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31/03/2023 | FRANCE | N°21PA04771

France | France, Cour administrative d'appel, 5ème chambre, 31 mars 2023, 21PA04771


Vu la procédure suivante :



Procédure contentieuse antérieure :



M. B... A... a demandé au tribunal administratif de Melun l'annulation de l'arrêté du 2 décembre 2020 par lequel le préfet du Val-de-Marne l'a obligé à quitter le territoire français dans le délai de trente jours et a fixé le pays de renvoi.



Par un jugement n° 2010369 du 22 juillet 2021, le magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Melun a, en ses articles 2 à 4, annulé l'arrêté du 2 décembre 2020 par lequel le préfet du Val-

de-Marne a obligé M. A... à quitter le territoire français dans le délai de trente jours et a fixé le pays...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. B... A... a demandé au tribunal administratif de Melun l'annulation de l'arrêté du 2 décembre 2020 par lequel le préfet du Val-de-Marne l'a obligé à quitter le territoire français dans le délai de trente jours et a fixé le pays de renvoi.

Par un jugement n° 2010369 du 22 juillet 2021, le magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Melun a, en ses articles 2 à 4, annulé l'arrêté du 2 décembre 2020 par lequel le préfet du Val-de-Marne a obligé M. A... à quitter le territoire français dans le délai de trente jours et a fixé le pays de renvoi, a enjoint au préfet territorialement compétent de réexaminer la situation de M. A... dans un délai de deux mois à compter de la notification du jugement et, dans l'attente, de lui délivrer une autorisation provisoire de séjour, et mis à la charge de l'Etat le versement à M. A... d'une somme de 1 200 euros au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Procédure devant la Cour :

Par une requête, enregistrée le 23 août 2021, le préfet du Val-de-Marne, représenté par la SELARL Actis avocats, agissant par Me Termeau, demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 2010369 du 22 juillet 2021 du magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Melun ;

2°) de rejeter la demande présentée par M. A... devant le tribunal administratif de Melun.

Il soutient que l'arrêté en litige ne méconnaît pas les dispositions du 10° de l'article L. 511-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile.

Par des mémoires en défense, enregistrés le 7 février 2022 et le 24 février 2022, M. A..., représenté par Me Langlois, conclut au rejet de la requête, à son admission au bénéfice de l'aide juridictionnelle à titre provisoire, à l'annulation des décisions du préfet du Val-de-Marne en date du 2 décembre 2020 l'obligeant à quitter le territoire français, lui accordant un délai de trente jours pour exécuter cette obligation, et fixant le pays de renvoi, à ce qu'il soit enjoint au préfet du Val-de-Marne de procéder au réexamen de sa situation dans un délai de quinze jours à compter de la notification de l'arrêt à intervenir, sous astreinte de 200 euros par jour de retard, et de lui délivrer durant cet examen une autorisation provisoire de séjour, et à ce qu'il soit mis à la charge de l'Etat le versement à son conseil, ou en cas de non-admission au bénéfice de l'aide juridictionnelle, à lui-même, d'une somme de 1 800 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Il fait valoir que :

- aucun des moyens soulevés par le préfet du Val-de-Marne n'est fondé ;

- l'arrêté en litige méconnaît les dispositions du 10° de l'article L. 511-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- la décision l'obligeant à quitter le territoire français est insuffisamment motivée ;

- le préfet du Val-de-Marne n'a pas procédé à un examen approfondi de sa situation ;

- il a entaché sa décision d'une erreur de droit ;

- il a méconnu son droit à être entendu ;

- il avait le droit de se maintenir en France jusqu'à la date de lecture en audience publique de la décision de la Cour nationale du droit d'asile ;

- la décision contestée méconnaît les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- elle est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation au regard de ses conséquences sur sa situation personnelle ;

- la décision fixant le délai de départ volontaire est entachée de l'illégalité, par voie d'exception, de la décision l'obligeant à quitter le territoire français ;

- elle est insuffisamment motivée ;

- elle est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation ;

- la décision fixant le pays de renvoi est entachée de l'illégalité, par voie d'exception, de la décision l'obligeant à quitter le territoire français ;

- elle méconnaît les stipulations de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ainsi que les dispositions de l'article L. 513-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile.

M. A... a été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale, par une décision du bureau d'aide juridictionnelle près le tribunal judiciaire de Paris en date du 9 septembre 2022.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;

- le code de justice administrative.

La présidente de la formation de jugement a dispensé Mme Lorin, rapporteure publique désignée en application de l'article R. 222-24 du code de justice administrative, de prononcer des conclusions à l'audience.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. Aggiouri ;

- et les observations de Me Ben-Saadi, substituant Me Langlois, avocate de M. A....

Considérant ce qui suit :

1. Par un arrêté du 2 décembre 2020, le préfet du Val-de-Marne a obligé M. A..., ressortissant guinéen né le 23 août 1995, à quitter le territoire français dans le délai de trente jours et a fixé le pays de renvoi. Par un jugement du 22 juillet 2021, le magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Melun a, en ses articles 2 à 4, annulé l'arrêté du 2 décembre 2020 par lequel le préfet du Val-de-Marne a obligé M. A... à quitter le territoire français dans le délai de trente jours et a fixé le pays de renvoi, a enjoint au préfet territorialement compétent de réexaminer la situation de M. A... dans un délai de deux mois à compter de la notification du jugement et, dans l'attente, de lui délivrer une autorisation provisoire de séjour, et mis à la charge de l'Etat le versement à M. A... d'une somme de 1 200 euros au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Le préfet du Val-de-Marne relève appel de ce jugement.

