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09/05/2023 | FRANCE | N°22PA01817

France | France, Cour administrative d'appel de Paris, 6ème chambre, 09 mai 2023, 22PA01817


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. C... A... a demandé au Tribunal administratif de Paris d'annuler l'arrêté du 20 décembre 2021 par lequel le préfet de police lui a refusé la délivrance d'un titre de séjour, l'a obligé à quitter le territoire français sans délai et a prononcé à son encontre une interdiction de retour pour une durée de vingt-quatre mois, d'enjoindre au préfet de police de lui délivrer un titre de séjour dans le délai d'un mois à compter de la notification du jugement, ou à tout le moins de procéder à un ré

examen de sa demande et de lui délivrer dans l'attente un récépissé, d'enjoindre égale...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. C... A... a demandé au Tribunal administratif de Paris d'annuler l'arrêté du 20 décembre 2021 par lequel le préfet de police lui a refusé la délivrance d'un titre de séjour, l'a obligé à quitter le territoire français sans délai et a prononcé à son encontre une interdiction de retour pour une durée de vingt-quatre mois, d'enjoindre au préfet de police de lui délivrer un titre de séjour dans le délai d'un mois à compter de la notification du jugement, ou à tout le moins de procéder à un réexamen de sa demande et de lui délivrer dans l'attente un récépissé, d'enjoindre également au préfet de police de procéder à l'effacement de son inscription dans le fichier de signalement Schengen aux fins de non-admission et de mettre à la charge de l'État la somme de 1 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Par un jugement n°2200627 du 7 avril 2022, le Tribunal administratif de Paris a annulé le refus d'octroi d'un délai de départ volontaire et l'interdiction de retour sur le territoire français pour une durée de vingt-quatre mois contenus dans l'arrêté attaqué, enjoint au préfet de police de procéder au réexamen de la demande de M. A... et de procéder à l'effacement de son signalement aux fins de non-admission du fichier Schengen dans le délai de deux mois à compter de la notification du présent jugement, mis à la charge de l'Etat une somme de 800 euros à verser à M. A... au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et rejeté le surplus des conclusions.

Procédure devant la Cour :

Par une requête, enregistrée le 22 avril 2022, M. A..., représenté par Me Calvo Pardo, demande à la Cour :

1°) d'annuler ce jugement du Tribunal administratif de Paris du 7 avril 2022 en tant qu'il a rejeté les conclusions tendant à l'annulation du refus de délivrance d'un titre de séjour et de l'obligation de quitter le territoire français contenus dans l'arrêté du préfet de police du

20 décembre 2021 ;

2°) de confirmer le jugement en tant qu'il a annulé le refus d'octroi d'un délai de départ volontaire et l'interdiction de retour sur le territoire français pour une durée de vingt-quatre mois contenus dans le même arrêté ;

3°) d'annuler le refus de délivrance d'un titre de séjour et l'obligation de quitter le territoire français contenus dans l'arrêté du préfet de police du 20 décembre 2021 ;

4°) d'enjoindre au préfet de police de lui délivrer un titre de séjour ou, à tout le moins, de procéder à un réexamen de sa demande et de lui délivrer entretemps une autorisation provisoire de séjour ;

5°) de mettre à la charge de l'État la somme de 1 500 euros au titre de l'article

L. 761-1 du code de justice administrative.

Il soutient que :

- l'arrêté attaqué est insuffisamment motivé, notamment en ce qu'il ne fait pas état de sa situation professionnelle ;

- cet arrêté méconnait les dispositions de l'article L. 435-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile dès lors qu'il ne représente pas une menace pour l'ordre public, et le tribunal ne pouvait à la fois annuler la décision de refus de délai volontaire au motif au motif qu'il ne représentait pas une menace pour l'ordre public et néanmoins rejeter les conclusions tendant à l'annulation du refus de titre ;

-il justifie de motifs exceptionnels justifiant son admission au séjour sur le fondement de l'article L. 435-1 dès lors notamment qu'il réside en France depuis 2009, qu'il y travaille, y est bien intégré, y a vécu sept ans en situation régulière et vit avec une ressortissante française avec qui il a des projets de mariage ;

-l'arrêté attaqué, pour les mêmes motifs, méconnait les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales.

Par un mémoire en défense, enregistré le 27 mai 2022, le préfet de police conclut au rejet de cette requête.

Il soutient que :

- les moyens de la requête ne sont pas fondés.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- le code de justice administrative.

Le président de la formation de jugement a dispensé la rapporteure publique, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Le rapport de Mme B... a été entendu au cours de l'audience publique.

