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14/06/2023 | FRANCE | N°22PA03487

France | France, Cour administrative d'appel de Paris, 4ème chambre, 14 juin 2023, 22PA03487


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. A... B... a demandé au tribunal administratif de Montreuil d'annuler l'arrêté du 26 mai 2021 par lequel le préfet de la Seine-Saint-Denis a refusé de lui délivrer un titre de séjour, l'a obligé à quitter le territoire français sans délai, a fixé le pays de renvoi et a prononcé à son encontre une interdiction de retour sur le territoire français d'une durée de deux ans.

Par un jugement n° 2108563 du 29 juin 2022, le tribunal administratif de Montreuil a rejeté sa demande.

Procédur

e devant la Cour :

Par une requête, enregistrée le 27 juillet 2022, M. B..., représenté par ...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. A... B... a demandé au tribunal administratif de Montreuil d'annuler l'arrêté du 26 mai 2021 par lequel le préfet de la Seine-Saint-Denis a refusé de lui délivrer un titre de séjour, l'a obligé à quitter le territoire français sans délai, a fixé le pays de renvoi et a prononcé à son encontre une interdiction de retour sur le territoire français d'une durée de deux ans.

Par un jugement n° 2108563 du 29 juin 2022, le tribunal administratif de Montreuil a rejeté sa demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête, enregistrée le 27 juillet 2022, M. B..., représenté par Me Weinberg, demande à la Cour :

1°) d'annuler ce jugement ;

2°) d'annuler, pour excès de pouvoir, cet arrêté ;

3°) d'enjoindre au préfet de la Seine-Saint-Denis de lui délivrer un certificat de résidence en application de l'article 7 ou de l'article 6-5 de l'accord franco-algérien ou, à défaut, de l'article L. 435-1 du code de l'entrée et du séjour et des étrangers et du droit d'asile, dans un délai de quinze jours à compter de la notification de l'arrêt à intervenir, sous astreinte de 25 euros par jour de retard ;

4°) à défaut, d'enjoindre au préfet de réexaminer sa situation dans un délai de quinze jours à compter de cette notification et de lui délivrer, dans l'attente de ce réexamen, une autorisation provisoire de séjour, sous astreinte de 25 euros par jour de retard ;

5°) de mettre à la charge de l'Etat le versement de la somme de 1 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Il soutient que :

- le jugement attaqué est irrégulier, le tribunal administratif ayant omis de se prononcer sur son moyen soulevé à l'encontre de la décision portant refus de titre de séjour et tiré de l'erreur manifeste d'appréciation de sa situation familiale au regard des dispositions de l'article L. 435-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- il est irrégulier, le tribunal administratif ayant omis de se prononcer sur son moyen soulevé à l'encontre de la décision refusant un délai de départ volontaire et tiré du défaut d'examen particulier de sa situation ;

- il est entaché d'erreurs de droit et de fait ;

- la décision portant refus de titre de séjour est entachée d'une insuffisance de motivation et d'un défaut d'examen particulier de sa situation ;

- elle est entachée d'une erreur de fait et d'une erreur de droit dans la mesure où le préfet ne pouvait écarter son ancienneté professionnelle au motif qu'il a travaillé muni d'une fausse carte d'identité ;

- elle méconnaît les stipulations de l'article 6-5 de l'accord franco-algérien ;

- elle est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation au regard des dispositions de l'article L. 435-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- elle méconnaît les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- elle méconnaît les stipulations de l'article 3-1 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant ;

- la décision portant obligation de quitter le territoire méconnaît les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- elle méconnaît les stipulations de l'article 3-1 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant ;

- la décision refusant un délai de départ volontaire est illégale par voie de conséquence de l'illégalité de la décision portant obligation de quitter le territoire français ;

- elle est entachée d'une insuffisance de motivation en droit et d'un défaut d'examen particulier de sa situation ;

- elle est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation au regard des dispositions des articles L. 612-2 et L. 612-3 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et des stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales dès lors qu'il justifie de garanties de représentation et de circonstances particulières ;

- la décision fixant le pays de renvoi est illégale par voie de conséquence de l'illégalité de la décision portant obligation de quitter le territoire ;

- la décision portant interdiction de retour sur le territoire français d'une durée de deux ans est illégale par voie de conséquence de l'illégalité de la décision portant obligation de quitter le territoire français ;

- elle est entachée d'une insuffisance de motivation et d'un défaut d'examen particulier de sa situation ;

- elle est entachée d'une erreur de droit dès lors qu'elle est fondée sur les dispositions de l'article L. 612-8 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- elle méconnaît les dispositions de l'article L. 612-10 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et les stipulations des articles 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et 3-1 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant.

