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05/04/2023 | FRANCE | N°22PA03063

France | France, Cour administrative d'appel de Paris, 2ème chambre, 05 avril 2023, 22PA03063


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. C... D... a demandé au Tribunal administratif de A... d'annuler l'arrêté du 7 juin 2021 par lequel le préfet de police lui a refusé la délivrance d'un titre de séjour, l'a obligé à quitter territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays de destination.

Par un jugement n° 2124686/2-3 du 24 mars 2022, le Tribunal administratif de A... a rejeté sa demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête et un mémoire enregistrés le 4 juillet 2022 et le 8 mars 2

023, M. D..., représenté par Me Amel Delimi, demande à la Cour :

1°) d'annuler ce jugement du 24 ...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. C... D... a demandé au Tribunal administratif de A... d'annuler l'arrêté du 7 juin 2021 par lequel le préfet de police lui a refusé la délivrance d'un titre de séjour, l'a obligé à quitter territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays de destination.

Par un jugement n° 2124686/2-3 du 24 mars 2022, le Tribunal administratif de A... a rejeté sa demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête et un mémoire enregistrés le 4 juillet 2022 et le 8 mars 2023, M. D..., représenté par Me Amel Delimi, demande à la Cour :

1°) d'annuler ce jugement du 24 mars 2022 du Tribunal administratif de A... ;

2°) d'annuler l'arrêté contesté devant ce tribunal ;

3°) d'enjoindre au préfet de police de lui délivrer un titre de séjour " vie privée et familiale " dans le délai d'un mois à compter de la notification de l'arrêt à intervenir ou, à défaut, de lui enjoindre de réexaminer sa situation dans un délai de deux mois ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 1 500 euros à verser à son conseil sur le fondement des articles L. 761-1 du code de justice administrative et l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991.

Il soutient que :

En ce qui concerne le refus de titre de séjour :

- la décision méconnaît l'article L. 423-23 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- elle méconnaît l'article 3-1 de la convention de New-York relative aux droits de l'enfant ;

- elle méconnaît l'article 8 de la convention de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

En ce qui concerne les décisions l'obligeant à quitter le territoire français :

- la décision est illégale à raison de l'illégalité de la décision de refus de titre de séjour ;

- elle méconnaît l'article 8 de la convention de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

En ce qui concerne la décision fixant le pays de destination :

- la décision est illégale à raison de l'illégalité de la décision de refus de titre de séjour.

Par un mémoire en défense enregistré le 8 février 2023, le préfet de police conclut au rejet de la requête.

Il soutient qu'aucun des moyens de la requête n'est fondé.

M. D... a été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du bureau d'aide juridictionnelle près le tribunal judiciaire de A... du 27 mai 2022.

Par une ordonnance du 8 février 2023, la clôture d'instruction a été reportée au 9 mars 2023.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridique ;

- le code de justice administrative.

Le président de la formation a dispensé la rapporteure publique, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Le rapport de Mme B... a été entendu au cours de l'audience publique.

Considérant ce qui suit :

1. M. D..., ressortissant malien né le 31 mai 1975, est entré régulièrement en France le 22 décembre 2011 sous couvert d'un passeport revêtu d'un visa de long séjour en qualité de conjoint de ressortissant français. Il a bénéficié d'un titre de séjour portant la mention " vie privée et familiale " le 22 décembre 2012, que le préfet a refusé de renouveler le 25 avril 2014 en l'absence de justification de la communauté de vie avec son épouse. Il a sollicité le 18 février 2021 la délivrance d'un titre de séjour sur le fondement de l'article L. 423-23 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. Par un arrêté du 7 juin 2021, le préfet de police a rejeté cette demande, obligé M. D... à quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays de destination. M. D... relève appel du jugement n° 2124686/2-3 du 24 mars 2022 par lequel le Tribunal administratif de A... a rejeté sa demande dirigée contre cet arrêté.

Sur la légalité des décisions contestées :

