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17/07/2023 | FRANCE | N°22PA00203

France | France, Cour administrative d'appel de Paris, 4ème chambre, 17 juillet 2023, 22PA00203


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. B... A... a demandé au tribunal administratif de Melun d'annuler les arrêtés du 8 septembre 2020 par lesquels le préfet de police, d'une part, l'a obligé à quitter le territoire français sans délai en fixant le pays de renvoi, et d'autre part, a prononcé à son encontre une interdiction de retour pour une durée de trente-six mois.

Par un jugement n° 2102591 du 17 décembre 2021, le premier vice-président du tribunal administratif de Melun a annulé ces deux arrêtés.

Procédure devant

la Cour :

Par une requête enregistrée le 14 janvier 2022, le préfet de police demande à la...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. B... A... a demandé au tribunal administratif de Melun d'annuler les arrêtés du 8 septembre 2020 par lesquels le préfet de police, d'une part, l'a obligé à quitter le territoire français sans délai en fixant le pays de renvoi, et d'autre part, a prononcé à son encontre une interdiction de retour pour une durée de trente-six mois.

Par un jugement n° 2102591 du 17 décembre 2021, le premier vice-président du tribunal administratif de Melun a annulé ces deux arrêtés.

Procédure devant la Cour :

Par une requête enregistrée le 14 janvier 2022, le préfet de police demande à la Cour :

1°) d'annuler ce jugement ;

2°) de rejeter la demande présentée par M. A... devant le tribunal administratif.

Il soutient que :

- la demande présentée par M. A... devant le tribunal administratif de Melun est tardive et par suite, irrecevable ;

- M. A... n'établit pas qu'il était de nationalité française à la date des décisions en litige ;

- il représente une menace à l'ordre public ;

- les autres moyens soulevés en première instance ne sont pas fondés.

La requête a été communiquée à M. A... qui n'a pas présenté de mémoire.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- l'accord franco-sénégalais du 23 septembre 2006 modifié ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- le code de justice administrative.

La présidente de la formation de jugement a dispensé la rapporteure publique, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

A été entendu au cours de l'audience publique le rapport de Mme Briançon.

Considérant ce qui suit :

1. M. B... A..., ressortissant sénégalais né le 20 octobre 1989, est entré en France en 2018 ou 2019 selon ses déclarations. Le 7 septembre 2020, il a fait l'objet d'une interpellation en flagrant délit de trafic de stupéfiants. Par un arrêté du 8 septembre 2020, le préfet de police lui a fait obligation de quitter le territoire français sans délai et a fixé le pays de renvoi et, par un arrêté du même jour, a prononcé à son encontre une interdiction de retour pour une durée de trente-six mois. Le préfet de police relève appel du jugement du 17 décembre 2021 par lequel le tribunal administratif de Melun a annulé ces deux arrêtés.

Sur la recevabilité de la demande de première instance :

2. Aux termes de l'article L. 512-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile dans sa version applicable au litige et désormais codifié à l'article L. 614-6 du même code : " (...) II. L'étranger qui fait l'objet d'une obligation de quitter le territoire sans délai peut, dans les quarante-huit heures suivant sa notification par voie administrative, demander au président du tribunal administratif l'annulation de cette décision, ainsi que l'annulation de la décision relative au séjour, de la décision refusant un délai de départ volontaire, de la décision mentionnant le pays de destination et de la décision d'interdiction de retour sur le territoire français qui l'accompagnent le cas échéant (...) IV. -En cas de détention de l'étranger, celui-ci est informé dans une langue qu'il comprend, dès la notification de l'obligation de quitter le territoire français, qu'il peut, avant même l'introduction de sa requête, demander au président du tribunal administratif l'assistance d'un interprète ainsi que d'un conseil. ". Aux termes du II de l'article R. 776-5 du code de justice administrative alors applicable : " Le délai de quarante-huit heures mentionné aux articles R. 776-2 et R. 776-4 et les délais de quinze jours mentionnés aux articles R. 776-2 et R. 776-3 ne sont susceptibles d'aucune prorogation. (...) ".