La requête a été communiquée au préfet de la Seine-Saint-Denis qui n'a pas présenté de mémoire en défense.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- la convention internationale relative aux droits de l'enfant signée à New York le 26 décembre 1990 ;

- l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968 modifié ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- le code de justice administrative.

Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme d'Argenlieu, rapporteure,

- et les observations de Me Milly substituant Me Weinberg, avocat de M. B....

Considérant ce qui suit :

1. M. B..., ressortissant algérien, né le 5 juin 1978 et entré en France le 23 août 2015, a sollicité, le 22 janvier 2021, la délivrance d'un certificat de résidence. Par un arrêté du 26 mai 2021, le préfet de la Seine-Saint-Denis a refusé de lui délivrer un titre de séjour, l'a obligé à quitter le territoire français sans délai, a fixé le pays à destination duquel il pourra être éloigné et a prononcé à son encontre une interdiction de retour sur le territoire français d'une durée de deux ans. Par un jugement, dont M. B... fait appel, le tribunal administratif de Montreuil a rejeté sa demande tendant à l'annulation de cet arrêté.

Sur la régularité du jugement attaqué :

2. D'une part, le requérant fait valoir que les premiers juges ont omis de se prononcer sur le moyen soulevé à l'encontre de la décision portant refus de titre de séjour et tiré de la méconnaissance de l'article L. 435-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers du droit d'asile. Toutefois, dans la mesure où M. B..., ressortissant algérien, dont la situation est régie de manière exclusive par l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968, ne pouvait utilement se prévaloir des dispositions de cet article, ce moyen était inopérant et le tribunal n'était pas tenu d'y répondre.

3. D'autre part, si M. B... soutient que le tribunal administratif aurait commis des erreurs de droit et de fait, ces moyens, qui se rattachent au bien-fondé du raisonnement suivi par les juges de première instance, ne sont pas de nature à affecter la régularité du jugement attaqué.

4. En revanche, il ressort du jugement attaqué, ainsi que le soutient le requérant, que les premiers juges ont omis de se prononcer sur le moyen soulevé à l'encontre de la décision refusant un délai de départ volontaire et tiré de l'absence d'examen particulier de sa situation personnelle, qui n'était pas inopérant. Par suite, M. B... est fondé à soutenir que ce jugement est, pour ce motif, entaché d'irrégularité et à en demander l'annulation en tant qu'il a rejeté ses conclusions tendant à l'annulation de la décision portant refus de délai de départ volontaire.

5. Il y a lieu de statuer immédiatement, par la voie de l'évocation, sur les conclusions de la demande de M. B... tendant à l'annulation de la décision portant refus de délai de départ volontaire et, par la voie de l'effet dévolutif de l'appel, sur le surplus des conclusions de sa requête.

Sur la légalité de la décision portant refus de titre de séjour :

6. En premier lieu, la décision attaquée comporte l'énoncé des considérations de droit et de fait, notamment la situation personnelle et familiale de M. B..., qui la fondent. Contrairement à ce que soutient le requérant, le préfet de la Seine-Saint-Denis n'était pas tenu de mentionner de manière exhaustive tous les éléments relatifs à sa situation personnelle dont il entendait se prévaloir. Par suite, le moyen tiré d'une insuffisance de motivation qui entacherait la décision attaquée doit être écarté.

