Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
La société Free Mobile a demandé au tribunal administratif de Montreuil d'annuler l'arrêté du 23 juillet 2021 par lequel le maire de la commune des Lilas s'est opposé à sa déclaration préalable déposée en vue de l'implantation de deux stations-relais de téléphonie mobile sur un immeuble situé 37 avenue du Maréchal Juin.
Par un jugement n° 2112766 du 20 octobre 2022, le tribunal administratif de Montreuil a rejeté sa demande.
Procédure devant la Cour :
Par une requête et un mémoire en réplique enregistrés les 19 décembre 2022 et 14 avril 2023, la société Free Mobile, représentée par Me Martin, demande à la Cour :
1°) d'annuler le jugement n° 2112766 du 20 octobre 2022 du tribunal administratif de Montreuil ;
2°) d'annuler l'arrêté du 23 juillet 2021 du maire de la commune des Lilas ;
3°) de rejeter la requête introduite devant le tribunal administratif ;
4°) d'enjoindre au maire de la commune des Lilas de lui délivrer un arrêté de non-opposition pour la réalisation des travaux déclarés le 7 juin 2021 ;
5°) de mettre à la charge de la commune des Lilas la somme de 5 000 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle soutient que :
- c'est à tort que la décision lui a opposé la règle de hauteur maximale applicable aux cheminées dès lors que la cheminée en litige, qui n'a d'autre objet que de dissimuler l'antenne qui constitue elle-même un ouvrage technique lié au fonctionnement des équipements d'intérêt collectif et services publics, et qui est en tout état de cause une condition sine qua non de son existence et donc de son fonctionnement, forme avec elle un tout indissociable devant bénéficier de la dérogation à la règle de hauteur maximale prévue par le règlement du plan local d'urbanisme accordée à ces derniers ouvrages ;
- la décision ne pouvait légalement se fonder sur les dispositions du règlement du plan local d'urbanisme relatives à l'aspect extérieur des ouvrages dès lors que l'intégration au paysage est assurée sous la forme de fausses cheminées qui se confondent avec les bâtiments sur lesquels elles sont implantées, qu'elles respectent la règle de retrait de 3 mètres et que les modules techniques annexes sont invisibles depuis l'espace public.
Par un mémoire en défense enregistré le 6 février 2023, la commune des Lilas, représentée par Me Lherminier, conclut au rejet de la requête et à ce qu'il soit mis à la charge de la société Free Mobile le versement d'une somme de 3 000 euros sur le fondement des dispositions de l'article
L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle soutient que les moyens soulevés ne sont pas fondés.
Un mémoire a été produit pour la commune des Lilas le 5 mai 2023, postérieurement à la clôture immédiate de l'instruction prononcée par une décision du même jour en application des dispositions des articles R. 611-11-1 et R. 613-1 du code de justice administrative.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- le code de l'urbanisme ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de M. Gobeill,
- les conclusions de M. Doré, rapporteur public,
- et les observations de Me Baron, substituant Me Lherminier, et représentant la commune des Lilas
Considérant ce qui suit :
1. La société Free Mobile a déposé, le 7 juin 2021, une déclaration préalable de travaux portant sur l'installation de deux stations-relais de téléphonie mobile devant être dissimulées dans deux fausses cheminées sur le toit terrasse d'un immeuble situé au 37 rue du Maréchal Juin aux Lilas (Seine-Saint-Denis). Par un arrêté en date du 23 juillet 2021, le maire de la commune des Lilas a fait opposition à l'exécution des travaux. La société Free Mobile relève appel du jugement du 20 octobre 2022 par lequel le tribunal administratif de Montreuil, saisi à cette fin par la société Free Mobile, a rejeté sa demande d'annulation de cette décision.
Sur les conclusions à fin d'annulation :
2. En premier lieu, aux termes des dispositions du point III. 1. i. du règlement du PLUi d'Est Ensemble, dans sa rédaction alors applicable : " III. Dispositions communes en toutes zones / 1. Dispositions écrites : / i. Dispositions relatives aux ouvrages techniques / Les dispositions du présent règlement ne sont pas applicables aux ouvrages techniques liés au fonctionnement des équipements d'intérêt collectif et services publics sous réserve d'une intégration satisfaisante (...) ". Aux termes des dispositions du point II. f. 2. du même règlement : " II. Dictionnaire du PLUi / f. Hauteur : / 2. Mode de calcul : / Calcul de la hauteur / (...) / Eléments non compris dans le calcul de la hauteur : / Sous réserve d'une bonne intégration architecturale et qu'ils soient invisibles depuis l'espace public : / (...) Les (...) cheminées (...) dans une limite de 3 mètres de hauteur / (...) ". Aux termes des dispositions du point IV. 3. d. du même règlement : " Dispositions particulières applicables aux zones urbaines (hors zones de projet) / 3. Fiches d'indices : / d. Hauteur des constructions / Nom de l'indice / 13 ; Dispositions qui s'appliquent aux secteurs régis par cet indice : / La hauteur des constructions est limitée à 13 mètres maximum (...) ".