Considérant ce qui suit :

1. M. A..., ressortissant égyptien, né le 15 octobre 1988, déclare être entré sur le territoire français au cours de l'année 2009 et y résider depuis lors. Il a sollicité pour la première fois en 2011 son admission au séjour, sur le fondement de l'article L. 313-11.11° du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile en raison de son état de santé, et a bénéficié à ce titre d'autorisations de séjour régulièrement renouvelées. Par arrêté du

28 novembre 2018, pris après avis du collège des médecins de l'office français de l'immigration et de l'intégration, qui retenait qu'il pouvait bénéficier des traitements appropriés à son état de santé dans son pays d'origine, le préfet des Hauts de Seine a rejeté sa dernière demande de renouvellement de son titre de séjour et l'a obligé à quitter le territoire français. Il s'y est néanmoins maintenu et a sollicité le 19 août 2021 auprès de la préfecture de police la délivrance d'un titre de séjour portant la mention " vie privée et familiale " sur le fondement de l'article L. 431-5 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. Toutefois, par un arrêté du 20 décembre 2021, le préfet de police a rejeté cette demande, obligé M. A... à quitter le territoire français sans délai et a prononcé à son encontre une interdiction de retour pour une durée de vingt-quatre mois. L'intéressé ayant saisi le tribunal administratif de Paris, celui-ci a, par jugement du 7 avril 2022, annulé le refus d'octroi d'un délai de départ volontaire et l'interdiction de retour sur le territoire français pour une durée de vingt-quatre mois contenus dans cet arrêté, mais il a rejeté les conclusions dirigées contre le refus de titre et l'obligation de quitter le territoire français. Par la présente requête M. A... interjette dès lors appel de ce jugement en tant qu'il a rejeté ses conclusions tendant à l'annulation du refus de délivrance de titre de séjour et de l'obligation de quitter le territoire français.

2. En premier lieu, il ressort de l'arrêté attaqué qu'il vise notamment la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, rappelle que le requérant dit être entré en France en 2009 et a sollicité en dernier lieu son admission au séjour sur le fondement de l'article L. 435-1 de ce code, qu'il a été condamné le 7 septembre 2020 par le tribunal de commerce de Pontoise à une interdiction de diriger, gérer, administrer ou contrôler toute entreprise commerciale pendant onze ans, qu'il est célibataire et sans charge de famille en France et n'atteste pas être démuni d'attaches à l'étranger où résident ses parents, que, nonobstant la présence de son frère, ses liens personnels et familiaux en France ne sont pas anciens, intenses et stables, et, par ailleurs, que, compte tenu de l'ensemble de sa situation ainsi que de son comportement constitutif d'une menace pour l'ordre public, il n'est pas porté une atteinte disproportionnée à ses droits tels que définis à l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales. Dès lors cet arrêté comporte l'énoncé des considérations de droit et de fait sur lesquelles il se fonde et est par suite suffisamment motivé, tant en ce qui concerne le refus de titre de séjour que l'obligation de quitter le territoire français, qui peuvent faire l'objet d'une motivation commune. De plus, l'autorité administrative n'étant, pour aucune de ces décisions, tenue de répondre à l'ensemble des éléments soulevés par le demandeur de titre de séjour, M. A... n'est pas fondé à soutenir que cet arrêté serait insuffisamment motivé du fait qu'il ne ferait pas état de sa vie professionnelle. Par suite, le moyen tiré de l'insuffisance de motivation manque en fait.

