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09/05/2023 | FRANCE | N°23PA00677

France | France, Cour administrative d'appel de Paris, 6ème chambre, 09 mai 2023, 23PA00677


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

L'association Ecole démocratique de Paris a demandé au Tribunal administratif de Paris d'annuler les mises en demeure en date des 20 mars 2019 et 6 février 2020, ainsi que les rapports figurant en annexe à ces mises en demeure, émanant du recteur de la région académique Ile-de-France, recteur de l'académie de Paris, et la décision rejetant implicitement son recours gracieux formé le 15 juillet 2020.

Par une ordonnance n° 2019166/1-1 du 16 décembre 2022, la présidente de la

1ère section

du Tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande.

Procédure devant la Cour :

Pa...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

L'association Ecole démocratique de Paris a demandé au Tribunal administratif de Paris d'annuler les mises en demeure en date des 20 mars 2019 et 6 février 2020, ainsi que les rapports figurant en annexe à ces mises en demeure, émanant du recteur de la région académique Ile-de-France, recteur de l'académie de Paris, et la décision rejetant implicitement son recours gracieux formé le 15 juillet 2020.

Par une ordonnance n° 2019166/1-1 du 16 décembre 2022, la présidente de la

1ère section du Tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête, enregistrée le 16 février 2023, l'association Ecole démocratique de Paris, représenté par Me Josselin et Me Nadan, demande à la Cour :

1°) d'annuler cette ordonnance de la présidente de la 1ère section du Tribunal administratif de Paris du 16 décembre 2022 ;

2°) d'annuler les mises en demeure en date des 20 mars 2019 et 6 février 2020, les rapports et la décision implicite de rejet, mentionnés ci-dessus ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 3 000 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- les mises en demeure litigieuses constituent, contrairement à ce qu'a estimé l'auteur de l'ordonnance attaquée, des actes faisant grief, susceptibles de faire l'objet d'un recours pour excès de pouvoir ;

- elles ont été prises par une autorité incompétente ;

- elles sont entachées d'une insuffisance de motivation ;

- elles ont été prises en méconnaissance du principe d'impartialité, au terme de contrôles insuffisants et en violation du principe du contradictoire ;

- elles sont entachées d'erreur de fait et d'erreur de droit ;

- elles méconnaissent la liberté d'enseignement.

Par un mémoire en défense, enregistré le 4 avril 2023, le recteur de la région académique Ile-de-France, recteur de l'académie de Paris, conclut au rejet de la requête.

Il soutient que les moyens de la requête ne sont pas fondés.

Par un mémoire en réplique, enregistré le 14 avril 2023, l'association Ecole démocratique de Paris conclut aux mêmes fins que la requête par les mêmes moyens.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code de l'éducation ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. A...,

- et les conclusions de Mme Naudin, rapporteure publique.

Considérant ce qui suit :

1. A la suite d'un contrôle de l'établissement privé d'enseignement hors contrat géré par l'association Ecole démocratique de Paris, réalisé le 10 décembre 2018, le recteur de la région académique Ile-de-France, recteur de l'académie de Paris, a, par une lettre datée du

20 mars 2019, mis l'établissement en demeure de respecter le droit à l'éducation, les normes minimales de connaissances et les règles du code de l'éducation, lui a imparti un délai d'un mois pour fournir ses explications et un délai de huit mois pour se mettre en règle, lui a indiqué qu'un nouveau contrôle serait réalisé à l'issue de ce délai, et lui a adressé le rapport établi à l'issue du contrôle dressant la liste des carences constatées au regard des obligations de délivrer un enseignement conforme à l'objet de l'instruction obligatoire. Après la réalisation d'un nouveau contrôle le 14 janvier 2020 ayant conduit l'administration à constater la persistance de carences et à conclure à l'absence de conformité de l'enseignement dispensé par l'établissement aux règles prévues par le code de l'éducation, le recteur a, par une lettre adressée le 6 février 2020 à la directrice de l'école qui l'a reçue le 14 février suivant, mis l'établissement en demeure de respecter le droit à l'éducation, les normes minimales de connaissances et les règles du code de l'éducation, en lui impartissant un délai d'un mois pour fournir ses explications et un délai de huit mois pour se mettre en règle, en lui indiquant qu'un nouveau contrôle serait réalisé à l'issue de ce délai, et en lui adressant le rapport établi à l'issue du contrôle. L'association a présenté ses observations à la suite de ces deux contrôles par deux courriers du 28 février et du 13 mars 2020. Par un courrier du 15 juillet suivant, elle a présenté un recours gracieux tendant au retrait des mises en demeure du 20 mars 2019 et du 6 février 2020 et des rapports figurant en annexe à ces mises en demeure. Ce recours gracieux ayant été implicitement rejeté, elle a demandé au Tribunal administratif de Paris d'annuler les courriers de mise en demeure, les rapports figurant en annexe et la décision implicite de rejet. Par une ordonnance du 16 décembre 2022, la présidente de la 1ère section du tribunal administratif a rejeté sa demande comme manifestement irrecevable.