7. En deuxième lieu, il ressort de cette motivation que, contrairement à ce que soutient le requérant, le préfet de la Seine-Saint-Denis a procédé à un examen particulier de sa situation, y compris professionnelle, avant de rejeter sa demande de titre de séjour. En outre, il ne ressort d'aucune des pièces du dossier que l'autorité préfectorale n'aurait pas pris en compte l'ensemble des éléments caractérisant sa situation personnelle et familiale prévalant à la date de la décision litigieuse. Par suite, le moyen tiré de l'erreur de droit dont serait entachée la décision attaquée doit être écarté.

8. En troisième lieu, les conditions dans lesquelles M. B..., ressortissant algérien, peut être admis à séjourner en France sont régies de manière exclusive par l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968. Le requérant ne peut, dès lors, utilement invoquer les dispositions de l'article L. 435-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, pour contester la décision attaquée portant refus de titre de séjour.

9. En quatrième lieu, M. B... se prévaut de la durée de son séjour en France, soit près de six ans à la date de la décision attaquée, de la présence sur le territoire national de son épouse et de ses deux enfants mineurs, dont l'aînée est scolarisée, de l'intensité et de la stabilité des liens personnels qu'il y a tissés ainsi que de son intégration dans la société française. Toutefois, il ressort des pièces du dossier que l'épouse de M. B..., ressortissante algérienne, est également en situation irrégulière au regard du séjour. En outre, l'intéressé n'établit, ni n'allègue sérieusement qu'il serait dans l'impossibilité de se réinsérer dans son pays d'origine où sa cellule familiale pourrait se reconstituer et où il n'établit pas être dépourvu d'attaches, alors qu'il y a lui-même vécu jusqu'à l'âge de trente-sept ans. Par ailleurs, M. B... ne se prévaut, pour justifier sa demande d'admission exceptionnelle au séjour au titre du travail, que d'un contrat de travail à durée indéterminée en qualité de maçon au sein de l'entreprise " BTM bâtiment " et des bulletins de paie du 1er juin 2018 au 31 juin 2020 qui s'y rapportent, et d'un contrat de travail à durée indéterminée en qualité d'agent de sécurité au sein de la société " Gold Sécurité privée " et des bulletins de paie du 13 octobre 2020 au 31 mars 2021 qui s'y rapportent. Cependant, ces activités professionnelles, d'une durée limitée, ne permettent pas de démontrer une insertion professionnelle stable et ancienne en France, ni l'existence de motifs exceptionnels justifiant son admission au séjour au titre du travail. Enfin, si le préfet relève dans sa décision, que M. B... a travaillé sous couvert d'une fausse carte d'identité française, ce qui faisait selon lui obstacle à son admission au séjour, il ressort des pièces du dossier qu'il aurait pris la même décision s'il s'était fondé sur la seule absence de motif exceptionnel. Par suite, en estimant que la situation personnelle et familiale de M. B... ne justifiait pas une mesure de régularisation, le préfet de la Seine-Saint-Denis n'a commis aucune erreur manifeste dans son appréciation de cette situation.

10. En cinquième lieu, aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " 1. Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale (...). / 2. Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale, ou à la protection des droits et libertés d'autrui ". Aux termes de l'article 6 de l'accord franco-algérien : " Le certificat de résidence d'un an portant la mention " vie privée et familiale " est délivré de plein droit : / (...) 5. Au ressortissant algérien, qui n'entre pas dans les catégories précédentes ou dans celles qui ouvrent droit au regroupement familial, dont les liens personnels et familiaux en France sont tels que le refus d'autoriser son séjour porterait à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée au regard des motifs du refus ".

11. Pour les mêmes motifs que ceux énoncés au point 9, M. B... n'est pas fondé à soutenir que la décision attaquée aurait porté à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée au regard des buts en vue desquels elle a été prise. Par suite, les moyens tirés de la méconnaissance des stipulations précitées doivent être écartés.

12. En dernier lieu, aux termes du paragraphe 1 de l'article 3 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant : " Dans toutes les décisions qui concernent les enfants, qu'elles soient le fait d'institutions publiques ou privées de protection sociale, des tribunaux, des autorités administratives ou des organes législatifs, l'intérêt supérieur de l'enfant doit être une considération primordiale ". Il résulte de ces stipulations, qui peuvent être utilement invoquées à l'appui d'un recours pour excès de pouvoir, que, dans l'exercice de son pouvoir d'appréciation, l'autorité administrative doit accorder une attention primordiale à l'intérêt supérieur des enfants dans toutes les décisions les concernant.