3. Il ressort des pièces du dossier, et notamment des termes mêmes de l'arrêté du 8 septembre 2020 portant obligation de quitter le territoire français sans délai, que celui-ci a été notifié à M. A... par voie administrative le jour-même à 18h30, et qu'il lui en a été donné lecture par le truchement d'un interprète en langue Wolof, langue qu'il a déclaré comprendre. Cet arrêté, sur lequel l'intéressé a apposé sa signature, ainsi que l'interprète et l'agent notificateur, mentionne que l'intéressé le signe et en prend copie ce même jour. Il ressort également des pièces du dossier que les voies et délais de recours contre cet arrêté lui ont été notifiés le même jour à 18h32, dans les mêmes conditions. De la même manière, le second arrêté du 8 septembre 2020 portant interdiction de retour pour une durée de trente-six mois mentionne, d'une part, que la lecture en a été faite à M. A... à 18h38 par le truchement du même interprète, et d'autre part, que l'intéressé le signe et en prend copie, et porte également la signature de M. A.... Les voies et délais de recours contre cet arrêté lui ont été notifiés le même jour à 18h40, dans les mêmes conditions. Si M. A... soutient que ces arrêtés lui ont été notifiés le 8 septembre 2020 alors qu'il se trouvait en garde à vue et qu'il lui a uniquement été demandé de les signer sans toutefois qu'ils lui soient matériellement remis, il n'établit cette circonstance par aucune pièce, pas plus qu'il n'établit qu'il n'aurait pris matériellement connaissance de ces arrêtés que le 18 mars 2021. Par ailleurs, si l'intéressé soutient qu'il n'a pas été mis à même de contacter un conseil, il ressort toutefois des pièces du dossier qu'il a bénéficié de l'assistance d'un avocat lors de sa garde à vue du 7 septembre 2020, et n'établit ni même n'allègue ne pas avoir bénéficié de l'assistance d'un conseil lors de sa comparution immédiate devant le tribunal correctionnel le 10 septembre 2020 et ce, alors que la notification des arrêtés portant obligation de quitter le territoire et interdiction de retour lui avaient été notifiés le 8 septembre dans une langue qu'il comprend, ainsi qu'il a été dit. Dans ces conditions, M. A... n'établit pas avoir été empêché d'avertir un conseil entre le 8 septembre 2020, date de la notification des arrêtés en litige et le 10 septembre 2020, date de sa comparution immédiate puis de son incarcération. En outre, si M. A... soutient qu'il n'a pas été en mesure de bien comprendre l'interprète en langue Wolof en raison de son accent, il ressort toutefois des pièces du dossier que l'intéressé a répondu sans difficulté apparente aux questions qui lui ont été posées par le truchement de cet interprète, et qu'il a signé les arrêtés contestés sans aucune réserve. Enfin, si le requérant soutient que l'information donnée sur les voies et délais de recours est incomplète, aucune disposition législative ou réglementaire n'imposait à l'administration de préciser le numéro de téléphone et de fax du tribunal administratif. Par suite, la notification des arrêtés attaqués a été effectuée régulièrement le 8 septembre 2020 et a eu pour effet de faire courir le délai de quarante-huit heures mentionné aux dispositions précitées. La demande de M. A..., enregistrée au tribunal administratif de Melun le 18 mars 2021 était donc tardive. Le préfet de police est, par suite, fondé à soutenir que c'est à tort que le premier vice-président du tribunal administratif de Melun a regardé la demande de M. A... comme étant recevable.

4. Il appartient à la Cour de se prononcer sur l'ensemble du litige par l'effet dévolutif de l'appel.

5. Ainsi qu'il a été dit au point 3, la demande de M. A... devant le tribunal administratif de Melun était irrecevable du fait de sa tardiveté. Par suite, la fin de non-recevoir du préfet de police doit être accueillie et la demande présentée par M. A... devant le tribunal administratif de Melun doit être rejetée.

D E C I D E :

Article 1er : Le jugement du tribunal administratif de Melun n° 2102591 du 17 décembre 2021 est annulé.

Article 2 : La demande présentée par M. A... devant le tribunal administratif de Melun est rejetée.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié au ministre de l'intérieur et des outre-mer et à M. B... A....

Copie en sera adressée au préfet de police.

Délibéré après l'audience du 29 juin 2023, à laquelle siégeaient :

- Mme Heers, présidente de chambre,

- Mme Briançon, présidente assesseure,

- Mme d'Argenlieu, première conseillère.

Rendu public par mise à disposition au greffe, le 17 juillet 2023.

La rapporteure,

C. BRIANÇON

La présidente,

M. HEERS

La greffière,

V. BREME

La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur et des outre-mer en ce qui le concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision

N° 22PA00203 2


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Paris
Formation : 4ème chambre
Numéro d'arrêt : 22PA00203
Date de la décision : 17/07/2023
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : Mme HEERS
Rapporteur ?: Mme Claudine BRIANÇON
Rapporteur public ?: Mme JAYER

Origine de la décision
Date de l'import : 10/08/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.paris;arret;2023-07-17;22pa00203 ?
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