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05/07/2023 | FRANCE | N°23PA01305

France | France, Cour administrative d'appel de Paris, 3ème chambre, 05 juillet 2023, 23PA01305


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. D... A... a demandé au tribunal administratif de Melun d'annuler l'arrêté du 11 janvier 2022 par lequel le préfet de Seine-et-Marne a refusé de renouveler son titre de séjour, l'a obligé à quitter le territoire français dans le délai de trente jours et a fixé le pays de destination.

Par un jugement n° 2203776 du 19 janvier 2023, le tribunal administratif de Melun a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête enregistrée le 30 mars 2023, M. A..., représenté

par Me Stephan, demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement du tribunal administratif de Melu...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. D... A... a demandé au tribunal administratif de Melun d'annuler l'arrêté du 11 janvier 2022 par lequel le préfet de Seine-et-Marne a refusé de renouveler son titre de séjour, l'a obligé à quitter le territoire français dans le délai de trente jours et a fixé le pays de destination.

Par un jugement n° 2203776 du 19 janvier 2023, le tribunal administratif de Melun a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête enregistrée le 30 mars 2023, M. A..., représenté par Me Stephan, demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement du tribunal administratif de Melun du 19 janvier 2023 ;

2°) d'annuler l'arrêté préfectoral du 11 janvier 2022 ;

3°) d'enjoindre au préfet de Seine-et-Marne de lui délivrer un titre de séjour dans le délai d'un mois, sous astreinte de 100 euros par jour de retard, ou, à titre subsidiaire, de réexaminer sa demande dans le délai d'un mois et de lui délivrer une autorisation provisoire de séjour ;

4°) de mettre à la charge de l'État la somme de 1 500 euros à verser à Me Stephan en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991.

Il soutient que :

- l'arrêté préfectoral contesté est entaché d'incompétence de son signataire ;

- il a été pris au terme d'une procédure irrégulière dès lors que la commission du titre de séjour n'a pas été saisie, alors qu'il justifie de plus de dix années de résidence sur le territoire français ;

- le préfet de Seine-et-Marne a commis une erreur manifeste d'appréciation en refusant de renouveler son titre de séjour ;

- l'arrêté litigieux viole les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- la décision l'obligeant à quitter le territoire français est entachée d'illégalité du fait de l'illégalité de la décision refusant le renouvellement de son titre de séjour ;

- cette décision méconnaît les dispositions du 3° de l'article L. 611-3 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- elle est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation de ses conséquences sur sa situation personnelle et viole les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- la décision fixant le pays de destination est entachée d'illégalité du fait de l'illégalité des décisions refusant le renouvellement de son titre de séjour et l'obligeant à quitter le territoire français.

La requête a été communiquée au préfet de Seine-et-Marne, qui n'a pas produit de mémoire en défense.

Le bureau d'aide juridictionnelle du tribunal judiciaire de Paris a accordé l'aide juridictionnelle totale à M. A... par une décision du 20 mars 2023.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Le président de la formation de jugement a dispensé la rapporteure publique, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

Le rapport de Mme B... a été entendu au cours de l'audience publique.

Considérant ce qui suit :

1. M. A..., ressortissant sénégalais né le 2 décembre 1957, déclare être entré en France le 28 décembre 2000. Il a bénéficié de titres de séjour portant la mention " vie privée et familiale " entre 2001 et 2012, puis de janvier 2015 à janvier 2016, et d'octobre 2017 à octobre 2021. Par un arrêté du 11 janvier 2022, le préfet de Seine-et-Marne a refusé de renouveler son titre de séjour, l'a obligé à quitter le territoire français dans le délai de trente jours et a fixé le pays de destination. M. A... demande à la cour d'annuler le jugement du 19 janvier 2023 par lequel le tribunal administratif de Melun a rejeté sa demande tendant à l'annulation de cet arrêté.

2. En premier lieu, l'arrêté contesté du 11 janvier 2022 a été signé par M. E... C..., sous-préfet de l'arrondissement de Torcy, qui disposait d'une délégation de signature à cette fin consentie par un arrêté préfectoral du 19 juillet 2021, régulièrement publié au recueil des actes administratifs le même jour. Par suite, le moyen tiré de l'incompétence du signataire dudit arrêté doit être écarté.

3. En deuxième lieu, aux termes de l'article L. 432-13 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Dans chaque département est instituée une commission du titre de séjour qui est saisie pour avis par l'autorité administrative : 1° Lorsqu'elle envisage de refuser de délivrer ou de renouveler la carte de séjour temporaire prévue aux articles L. 423-1, L. 423-7, L. 423-13, L. 423-14, L. 423-15, L. 423-21, L. 423-22, L. 423-23, L. 425-9 ou L. 426-5 à un étranger qui en remplit effectivement les conditions de délivrance ; (...) 4° Dans le cas prévu à l'article L. 435-1 ". Et aux termes de l'article L. 435-1 du même code : " (...) Lorsqu'elle envisage de refuser la demande d'admission exceptionnelle au séjour formée par un étranger qui justifie par tout moyen résider habituellement en France depuis plus de dix ans, l'autorité administrative est tenue de soumettre cette demande pour avis à la commission du titre de séjour prévue à l'article L. 432-14 (...) ".