13. M. B... soutient que la décision contestée porterait atteinte à l'intérêt supérieur de ses enfants. Toutefois, cette décision n'a ni pour objet ni pour effet de séparer les enfants de leur père alors que, Mme B... étant également en situation régulière, la cellule familiale a vocation à se reconstituer en Algérie. Par ailleurs, il n'est fait état d'aucun obstacle à ce que les enfants de M. B..., qui sont encore très jeunes, y poursuivent leur scolarité. Ainsi, la décision contestée n'a pas porté une atteinte à l'intérêt supérieur des enfants de l'intéressé et n'a donc pas méconnu les stipulations précitées.

Sur la légalité de la décision portant obligation de quitter le territoire :

14. D'une part, pour les mêmes motifs que ceux énoncés au point 9, le moyen tiré de la méconnaissance des stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales doit être écarté.

15. D'autre part, pour les mêmes motifs que ceux énoncés au point 13, le moyen tiré de la méconnaissance des stipulations de l'article 3-1 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant doit être écarté.

En ce qui concerne la décision refusant un délai de départ volontaire :

16. En premier lieu, il résulte de ce qui précède que le moyen tiré de ce que la décision refusant un délai de départ volontaire doit être annulée par voie de conséquence de l'annulation de l'obligation de quitter le territoire français doit être écarté.

17. En second lieu, aux termes de l'article L. 612-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " (...) l'autorité administrative peut refuser d'accorder un délai de départ volontaire dans les cas suivants : / (...) 3° Il existe un risque que l'étranger se soustraie à la décision portant obligation de quitter le territoire français dont il fait l'objet ". Aux termes de l'article L. 612-3 du même code : " Le risque mentionné au 3° de l'article L. 612-2 peut être regardé comme établi, sauf circonstance particulière, dans les cas suivants : / (...) 5° L'étranger s'est soustrait à l'exécution d'une précédente mesure d'éloignement ; / (...) 7° L'étranger a contrefait, falsifié ou établi sous un autre nom que le sien un titre de séjour ou un document d'identité ou de voyage ou a fait usage d'un tel document ; / 8° L'étranger ne présente pas de garanties de représentation suffisantes, notamment parce qu'il ne peut présenter des documents d'identité ou de voyage en cours de validité, qu'il a refusé de communiquer les renseignements permettant d'établir son identité ou sa situation au regard du droit de circulation et de séjour ou a communiqué des renseignements inexacts, qu'il a refusé de se soumettre aux opérations de relevé d'empreintes digitales ou de prise de photographie prévues au 3° de l'article L. 142-1, qu'il ne justifie pas d'une résidence effective et permanente dans un local affecté à son habitation principale ou qu'il s'est précédemment soustrait aux obligations prévues aux articles L. 721-6 à L. 721-8, L. 731-1, L. 731-3, L. 733-1 à L. 733-4, L. 733-6, L. 743-13 à L. 743-15 et L. 751-5 ".

18. D'une part, la décision en litige, qui vise l'article L. 612-2 précité du code de l'entrée et du séjour des étrangers, lequel prévoit que l'autorité administrative peut refuser d'accorder un délai de départ volontaire lorsqu'il existe un risque que l'étranger se soustraie à la décision portant obligation de quitter le territoire français dont il fait objet, mentionne, notamment, que M. B... s'est soustrait à une précédente obligation de quitter le territoire français du 9 février 2017 et qu'il a fait usage d'une carte d'identité française frauduleuse entre 2018 et 2020 ". Elle comporte ainsi l'énoncé des considérations de droit et de fait qui la fondent et est donc suffisamment motivée, alors même qu'elle ne vise pas expressément l'article L. 612-3 précité du même code. Par suite, le moyen tiré d'une insuffisance de motivation qui entacherait la décision attaquée doit être écarté.

