Vu la procédure suivante : Procédure contentieuse antérieure : M. D... A... a demandé au tribunal administratif de Paris d'annuler pour excès de pouvoir les arrêtés du 16 février 2022 par lesquels le préfet de police l'a obligé à quitter sans délai le territoire français, a fixé le pays de destination et a prononcé une mesure d'interdiction de retour sur le territoire français d'une durée de deux ans. Par un jugement n° 2213471 du 11 août 2022 le magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Paris a annulé les arrêtés du 16 février 2022 du préfet de police et a enjoint au préfet d'examiner la situation de M. A... au regard de son droit au séjour en France et de le munir d'une autorisation provisoire de séjour dans un délai de deux mois. Procédure devant la Cour : Par une requête sommaire et un mémoire ampliatif, enregistrés les 9 et 26 septembre 2022, le préfet de police demande à la Cour : 1°) d'annuler le jugement n° 2213471 du 11 août 2022 ; 2°) de rejeter la demande de M. A.... Il soutient que : - contrairement à ce qu'a jugé le magistrat désigné, il n'a pas commis d'erreur manifeste d'appréciation en édictant une décision portant obligation de quitter le territoire ainsi qu'une décision portant interdiction de retour sur le territoire pour une durée de deux ans ; - les autres moyens soulevés par M. A... en première instance ne sont pas fondés. Par un mémoire en défense enregistré le 23 mars 2023, non communiqué, M. A... représenté par Me Mileo conclut au rejet de la requête et demande de mettre à la charge de l'Etat la somme de 1 500 euros à verser à Me Mileo, conseil de M. A..., au titre des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991. M. A... a été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par décision du 8 février 2023. Vu les autres pièces du dossier. Vu : - le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ; - la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ; - le code de justice administrative. Le président de la formation de jugement a décidé de dispenser le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience. Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience. Le rapport de Mme B... a été entendu au cours de l'audience publique. Considérant ce qui suit : 1. Par deux arrêtés du 16 février 2022, le préfet de police a obligé M. A..., ressortissant guinéen né le 1er janvier 2002 à Conakry en Guinée, à quitter le territoire français sans délai, a désigné le pays à destination duquel il pourra être éloigné et a prononcé une interdiction de retour sur le territoire français pour une durée de vingt-quatre mois. Le préfet de police fait appel du jugement du 11 août 2022 par lequel le magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Paris a annulé les arrêtés du préfet de police en date du 16 février 2022.
Sur le bien-fondé du jugement attaqué : 2. Il ressort des pièces du dossier que M. A..., né le 1er janvier 2002, est entré en France au mois de décembre 2018 à l'âge de 16 ans et a été confié au service de l'aide sociale à l'enfance de Paris jusqu'à sa majorité. Il a ensuite conclu un contrat jeune majeur avec le département de Paris le 1er janvier 2020, valable jusqu'au 31 décembre 2022. Ainsi, à la date de la décision attaquée, il résidait sur le territoire français depuis quatre ans. Par ailleurs, il n'est pas contesté qu'il a obtenu un certificat d'aptitude professionnelle " électricien " au mois de juillet 2021 et qu'il a intégré pour l'année scolaire 2021/2022 le lycée Gaston Bachelard à Paris pour préparer un bac professionnel en électricité. Au cours de cette année scolaire, M. A..., qui était déjà orphelin, a perdu ses sœurs suite à un accident de la route au mois d'octobre 2021 en Guinée. A la suite de cet événement, l'intéressé a présenté un syndrome dépressif majeur avec des troubles sévères du sommeil et fatigue prononcée, une chute de sa motivation pour s'engager dans des projets de vie, ainsi qu'une confusion mentale qui ont généré un ralentissement général de sa pensée comme en atteste le rapport de la psychologue clinicienne de la plateforme d'accueil et d'accompagnement de jeunes non accompagnés en date du 25 juin 2022, nécessitant un accompagnement psychologique voir psychiatrique urgent. 