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02/10/2023 | FRANCE | N°22PA04739

France | France, Cour administrative d'appel de Paris, 8ème chambre, 02 octobre 2023, 22PA04739


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. B... A... a demandé au Tribunal administratif de Paris d'annuler l'arrêté du 2 juillet 2021 par lequel le préfet de police a refusé de lui délivrer un titre de séjour, l'a obligé à quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays à destination duquel il pourra être éloigné à l'issue de ce délai.

Par un jugement n° 2203317 du 24 mai 2022, le Tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête enre

gistrée le 4 novembre 2022, M. A..., représenté par Me Escuillié, demande à la Cour :

1°) d'annuler l...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. B... A... a demandé au Tribunal administratif de Paris d'annuler l'arrêté du 2 juillet 2021 par lequel le préfet de police a refusé de lui délivrer un titre de séjour, l'a obligé à quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays à destination duquel il pourra être éloigné à l'issue de ce délai.

Par un jugement n° 2203317 du 24 mai 2022, le Tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête enregistrée le 4 novembre 2022, M. A..., représenté par Me Escuillié, demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement du 24 mai 2022 du Tribunal administratif de Paris ;

2°) d'annuler l'arrêté du 2 juillet 2021 du préfet de police ;

3°) d'enjoindre au préfet de police de lui délivrer un titre de séjour sur le fondement de l'article L. 435-3 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ou de l'article L. 423-23 du même code, dans un délai d'un mois à compter de la notification de l'arrêt à intervenir, sous astreinte de 150 euros par jour de retard et de lui délivrer une autorisation provisoire de séjour et de travail ou un récépissé de demande de titre de séjour l'autorisant à travailler, dans un délai de dix jours à compter de la notification de l'arrêt à intervenir, sous la même astreinte ou, à titre subsidiaire, de procéder au réexamen de sa situation dans un délai de quinze jours à compter de la notification de l'arrêt à intervenir, sous astreinte de 150 euros par jour de retard et de lui délivrer, pendant ce réexamen, une autorisation provisoire de séjour l'autorisant à travailler ou un récépissé de demande de titre de séjour l'autorisant à travailler dans un délai de dix jours à compter de la notification de l'arrêt à intervenir, sous la même astreinte ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 1 500 euros à verser à Me Escuillié au titre des dispositions des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi n° 91- 647 du 10 juillet 1991.

Il soutient que :

En ce qui concerne la décision de refus de titre de séjour :

- la décision contestée méconnaît les dispositions de l'article L. 435-3 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile dès lors que, d'une part, il établit avoir été dans l'impossibilité de déposer sa demande de titre de séjour avant son 19ème anniversaire compte tenu de sa précarité et de sa vulnérabilité entre l'âge de 18 et 19 ans, aggravées par la crise sanitaire et par l'absence d'un accompagnement social et, d'autre part, il remplit les conditions prévues par ces dispositions ;

- elle méconnaît les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales dès lors qu'il est entré en France à l'âge de 17 ans, qu'il est scolarisé en classe de première en vue d'obtenir un baccalauréat professionnel Aménagement et finition du bâtiment après avoir obtenu un CAP, qu'il n'a plus de contact avec sa famille résidant au Cameroun et qu'il sera isolé en cas de retour dans son pays d'origine ;

- elle est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation ;

En ce qui concerne l'obligation de quitter le territoire français :

- la décision portant obligation de quitter le territoire français est privée de base légale du fait de l'illégalité de la décision de refus de séjour ;

- elle méconnaît les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales.

Par un mémoire en défense enregistré le 23 février 2023, le préfet de police conclut au rejet de la requête.

Il soutient que les moyens soulevés par le requérant ne sont pas fondés.

Par une décision du 21 septembre 2022, le bureau d'aide juridictionnelle près le tribunal judiciaire de Paris a accordé l'aide juridictionnelle totale à M. A....

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;

- le code de justice administrative.

Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Le rapport de Mme Larsonnier a été entendu au cours de l'audience publique.

Considérant ce qui suit :

1. M. A..., ressortissant camerounais né le 10 octobre 2001 à Yaoundé (Cameroun), et entré en France le 23 septembre 2018 selon ses déclarations, a sollicité la délivrance d'un titre de séjour sur le fondement des dispositions de l'article L. 423-22 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. Par un arrêté du 2 juillet 2021, le préfet de police a refusé de lui délivrer un titre de séjour, l'a obligé à quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays à destination duquel il pourra être éloigné à l'issue de ce délai. Par un jugement du 24 mai 2022, dont M. A... relève appel, le Tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande tendant à l'annulation de cet arrêté.

Sur la décision de refus de séjour :

2. En premier lieu, aux termes de l'article L. 435-3 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " A titre exceptionnel, l'étranger qui a été confié à l'aide sociale à l'enfance entre l'âge de seize ans et l'âge de dix-huit ans et qui justifie suivre depuis au moins six mois une formation destinée à lui apporter une qualification professionnelle peut, dans l'année qui suit son dix-huitième anniversaire, se voir délivrer une carte de séjour temporaire portant la mention " salarié " ou " travailleur temporaire ", sous réserve du caractère réel et sérieux du suivi de cette formation, de la nature de ses liens avec sa famille restée dans le pays d'origine et de l'avis de la structure d'accueil sur l'insertion de cet étranger dans la société française. (...). "

3. Lorsqu'il examine une demande d'admission exceptionnelle au séjour en qualité de " salarié " ou " travailleur temporaire ", présentée sur le fondement de ces dispositions, le préfet vérifie tout d'abord que l'étranger est dans l'année qui suit son dix-huitième anniversaire, qu'il a été confié à l'aide sociale à l'enfance entre l'âge de seize ans et dix-huit ans, qu'il justifie suivre depuis au moins six mois une formation destinée à lui apporter une qualification professionnelle et que sa présence en France ne constitue pas une menace pour l'ordre public. Il lui revient ensuite, dans le cadre du large pouvoir dont il dispose, de porter une appréciation globale sur la situation de l'intéressé, au regard notamment du caractère réel et sérieux du suivi de cette formation, de la nature de ses liens avec sa famille restée dans son pays d'origine et de l'avis de la structure d'accueil sur l'insertion de cet étranger dans la société française.