2. Il ressort des pièces du dossier que M. D..., entré régulièrement en France en 2011, justifie d'une résidence habituelle sur le territoire français depuis. Il établit ses efforts d'insertion dans la société française par les formations professionnelles qu'il a suivies avec succès en 2012, 2018 et 2019. La réalité de sa relation, certes récente avec une ressortissante française est attestée, en particulier par l'ordonnance du juge des enfants du 15 décembre 2020 l'autorisant à bénéficier des droits de visite et d'hébergement du fils de M. D..., ainsi que par l'acte de naissance du 16 décembre 2020 d'un enfant né sans vie issu de leur union. Si le fils du requérant né le 18 juillet 2018, qui présente des retards de développement nécessitant une prise en charge spécialisée, a été placé sous la protection de l'aide sociale à l'enfance peu après sa naissance, le requérant a bénéficié de droits de visite et d'hébergement qu'il a effectivement exercés avec sa compagne qui a conduit à ce que, postérieurement à la décision attaquée, au regard du bon déroulement de l'exercice de ses droits parentaux, l'enfant lui soit confié à partir du 30 août 2021 par une ordonnance du Tribunal des enfants de A... du 22 juillet 2021, laquelle prévoit que soient accordés à sa mère des droits de visite accompagnée. Enfin, il est établi que par ailleurs la mère de M. D... est de nationalité française et que trois de ses frères et sœurs, avec lesquels il entretient des liens réguliers selon les attestations établies par ces derniers, résident régulièrement sur le territoire français. Dans ces conditions, au regard de la durée de sa résidence en France et de ses liens familiaux sur le territoire français, et alors même que M. D... n'est pas dépourvu de famille dans son pays d'origine où réside en particulier un de ses fils mineur, la décision lui refusant la délivrance d'un titre de séjour est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation de ses conséquences sur la situation de M. D.... Par suite, sans qu'il soit besoin d'examiner les autres moyens de la requête, le refus de titre de séjour en litige et, par voie de conséquence, l'obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours et la décision fixant le pays de renvoi sont entachées d'illégalité et doivent être annulées.

3. Il résulte ce qui précède que M. D... est fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de A... a rejeté sa demande.

Sur les conclusions à fin d'injonction et d'astreinte :

4. Considérant qu'aux termes de l'article L. 911-1 du code de justice administrative : " Lorsque sa décision implique nécessairement qu'une personne morale de droit public ou un organisme de droit privé chargé de la gestion d'un service public prenne une décision dans un sens déterminé, la juridiction, saisie de conclusions en ce sens, prescrit, par la même décision, cette mesure assortie, le cas échéant, d'un délai d'exécution ".

5. En application de ces dispositions et eu égard au motif qui fonde l'annulation des décisions en litige et dès lors qu'il ne résulte pas de l'instruction qu'un changement dans la situation de droit ou de fait du requérant y ferait obstacle, le présent arrêt implique nécessairement que le préfet de police délivre à M. D... une carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale ". Dès lors, il y a lieu d'enjoindre au préfet de police de délivrer un tel titre de séjour à l'intéressé dans le délai de deux mois à compter de la notification du présent arrêt.

Sur les frais liés à l'instance :

6. Il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de faire application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 et de mettre à la charge de l'Etat le versement au conseil de M. D..., Me Delimi, d'une somme de 1 500 euros au titre des frais exposés et non compris dans les dépens, sous réserve que Me Delimi renonce à percevoir la part contributive de l'Etat au titre de l'aide juridictionnelle.

DECIDE :

Article 1er : Le jugement du Tribunal administratif de A... du 24 mars 2022 et l'arrêté du 7 juin 2021 du préfet de police sont annulés.

Article 2 : Il est enjoint au préfet de police de délivrer à M. D... une carte de séjour temporaire dans le délai de deux mois à compter de la notification du présent arrêt.

Article 3 : L'Etat versera au conseil de M. D..., Me Delimi, une somme de 1 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991, sous réserve que celui-ci renonce à percevoir la somme correspondant à la part contributive de l'Etat au titre de l'aide juridictionnelle.

Article 4 : Le surplus des conclusions de la requête de M. D... est rejeté.

Article 5 : Le présent arrêt sera notifié à M. C... D..., au préfet de police et au ministre de l'intérieur et des outre-mer.

Copie en sera adressée à Me Amel Delimi.

Délibéré après l'audience du 22 mars 2023 à laquelle siégeaient :

- Mme Brotons, président de chambre,

- Mme Topin, présidente assesseure,

- M. Magnard, premier conseiller.

Rendu public par mise à disposition au greffe le 5 avril 2023.

La rapporteure,

Signé

E. B...Le président,

Signé

I. BROTONS

Le greffier,

Signé

A. MOHAMAN YERO

La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur et des outre-mer en ce qui le concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

2

N° 22PA03063


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Paris
Formation : 2ème chambre
Numéro d'arrêt : 22PA03063
Date de la décision : 05/04/2023
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : Mme BROTONS
Rapporteur ?: Mme Emmanuelle TOPIN
Rapporteur public ?: Mme PRÉVOT
Avocat(s) : DELIMI

Origine de la décision
Date de l'import : 14/04/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.paris;arret;2023-04-05;22pa03063 ?
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