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31/03/2023 | FRANCE | N°22PA03423

France | France, Cour administrative d'appel de Paris, 9ème chambre, 31 mars 2023, 22PA03423


Vu la procédure suivante : Procédure contentieuse antérieure : M. C... B... a demandé au tribunal administratif de Paris d'annuler l'arrêté du 16 novembre 2021 par lequel le préfet de police a refusé de lui délivrer une carte de séjour temporaire, l'a obligé à quitter le territoire français à l'expiration d'un délai de trente jours et a fixé le pays à destination duquel il serait reconduit. Par un jugement n° 2204994 du 23 juin 2022, le tribunal administratif de Paris a rejeté la demande de l'intéressé. Procédure devant la Cour : Par une requ

ête et des pièces complémentaires, enregistrées les 22 juillet, 19 se...

Vu la procédure suivante : Procédure contentieuse antérieure : M. C... B... a demandé au tribunal administratif de Paris d'annuler l'arrêté du 16 novembre 2021 par lequel le préfet de police a refusé de lui délivrer une carte de séjour temporaire, l'a obligé à quitter le territoire français à l'expiration d'un délai de trente jours et a fixé le pays à destination duquel il serait reconduit. Par un jugement n° 2204994 du 23 juin 2022, le tribunal administratif de Paris a rejeté la demande de l'intéressé. Procédure devant la Cour : Par une requête et des pièces complémentaires, enregistrées les 22 juillet, 19 septembre 2022 et 23 février 2023, M. B..., représenté par Me Béchieau, demande à la Cour : 1°) de l'admettre provisoirement au bénéfice de l'aide juridictionnelle ; 2°) d'annuler le jugement précité ; 3) d'annuler l'arrêté du 16 novembre 2021 par lequel le préfet de police a refusé de lui délivrer une carte de séjour temporaire, l'a obligé à quitter le territoire français à l'expiration d'un délai de trente jours et a fixé le pays à destination duquel il serait reconduit ; 3°) d'enjoindre au préfet de police, à titre principal, de lui délivrer une carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " dans un délai de 15 jours à compte de la notification de l'arrêt à intervenir sous astreinte de 100 euros par jour de retard, ou, à titre subsidiaire, de lui délivrer une carte de séjour mention salarié ou de réexaminer sa situation dans les mêmes conditions de délai et d'astreinte et, dans l'attente, de le munir d'une autorisation provisoire de séjour ; 4°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 1 500 euros sur le fondement des dispositions combinées de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridique. Il soutient que : - la décision portant refus de séjour est entachée d'une erreur manifeste dans l'appréciation des conditions posées par l'article L. 435-3 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ; - elle méconnaît les dispositions de l'article L. 423-23 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ; - elle méconnaît les stipulations de l'article 8 de la convention de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ; - elle est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation au regard de sa situation personnelle ; - la décision portant obligation de quitter le territoire est illégale en conséquence de l'illégalité du refus de titre ; - la décision fixant le pays de renvoi est illégale en conséquence de l'illégalité du refus de titre. Par un mémoire en défense enregistré le 23 janvier 2023 le préfet de police conclut au rejet de la requête. Il soutient que les moyens soulevés par le requérant ne sont pas fondés. M. B... a été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par décision du 3 octobre 2022. Vu les autres pièces du dossier. Vu : - la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ; - le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ; - la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridictionnelle ; - le code de justice administrative. Le président de la formation de jugement a décidé de dispenser le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience. Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience. Ont été entendus au cours de l'audience publique : - le rapport de Mme A..., - et les observations de Me Béchieau, avocat de M. B.... Considérant ce qui suit : 1. M. B..., ressortissant ivoirien né le 2 avril 2002, a sollicité un titre de séjour sur le fondement des dispositions de l'article L. 435-3 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. Par un arrêté du 16 novembre 2021, le préfet de police a refusé de lui délivrer une carte de séjour temporaire, l'a obligé à quitter le territoire français à l'expiration d'un délai de trente jours et a fixé le pays à destination duquel il serait reconduit. Par un jugement n° 2204994 du 23 juin 2022 dont il interjette régulièrement appel, le tribunal administratif a rejeté sa demande. Sur les conclusions tendant au bénéfice de l'aide juridictionnelle provisoire : 2. M. B... a été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du bureau d'aide juridictionnelle près le tribunal judiciaire de Paris du 3 octobre 2022. Par suite, ses conclusions tendant au bénéfice de l'aide juridictionnelle provisoire sont devenues sans objet. Sur les conclusions à fin d'annulation : 3. En premier