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15/03/2023 | FRANCE | N°22PA03003

France | France, Cour administrative d'appel de Paris, 7ème chambre, 15 mars 2023, 22PA03003


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme B... A... a demandé au Tribunal administratif de Paris d'annuler l'arrêté du 1er avril 2022 par lequel le préfet de police l'a obligée à quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays de renvoi.

Par un jugement n° 2209159/8 du 2 juin 2022, le magistrat désigné par le président du Tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête, enregistrée le 30 juin 2022, Mme A..., représentée par Me Loison,

demande à la Cour :

1°) de l'admettre au bénéfice de l'aide juridictionnelle provisoire ;

2°) d'a...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme B... A... a demandé au Tribunal administratif de Paris d'annuler l'arrêté du 1er avril 2022 par lequel le préfet de police l'a obligée à quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays de renvoi.

Par un jugement n° 2209159/8 du 2 juin 2022, le magistrat désigné par le président du Tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête, enregistrée le 30 juin 2022, Mme A..., représentée par Me Loison, demande à la Cour :

1°) de l'admettre au bénéfice de l'aide juridictionnelle provisoire ;

2°) d'annuler ce jugement du 2 juin 2022 ;

3°) d'annuler l'arrêté du préfet de police du 1er avril 2022 ;

4°) d'enjoindre au préfet de police de lui délivrer un titre de séjour portant la mention " vie privée et familiale " sur le fondement de l'article L. 425-9 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

5°) à défaut, d'enjoindre au préfet de police de lui délivrer une autorisation provisoire de séjour et de réexaminer sa situation dans un délai de quinze jours, sous astreinte de 100 euros par jour de retard à compter de l'expiration de ce délai ;

6°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 1 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

S'agissant du jugement attaqué :

- le magistrat désigné par le président du Tribunal administratif de Paris a omis de répondre au moyen tiré de ce que l'obligation de quitter le territoire français prise à son encontre méconnaît les dispositions de l'article L. 121-1 du code des relations entre le public et l'administration ;

S'agissant de la décision portant obligation de quitter le territoire français :

- elle est insuffisamment motivée ;

- elle est entachée d'un défaut d'examen de sa situation personnelle ;

- elle méconnaît les dispositions de l'article L.121-1 du code des relations entre le public et l'administration ;

- elle méconnaît les dispositions du 9° de l'article L. 611-3 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile.

Par un mémoire en défense, enregistré le 2 décembre 2022, le préfet de police conclut au rejet de la requête.

Il soutient que :

- les moyens tirés de la méconnaissance des dispositions de l'article L. 121-1 du code des relations entre le public et l'administration ainsi que de celles du 9° de l'article L. 611-3 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile sont inopérants ;

- les autres moyens soulevés par la requérante ne sont pas fondés.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- le code des relations entre le public et l'administration ;

- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;

- le décret n° 2020-1717 du 28 décembre 2020 ;

- l'arrêté du 5 janvier 2017 fixant les orientations générales pour l'exercice par les médecins de l'Office français de l'immigration et de l'intégration, de leurs missions, prévues à l'article L. 313-11 (11°) du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- le code de justice administrative.

Le président de la formation de jugement a dispensé la rapporteure publique, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. C...,

- et les observations de Me Loison, avocate de Mme A....

Considérant ce qui suit :

1. Ayant constaté que la demande d'asile de Mme A..., ressortissante mauritanienne, née en 1977, a été définitivement rejetée par une décision de la Cour nationale du droit d'asile du 23 février 2022, notifiée le 28 février 2022, le préfet de police, par un arrêté du 1er avril 2022, a obligé l'intéressée à quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays de renvoi en application des dispositions du 4° de l'article L. 611-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. Mme A... fait appel du jugement par lequel le magistrat désigné par le président du Tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande tendant à l'annulation de cet arrêté.

Sur la demande d'admission provisoire à l'aide juridictionnelle :

2. Aux termes de l'article 20 de la loi du 10 juillet 1991 : " Dans les cas d'urgence (...), l'admission provisoire à l'aide juridictionnelle peut être prononcée par la juridiction compétente ou son président / (...). ". Aux termes de l'article 61 du décret du 28 décembre 2020 : " L'admission provisoire peut être accordée dans une situation d'urgence (...) / [Elle] est accordée par (...) le président de la juridiction saisie, soit sur une demande présentée sans forme par l'intéressé, soit d'office si celui-ci a présenté une demande d'aide juridictionnelle (...) sur laquelle il n'a pas encore été statué ".

