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23/05/2023 | FRANCE | N°22PA00384

France | France, Cour administrative d'appel de Paris, 6ème chambre, 23 mai 2023, 22PA00384


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. B... C... a saisi le Tribunal administratif de Melun d'une demande tendant à titre principal à l'annulation de la décision du 16 juillet 2019 par laquelle le maire de la commune de Melun lui a infligé un blâme.

Par un jugement n°1908340 du 25 novembre 2021, le Tribunal administratif de Melun a rejeté sa demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête, enregistrée le 25 janvier 2022, M. C..., représenté par

Me Lerat, demande à la Cour :

1°) d'annuler ce jugem

ent du 25 novembre 2021 du Tribunal administratif de Melun ;

2°) d'annuler la décision mentionnée ci-dess...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. B... C... a saisi le Tribunal administratif de Melun d'une demande tendant à titre principal à l'annulation de la décision du 16 juillet 2019 par laquelle le maire de la commune de Melun lui a infligé un blâme.

Par un jugement n°1908340 du 25 novembre 2021, le Tribunal administratif de Melun a rejeté sa demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête, enregistrée le 25 janvier 2022, M. C..., représenté par

Me Lerat, demande à la Cour :

1°) d'annuler ce jugement du 25 novembre 2021 du Tribunal administratif de Melun ;

2°) d'annuler la décision mentionnée ci-dessus du 16 juillet 2019 ;

3°) d'enjoindre au maire de Melun de retirer la sanction litigieuse de son dossier administratif ;

4°) de mettre à la charge de la commune de Melun la somme de 2 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Il soutient que :

- le jugement attaqué est irrégulier pour insuffisance de motivation ;

- la sanction disciplinaire litigieuse a été prise au terme d'une procédure irrégulière, certaines pièces de la procédure disciplinaire, notamment les rapports établis par sa hiérarchie, ne lui ayant pas été communiquées, portant atteinte au principe général des droits de la défense, en violation de l'article 19 de la loi du 13 juillet 1983 ;

- la matérialité des faits reprochés n'est pas établie ;

- la sanction infligée est entachée d'erreur d'appréciation et est disproportionnée, eu égard aux faits ainsi retenus, et en l'absence de reproches antérieurs visant son comportement relationnel.

Par un mémoire en défense, enregistré le 27 février 2023, la commune de Melun, représentée par Me Eyrignoux, conclut au rejet de la requête et demande, en outre, qu'une somme de 4 000 euros soit mise à la charge de M. C... au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que les moyens soulevés par M. C... sont infondés.

Par des mémoires en réplique, enregistrés les 14 et 15 mars 2023, M. C... maintient ses conclusions par les mêmes moyens.

Par une ordonnance du 28 février 2023, la clôture de l'instruction a été reportée au 28 mars 2023 à 12 heures.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code général des collectivités territoriales ;

- la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983 ;

- la loi n° 84-53 du 26 janvier 1984 ;

- le décret n° 89-677 du 18 septembre 1989 ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. A...,

- les conclusions de Mme Naudin, rapporteure publique,

- les observations de Me Abbar pour M. C...,

- et les observations de Me Pawlotsky pour la commune de Melun.

Considérant ce qui suit :

1. Titulaire du grade d'adjoint technique principal de deuxième classe de la fonction publique territoriale, M. C... exerce ses fonctions au sein de la commune de Melun depuis le 1er mars 2008, au service de la propreté urbaine. Par une décision du 16 juillet 2019, le maire de la commune lui a infligé un blâme. M. C... a saisi le Tribunal administratif de Melun d'une demande tendant à l'annulation de cette décision Par un jugement du

25 novembre 2021, le tribunal administratif de Melun a rejeté sa demande. M. C... relève appel de ce jugement.