4. M. A... soutient qu'il était dans l'impossibilité de déposer sa demande de titre de séjour avant son dix-neuvième anniversaire compte tenu de sa précarité et de sa vulnérabilité entre l'âge de dix-huit et dix-neuf ans, aggravées par la crise sanitaire et par l'absence d'un accompagnement social alors que la procédure de dépôt d'une demande de titre de séjour en qualité d'ancien mineur non accompagné est particulièrement complexe et nécessitait de disposer de moyens informatiques. Il est constant que M. A... a formé sa demande de titre de séjour sur le fondement de l'article L. 435-3 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile le 10 mai 2021 alors qu'il était âgé de dix-neuf ans et sept mois. Or, il n'établit pas avoir été dans l'impossibilité de déposer sa demande de titre de séjour ni de se faire accompagner dans ces démarches auprès des services de la préfecture dans l'année qui a suivi son dix-huitième anniversaire. Dans ces conditions, le préfet de police pouvait, pour ce seul motif, refuser de lui délivrer un titre de séjour sur le fondement des dispositions de l'article L. 435-3 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile.

5. En deuxième lieu, aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " 1. Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance. / 2. Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale ou à la protection des droits et libertés d'autrui ".

6. M. A... est entré en France le 23 septembre 2018 selon ses déclarations, soit à l'âge de 16 ans. Il est constant que par une ordonnance de placement provisoire du 3 janvier 2019, il a été confié aux services de l'aide sociale à l'enfance pour une période de six mois. Il ressort des pièces du dossier qu'après une période d'errance débutée en novembre 2019, il a été pris en charge par l'association Aurore à compter du 23 octobre 2020. Après avoir suivi une formation de remise à niveau pendant l'année 2019, il a ensuite été inscrit en CAP Peinture et a obtenu ce diplôme le 5 juillet 2021. La circonstance qu'il a poursuivi ses études en classe de première professionnelle Aménagement finition bâtiment au titre de l'année scolaire 2021-2022 est sans incidence sur la légalité de la décision contestée qui s'apprécie à la date à laquelle elle a été prise. M. A... est célibataire et sans charge de famille en France. Il ne justifie pas avoir développé des liens personnels en France. En outre, il n'est pas établi que l'intéressé serait dépourvu de toutes attaches dans son pays d'origine. Dans ces conditions, et même si M. A... témoigne d'une volonté d'intégration, le préfet de police n'a pas porté à son droit au respect de sa vie privée et familiale, en lui refusant la délivrance d'un titre de séjour, une atteinte disproportionnée aux buts en vue desquels la décision a été prise et, par suite, n'a pas méconnu les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales.

7. En troisième et dernier lieu, pour les mêmes motifs que ceux énoncés au point 6 le préfet n'a pas commis d'erreur manifeste dans l'appréciation des conséquences de sa décision sur la situation personnelle de M. A....

Sur la décision portant obligation de quitter le territoire français :

8. En premier lieu, les moyens dirigés contre la décision de refus de séjour ayant été écartés, l'exception d'illégalité de cette décision invoquée à l'appui des conclusions de M. A... dirigées contre la décision portant obligation de quitter le territoire français ne peut qu'être écartée par voie de conséquence.

9. En second lieu, pour les mêmes motifs que ceux énoncés au point 6, le préfet n'a pas méconnu les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales.

10. Il résulte de tout ce qui précède, et sans qu'il soit besoin d'examiner la recevabilité de la requête, que M. A... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande. Par voie de conséquence, ses conclusions à fin d'injonction sous astreinte et celles présentées au titre de l'article L.761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 ne peuvent qu'être rejetées.

DÉCIDE :

Article 1er : La requête de M. A... est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. B... A... et au ministre de l'intérieur et des outre-mer.

Copie en sera adressée au préfet de police.

Délibéré après l'audience du 12 septembre 2023, à laquelle siégeaient :

- M. Ho Si Fat, président de la formation de jugement,

- Mme Collet, première conseillère

- Mme Larsonnier, première conseillère.

Rendu public par mise à disposition au greffe le 2 octobre 2023.

La rapporteure,

V. LARSONNIER Le président,

F. HO SI FAT

La greffière,

N. COUTY

La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur et des outre-mer en ce qui le concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

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Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Paris
Formation : 8ème chambre
Numéro d'arrêt : 22PA04739
Date de la décision : 02/10/2023
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : M. HO SI FAT
Rapporteur ?: Mme Virginie LARSONNIER
Rapporteur public ?: Mme BERNARD
Avocat(s) : ESCUILLIE

Origine de la décision
Date de l'import : 08/10/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.paris;arret;2023-10-02;22pa04739 ?
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