19. D'autre part, il ne ressort ni de cette motivation, ni d'aucune autre pièce du dossier que le préfet de la Seine-Saint-Denis n'aurait pas, avant de lui refuser un délai de départ volontaire, procédé à un examen particulier de la situation personnelle et familiale de M. B.... Le moyen doit donc être écarté.

20. Par ailleurs, quand bien même l'intéressé présenterait des garanties de représentation, notamment un passeport, un domicile et un travail et si le requérant se prévaut, en particulier, de la scolarisation de sa fille, il ressort des pièces du dossier et il n'est pas contesté qu'il s'est soustrait à une précédente mesure d'éloignement du 9 février 2017 et que, par ailleurs, il a fait usage d'une fausse carte d'identité française entre 2018 et 2020. Dans ces conditions, en estimant qu'il existait un risque que l'intéressé se soustraie à la mesure d'éloignement en litige et, dans les circonstances de l'espèce, en refusant de lui accorder un délai de départ volontaire, le préfet de la Seine-Saint-Denis n'a pas commis d'erreur dans son appréciation de la situation de l'intéressé au regard des dispositions citées au point 17.

21. Enfin, pour les mêmes motifs que ceux exposés au point 9, le moyen tiré de ce qu'en refusant d'accorder un délai de départ volontaire, le préfet de la Seine-Saint-Denis aurait méconnu les stipulations précitées de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés, doit être écarté.

Sur la légalité de la décision fixant le pays de destination :

22. Il résulte de ce qui précède que le requérant n'est pas fondé à demander l'annulation de la décision fixant le pays de destination par voie de conséquence de celle de la mesure d'éloignement.

Sur la légalité de la décision portant interdiction de retour sur le territoire français :

23. En premier lieu, il résulte de ce qui précède que le moyen tiré de ce que la décision portant interdiction de retour sur le territoire français doit être annulée par voie de conséquence de l'annulation de l'obligation de quitter le territoire français doit être écarté.

24. En second lieu, aux termes de l'article L. 612-6 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Lorsqu'aucun délai de départ volontaire n'a été accordé à l'étranger, l'autorité administrative assortit la décision portant obligation de quitter le territoire français d'une interdiction de retour sur le territoire français. Des circonstances humanitaires peuvent toutefois justifier que l'autorité administrative n'édicte pas d'interdiction de retour. / Les effets de cette interdiction cessent à l'expiration d'une durée, fixée par l'autorité administrative, qui ne peut excéder trois ans à compter de l'exécution de l'obligation de quitter le territoire français ". Aux termes de l'article L. 612-8 du même code : " Lorsque l'étranger n'est pas dans une situation mentionnée aux articles L. 612-6 et L. 612-7, l'autorité administrative peut assortir la décision portant obligation de quitter le territoire français d'une interdiction de retour sur le territoire français. / Les effets de cette interdiction cessent à l'expiration d'une durée, fixée par l'autorité administrative, qui ne peut excéder deux ans à compter de l'exécution de l'obligation de quitter le territoire français ". Aux termes de l'article L. 612-10 de ce code : " Pour fixer la durée des interdictions de retour mentionnées aux articles L. 612-6 et L. 612-7, l'autorité administrative tient compte de la durée de présence de l'étranger sur le territoire français, de la nature et de l'ancienneté de ses liens avec la France, de la circonstance qu'il a déjà fait l'objet ou non d'une mesure d'éloignement et de la menace pour l'ordre public que représente sa présence sur le territoire français (...) ".

25. D'une part, la décision attaquée comporte l'énoncé des considérations de droit et de fait, notamment la situation personnelle, familiale et professionnelle du requérant, qui la fondent. Par suite, le moyen tiré d'une insuffisance de motivation qui entacherait cette décision doit être écarté.

26. D'autre part, il ressort de cette motivation que, contrairement à ce que soutient le requérant, le préfet de la Seine-Saint-Denis a procédé à un examen particulier de sa situation en prenant en compte l'ensemble des éléments caractérisant sa situation à la date de la décision litigieuse. Par suite, le moyen tiré de l'erreur de droit dont serait entachée de ce chef la décision attaquée doit être écarté.