3. La décision contestée a tout d'abord retenu, au visa des dispositions des points II.f et IV.d.3 du règlement du plan local d'urbanisme, que les ouvrages créés pour masquer les antennes et qualifiés de fausses cheminées, et qui constituent des ouvrages techniques à prendre en compte dans l'application du plafond de hauteur, se situent en l'espèce à plus de 16 mètres au-dessus du niveau du sol et est également fondée, au visa du point III.1.b du même règlement, sur la circonstance que ces mêmes ouvrages, ainsi que les autres installations projetées, notamment la zone technique, ne sont pas intégrés dans le volume de la construction, qu'ils sont implantés à moins de trois mètres par rapport à l'acrotère et que le dossier ne prévoit ni un traitement spécifique leur permettant de s'intégrer aux toitures ni un camouflage des réseaux techniques.
4. D'une part, et s'agissant tout d'abord des ouvrages qualifiés de " fausses cheminées ", ils n'ont d'autre finalité que celle de dissimuler les antennes-relais de téléphonie mobile qui sont des ouvrages techniques liés au fonctionnement des équipements d'intérêt collectif et du service public des communications électroniques, et, quand bien même ils n'auraient pas en soi d'intérêt technique, ils ne sauraient exister sans ces dernières dont ils sont l'accessoire. Il n'est ensuite pas contesté que les autres installations techniques constituent des accessoires indispensables au fonctionnement de ces antennes. Il en résulte que leur étaient applicables les dispositions du point III. 1. rappelées au point 2 du présent arrêt et que la décision contestée ne pouvait dans ces conditions légalement rejeter la demande pour les motifs opposés.
5. D'autre part, compte tenu du choix fait par la société pétitionnaire de traiter lesdits dispositifs dans une couleur identique à celle de l'immeuble sur lequel ils s'implantent, du caractère limité de leur dépassement du niveau du toit de l'immeuble sur lequel ils sont implantés et de l'absence d'intérêt architectural particulier de cet immeuble, le projet ne méconnait pas la condition d'intégration satisfaisante prévue par les dispositions précitées de l'article III. 1. i. du règlement précité.
6. Pour l'application de l'article L. 600-4-1 du code de l'urbanisme, aucun des autres moyens soulevés par la société Free mobile n'est susceptible de fonder l'annulation de cette décision.
7. Il résulte de ce qui précède que la société Free mobile est fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Montreuil a rejeté sa demande. L'arrêté du 23 juillet 2021 et le jugement du 20 octobre 2022 doivent donc être annulés.
Sur les conclusions à fin d'injonction :
8. Aux termes du premier alinéa de l'article L. 911-1 du code de justice administrative : " Lorsque sa décision implique nécessairement qu'une personne morale de droit public ou un organisme de droit privé chargé de la gestion d'un service public prenne une mesure d'exécution dans un sens déterminé, la juridiction, saisie de conclusions en ce sens, prescrit, par la même décision, cette mesure assortie, le cas échéant, d'un délai d'exécution. ". Lorsque le juge annule un refus d'autorisation ou une opposition à une déclaration après avoir censuré l'ensemble des motifs que l'autorité compétente a énoncés dans sa décision conformément aux prescriptions de l'article
L. 424-3 du code de l'urbanisme ainsi que, le cas échéant, les motifs qu'elle a pu invoquer en cours d'instance, il doit, s'il est saisi de conclusions à fin d'injonction, ordonner à l'autorité compétente de délivrer l'autorisation ou de prendre une décision de non-opposition. Il n'en va autrement que s'il résulte de l'instruction soit que les dispositions en vigueur à la date de la décision annulée, qui eu égard aux dispositions de l'article L. 600-2 du code de l'urbanisme demeurent applicables à la demande, interdisent de l'accueillir pour un motif que l'administration n'a pas relevé, ou que, par suite d'un changement de circonstances, la situation de fait existant à la date du jugement y fait obstacle.
9. Il y a donc lieu, dans les circonstances de l'espèce, d'enjoindre à la commune des Lilas de prendre une décision de non-opposition aux travaux déclarés par la société Free Mobile, dans un délai de trois mois à compter de la notification du présent arrêt.
Sur les frais liés au litige :
10. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mis à la charge de la société Free Mobile, qui n'est pas, dans la présente instance la partie perdante, le versement de la somme que la commune des Lilas demande au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens. Il y a lieu en revanche de mettre à la charge de la commune des Lilas une somme totale de 1 500 euros à verser la société Free Mobile sur le fondement de ces mêmes dispositions.
D E C I D E :
Article 1er: Le jugement n° 2112706 du 20 octobre 2022 du tribunal administratif de Montreuil est annulé.
Article 2 : L'arrêté du 23 juillet 2021 du maire de la commune des Lilas est annulé.
Article 3 : Il est enjoint au maire de la commune des Lilas de prendre une décision de non-opposition aux travaux déclarés par la société Free Mobile dans un délai de trois mois à compter de la notification du présent arrêt.
Article 4 : La commune des Lilas versera à la société Free Mobile une somme de 1 500 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Article 5 : Le présent arrêt sera notifié à la société Free Mobile et à la commune des Lilas.
Délibéré après l'audience du 22 juin 2023, à laquelle siégeaient :
- M. Lapouzade, président de chambre,
- M. Diémert, président-assesseur,
- M. Gobeill, premier conseiller.
Rendu public par mise à disposition au greffe, le 6 juillet 2023.
Le rapporteur, Le président,
J.-F. GOBEILL J. LAPOUZADE
La greffière
C. POVSE
La République mande et ordonne au préfet de la Seine-Saint-Denis en ce qui le concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
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N° 22PA05403