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28/04/2023 | FRANCE | N°21PA02922

France | France, Cour administrative d'appel de Paris, 4ème chambre, 28 avril 2023, 21PA02922


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

La société Air France a demandé au tribunal administratif de Paris d'annuler la décision du 7 novembre 2019 par laquelle le ministre de l'intérieur lui a infligé une amende de 10 000 euros sur le fondement des dispositions des articles L. 625-1 et suivants du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile.

Par un jugement n° 2000416 du 30 mars 2021, le tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête, enregistrée le

31 mai 2021, la société Air France demande à la Cour :

1°) d'annuler ce jugement ;

2°) d'an...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

La société Air France a demandé au tribunal administratif de Paris d'annuler la décision du 7 novembre 2019 par laquelle le ministre de l'intérieur lui a infligé une amende de 10 000 euros sur le fondement des dispositions des articles L. 625-1 et suivants du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile.

Par un jugement n° 2000416 du 30 mars 2021, le tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête, enregistrée le 31 mai 2021, la société Air France demande à la Cour :

1°) d'annuler ce jugement ;

2°) d'annuler cette décision ou de la décharger du paiement de l'amende ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat le versement de la somme de 2 000 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que la falsification ne constitue pas une irrégularité manifeste décelable par un examen normalement attentif d'un agent d'embarquement rompu au contrôle des documents de voyage.

Par un mémoire en défense, enregistré le 22 juin 2021, le ministre de l'intérieur conclut au rejet de la requête.

Il soutient que les moyens de la requête ne sont pas fondés.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le règlement (CE) n° 539/2001 du Conseil du 15 mars 2001 ;

- le règlement (UE) n° 2016/399 du Parlement européen et du Conseil du 9 mars 2016 ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- le code des transports ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. Mantz,

- et les conclusions de Mme Jayer, rapporteure publique.

Considérant ce qui suit :

1. Par une décision du 7 novembre 2019, le ministre de l'intérieur a infligé à la société Air France une amende d'un montant de 10 000 euros, sur le fondement de l'article L. 625-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, pour avoir débarqué, le 5 août 2019, un passager de nationalité bolivienne dont le visa Schengen était, selon lui, manifestement falsifié. La société Air France relève appel du jugement du 30 mars 2021 par lequel le tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande tendant à l'annulation de cette décision.

2. Aux termes de l'article L. 6421-2 du code des transports : " Le transporteur ne peut embarquer les passagers pour un transport international qu'après justification qu'ils sont régulièrement autorisés à atterrir au point d'arrivée et aux escales prévues ". Par ailleurs, selon l'article L. 625-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, l'entreprise de transport aérien ou maritime qui débarque sur le territoire français, en provenance d'un Etat avec lequel ne s'applique pas l'acquis de Schengen, un étranger non ressortissant d'un Etat de l'Union européenne et démuni du document de voyage et, le cas échéant, du visa requis par la loi ou l'accord international qui lui est applicable en raison de sa nationalité est punie d'une amende d'un montant maximum de 10 000 euros. Toutefois, en vertu du 2° de l'article L. 625-5, l'amende n'est pas infligée lorsque l'entreprise de transport établit que les documents requis lui ont été présentés au moment de l'embarquement et qu'ils ne comportaient pas d'élément d'irrégularité manifeste.

3. Ces dispositions imposent à l'entreprise de transport de vérifier que l'étranger est muni des documents de voyage et des visas éventuellement requis et que ceux-ci ne comportent pas d'irrégularité manifeste, décelable par un examen normalement attentif de ses agents. En l'absence d'une telle vérification, le transporteur encourt l'amende administrative prévue par l'article L. 625-1.

4. Pour infliger à la société Air France une amende de 10 000 euros sur le fondement mentionné au point 1, le ministre de l'intérieur a relevé notamment, dans la décision attaquée, que, suivant la planche annotée en couleur établie par l'officier de police judiciaire décrivant précisant les anomalies existantes, " des traces de grattage sont visibles à l'altération du fond d'impression indiquant la présence d'un compostage effacé autour de la mention fixe intitulée " durée de séjour" ". Il résulte toutefois de l'examen de cette planche que les traces de grattage invoquées ne sont décelables qu'au moyen d'un fort grossissement des éléments situés autour de la mention " durée de séjour", nécessitant le recours à un matériel spécialisé, et ne résultent pas de l'examen normalement attentif du visa. Par suite, ce dernier ne saurait être regardé comme comportant des éléments d'irrégularité manifeste. Il s'ensuit que la décision attaquée est entachée d'illégalité.

5. Il résulte de tout ce qui précède que la société Air France est fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande tendant à l'annulation de la décision du 7 novembre 2019.

Sur les frais liés au litige :

6. Il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de l'Etat le versement d'une somme de 1 500 euros au titre des frais exposés par la société Air France et non compris dans les dépens.

DECIDE :

Article 1er : Le jugement n° 2000416 du tribunal administratif de Paris du 30 mars 2021 et la décision du ministre de l'intérieur du 7 novembre 2019 sont annulés.

Article 2 : La société Air France est déchargée du paiement de l'amende prévue par la décision mentionnée à l'article 1er.

Article 3 : L'Etat versera à la Société Air France une somme de 1 500 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 4 : Le présent arrêt sera notifié à la société Air France et au ministre de l'intérieur et des outre-mer.

Délibéré après l'audience du 14 avril 2023, à laquelle siégeaient :

- Mme Heers, présidente,

- Mme Briançon, présidente assesseure,

- M. Mantz, premier conseiller.

Rendu public par mise à disposition au greffe, le 28 avril 2023.

Le rapporteur,

P. MANTZ

La présidente,

M. HEERS La greffière,

O. BADOUX-GRARE

La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur et des outre-mer en ce qui le concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

2

N° 21PA02922


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Paris
Formation : 4ème chambre
Numéro d'arrêt : 21PA02922
Date de la décision : 28/04/2023
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : Mme HEERS
Rapporteur ?: M. Pascal MANTZ
Rapporteur public ?: Mme JAYER
Avocat(s) : CLYDE et CO LLP

Origine de la décision
Date de l'import : 15/10/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.paris;arret;2023-04-28;21pa02922 ?
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