMON
Rapporteur public ?: Mme JURIN
Avocat(s) : DE SA - PALLIX

Origine de la décision
Date de l'import : 15/10/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.paris;arret;2023-10-11;23pa01447 ?
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