3. Au regard de cette situation, le lycée a décidé de suspendre son inscription au mois de février 2022 pour qu'il puisse travailler sur son mal-être, tout en lui gardant une place en place en première en redoublement pour l'année scolaire 2022/2023 comme le précise l'attestation de la conseillère principale d'éducation du lycée Gaston Bachelard à Paris en date du 23 juin 2022. A la suite de cette déscolarisation, M. A... a été inscrit à l'EDI (Espace Dynamique Jeune) afin de pouvoir rester actif et se remotiver. Depuis son arrivée en France, il apparaît que l'intéressé a su s'insérer par l'apprentissage de la langue française, bien qu'il ne fût jamais scolarisé auparavant comme en atteste le rapport établi par la conseillère en économie sociale et familiale de l'association Aurore en date du 20 juillet 2022 qui suit l'intéressé depuis 2019. Par ailleurs, en dépit des difficultés rencontrées au cours de sa scolarité, les professeurs ont souligné son implication, sa volonté et les efforts accomplis pour réussir. 4. Enfin, il ne ressort d'aucune pièce du dossier que M. A... entretiendrait des relations avec des membres de sa famille dans son pays d'origine, dont quatre membres sont décédés. Les éléments qu'il verse à l'instance démontrent qu'il a transféré le centre de ses intérêts personnels en France où il justifie de l'existence d'attaches intenses et stables. Ainsi, en dépit de signalements pour des faits constitutifs d'infraction (détention et usage illicite de stupéfiants, conduite sous l'effet de substances illicites avec refus d'obtempérer, détention de plaquettes de valium sans ordonnance et d'une bombe lacrymogène) et de la négligence de l'intéressé dans le suivi administratif de la régularisation de sa situation administrative, et sans qu'y fasse obstacle la circonstance qu'il a été entendu par les services de police, le 12 avril 2022, au demeurant postérieurement à la date de la décision attaquée, à la suite d'un signalement par la victime d'une agression à la machette commise par un groupe d'individus, il ressort des éléments mentionnés ci-dessus eu qu'égard à la nécessité d'un maintien de l'intéressé en accompagnement scolaire et professionnel dans les conditions mentionnées au point 3 du présent arrêt, c'est à bon droit que, dans les circonstances particulières de l'espèce, le magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Paris a estimé que les arrêtés du 16 février 2022 étaient entachés d'une erreur manifeste dans l'appréciation de leurs conséquences sur la situation personnelle de l'intéressé. 5. Il résulte de ce qui précède que le préfet de police n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Paris a annulé les arrêtés du 16 février 20012 par lesquels le préfet de police a obligé M. A... à quitter le territoire français, a fixé le pays de destination et a prononcé une mesure d'interdiction de retour sur le territoire français d'une durée de deux ans. Sur les frais liés à l'instance : 6. M. A... a obtenu le bénéfice de l'aide juridictionnelle totale. Par suite, son avocat peut se prévaloir des dispositions des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991. Il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de l'Etat le versement à Me Mileo de la somme de 1 200 euros sous réserve que Me Mileo, avocat de M. A..., renonce à percevoir la somme correspondant à la part contributive de l'État au titre de l'aide juridictionnelle. D E C I D E : Article 1er : La requête du préfet de police est rejetée.Article 2 : L'Etat versera à Me Mileo, avocat de M. A..., la somme de 1 200 euros au titre au titre des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991, sous réserve de sa renonciation au bénéfice de l'aide juridictionnelle.
Article 3 : Le surplus des conclusions de M. A... présentées au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées. Article 4 : Le présent arrêt sera notifié au ministre de l'intérieur et des outre-mer et à M. C... A....Copie en sera adressée et au préfet de police.Délibéré après l'audience du 5 avril 2023 à laquelle siégeaient :- M. Carrère, président,- M. Simon, premier conseiller,- Mme Boizot, première conseillère.Rendu public par mise à disposition au greffe de la Cour, le 10 mai 2023. La rapporteure,S. B...Le président,S. CARRERE La greffière,E. LUCELa République mande et ordonne au ministre de l'intérieur et des outre-mer en ce qui le concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.22PA04128 2