lieu, aux termes de l'article L. 435-3 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " A titre exceptionnel, l'étranger qui a été confié à l'aide sociale à l'enfance entre l'âge de seize ans et l'âge de dix-huit ans et qui justifie suivre depuis au moins six mois une formation destinée à lui apporter une qualification professionnelle peut, dans l'année qui suit son dix-huitième anniversaire, se voir délivrer une carte de séjour temporaire portant la mention " salarié " ou " travailleur temporaire ", sous réserve du caractère réel et sérieux du suivi de cette formation, de la nature de ses liens avec sa famille restée dans le pays d'origine et de l'avis de la structure d'accueil sur l'insertion de cet étranger dans la société française. La condition prévue à l'article L. 412-1 n'est pas opposable ". 4. Lorsqu'il examine une demande d'admission exceptionnelle au séjour en qualité de " salarié " ou " travailleur temporaire ", présentée sur le fondement de ces dispositions, le préfet vérifie tout d'abord que l'étranger est dans l'année qui suit son dix-huitième anniversaire, qu'il a été confié à l'aide sociale à l'enfance entre l'âge de seize ans et dix-huit ans, qu'il justifie suivre depuis au moins six mois une formation destinée à lui apporter une qualification professionnelle et que sa présence en France ne constitue pas une menace pour l'ordre public. Il lui revient ensuite, dans le cadre du large pouvoir dont il dispose, de porter une appréciation globale sur la situation de l'intéressé, au regard notamment du caractère réel et sérieux du suivi de cette formation, de la nature de ses liens avec sa famille restée dans son pays d'origine et de l'avis de la structure d'accueil sur l'insertion de cet étranger dans la société française. Il appartient au juge administratif, saisi d'un moyen en ce sens, de vérifier que le préfet n'a pas commis d'erreur manifeste dans l'appréciation ainsi portée. 5. Après avoir relevé que l'intéressé a été régulièrement scolarisé en seconde professionnelle option " technicien d'usinage " pour l'année 2019/2020 puis en première professionnelle au titre de l'année 2020/2021, qu'il justifiait d'une inscription en terminale pour l'année scolaire 2021/2022 et que les bulletins de notes 2020/2021 faisaient apparaître un manque d'assiduité et de sérieux et de très nombreuses absences non justifiées qui ont conduit à des appréciations défavorables de ses professeurs ainsi qu'à une mise en garde au regard des résultats obtenus et des absences, le préfet de police, pour refuser de lui délivrer un titre de séjour, a estimé que M. B... ne démontrait pas le caractère réel et sérieux du suivi de sa formation. 6. Pour démontrer son sérieux dans ses études, M. B... produit une attestation du médecin scolaire précisant qu'il n'a pu effectuer son stage en milieu professionnel du 15 mars au 21 mai 2021 en raison de son état de santé, un récapitulatif de ses absences et retards pour la période du 2 septembre au 24 novembre 2021 démontrant que pour cette période ses absences étaient justifiées principalement par des recherches de stage, convocations administratives et motifs médicaux, une note sociale en date du 15 décembre 2021 établie par un cadre de l'association Aurore et un éducateur spécialisé chargés de l'accompagner dans son parcours d'insertion sociale et professionnelle qui explique la période de baisse d'investissement du requérant par ses difficultés à obtenir ses documents officiels ivoiriens et par le décès de ses parents, mais souligne l'implication de M. B... dans son projet d'insertion en France, ainsi qu'une attestation de la conseillère principale d'éducation du lycée professionnel Chennevière Malézieux, dans lequel il a effectué sa scolarité, en date du 10 mars 2022, dans laquelle elle observe qu'il a depuis son arrivée fait preuve de beaucoup de volonté pour progresser de même qu'un investissement sans faille et une présence régulière en cours. 7. Toutefois, il ressort clairement des appréciations littérales du bulletin de notes de l'année 2020/2021 émises par ses professeurs que ses absences répétées, en particulier au deuxième trimestre, n'ont pas permis à de nombreux enseignants de l'évaluer et que le travail est assez irrégulier dans de nombreuses matières ce qui rend l'ensemble très fragile en dépits de quelques efforts. Par ailleurs, il n'est pas établi que l'absentéisme de M. B... trouverait son origine dans des difficultés d'ordre personnel résultant de la crise sanitaire. Enfin, si le requérant a obtenu son baccalauréat professionnel spécialité technicien outilleur au mois de juillet 2022, cette circonstance est postérieure à la date de la décision attaquée et ne fait pas obstacle à ce que l'intéressé, s'il s'y estime fondé, présente une nouvelle demande de titre séjour. Dès lors, et alors même qu'il aurait donné satisfaction à son employeur durant son stage, eu égard à l'absence de caractère réel et sérieux du suivi de la formation du requérant à la date de la décision attaquée, le préfet n'a pas inexactement apprécié les faits de l'espèce en refusant de délivrer un titre de séjour à M. B... sur le fondement de l'article L. 435-3 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile.