4. D'une part, si M. A... soutient qu'il justifie résider en France depuis plus de dix ans et que, pour ce motif, la commission du titre de séjour aurait dû être saisie par le préfet de Seine-et-Marne préalablement à l'édiction de l'arrêté contesté, il est constant qu'il n'a pas formé sa demande de renouvellement de titre de séjour en invoquant les dispositions précitées de l'article L. 435-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, au regard desquelles sa demande n'a ainsi pas été examinée. Il ne peut par suite utilement en invoquer la méconnaissance. D'autre part, il résulte des dispositions précitées du 1° de l'article L. 432-13 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile que le préfet est tenu de saisir la commission du titre de séjour du seul cas des étrangers qui remplissent effectivement les conditions prévues aux articles mentionnés, auxquels il envisage de refuser le titre de séjour sollicité, et non de celui de tous les étrangers qui se prévalent des dispositions de ces articles. Or, M. A... n'établit pas ni même ne soutient qu'il remplirait les conditions posées par l'article L. 423-23 dudit code, en application desquelles il a sollicité le renouvellement de son titre de séjour. Par suite, le préfet de Seine-et-Marne n'était pas tenu de soumettre son cas à la commission du titre de séjour. Dès lors, le moyen tiré du vice de procédure ne peut qu'être écarté.

5. En troisième lieu, aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " 1. Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale (...). / 2. Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale, ou à la protection des droits et libertés d'autrui. ".

6. M. A... soutient qu'il réside en France depuis la fin de l'année 2001 et qu'il a bénéficié à plusieurs reprises de titres de séjour sur le territoire français, où il a travaillé comme agent de service jusqu'en 2018. Il fait également valoir qu'il est atteint de troubles cardiaques nécessitant un suivi régulier. Il n'est toutefois pas contesté que son épouse réside au Sénégal, son pays d'origine, où il a lui-même vécu jusqu'à l'âge de quarante-trois ans. Par ailleurs, M. A... ne se prévaut d'aucun lien affectif stable et ancien en France. Dans ces conditions, le préfet de Seine-et-Marne n'a pas, en prenant l'arrêté contesté, porté à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée au regard des buts de ce dernier, et n'a donc pas violé les stipulations précitées de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales. Il n'a pas, pour les mêmes motifs, commis d'erreur manifeste d'appréciation des conséquences dudit arrêté sur la situation personnelle du requérant.

7. En quatrième lieu, il résulte de ce qui a été dit aux points 2 à 6 du présent arrêt que le moyen tiré, par voie d'exception, de ce que la décision obligeant M. A... à quitter le territoire français serait illégale du fait de l'illégalité du refus de renouvellement de titre de séjour, doit être écarté.

8. En cinquième lieu, aux termes de l'article L. 611-3 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Ne peuvent faire l'objet d'une décision portant obligation de quitter le territoire français : / (...) / 3° L'étranger qui réside régulièrement en France depuis plus de dix ans, sauf s'il a été, pendant toute cette période, titulaire d'une carte de séjour temporaire ou pluriannuelle portant la mention " étudiant " ; ".

9. M. A... a bénéficié, comme il a déjà été dit, de titres de séjour portant la mention " vie privée et familiale " entre 2001 et 2012, puis de janvier 2015 à janvier 2016, et d'octobre 2017 à octobre 2021. Ainsi, à la date de l'arrêté préfectoral du 11 janvier 2022, il ne résidait pas régulièrement en France depuis plus de dix ans. Le moyen tiré de la méconnaissance des dispositions précitées doit donc être écarté.

10. En sixième lieu, le moyen tiré de la violation des stipulations l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales par la décision obligeant le requérant à quitter le territoire français doit être écarté pour les même motifs que ceux exposés au point 6 du présent arrêt.

11. En dernier lieu, il résulte de ce qui a été dit aux points 2 à 10 du présent arrêt que le moyen tiré, par voie d'exception, de ce que la décision fixant le pays de destination serait illégale du fait de l'illégalité du refus de renouvellement de titre de séjour et de la décision obligeant M. A... à quitter le territoire français, doit être écarté.

12. Il résulte de tout ce qui précède que M. A... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Melun a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du préfet de Seine-et-Marne du 11 janvier 2022. Ses conclusions à fin d'annulation ainsi, par voie de conséquence, que ses conclusions à fin d'injonction et celles tendant à l'application des dispositions des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991, doivent donc être rejetées.

D É C I D E :

Article 1er : La requête de M. A... est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à D... A... et au ministre de l'intérieur et des outre-mer.

Copie en sera adressée au préfet de Seine-et-Marne.

Délibéré après l'audience du 21 juin 2023 à laquelle siégeaient :

- M. Ivan Luben, président de chambre,

- Mme Marianne Julliard, présidente-assesseure,

- Mme Gaëlle Mornet, première conseillère.

Rendu public par mise à disposition au greffe le 5 juillet 2023.

La rapporteure,

G. B...Le président,

I. LUBENLa greffière,

N. DAHMANI

La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur et des outre-mer, en ce qui le concerne, et à tous commissaires de justice à ce requis, en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

N° 23PA01305

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Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Paris
Formation : 3ème chambre
Numéro d'arrêt : 23PA01305
Date de la décision : 05/07/2023
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : M. LUBEN
Rapporteur ?: Mme Gaëlle MORNET
Rapporteur public ?: Mme PENA
Avocat(s) : STEPHAN

Origine de la décision
Date de l'import : 10/08/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.paris;arret;2023-07-05;23pa01305 ?
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