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02/10/2023 | FRANCE | N°22PA00725

France | France, Cour administrative d'appel de Paris, 8ème chambre, 02 octobre 2023, 22PA00725


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. C... A... a demandé au Tribunal des pensions militaires d'invalidité de Paris puis au Tribunal administratif de Paris auquel a été transféré son recours d'annuler la décision du 19 novembre 2018 par laquelle le directeur de la caisse nationale militaire de sécurité sociale a refusé de prendre en charge sa demande d'appareillage auditif au titre de l'article L. 212-1 du code des pensions militaires d'invalidité et des victimes de guerre et de la décision du 24 avril 2019 en tant que lui a été refus

e la prise en charge de l'intégralité du coût de ses prothèses auditives.

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Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. C... A... a demandé au Tribunal des pensions militaires d'invalidité de Paris puis au Tribunal administratif de Paris auquel a été transféré son recours d'annuler la décision du 19 novembre 2018 par laquelle le directeur de la caisse nationale militaire de sécurité sociale a refusé de prendre en charge sa demande d'appareillage auditif au titre de l'article L. 212-1 du code des pensions militaires d'invalidité et des victimes de guerre et de la décision du 24 avril 2019 en tant que lui a été refusée la prise en charge de l'intégralité du coût de ses prothèses auditives.

Par jugement n° 1923752/5-3 du 15 décembre 2021, le Tribunal administratif de Paris a annulé la décision du 19 novembre 2018 et la décision 24 avril 2019 en tant qu'elle refuse partiellement de prendre en charge les appareils auditifs de M. A... et a condamné la caisse nationale militaire de sécurité sociale à lui rembourser les sommes qu'il a dû verser, sous déduction de celles déjà prises en charge le cas échéant par des organismes de sécurité sociale et de protection sociale complémentaire, avec intérêt au taux légal à compter du 19 novembre 2018 et capitalisation des intérêts à compter du 19 novembre 2019 puis à chaque échéance annuelle.

Procédure devant la Cour :

Par requête et un mémoire enregistrés les 16 février 2022 et 20 février 2023, la caisse nationale militaire de sécurité sociale, représentée par son directeur, demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1923752/5-3 du 15 décembre 2021 du Tribunal administratif de Paris ;

2°) de rejeter la demande de M. A....

Elle soutient que :

- le jugement attaqué a méconnu les dispositions de l'article L. 213-1 du code des pensions militaires d'invalidité et des victimes de guerre ;

- en remboursant les prothèses auditives de M. A... uniquement à hauteur de 2 800 euros et non intégralement, la CNMSS a fait une juste application de l'article L. 213-1 du code des pensions militaires d'invalidité et des victimes de guerre et de la nomenclature de la liste des produits et prestations remboursables prévue à l'article L.165-1 du code de la sécurité sociale concernant les aides auditives.

Par un mémoire en défense, enregistré le 5 avril 2022, M. A..., représenté par Me Haushalter, conclut au rejet de l'appel de la caisse nationale militaire de sécurité sociale, à la confirmation du jugement n° 1923752/5-3 du 15 décembre 2021 du Tribunal administratif de Paris et à la condamnation de l'Etat à verser la somme de 2 000 euros à son conseil en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et du deuxième alinéa de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991, sous réserve de sa renonciation au bénéfice de la part contributive de l'Etat au titre de l'aide juridictionnelle.

Il soutient que les moyens soulevés ne sont pas fondés.

M. A... a été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du bureau d'aide juridictionnelle près le tribunal judiciaire de Paris du 27 avril 2022.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code des pensions militaires d'invalidité et des victimes de guerre ;

- le code de la sécurité sociale ;

- la loi n°91-647 du 10 juillet 1991 ;

- la loi n° 2018-607 du 13 juillet 2018 relative à la programmation militaire pour les années 2019 à 2025 et portant diverses dispositions intéressant la défense et créant un recours administratif préalable obligatoire en matière de pensions militaires d'invalidité ;

- le décret n° 2018-1292 du 28 décembre 2018 pris pour l'application de l'article 51 de la loi n° 2018-607 du 13 juillet 2018 ;

- le décret n°2020-1717 du 28 décembre 2020 ;

- l'arrêté du 14 novembre 2018 portant modification des modalités de prise en charge des aides auditives et prestations associées au chapitre 3 du titre II de la liste des prestations prévues à l'article L. 165-1 du code de la sécurité sociale ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme Collet, première conseillère,

- et les conclusions de Mme Bernard, rapporteure publique.

