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22/06/2023 | FRANCE | N°22PA03873

France | France, Cour administrative d'appel de Paris, 1ère chambre, 22 juin 2023, 22PA03873


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme A... B... épouse C... a demandé au tribunal administratif de Paris d'annuler l'arrêté du 8 avril 2022 par lequel le préfet de police a refusé de lui délivrer un titre de séjour, et lui a fait obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours.

Par un jugement n° 2210462/8 du 21 juillet 2022, le tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête enregistrée le 19 août 2022, Mme B... épouse C..., représent

e par Me Tihal, demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 2210462/8 du 21 juillet 2022 du...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme A... B... épouse C... a demandé au tribunal administratif de Paris d'annuler l'arrêté du 8 avril 2022 par lequel le préfet de police a refusé de lui délivrer un titre de séjour, et lui a fait obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours.

Par un jugement n° 2210462/8 du 21 juillet 2022, le tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête enregistrée le 19 août 2022, Mme B... épouse C..., représentée par Me Tihal, demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 2210462/8 du 21 juillet 2022 du tribunal administratif de Paris ;

2°) d'annuler l'arrêté du 8 avril 2022 du préfet de police ayant refusé de lui délivrer un titre de séjour, et lui ayant fait obligation de quitter le territoire français ;

3°) d'enjoindre au préfet de police de réexaminer sa situation administrative dans un délai de quinze jours à compter de la notification de la décision à intervenir ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 1 500 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- l'arrêté contesté méconnaît les dispositions des articles L. 233-1 et L. 233-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- il méconnaît les stipulations de la convention internationale relative aux droits de l'enfant ;

- il méconnaît les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et est entaché d'erreur manifeste d'appréciation.

Par un mémoire en défense enregistré le 4 avril 2023, le préfet de police conclut au rejet de la requête.

Il soutient que les moyens invoqués ne sont pas fondés.

Par un courrier du 25 mai 2023, les parties ont été informées, en application des dispositions de l'article R. 611-7-3 du code de justice administrative, de ce que l'arrêt à intervenir était susceptible d'impliquer le prononcé d'office d'une injonction au préfet de police de délivrer à Mme B..., un titre de séjour en qualité de membre de la famille d'un ressortissant de l'Union européenne.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- le code de justice administrative.

Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

M. Lapouzade a présenté son rapport lors de l'audience publique.

Considérant ce qui suit :

1. Mme B... épouse C..., ressortissante algérienne née en juillet 1985, est entrée en France en juillet 2020 selon ses déclarations. Le 19 janvier 2022, elle a sollicité son admission au séjour en qualité de membre de famille d'un citoyen de l'Union européenne. Par un arrêté du 8 avril 2022, le préfet de police a refusé de lui délivrer un titre de séjour, et lui a fait obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours. Mme B... épouse C... fait appel du jugement du 21 juillet 2022 par lequel le tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande tendant à l'annulation de cet arrêté.

Sur les conclusions à fin d'annulation :

2. En premier lieu, aux termes de l'article L. 233-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Les ressortissants de pays tiers, membres de famille d'un citoyen de l'Union européenne satisfaisant aux conditions énoncées aux 1° ou 2° de l'article L. 233-1, ont le droit de séjourner sur le territoire français pour une durée supérieure à trois mois. ". Aux termes de l'article L. 233-1 du même code : " Les citoyens de l'Union européenne ont le droit de séjourner en France pour une durée supérieure à trois mois s'ils satisfont à l'une des conditions suivantes : / 1° Ils exercent une activité professionnelle en France ; / 2° Ils disposent pour eux et pour leurs membres de famille de ressources suffisantes afin de ne pas devenir une charge pour le système d'assistance sociale, ainsi que d'une assurance maladie ; / (...). ".

3. Ces dispositions, telles qu'interprétées par la Cour de justice de l'Union européenne, confèrent au ressortissant mineur d'un Etat membre, en sa qualité de citoyen de l'Union, ainsi que, par voie de conséquence, au ressortissant d'un Etat tiers, parent de ce mineur et qui en assume la charge, un droit de séjour dans l'Etat membre d'accueil à la double condition que cet enfant soit couvert par une assurance maladie appropriée et que le parent qui en assume la charge dispose de ressources suffisantes. L'Etat membre d'accueil, qui doit assurer aux citoyens de l'Union la jouissance effective des droits que leur confère ce statut, ne peut refuser à l'enfant mineur, citoyen de l'Union, et à son parent, le droit de séjourner sur son territoire que si l'une au moins de ces deux conditions, dont le respect permet d'éviter que les intéressés ne deviennent une charge déraisonnable pour ses finances publiques, n'est pas remplie.

