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13/04/2023 | FRANCE | N°22PA01203

France | France, Cour administrative d'appel de Paris, 1ère chambre, 13 avril 2023, 22PA01203


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. B... C... a demandé au tribunal administratif de Paris d'annuler l'arrêté du 20 octobre 2021 par lequel le préfet de police a refusé de renouveler son titre de séjour, lui a fait obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays à destination duquel il sera éloigné.

Par un jugement n° 2125760 du 15 février 2022, le tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête et des mémoires enregi

strés les 14 mars, 31 mars et 12 avril 2022, M. B... C..., représenté par Me N'Diaye, demande à la...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. B... C... a demandé au tribunal administratif de Paris d'annuler l'arrêté du 20 octobre 2021 par lequel le préfet de police a refusé de renouveler son titre de séjour, lui a fait obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays à destination duquel il sera éloigné.

Par un jugement n° 2125760 du 15 février 2022, le tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête et des mémoires enregistrés les 14 mars, 31 mars et 12 avril 2022, M. B... C..., représenté par Me N'Diaye, demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 2125760 du 15 février 2022 du tribunal administratif de Paris ;

2°) d'annuler l'arrêté du 20 octobre 2021 du préfet de police ;

3°) d'enjoindre au préfet de police de lui délivrer un titre de séjour dans un délai de quinze jours à compter de la notification de l'arrêt à intervenir sous astreinte de 100 euros par jour de retard, en application des articles L. 911-2 et L. 911-3 du code de justice administrative ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat le versement d'une somme de 2 000 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

5°) de condamner l'Etat aux entiers dépens.

Il soutient que :

S'agissant de l'ensemble des décisions attaquées :

- elles méconnaissent l'article L. 425-9 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- elles sont entachées d'une erreur manifeste d'appréciation ;

S'agissant de la décision portant obligation de quitter le territoire français :

- elle est entachée d'un défaut de motivation.

Par un mémoire en défense, enregistré le 19 mai 2022, le préfet de police conclut, à titre principal, à l'irrecevabilité de la requête, et subsidiairement, à son rejet au fond.

Il soutient que :

- la requête de M. C... est irrecevable en ce qu'elle ne comporte aucun élément nouveau de fait ou de droit de nature à remettre en cause le bien-fondé du jugement attaqué ;

- les moyens soulevés par M. C... ne sont pas fondés.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- le code de justice administrative.

Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Le rapport de M. A... a été entendu au cours de l'audience publique.

Considérant ce qui suit :

1. M. C..., né le 13 février 1991, de nationalité malienne, est entré en France le 3 juin 2019 selon ses déclarations. Il a sollicité le 8 juin 2021 le renouvellement de son titre de séjour octroyé au titre de son état de santé. Par un arrêté du 20 octobre 2021, le préfet de police a refusé de lui renouveler le titre demandé, l'a obligé à quitter le territoire dans un délai de trente jours et fixé le pays à destination duquel il pourrait être éloigné d'office. M. C... relève appel du jugement du 15 février 2022 par lequel le tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande tendant à l'annulation de cet arrêté.

Sur la fin de non-recevoir soulevée par le préfet de police :

2. Aux termes de l'article R. 411-1 du code de justice administrative : " La juridiction est saisie par requête. La requête indique les noms et domicile des parties. Elle contient l'exposé des faits et moyens, ainsi que l'énoncé des conclusions soumises au juge. / L'auteur d'une requête ne contenant l'exposé d'aucun moyen ne peut la régulariser par le dépôt d'un mémoire exposant un ou plusieurs moyens que jusqu'à l'expiration du délai de recours ".

3. La requête d'appel présentée par M. C... ne constitue pas la seule reproduction intégrale et littérale de son mémoire de première instance et énonce de manière précise les moyens justifiant l'annulation de la décision attaquée. Une telle motivation répond aux conditions posées par l'article R. 411-1 du code de la justice administrative. Par suite, la fin de non-recevoir opposée par le préfet de police doit être écarté.