8. En deuxième lieu, aux termes de l'article L. 423-23 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " L'étranger qui n'entre pas dans les catégories prévues aux articles L. 423-1, L. 423-7, L. 423-14, L. 423-15, L. 423-21 et L. 423-22 ou dans celles qui ouvrent droit au regroupement familial, et qui dispose de liens personnels et familiaux en France tels que le refus d'autoriser son séjour porterait à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée au regard des motifs du refus, se voit délivrer une carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " d'une durée d'un an, sans que soit opposable la condition prévue à l'article L. 412-1. / Les liens mentionnés au premier alinéa sont appréciés notamment au regard de leur intensité, de leur ancienneté et de leur stabilité, des conditions d'existence de l'étranger, de son insertion dans la société française ainsi que de la nature de ses liens avec sa famille restée dans son pays d'origine. / L'insertion de l'étranger dans la société française est évaluée en tenant compte notamment de sa connaissance des valeurs de la République ". Aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " 1. Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance (...) ". 9. M. B... fait état de ce qu'il a été pris en charge en qualité de mineur isolé à son arrivée sur le territoire français et de son intégration scolaire rapide. Toutefois, s'il n'est pas contesté qu'il a obtenu un baccalauréat professionnel spécialité technicien outilleur au mois de juillet 2022, il ne ressort pas des pièces du dossier qu'il aurait noué des attaches intenses et pérennes en France où il demeure célibataire et sans charges de famille. En outre, M. B..., qui a passé l'essentiel de son existence dans son pays d'origine, où réside sa sœur, n'apporte pas la preuve qu'il ne pourrait y poursuivre son existence. Dans ces circonstances, M. B... n'est pas fondé à soutenir que la décision attaquée aurait porté à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée par rapport aux buts en vue desquels elle a été prise et aurait ainsi méconnu les dispositions de l'article L. 423-23 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile précitées, ainsi que les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales. Pour les mêmes motifs, cette décision n'est pas davantage entachée d'une erreur manifeste d'appréciation. 10. Il résulte de ce qui précède que M. B... n'est pas fondé à soutenir que la décision du préfet de police en date du 16 novembre 2021 lui faisant obligation de quitter le territoire français serait illégale du fait qu'elle serait la conséquence d'un refus de titre de séjour lui-même illégal. 11. Enfin, M. B... n'ayant pas démontré l'illégalité des décisions portant refus d'admission au séjour et de la décision portant obligation de quitter le territoire français prises à son encontre, le moyen tiré de cette illégalité et soulevé, par la voie de l'exception, à l'encontre de la décision fixant le pays de destination, doit être écarté. 12. Il résulte de ce qui précède que M. B... n'est pas fondé à demander l'annulation du jugement et de l'arrêté qu'il conteste. Par voie de conséquence, ses conclusions à fin d'injonction sous astreinte et celles présentées au titre des articles 37 de la loi du 10 juillet 1991 et L. 761-1 du code de justice administrative ne peuvent qu'être rejetées.

D E C I D E :Article 1er : Il n'y a pas lieu de statuer sur la demande de M. B... tendant à son admission provisoire au bénéfice de l'aide juridictionnelle.Article 2 : La requête de M. B... est rejetée.Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à M. C... B... et au ministre de l'intérieur et des outre-mer.Copie en sera adressé à au préfet de police.Délibéré après l'audience du 10 mars 2023 à laquelle siégeaient :- M. Carrère, président,- M. Simon, premier conseiller,- Mme Boizot, première conseillère.Rendu public par mise à disposition au greffe de la Cour, le 31 mars 2023.La rapporteure,S. A...Le président,S. CARRERE La greffière,E. LUCELa République mande et ordonne au ministre de l'intérieur et des outre-mer en ce qui le concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt.N° 22PA03423 2


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Paris
Formation : 9ème chambre
Numéro d'arrêt : 22PA03423
Date de la décision : 31/03/2023
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : M. CARRERE
Rapporteur ?: Mme Sabine BOIZOT
Rapporteur public ?: M. SIBILLI
Avocat(s) : BECHIEAU

Origine de la décision
Date de l'import : 14/04/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.paris;arret;2023-03-31;22pa03423 ?
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