4. Pour refuser l'admission au séjour de Mme B... épouse C..., dont il n'est pas contesté qu'elle est mère d'un enfant de nationalité italienne né en 2014, le préfet de police s'est fondé sur la circonstance que l'intéressée ne justifiait pas de ressources suffisantes pour elle et son enfant, ni, en outre, d'une activité professionnelle. Il ressort des pièces produites en appel par Mme B... épouse C..., qu'elle exerce sous le statut d'auto-entrepreneur, selon l'extrait d'immatriculation au registre du commerce et des sociétés, et depuis septembre 2020, des activités d'achat vente en e-commerce et sur les marchés, de livraison de repas à domicile, de gardes d'enfants et de cours de langue et qu'elle est inscrite à ce titre à l'URSSAF. Elle produit une attestation fiscale, des bulletins de salaire et une déclaration de ses revenus sur l'année 2021 dont il ressort qu'elle a perçu 23 608 euros de chiffres d'affaires de son activité de micro entrepreneur et 1 620 euros de revenus salariés pour un emploi d'assistante ménagère. Ces documents attestent qu'à la date de la décision en litige, Mme B... épouse C... disposait ainsi de ressources suffisantes pour elle et son fils. Une attestation de l'URSSAF du 18 mai 2022, produite au dossier fait également état de ce qu'elle est à jour de ses obligations de paiements des cotisations de sécurité sociale. Dans ces conditions, Mme B... épouse C... ne pouvait être regardée comme susceptible de faire peser sur les finances publiques nationales une charge déraisonnable. Par suite, en refusant de délivrer à l'intéressée le titre sollicité en qualité de membre de famille d'un ressortissant de l'Union européenne, le préfet de police a méconnu les dispositions précitées.

5. Le refus de titre de séjour opposé à Mme B... épouse C... étant ainsi entaché d'illégalité, la décision portant obligation de quitter le territoire français doit, par voie de conséquence, également être annulée.

6. Il résulte de ce qui précède, sans qu'il soit besoin d'examiner les autres moyens de la requête, que Mme B... épouse C... est fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande.

Sur les conclusions à fin d'injonction :

7. Aux termes de l'article L. 911-1 du code de justice administrative : " Lorsque sa décision implique nécessairement qu'une personne morale de droit public ou un organisme de droit privé chargé de la gestion d'un service public prenne une mesure d'exécution dans un sens déterminé, la juridiction, saisie de conclusions en ce sens, prescrit, par la même décision, cette mesure assortie, le cas échéant, d'un délai d'exécution. / La juridiction peut également prescrire d'office cette mesure. ".

8. Eu égard au motif d'annulation retenu, le présent arrêt implique nécessairement que soit délivré à Mme B... épouse C... un titre de séjour en qualité de membre de famille d'un ressortissant de l'Union européenne, dans un délai de trois mois à compter de la notification de l'arrêt.

Sur les conclusions présentées sur le fondement des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

9. Il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de l'État le versement à Mme B... épouse C... de la somme de 1 500 euros.

DÉCIDE :

Article 1er : Le jugement n° 2210462/8 du 21 juillet 2022 du tribunal administratif de Paris ainsi que l'arrêté du 8 avril 2022 du préfet de police sont annulés.

Article 2 : Il est enjoint au préfet de police de délivrer à Mme B... épouse C... un titre de séjour en qualité de membre de famille d'un ressortissant de l'Union européenne dans un délai de trois mois à compter de la notification du présent arrêt.

Article 3 : L'État versera à Mme B... épouse C..., une somme de 1 500 euros en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 4 : Le présent arrêt sera notifié à Mme A... B... épouse C..., au ministre de l'intérieur et des outre-mer et au préfet de police.

Délibéré après l'audience du 1er juin 2023, à laquelle siégeaient :

- M. Lapouzade, président de chambre,

- M. Diémert, président-assesseur,

- M. Gobeill, premier conseiller.

Rendu public par mise à disposition au greffe le 22 juin 2023.

Le président-rapporteur,

J. LAPOUZADE Le président-assesseur,

S. DIEMERT

La greffière,

Y. HERBER

La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur et des outre-mer en ce qui le concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

N° 22PA03873 2


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Paris
Formation : 1ère chambre
Numéro d'arrêt : 22PA03873
Date de la décision : 22/06/2023
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : M. LAPOUZADE
Rapporteur ?: M. LAPOUZADE
Rapporteur public ?: M. DORE
Avocat(s) : TIHAL

Origine de la décision
Date de l'import : 10/08/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.paris;arret;2023-06-22;22pa03873 ?
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