Sur la régularité du jugement attaqué :

2. Les premiers juges, qui n'étaient pas tenus de répondre à tous les arguments de

M. C..., ont répondu de façon suffisamment circonstanciée à l'ensemble de ses moyens pour les écarter. Le moyen tiré de l'irrégularité du jugement attaqué pour insuffisance de sa motivation doit donc être écarté.

Sur le bien-fondé du jugement attaqué :

3. En premier lieu, aux termes de l'article 19 de la loi du 13 juillet 1983 portant droits et obligations des fonctionnaires : " Le fonctionnaire à l'encontre duquel une procédure disciplinaire est engagée a droit à la communication de l'intégralité de son dossier individuel et de tous les documents annexes et à l'assistance de défenseurs de son choix. L'administration doit informer le fonctionnaire de son droit à communication du dossier. (...) ". Aux termes de l'article 4 du décret du 18 septembre 1989 relatif à la procédure disciplinaire applicable aux fonctionnaires territoriaux : " L'autorité investie du pouvoir disciplinaire informe par écrit l'intéressé de la procédure disciplinaire engagée contre lui, lui précise les faits qui lui sont reprochés et lui indique qu'il a le droit d'obtenir la communication intégrale de son dossier individuel au siège de l'autorité territoriale et la possibilité de se faire assister par un ou plusieurs conseils de son choix. / L'intéressé doit disposer d'un délai suffisant pour prendre connaissance de ce dossier et organiser sa défense. (...). ".

4. Le requérant soutient que la sanction litigieuse a été prise au terme d'une procédure viciée au motif qu'il n'a pas pris connaissance de pièces sur le fondement desquelles cette sanction a été édictée. Toutefois, d'une part, s'il mentionne que des rapports " ne [lui] ont pas été communiqués " il n'est pas contesté que l'intéressé n'a pas demandé à avoir accès à son dossier, alors que son droit à la communication de son dossier lui avait été rappelé par un courrier du 11 juin 2019. Si le requérant relève que l'un des rapports, établi par mail du 26 juin 2019, ne pouvait matériellement figurer dans son dossier au moment de l'entretien du 21 juin 2019 préalable à l'édiction de la sanction, il est constant qu'il a eu un second entretien préalable à la date du 26 juin 2019. Par suite, le moyen tiré de ce que la décision attaquée serait entachée d'un vice de procédure doit être écarté.

5. En deuxième lieu, aux termes de l'article 29 de la loi du 13 juillet 1983 portant droits et obligations des fonctionnaires : " Toute faute commise par un fonctionnaire dans l'exercice ou à l'occasion de l'exercice de ses fonctions l'expose à une sanction disciplinaire (...). ". L'article 89 de la loi du 26 janvier 1984 portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique territoriale dispose : " Les sanctions disciplinaires sont réparties en quatre groupes : / Premier groupe : / (...) / le blâme ; (...) ".

6. Il appartient au juge de l'excès de pouvoir, saisi de moyens en ce sens, de rechercher si les faits reprochés à un agent public ayant fait l'objet d'une sanction disciplinaire constituent des fautes de nature à justifier une sanction et si la sanction retenue est proportionnée à la gravité de ces fautes.

7. Il résulte des mentions de la décision attaquée que, pour prendre la sanction de blâme à l'encontre de M. C..., l'autorité territoriale s'est fondée sur le manquement tenant à son comportement relationnel, plus particulièrement caractérisé par des " propos déplacés " que le requérant aurait tenus le 31 mai 2019 concernant l'un de ses collègues, en présence d'une autre agente de la collectivité, alors même que ses supérieurs hiérarchiques l'avaient déjà alerté à plusieurs reprises sur son attitude au plan relationnel.

