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09/05/2023 | FRANCE | N°23PA00369

France | France, Cour administrative d'appel de Paris, 6ème chambre, 09 mai 2023, 23PA00369


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. A... C... a demandé au Tribunal administratif de Paris :

1°) d'enjoindre au ministre de l'intérieur et des outre-mer de produire sa fiche issue du fichier " ADOC " ;

2°) d'annuler l'arrêté du 17 mai 2022, notifié le 18 juin 2022, par lequel le ministre de l'intérieur a pris à son encontre une interdiction administrative du territoire ;

3°) d'enjoindre au ministre de l'intérieur d'organiser son retour sur le territoire français.

Par un jugement n° 2213451/3-3 du 29 novembr

e 2022, le Tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande.

Procédure devant la Cour :

Par u...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. A... C... a demandé au Tribunal administratif de Paris :

1°) d'enjoindre au ministre de l'intérieur et des outre-mer de produire sa fiche issue du fichier " ADOC " ;

2°) d'annuler l'arrêté du 17 mai 2022, notifié le 18 juin 2022, par lequel le ministre de l'intérieur a pris à son encontre une interdiction administrative du territoire ;

3°) d'enjoindre au ministre de l'intérieur d'organiser son retour sur le territoire français.

Par un jugement n° 2213451/3-3 du 29 novembre 2022, le Tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête, enregistrée le 26 janvier 2023, M. C..., représenté par

Me Souty, demande à la Cour :

1°) d'annuler ce jugement du Tribunal administratif de Paris du 29 novembre 2022 ;

2°) d'enjoindre au ministre de l'intérieur de produire sa fiche issue du fichier ADOC (accès aux dossiers de contravention), ainsi que les éléments non couverts par le secret du renseignement concernant les faits qui lui sont reprochés ;

3°) d'annuler l'arrêté du ministre de l'intérieur du 17 mai 2022, mentionné ci-dessus ;

4°) d'enjoindre au ministre de l'intérieur d'organiser son retour sur le territoire français dans le délai de 15 jours suivant l'arrêt à intervenir ;

5°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 1 600 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Il soutient que :

- le jugement du tribunal administratif a été rendu en méconnaissance du droit à un recours effectif garanti par l'article 13 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, et du droit à un procès équitable garanti par l'article 6, paragraphe 1, de la même convention, le tribunal ayant refusé de solliciter, dans le cadre de ses pouvoirs d'instruction, la communication des fichiers de police qui auraient permis de confirmer sa présence en France au moment de l'édiction de la mesure attaquée, et le fait qu'il y résidait habituellement depuis 2021 ;

- en outre, en admettant " la recevabilité des notes blanches " sans aucune distinction, le tribunal administratif l'a empêché de discuter utilement des éléments contenus dans la " note blanche " qui lui est opposée et qu'il conteste ;

- en écartant les témoignages produits en sa faveur, il a porté atteinte à l'équité du procès et à l'égalité des armes ;

- la mesure attaquée a, compte tenu de sa présence en France au moment de son adoption, été prise en violation de l'article L. 321-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- il n'est pas établi que sa présence en France constituerait une menace grave pour l'ordre public, la sécurité intérieure ou les relations internationales de la France ;

- la " note blanche " qui lui est opposée est " partiellement irrecevable " ;

- il doit être enjoint au ministre de l'intérieur de produire la fiche issue du fichier ADOC (accès aux dossiers de contravention), ainsi que les éléments non couverts par le secret du renseignement concernant les faits qui lui sont reprochés.

Par un mémoire en défense, enregistré le 31 mars 2023, le ministre de l'intérieur et des outre-mer conclut au rejet de la requête.

Il soutient que les moyens de la requête ne sont pas fondés.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. B...,

- et les conclusions de Mme Naudin, rapporteure publique.

Considérant ce qui suit :

1. Par un arrêté du 17 mai 2022, le ministre de l'intérieur et des outre-mer a pris à l'encontre de M. C... une interdiction administrative de territoire. Par un jugement du 29 novembre 2022, le Tribunal administratif de Paris a rejeté la demande de M. C... tendant à l'annulation de cet arrêté. M. C... fait appel de ce jugement.