Sur les conclusions à fin d'annulation :

En ce qui concerne les moyens communs aux décisions attaquées :

4. Aux termes de l'article L. 425-9 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " L'étranger, résidant habituellement en France, dont l'état de santé nécessite une prise en charge médicale dont le défaut pourrait avoir pour lui des conséquences d'une exceptionnelle gravité et qui, eu égard à l'offre de soins et aux caractéristiques du système de santé dans le pays dont il est originaire, ne pourrait pas y bénéficier effectivement d'un traitement approprié, se voit délivrer une carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " d'une durée d'un an (...) / La décision de délivrer cette carte de séjour est prise par l'autorité administrative après avis d'un collège de médecins du service médical de l'Office français de l'immigration et de l'intégration, dans des conditions définies par décret en Conseil d'Etat (...) ". Aux termes des dispositions de l'article R. 425-11 du même code : " Pour l'application de l'article L. 425-9, le préfet délivre la carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " au vu d'un avis émis par un collège de médecins à compétence nationale de l'Office français de l'immigration et de l'intégration. / L'avis est émis dans les conditions fixées par arrêté du ministre chargé de l'immigration et du ministre chargé de la santé au vu, d'une part, d'un rapport médical établi par un médecin de l'office et, d'autre part, des informations disponibles sur les possibilités de bénéficier effectivement d'un traitement approprié dans le pays d'origine de l'intéressé. Les orientations générales mentionnées au troisième alinéa de l'article L. 425-9 sont fixées par arrêté du ministre chargé de la santé. ". Aux termes de l'article R. 425-12 du même code : " (...) Le collège à compétence nationale, composé de trois médecins, émet un avis dans les conditions de l'arrêté mentionné au premier alinéa du présent article. (...) ". L'article 4 de l'arrêté du 5 janvier 2017 fixant les orientations générales pour l'exercice par les médecins de l'Office français de l'immigration et de l'intégration, de leurs missions, prévues à l'article L. 313-11 (11°) du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile prévoit que : " Les conséquences d'une exceptionnelle gravité résultant d'un défaut de prise en charge médicale, mentionnées au 11° de l'article L. 313-11 du CESEDA, sont appréciées sur la base des trois critères suivants : degré de gravité (mise en cause du pronostic vital de l'intéressé ou détérioration d'une de ses fonctions importantes), probabilité et délai présumé de survenance de ces conséquences. / Cette condition des conséquences d'une exceptionnelle gravité résultant d'un défaut de prise en charge doit être regardée comme remplie chaque fois que l'état de santé de l'étranger concerné présente, en l'absence de la prise en charge médicale que son état de santé requiert, une probabilité élevée à un horizon temporel qui ne saurait être trop éloigné de mise en jeu du pronostic vital, d'une atteinte à son intégrité physique ou d'une altération significative d'une fonction importante. / Lorsque les conséquences d'une exceptionnelle gravité ne sont susceptibles de ne survenir qu'à moyen terme avec une probabilité élevée (pathologies chroniques évolutives), l'exceptionnelle gravité est appréciée en examinant les conséquences sur l'état de santé de l'intéressé de l'interruption du traitement dont il bénéficie actuellement en France (rupture de la continuité des soins). Cette appréciation est effectuée en tenant compte des soins dont la personne peut bénéficier dans son pays d'origine. ".