2. Aux termes de l'article L. 442-2 du code de l'éducation, dans sa rédaction applicable au litige : " I. - Mis en œuvre sous l'autorité conjointe du représentant de l'Etat dans le département et de l'autorité compétente en matière d'éducation, le contrôle de l'Etat sur les établissements d'enseignement privés qui ne sont pas liés à l'Etat par contrat se limite aux titres exigés des directeurs et des enseignants, à l'obligation scolaire, à l'instruction obligatoire, au respect de l'ordre public, à la prévention sanitaire et sociale et à la protection de l'enfance et de la jeunesse. / II.- Les établissements mentionnés au I communiquent chaque année à l'autorité de l'Etat compétente en matière d'éducation les noms des personnes exerçant des fonctions d'enseignement ainsi que les pièces attestant de leur identité, de leur âge, de leur nationalité et de leurs titres, dans des conditions fixées par décret. / L'autorité de l'Etat compétente en matière d'éducation prescrit le contrôle des classes hors contrat afin de s'assurer que l'enseignement qui y est dispensé respecte les normes minimales de connaissances requises par l'article L. 131-1-1 et que les élèves de ces classes ont accès au droit à l'éducation tel que celui-ci est défini par l'article L. 111-1. / Ce contrôle a lieu dans l'établissement d'enseignement privé dont relèvent ces classes hors contrat. / Un contrôle est réalisé au cours de la première année d'exercice d'un établissement privé. / Les résultats de ce contrôle sont notifiés au directeur de l'établissement avec l'indication du délai dans lequel il est mis en demeure de fournir ses explications ou d'améliorer la situation et des sanctions dont il serait l'objet dans le cas contraire. / En cas de refus de la part du directeur de l'établissement d'améliorer la situation et notamment de dispenser, malgré la mise en demeure de l'autorité de l'Etat compétente en matière d'éducation, un enseignement conforme à l'objet de l'instruction obligatoire, tel que celui-ci est défini par l'article L. 131-1-1, et qui permet aux élèves concernés l'acquisition progressive du socle commun défini à l'article L. 122-1-1, l'autorité académique avise le procureur de la République des faits susceptibles de constituer une infraction pénale, puis met en demeure les parents des élèves scolarisés dans l'établissement d'inscrire leur enfant dans un autre établissement, dans les quinze jours suivant la mise en demeure qui leur est faite (...) ".

3. Il résulte de ces dispositions que la mise en demeure adressée, à la suite du contrôle d'un établissement privé hors contrat, au directeur de ce dernier, peut lui imposer, au vu des manquements constatés lors de ce contrôle, notamment au regard de l'obligation de dispenser un enseignement conforme à l'objet de l'instruction obligatoire, non seulement de fournir des explications, mais aussi d'engager les actions nécessaires, qu'elle doit exposer de manière précise et circonstanciée, pour remédier aux manquements que l'autorité de l'Etat compétente en matière d'éducation estime constitués, et ce dans un délai déterminé, au terme duquel l'autorité académique, en cas de refus d'engager les actions ainsi exigées, peut saisir le procureur de la République des faits susceptibles de constituer une infraction pénale et mettre en demeure les parents des élèves scolarisés dans cet établissement d'inscrire ces enfants dans un autre établissement. Lorsque cette mise en demeure ne se borne pas à exiger des explications mais impose à l'établissement d'engager des actions déterminées, elle constitue un acte faisant grief susceptible de recours.

4. Il ressort des pièces du dossier que les mises en demeure datées du 20 mars 2019 et du 6 février 2020 relevaient divers manquements constatés lors des contrôles effectués le 10 décembre 2018 et le 14 janvier 2020 au regard du respect du droit à l'éducation et de l'objet de l'instruction obligatoire, enjoignaient à l'établissement non seulement de fournir ses explications mais encore d'engager des actions déterminées et l'avisaient des conséquences encourues en cas de persistance des manquements relevés. Ces mises en demeure doivent donc, contrairement à ce qu'a estimé l'auteur de l'ordonnance attaquée, être regardées comme des actes faisant grief, susceptibles de faire l'objet d'un recours pour excès de pouvoir.

5. Il y a lieu, dès lors, d'annuler l'ordonnance attaquée et, dans les circonstances de l'espèce, de renvoyer l'affaire devant le Tribunal administratif de Paris pour qu'il statue sur la demande de l'association Ecole démocratique de Paris.

DÉCIDE :

Article 1er: L'ordonnance n° 2019166/1-1 de la présidente de la 1ère section du Tribunal administratif de Paris du 16 décembre 2022 est annulée.

Article 2 : L'affaire est renvoyée devant le Tribunal administratif de Paris.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à l'association Ecole démocratique de Paris et au ministre de l'éducation nationale et de la jeunesse.

Copie en sera adressée au recteur de la région académique Ile-de-France, recteur de l'académie de Paris.

Délibéré après l'audience du 18 avril 2023, à laquelle siégeaient :

- M. Célérier, président de chambre,

- M. Niollet, président-assesseur,

- Mme Labetoulle, premier conseiller.

Rendu public par mise à disposition au greffe, le 9 mai 2023.

Le rapporteur,

J-C. A...Le président,

T. CELERIER

La greffière,

Z. SAADAOUI

La République mande et ordonne au ministre de l'éducation nationale et de la jeunesse, en ce qui le concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

2

N° 23PA00677


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Paris
Formation : 6ème chambre
Numéro d'arrêt : 23PA00677
Date de la décision : 09/05/2023
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : M. CELERIER
Rapporteur ?: M. Jean-Christophe NIOLLET
Rapporteur public ?: Mme NAUDIN
Avocat(s) : SELARL VALADOU - JOSSELIN et ASSOCIES

Origine de la décision
Date de l'import : 28/05/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.paris;arret;2023-05-09;23pa00677 ?
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