2. En premier lieu, M. C... ne saurait contester la régularité du jugement du tribunal administratif en invoquant les stipulations de l'article 6, paragraphe 1, de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, le présent litige ne portant ni sur ses droits et obligations de caractère civil, ni sur une accusation en matière pénale, et n'entrant donc pas dans le champ d'application de ces stipulations. Il ne saurait davantage invoquer les stipulations de l'article 13 de la même convention en l'absence d'atteinte portée à un droit ou à une liberté, reconnu par cette convention.

3. En deuxième lieu, aux termes de l'article L. 321-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Tout étranger peut, dès lors qu'il ne réside pas habituellement en France et ne se trouve pas sur le territoire national, faire l'objet d'une interdiction administrative du territoire lorsque sa présence en France constituerait une menace grave pour l'ordre public, la sécurité intérieure ou les relations internationales de la France ". Aux termes de l'article L. 321-2 du même code : " L'interdiction administrative du territoire fait l'objet d'une décision écrite rendue après une procédure non contradictoire. Elle est motivée, à moins que des considérations relevant de la sûreté de l'Etat ne s'y opposent. Si l'étranger est entré en France alors que la décision d'interdiction administrative du territoire prononcée antérieurement ne lui avait pas déjà été notifiée, il est procédé à cette notification sur le territoire national. "

4. Ainsi que les premiers juges l'ont relevé à juste titre au point 8 de leur jugement. M. C..., ne justifie pas résider habituellement en France et s'être trouvé en France au sens de ces dispositions à la date de la décision attaquée.

5. En troisième lieu, pour prendre la mesure d'interdiction administrative de territoire en litige, le ministre de l'intérieur s'est fondé sur la menace pour l'ordre public et la sécurité intérieure qu'est susceptible de constituer la présence de M. C... sur le territoire français du fait de sa radicalisation islamiste, en raison de laquelle il a fait l'objet d'un signalement et d'un suivi. Devant les premiers juges, le ministre a en outre produit une " note blanche " établie dans ce cadre par les services de renseignement. Il en ressort notamment que

M. C... a fréquenté, en 2019, lors de séjours en France, une mosquée salafiste située à Allonnes qui a été fermée par un arrêté du préfet de la Sarthe du 25 octobre 2021, en raison de la diffusion, dans cette mosquée, d'idées et de théories provoquant à la violence, à la haine, à la discrimination ou à la commission d'actes de terrorisme, ou faisant l'apologie de tels actes. Il ressort en outre de cette note que M. C... était en relation étroite avec son cousin, connu pour évoluer au sein de la mouvance salafiste d'Allonnes, et a été logé, au cours d'un séjour en France, entre les mois de novembre et décembre 2020, dans un studio situé à Chambéry occupé par une femme défavorablement connue des services de police qui avait été signalée pour s'être livrée à l'apologie du terrorisme. M. C... ne produit aucun élément probant ou étayé au soutien de sa contestation des éléments, précis et circonstanciés, ainsi avancés à bon droit par le ministre par référence à cette note. Dans ces conditions, l'arrêté attaqué ne peut être regardé comme reposant sur une erreur de fait ou sur une erreur d'appréciation.

6. Il résulte de ce qui précède que M. C... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande. Sa requête ne peut par suite qu'être rejetée, y compris ses conclusions à fins d'injonction et celles présentées sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

DÉCIDE :

Article 1er : La requête de M. C... est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. A... C... et au ministre de l'intérieur et des outre-mer.

Délibéré après l'audience du 18 avril 2023, à laquelle siégeaient :

- M. Célérier, président de chambre,

- M. Niollet, président-assesseur,

- Mme Labetoulle, première conseillère.

Rendu public par mise à disposition au greffe, le 9 mai 2023.

Le rapporteur,

J-C. B...Le président,

T. CELERIER

La greffière,

Z. SAADAOUI

La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur et des outre-mer, en ce qui le concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

2

N° 23PA00369


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Paris
Formation : 6ème chambre
Numéro d'arrêt : 23PA00369
Date de la décision : 09/05/2023
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : M. CELERIER
Rapporteur ?: M. Jean-Christophe NIOLLET
Rapporteur public ?: Mme NAUDIN
Avocat(s) : SOUTY

Origine de la décision
Date de l'import : 28/05/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.paris;arret;2023-05-09;23pa00369 ?
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