Considérant ce qui suit :

1. M. C... A..., né le 29 octobre 1950, militaire de carrière est titulaire d'une pension militaire d'invalidité définitive au taux de 85 % concédée par un arrêté du 29 mars 2016 à compter du 9 avril 2014 en raison notamment de séquelles de traumatisme sonore avec perte de sélectivité et hypoacousie bilatérale. Le 13 septembre 2018, des prothèses auditives lui ont été prescrites et le 12 novembre 2018, M. A... en a sollicité la prise en charge sur le fondement de l'article L. 213-1 du code des pensions militaires d'invalidité et des victimes de guerre. Par décision du 19 novembre 2018, le directeur de la caisse nationale militaire de sécurité sociale (CNMSS) a refusé de faire droit à cette demande avant finalement d'accepter de les prendre en charge à hauteur de 2 800 euros par décision du 24 avril 2019. Par jugement n°1923752/5-3 du 15 décembre 2021, dont la CNMSS relève appel, le Tribunal administratif de Paris a annulé la décision du 19 novembre 2018 et la décision du 24 avril 2019 en tant qu'elle refuse partiellement de prendre en charge les appareils auditifs de M. A... et a condamné la CNMSS à lui rembourser les sommes qu'il a dû verser, sous déduction de celles déjà prises en charge le cas échéant par des organismes de sécurité sociale et de protection sociale complémentaire, avec intérêts au taux légal à compter du 19 novembre 2018 et capitalisation des intérêts à compter du 19 novembre 2019 puis à chaque échéance annuelle.

Sur le moyen d'annulation retenu par le tribunal :

2. Aux termes de l'article L. 213-1 du code des pensions militaires d'invalidité et des victimes de guerre : " Les invalides pensionnés au titre du présent code ont droit aux appareils, produits et prestations nécessités par les infirmités qui ont motivé leur pension. Les appareils sont fournis, réparés et remplacés aux frais de l'Etat dans les conditions prévues par le présent code, tant que l'infirmité en cause nécessite l'appareillage. Les produits et prestations pris en charge par l'Etat sont ceux prévus à l'article L. 165-1 du code de la sécurité sociale, dans les conditions définies par cet article ou par les dispositions du présent code. Les modalités d'application du présent article sont fixées par décret en Conseil d'Etat ". Aux termes de l'article D. 211-7 de ce code : " Le droit au bénéfice des dispositions des articles L. 212-1, L.213-1 et L. 221-1 suit le sort de la pension d'invalidité ".

3. Il ressort des pièces du dossier et notamment de la fiche descriptive des infirmités portant décision d'attribution d'une pension militaire d'invalidité du 11 avril 2016 que si une pension militaire d'invalidité a été attribuée à M. A... au titre des " Séquelles de traumatisme sonore avec perte de sélectivité. Hypoacousie bilatérale. Origine par preuve blessure reçue par le fait du service le 13/01/1982 - Hors guerre " avec un taux de 10 % + 15, seule l'infirmité " séquelles de traumatisme sonore avec perte de sélectivité lui a ouvert un droit à pension au taux de 10 % + 15 et que l'hypoacousie est en relation avec l'infirmité pensionnée. Il s'ensuit que dès lors que l'hypoacousie dont souffre M. A... ne lui a pas ouvert un droit à pension spécifique mais est seulement associée à une perte de sélectivité, elle ne peut être regardée comme une infirmité ayant motivé son droit à pension au sens des dispositions précitées de l'article L. 213-1 du code des pensions militaires d'invalidité et des victimes de guerre et lui ouvrant ainsi droit, contrairement à ce qu'ont considéré les premiers juges, à la prise en charge par l'État des frais liés à cette infirmité. Or, il ressort des pièces du dossier, et notamment de la prescription médicale du 13 septembre 2018 du docteur B... et de l'audiogramme du même jour que les prothèses auditives prescrites à M. A... ont pour objectif de corriger la surdité de perception et non sa perte de sélectivité. Par suite, la CNMSS est fondée à soutenir que c'est à tort que les premiers juges ont annulé la décision du 19 novembre 2018 et la décision du 24 avril 2019 en tant qu'elle refuse la prise en charge de l'intégralité du coût de ses prothèses auditives en méconnaissance des dispositions précitées de l'article L. 213-1 du code des pensions militaires d'invalidité et des victimes de guerre.

4. Il appartient à la Cour, saisie de l'ensemble du litige par l'effet dévolutif de l'appel, d'examiner les autres moyens soulevés par M. A... devant le Tribunal administratif de Paris.

Sur les autres moyens invoqués par M. A... en première instance :

5. En premier lieu, M. A... soutient que le directeur de la CNMSS s'est volontairement abstenu de solliciter les services de son médecin conseil, praticien de référence en charge de l'analyse et de l'interprétation des examens médicaux. Toutefois il n'assortit pas son moyen des précisions suffisantes permettant d'en apprécier le bien-fondé, et notamment pas des textes qui imposeraient un tel recours au médecin conseil. Par suite, le moyen tiré du vice de procédure dont serait entachée la décision du 19 novembre 2018 attaquée pour ce motif ne peut qu'être écarté.

6. En deuxième lieu, il ne ressort pas des pièces du dossier que, contrairement à ce que soutient le requérant, le directeur de la CNMSS aurait entaché la décision du 19 novembre 2018 d'un détournement de pouvoir. Par suite, ce moyen n'est pas fondé.