3. En deuxième lieu, aux termes de l'article L. 435-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " L'étranger dont l'admission au séjour répond à des considérations humanitaires ou se justifie au regard des motifs exceptionnels qu'il fait valoir peut se voir délivrer une carte de séjour temporaire portant la mention "salarié", " travailleur temporaire " ou " vie privée et familiale ", sans que soit opposable la condition prévue à l'article L. 412-1./ Lorsqu'elle envisage de refuser la demande d'admission exceptionnelle au séjour formée par un étranger qui justifie par tout moyen résider habituellement en France depuis plus de dix ans, l'autorité administrative est tenue de soumettre cette demande pour avis à la commission du titre de séjour prévue à l'article L. 432-14. (...) ". Il résulte des termes clairs de cet article que la seule circonstance, lorsqu'elle est établie, que le demandeur de titre de séjour ne représente pas une menace pour l'ordre public, ne suffit pas à ouvrir droit à la délivrance d'un titre de séjour sur le fondement de ces dispositions, lesquelles subordonnent la délivrance d'un tel titre à l'existence de considérations humanitaires ou de motifs exceptionnels. Or en l'espèce, si M. A... justifie de sept ans de présence régulière en France de 2011 à 2018, et de son maintien ensuite sur le territoire français en dépit de l'obligation de quitter le territoire prise le 28 novembre 2018, et s'il justifie également de périodes d'activité professionnelle, de juillet à septembre 2012 , de février à décembre 2013, de mars à juin 2014, de juillet à septembre 2015, de juin et décembre 2018, de janvier à mai 2019 et de septembre à octobre 2021, il ressort des pièces du dossier qu'à supposer même qu'il soit entré en France en 2009 comme il le soutient, il y serait arrivé à l'âge de vingt et un ans, soit à l'âge adulte ; de plus, il n'établit par aucune pièce du dossier la réalité de la vie commue alléguée avec une ressortissante française ni de leurs projets de mariage, et n'allègue pas même ne plus avoir d'attaches familiales dans son pays d'origine. Par ailleurs, s'il fait état des difficultés qu'il rencontrerait en Egypte en raison de sa religion chrétienne, il n'établit pas que lui-même ou sa famille y auraient été inquiétés pour ce motif et il n'établit pas non plus avoir déposé de demande d'asile. Dès lors, s'il fait état de sa bonne intégration sur le territoire français, il ne peut être regardé comme justifiant de considérations humanitaires ou de motifs exceptionnels. Par suite le préfet de police, qui a rappelé les éléments de sa situation personnelle pour en déduire qu'il ne satisfaisait pas aux conditions posées par l'article L. 435-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, pouvait, à bon droit, sans erreur manifeste d'appréciation, et pour ce seul motif, opposer un refus à sa demande de délivrance d'un titre de séjour, quand bien même il n'aurait pas retenu qu'il représentait une menace pour l'ordre public. Pour les mêmes motifs les premiers juges ont pu, sans contradiction, tout à la fois rejeter ses conclusions tendant à l'annulation du refus de titre de séjour et de l'obligation de quitter le territoire français du fait qu'il ne satisfaisait pas aux conditions de l'article L. 435-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, et annuler le refus d'octroi d'un délai de départ volontaire et l'interdiction de retour sur le territoire français, en jugeant qu'en se fondant sur sa seule condamnation du 7 septembre 2020 par le tribunal de commerce de Pontoise, pour retenir qu'il constituait une menace pour l'ordre public, le préfet de police avait commis une erreur d'appréciation.

4. En troisième lieu, aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance (...) ". Ainsi qu'il a été dit au point 3, s'il justifie vivre en France à tout le moins depuis 2011, et y avoir exercé des emplois en tant que peintre en bâtiment ou menuisier, le requérant ne justifie pas de la réalité de sa relation et de ses projets de vie avec une ressortissante française, pas plus que de la présence de son frère sur le territoire français, et n'établit pas non plus ne plus avoir d'attaches familiales dans son pays d'origine où il a vécu à tout le moins jusqu'à l'âge de vingt et un ans. Par suite, il n'est pas fondé à soutenir que le refus de titre de séjour et l'obligation de quitter le territoire français contestés porteraient à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée au regard des buts en vue desquels ces décisions ont été prises ni, dès lors, qu'elles méconnaitraient les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ou seraient entachées d'erreur manifeste d'appréciation.

5. Il résulte de tout ce qui précède que M. A... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Paris a rejeté ses conclusions tendant à l'annulation du refus de titre de séjour et de l'obligation de quitter le territoire français contenus dans l'arrêté du 20 décembre 2021. Sa requête ne peut par suite qu'être rejetée y compris ses conclusions à fins d'injonction et celles tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

DÉCIDE :

Article 1er : La requête de M. A... est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. C... A... et au ministre de l'intérieur et des outre-mer.

Copie en sera adressée au préfet de police.

Délibéré après l'audience du 18 avril 2023 à laquelle siégeaient :

- M. Célérier, président de chambre,

- M. Niollet, président-assesseur,

- Mme Labetoulle, première conseillère.

Rendu public par mise à disposition au greffe, le 9 mai 2023.

La rapporteure,

M-I. B...Le président,

T. CELERIER

La greffière,

Z. SAADAOUI

La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur et des outre-mer en ce qui le concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

2

N° 22PA01817


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Paris
Formation : 6ème chambre
Numéro d'arrêt : 22PA01817
Date de la décision : 09/05/2023
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : M. CELERIER
Rapporteur ?: Mme Marie-Isabelle LABETOULLE
Rapporteur public ?: Mme NAUDIN
Avocat(s) : CALVO PARDO

Origine de la décision
Date de l'import : 14/05/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.paris;arret;2023-05-09;22pa01817 ?
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