Sur les conclusions tendant à l'admission à l'aide juridictionnelle provisoire :

2. M. A... ayant été admis à l'aide juridictionnelle totale par une décision du bureau d'aide juridictionnelle près le tribunal judiciaire de Paris du 9 septembre 2022, il n'y a pas lieu de statuer sur ses conclusions tendant à son admission à l'aide juridictionnelle provisoire, qui sont devenues sans objet.

Sur le bien-fondé du jugement :

3. Aux termes des dispositions alors codifiées à l'article L. 511-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Ne peuvent faire l'objet d'une obligation de quitter le territoire français : / [...] 10° L'étranger résidant habituellement en France si son état de santé nécessite une prise en charge médicale dont le défaut pourrait avoir pour lui des conséquences d'une exceptionnelle gravité et si, eu égard à l'offre de soins et aux caractéristiques du système de santé du pays de renvoi, il ne pourrait pas y bénéficier effectivement d'un traitement approprié ".

4. Il ressort des pièces du dossier, et en particulier d'un certificat médical daté du 26 avril 2021, que M. A... est né avec une fente labio-palatine unilatérale complète, qui a nécessité une intervention chirurgicale réalisée en Guinée, alors qu'il était âgé de 8 mois. Si, après de multiples complications, il a connu une période de stabilisation des symptômes entre l'âge de 2 ans et l'âge de 22 ans, l'aggravation des fuites de la cavité buccale vers les cavités naso-pharyngiennes, à compter de l'année 2017, a justifié la réalisation d'une nouvelle intervention chirurgicale, au sein du service ORL de l'hôpital de la Pitié-Salpêtrière, en août 2020. Ce certificat médical précise par ailleurs que M. A... devait être suivi de manière régulière, pendant une durée d'au moins dix-huit mois, dans ce " service hautement spécialisé, afin de s'assurer de la cicatrisation complète et d'évaluer la nécessite ou non de ré-intervenir " et que " l'absence de ce suivi peut amener à la non-découverte d'une réouverture des lésions, avec comme conséquences éventuelles des infections ORL et pulmonaires à répétition, une dénutrition, des troubles de la phonation et de la déglutition, dont les conséquences pourraient être d'une exceptionnelle gravité ". Enfin, ce certificat relève que le suivi dont M. A... a bénéficié dans son pays s'est [...] montré insuffisant pour éviter des complications sévères ". Or, le préfet du Val-de-Marne ne produit dans ses écritures aucun élément permettant de remettre en cause les conclusions de ce certificat médical, qui portent tant sur la gravité de la pathologie dont souffre M. A... que sur la disponibilité de soins adaptés dans son pays d'origine. A cet égard, la seule circonstance que M. A... n'a pas sollicité la délivrance d'un titre de séjour en qualité d'étranger malade ne le privait nullement de la possibilité de se prévaloir, comme il l'a fait, de son état de santé, sur le fondement des dispositions du 10° de l'article L. 511-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, au soutien des conclusions à fin d'annulation de l'obligation de quitter le territoire français qui lui a été opposée. Ainsi, M. A... établit que le préfet du Val-de-Marne ne pouvait, sans méconnaître ces dispositions, prononcer à son encontre une obligation de quitter le territoire français.

5. Il résulte de tout ce qui précède que le préfet du Val-de-Marne n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Melun a annulé les décisions contestées.

Sur les conclusions à fin d'injonction :

6. Le jugement du magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Melun en date du 22 juillet 2021 ayant déjà enjoint au préfet du Val-de-Marne de procéder au réexamen de la situation de M. A... et de lui délivrer une autorisation provisoire de séjour dans l'attente d'une nouvelle décision, les conclusions à fin d'injonction sous astreinte présentées de nouveau en appel par M. A... doivent être rejetées. Toutefois, il appartient au préfet territorialement compétent d'exécuter dans les meilleurs délais, si cela n'a pas été fait, le jugement en litige.

Sur les frais liés à l'instance :

7. Il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de l'Etat le versement au conseil de M. A..., Me Langlois, de la somme de 1 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991, sous réserve que Me Langlois renonce à percevoir la part contributive de l'Etat au titre de l'aide juridictionnelle.

DÉCIDE :

Article 1er : Il n'y a pas lieu de statuer sur les conclusions de M. A... tendant à son admission à l'aide juridictionnelle provisoire.

Article 2 : La requête du préfet du Val-de-Marne est rejetée.

Article 3 : L'Etat versera au conseil de M. A..., Me Langlois, la somme de 1 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991, sous réserve que celui-ci renonce à percevoir la somme correspondant à la part contributive de l'Etat au titre de l'aide juridictionnelle.

Article 4 : Le surplus des conclusions de M. A... est rejeté.

Article 5 : Le présent arrêt sera notifié au ministre de l'intérieur et des outre-mer et à M. B... A....

Copie en sera adressée au préfet du Val-de-Marne.

Délibéré après l'audience du 9 mars 2023, à laquelle siégeaient :

- Mme Vrignon-Villalba, présidente de la formation de jugement en application de l'article R. 222-26 du code de justice administrative,

- M. Aggiouri, premier conseiller,

- M. Perroy, premier conseiller.

Rendu public par mise à disposition au greffe, le 31 mars 2023.

Le rapporteur,

K. AGGIOURILa présidente,

C. VRIGNON-VILLALBA

La greffière,

A. MAIGNAN

La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur et des outre-mer en ce qui le concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

N° 21PA04771 2


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de PARIS
Formation : 5ème chambre
Numéro d'arrêt : 21PA04771
Date de la décision : 31/03/2023
Type de recours : Plein contentieux

Composition du Tribunal
Président : Mme VRIGNON-VILLALBA
Rapporteur ?: M. Khalil AGGIOURI
Rapporteur public ?: Mme LORIN
Avocat(s) : LANGLOIS

Origine de la décision
Date de l'import : 28/01/2024
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel;arret;2023-03-31;21pa04771 ?
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