5. Il ressort des pièces du dossier que M. C... souffre d'insuffisance aortique post rhumatismale articulaire aigue. Pour rejeter sa demande de titre de séjour, le préfet de police s'est notamment fondé sur l'avis du collège de médecins de l'Office français de l'immigration et de l'intégration du 26 août 2021 et a relevé que si l'état de santé de l'intéressé nécessitait une prise en charge médicale dont le défaut pourrait entraîner des conséquences d'une exceptionnelle gravité, eu égard à l'offre de soins et aux caractéristiques du système de santé dans le pays dont il est originaire, il pouvait bénéficier d'un traitement approprié et voyager sans risque vers son pays d'origine. Pour contredire cette appréciation, M. C... se borne à produire une lettre du ministère de la santé du Mali du 15 juillet 2014 qui relève seulement qu'une demande d'évacuation sanitaire n'est pas de sa compétence, des compte-rendu opératoires et de consultation ainsi que des certificats médicaux qui indiquent seulement que la " prise en charge cardiologique et de chirurgie cardiaque ne peut être dispensée dans son pays d'origine (le Mali) qui ne dispose pas du plateau technique pour cette prise en charge spécialisée ". Cependant, ces certificats médicaux, rédigés de façon générale et qui ne se prononcent pas précisément sur les possibilités de traitement et la disponibilité des équipements nécessaires à une prise en charge adaptée ne sauraient remettre en cause l'appréciation du préfet de police. Par ailleurs, ce dernier établit que le Mali a développé un plateau technique de cardiologie et est doté d'un pôle cardiovasculaire et thoracique comprenant plusieurs lits d'hospitalisation, une salle d'urgence, deux blocs opératoires ainsi qu'une unité de réanimation. En outre, si le requérant soutient qu'il ne pourrait pas avoir effectivement accès à la prise en charge de sa pathologie dans son pays d'origine en raison du coût des traitements, il n'apporte aucun élément de nature à évaluer ni ledit coût ni ses ressources. Enfin il n'apporte pas d'éléments précis relatifs à sa participation au protocole de recherche dont il se prévaut. Dès lors, le requérant n'est pas fondé à soutenir que l'arrêté attaqué méconnaît les dispositions précitées de l'article L. 425-9 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile.

6. Compte tenu de ce qui a été dit au point précédent, et M. C... n'établissant pas être isolé au Mali où il a vécu jusqu'à l'âge de 27 ans, le moyen tiré de l'erreur manifeste d'appréciation doit être écarté.

Sur la décision portant obligation de quitter le territoire français :

7. Aux termes de l'article L. 611-1 3° du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " L'autorité administrative peut obliger un étranger à quitter le territoire français lorsqu'il se trouve dans les cas suivants : / (...) 3° L'étranger s'est vu refuser la délivrance d'un titre de séjour (...) ". Aux termes de l'article L. 613-1 du même code : " (...) Dans le cas prévu au 3° de l'article L. 611-1, la décision portant obligation de quitter le territoire français n'a pas à faire l'objet d'une motivation distincte de celle de la décision relative au séjour (...) ".

8. Il résulte de ces dispositions que l'obligation faite à un étranger de quitter le territoire français n'a pas à comporter une motivation spécifique distincte de celle du refus de titre de séjour sur lequel elle se fonde si ce dernier est suffisamment motivé. Or celui-ci, compte tenu de ses motifs rappelés au point 5 du présent arrêt, étant suffisamment motivé, la décision d'éloignement n'avait pas à faire l'objet d'une motivation distincte. Dès lors le moyen tiré de l'insuffisance de motivation doit être écarté.

Sur les frais liés à l'instance :

9. L'Etat n'étant pas la partie perdante à l'instance, les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative dont obstacle à ce que soit mise à sa charge la somme demandée par M. C... au titre de ces dispositions.

Sur les dépens :

10. La présente instance ne comportant aucun dépens, les conclusions de l'appelant relatives aux dépens ne peuvent qu'être rejetées.

D E C I D E :

Article 1er : La requête de M. C... est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. B... C... et au ministre de l'intérieur et des outre-mer.

Copie en sera adressée au préfet de police.

Délibéré après l'audience du 23 mars 2023, à laquelle siégeaient :

- M. Lapouzade, président de chambre,

- Mme d'Argenlieu, première conseillère,

- M. Gobeill, premier conseiller.

Rendu public par mise à disposition au greffe, le 13 avril 2023.

Le rapporteur, Le président,

J.-F. A... J. LAPOUZADE

La greffière

C. POVSE

La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur et des outre-mer en ce qui le concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

2

N° 22PA01203


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Paris
Formation : 1ère chambre
Numéro d'arrêt : 22PA01203
Date de la décision : 13/04/2023
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : M. LAPOUZADE
Rapporteur ?: M. Jean-François GOBEILL
Rapporteur public ?: M. DORE
Avocat(s) : N'DIAYE

Origine de la décision
Date de l'import : 15/04/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.paris;arret;2023-04-13;22pa01203 ?
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