7. En troisième lieu, M. A... soutient qu'aucune disposition du code des pensions militaires d'invalidité et des victimes de guerre ne fait mention de caractéristiques audiométriques tonales spécifiques définissant les critères de prise en charge des appareillages pour des hypoacousies. Toutefois, un tel moyen est inopérant dès lors que comme indiqué au point 3, l'hypoacousie dont souffre le requérant ne lui a pas ouvert un droit à pension spécifique et ne constitue pas une infirmité lui donnant droit à pension au sens des dispositions précitées de l'article L. 213-1 du code des pensions militaires d'invalidité et des victimes de guerre.

8. En quatrième lieu, il ressort des pièces du dossier que la décision du 19 novembre 2018 après avoir mentionné l'article L. 212-1 du code des pensions militaires d'invalidité et des victimes de guerre précise que les caractéristiques de l'hypoacousie figurant sur la fiche descriptive des infirmités de M. A... ne permettent pas sa prise en charge au titre de cet article. En outre, la décision du 24 avril 2019 du directeur de la CNMSS précise, quant à elle, que bien que " les conditions règlementaires de prise en charge ne soient pas totalement satisfaites, la CNMSS accepte, à titre exceptionnel, de prendre en charge vos audioprothèses, au titre de l'article L.213-1 du code des pensions militaires d'invalidité et des victimes de guerre ". Cette décision ajoute que la prise en charge aura lieu selon le devis établi le 8 novembre 2018 sur la base du tarif de responsabilité de la sécurité sociale fixé dans la liste des produits et prestations remboursables (LPPR), à 1 400,00 euros par appareil, soit 2 800 euros pour les deux audioprothèses. Les décisions attaquées comportent ainsi l'ensemble des considérations de droit et de fait qui en constitue le fondement et sont, suffisamment motivées. Par suite, le moyen tiré de l'insuffisance de motivation de ces décisions ne peut qu'être écarté.

9. En dernier lieu, la circonstance que les aides auditives ou audio prothèses et prestations associées soient inscrites dans la liste des produits et prestations prévues à l'article L. 165-1 du code de la sécurité sociale n'est pas susceptible d'ouvrir droit à M. A..., contrairement à ce qu'il soutient, à la prise en charge par l'Etat de l'intégralité des frais liés à son appareillage auditif nécessité par son hypoacousie dès lors que comme indiqué au point 3 du présent arrêt, l'hypoacousie dont il souffre ne lui a pas ouvert un droit à pension spécifique et ne constitue ainsi pas une infirmité ayant motivé son droit à pension au sens des dispositions précitées de l'article L. 213-1 du code des pensions militaires d'invalidité et des victimes de guerre.

10. Il résulte de tout ce qui précède que la CNMSS est fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Paris a annulé la décision du 19 novembre 2018 et la décision du 24 avril 2019 en tant qu'elle refuse partiellement de prendre en charge les appareils auditifs de M. A... et l'a condamné à lui rembourser les sommes qu'il a dû verser, sous déduction des sommes déjà prises en charge le cas échéant par des organismes de sécurité sociale et de protection sociale complémentaire, avec intérêt au taux légal à compter du 19 novembre 2018 et capitalisation des intérêts à compter du 19 novembre 2019 puis à chaque échéance annuelle. Dès lors, il y a lieu d'annuler le jugement du 15 décembre 2021 du tribunal et de rejeter la demande présentée par M. A... devant le tribunal, de même que les conclusions présentées en appel sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi n° 91- 647 du 10 juillet 1991, l'Etat n'ayant pas dans la présente instance la qualité de partie perdante.

DÉCIDE :

Article 1er : Le jugement n° 1923752/5-3 du 15 décembre 2021 du Tribunal administratif de Paris est annulé.

Article 2 : La demande présentée par M. A... devant le Tribunal administratif de Paris et ses conclusions d'appel présentées devant la Cour sont rejetées.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à la caisse nationale militaire de sécurité sociale et à M. C... A....

Délibéré après l'audience du 12 septembre 2023, à laquelle siégeaient :

- M. Ho Si Fat, président de la formation de jugement,

- Mme Collet, première conseillère,

- Mme Larsonnier, première conseillère.

Rendu public par mise à disposition au greffe, le 2 octobre 2023.

La rapporteure,

A. COLLET Le président,

F. HO SI FAT

La greffière,

N. COUTY

La République mande et ordonne au ministre des armées en ce qui le concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

2

N° 22PA00725


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Paris
Formation : 8ème chambre
Numéro d'arrêt : 22PA00725
Date de la décision : 02/10/2023
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Contentieux des pensions

Composition du Tribunal
Président : M. HO SI FAT
Rapporteur ?: Mme Aude COLLET
Rapporteur public ?: Mme BERNARD
Avocat(s) : HAUSHALTER

Origine de la décision
Date de l'import : 08/10/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.paris;arret;2023-10-02;22pa00725 ?
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