27. Par ailleurs, si la décision en litige vise par erreur l'article L. 612-8 précité du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile relatif à la situation des étrangers auxquels un délai de départ volontaire a été accordé, alors que le préfet de la Seine-Saint-Denis, qui a refusé un délai de départ volontaire à M. B..., aurait dû viser l'article L. 612-6 précité du même code, cette erreur est, en l'espèce, sans incidence sur la légalité de la décision attaquée dans la mesure où ces deux textes autorisaient le préfet à prononcer une interdiction de retour et où le préfet, en refusant à l'intéressé un délai de départ volontaire, était, en principe, tenu d'assortir la décision portant obligation de quitter le territoire français d'une interdiction de retour. Le moyen tiré de l'erreur de droit doit, par suite, être écarté.

28. Enfin, M. B... ne démontre aucune circonstance humanitaire de nature à faire obstacle au prononcé d'une interdiction de retour qui doit assortir en principe, en application des dispositions de l'article L. 612-6 précité, l'obligation faite à un ressortissant étranger de quitter le territoire français sans délai. En particulier, ainsi qu'il a été dit aux points 9 et 13, le requérant ne justifie pas d'une insertion professionnelle stable et ancienne en France et n'établit, ni n'allègue sérieusement aucune circonstance particulière de nature à faire obstacle à ce qu'il emmène avec lui son épouse, qui est également en situation irrégulière au regard du séjour, et ses deux enfants et à ce qu'il poursuive normalement sa vie privée et familiale à l'étranger et, en particulier, en Algérie où lui-même a vécu de nombreuses années. Par suite, en se fondant, notamment, sur les conditions irrégulières de son séjour en France, le préfet de la Seine-Saint-Denis a pu, sans entacher sa décision d'une erreur d'appréciation, ni méconnaître les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et celles de l'article 3-1 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant, prononcer à son encontre une interdiction de retour pour une durée de douze mois.

29. Il résulte de tout ce qui précède que M. B... n'est pas fondé, d'une part, à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Montreuil a rejeté les conclusions de sa demande tendant à l'annulation des décisions portant refus de titre de séjour et obligation de quitter le territoire français, fixant le pays de destination et portant interdiction de retour sur le territoire français d'une durée de deux ans et, d'autre part, à demander l'annulation de la décision portant refus d'un délai de départ volontaire. Par voie de conséquence, ses conclusions aux fins d'injonction et d'astreinte et celles présentées sur le fondement des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ne peuvent qu'être rejetées.

D E C I D E :

Article 1er : Le jugement n° 2108563 du tribunal administratif de Montreuil du 29 juin 2022 est annulé en tant qu'il statue sur les conclusions de la demande de M. B... tendant à l'annulation de la décision du préfet de la Seine-Saint-Denis du 26 mai 2022 refusant de lui accorder un délai de départ volontaire.

Article 2 : Les conclusions de la demande de M. B... tendant à l'annulation de la décision du 26 mai 2022 portant refus de délai de départ volontaire et le surplus des conclusions de sa requête sont rejetés.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à M. A... B... et au ministre de l'intérieur et des outre-mer.

Copie en sera adressée au préfet de la Seine-Saint-Denis.

Délibéré après l'audience du 31 mai 2023 à laquelle siégeaient :

- M. d'Haëm, président-assesseur,

- Mme d'Argenlieu, première conseillère,

- Mme Saint-Macary, première conseillère.

Rendu public par mise à disposition au greffe le 14 juin 2023.

La rapporteure,

L. d'ARGENLIEULe président-assesseur,

R. d'HAEM

La greffière,

V. BREME

La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur et des outre-mer en ce qui le concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

N° 22PA03487 2


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Paris
Formation : 4ème chambre
Numéro d'arrêt : 22PA03487
Date de la décision : 14/06/2023
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : M. D’HAEM
Rapporteur ?: Mme Lorraine D'ARGENLIEU
Rapporteur public ?: M. MANTZ
Avocat(s) : WEINBERG

Origine de la décision
Date de l'import : 18/06/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.paris;arret;2023-06-14;22pa03487 ?
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