8. D'une part, pour établir la matérialité des faits survenus le 31 mai 2019, l'autorité territoriale s'est fondée sur des rapports établis par la hiérarchie du requérant, constitués d'un mail du 3 juin 2019 de sa supérieure hiérarchique, et d'un mail du même jour ainsi que d'une note du 6 juin 2019 établis par le chef de son service, lesquels rapportent le témoignage de l'agente devant laquelle des propos, à caractère insultant et haineux, et précisément exposés, ont été tenus par M. C..., cette agente ayant confirmé son témoignage lors d'une nouvelle audition, dont la teneur est retracée dans un mail du 26 juin 2019 par la directrice des ressources humaines adjointe. Or, contrairement à ce que soutient le requérant, il ne ressort pas des pièces du dossier que les deux témoignages de cette agente se seraient contredits, ni qu'ils seraient pour un quelconque motif sujets à caution, cette agente avec laquelle il n'allègue par ailleurs pas avoir jamais connu un quelconque différend et qui ne relève pas du même service. Par suite, le moyen tiré de l'erreur de fait concernant l'incident survenu le 31 mai 2019 doit être écarté.

9. D'autre part, le requérant soutient que la commune n'était pas fondée à lui infliger la sanction du blâme, en particulier en l'absence d'un quelconque reproche de même nature qui lui aurait été fait antérieurement au 31 mai 2019. Toutefois, et alors même que certains des faits antérieurs invoqués par la commune diffèrent par leur nature de ceux qui ont justifié la sanction attaquée, le requérant ne conteste pas utilement qu'il lui a été reproché, en 2014, de s'en être pris verbalement à un responsable en charge de la formation, que ses entretiens professionnels de 2016 à 2019 comportent de multiples mentions de fréquents écarts de propos et d'une difficulté à emprunter un mode de communication modéré, sans que ces mentions aient donné lieu à observation de l'intéressé avant l'évaluation de 2019, et, qu'enfin, il aurait été appelé à modifier son comportement relationnel en avril 2019, la circonstance que de telles observations lui auraient été faites à l'occasion d'un entretien préalable à une sanction envisagée pour un tout autre motif, défaut de maîtrise d'un véhicule qui lui a valu un avertissement, étant sans incidence. Dès lors, compte tenu de la teneur des propos reprochés, matériellement établis ainsi qu'il a été dit, et qui à eux seuls justifiaient le prononcé d'une sanction, ainsi que des circonstances précitées, et à supposer même que le requérant aurait été un temps placé en situation managériale sans formation pour améliorer ses capacités relationnelles, la commune était fondée à édicter à l'encontre du requérant un blâme, sanction du premier groupe. Par suite, les moyens tirés de l'erreur d'appréciation et de la disproportion de la sanction doivent être écartés.

10. Il résulte de tout ce qui précède que M. C... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Melun a rejeté sa demande. Par voie de conséquence, ses conclusions à fin d'injonction doivent également être rejetées ainsi que celles tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

11. Enfin, il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, de faire droit aux conclusions présentées au titre du même article par la commune de Melun.

DÉCIDE :

Article 1er : La requête de M. C... est rejetée.

Article 2 : Les conclusions de la commune de Melun au titre de l'article L 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à M. B... C... et à la commune de Melun.

Délibéré après l'audience du 9 mai 2023 à laquelle siégeaient :

- M. Célérier, président de chambre,

- M. Niollet, président assesseur,

- M. Pagès, premier conseiller.

Rendu public par mise à disposition au greffe, le 23 mai 2023.

Le rapporteur,

D. PAGES

Le président,

T. CELERIER

La greffière,

E. TORDO

La République mande et ordonne au préfet de Seine- et -Marne en ce qui le concerne et à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

2

N° 22PA00384


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Paris
Formation : 6ème chambre
Numéro d'arrêt : 22PA00384
Date de la décision : 23/05/2023
Type d'affaire : Administrative

Composition du Tribunal
Président : M. CELERIER
Rapporteur ?: M. Dominique PAGES
Rapporteur public ?: Mme NAUDIN
Avocat(s) : LERAT

Origine de la décision
Date de l'import : 10/08/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.paris;arret;2023-05-23;22pa00384 ?
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