3. Il ressort des pièces du dossier que Mme A..., qui a sollicité l'admission provisoire à l'aide juridictionnelle lors de l'enregistrement de sa requête d'appel, n'a accompli, depuis lors, aucune démarche auprès du bureau d'aide juridictionnelle en vue de la compléter. Dans ces circonstances, la situation d'urgence au sens de l'article 20 de la loi du 10 juillet 1991 n'est pas caractérisée. Par suite, il n'y a pas lieu d'admettre à titre provisoire Mme A... au bénéfice de l'aide juridictionnelle.

Sur la régularité du jugement attaqué :

4. Contrairement à ce que soutient Mme A..., il ressort du point 12 du jugement attaqué que le magistrat désigné par le président du Tribunal administratif de Paris a répondu au moyen tiré de ce que l'obligation de quitter le territoire français prise à son encontre méconnaît les dispositions de l'article L. 121-1 du code des relations entre le public et l'administration, lequel moyen est au demeurant inopérant dès lors qu'il ressort des dispositions des articles L. 613-1 et suivants du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile que le législateur a entendu déterminer l'ensemble des règles de procédure administrative et contentieuse auxquelles sont soumises l'intervention et l'exécution des décisions par lesquelles l'autorité administrative signifie à l'étranger l'obligation dans laquelle il se trouve de quitter le territoire français. Par suite, le moyen d'irrégularité soulevé par Mme A... doit être écarté.

Sur le bien-fondé du jugement attaqué :

5. En premier lieu, Mme A... reprend en appel les moyens invoqués en première instance et tirés de ce que l'obligation de quitter le territoire français n'est pas suffisamment motivée, de ce qu'elle est entachée d'un défaut d'examen de sa situation et de ce qu'elle méconnaît les dispositions de l'article L. 121-1 du code des relations entre le public et l'administration. Il y a lieu de rejeter ces moyens par adoption des motifs retenus à bon droit par le premier juge.

6. En second lieu, aux termes de l'article L. 611-3 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Ne peuvent faire l'objet d'une décision portant obligation de quitter le territoire français : / (...) / 9° L'étranger résidant habituellement en France si son état de santé nécessite une prise en charge médicale dont le défaut pourrait avoir pour lui des conséquences d'une exceptionnelle gravité et si, eu égard à l'offre de soins et aux caractéristiques du système de santé du pays de renvoi, il ne pourrait pas y bénéficier effectivement d'un traitement approprié / (...) ". Aux termes de l'article 4 de l'arrêté du 5 janvier 2017 fixant les orientations générales pour l'exercice par les médecins de l'Office français de l'immigration et de l'intégration, de leurs missions, prévues à l'article L. 313-11 (11°) du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Les conséquences d'une exceptionnelle gravité résultant d'un défaut de prise en charge médicale (...) sont appréciées sur la base des trois critères suivants : degré de gravité (mise en cause du pronostic vital de l'intéressé ou détérioration d'une de ses fonctions importantes), probabilité et délai présumé de survenance de ces conséquences / Cette condition des conséquences d'une exceptionnelle gravité résultant d'un défaut de prise en charge doit être regardée comme remplie chaque fois que l'état de santé de l'étranger concerné présente, en l'absence de la prise en charge médicale que son état de santé requiert, une probabilité élevée à un horizon temporel qui ne saurait être trop éloigné de mise en jeu du pronostic vital, d'une atteinte à son intégrité physique ou d'une altération significative d'une fonction importante / Lorsque les conséquences d'une exceptionnelle gravité ne sont susceptibles de ne survenir qu'à moyen terme avec une probabilité élevée (pathologies chroniques évolutives), l'exceptionnelle gravité est appréciée en examinant les conséquences sur l'état de santé de l'intéressé de l'interruption du traitement dont il bénéficie actuellement en France (rupture de la continuité des soins). Cette appréciation est effectuée en tenant compte des soins dont la personne peut bénéficier dans son pays d'origine ".

7. Mme A..., qui souffre d'un diabète de type 2 diagnostiqué et traité en France depuis 2019, soutient que le défaut de prise en charge médicale de son état de santé peut avoir pour elle des conséquences d'une exceptionnelle gravité et qu'elle ne peut bénéficier effectivement d'un traitement approprié à sa pathologie en Mauritanie. Toutefois, si le certificat d'un médecin diabétologue-endocrinologue, établi le 2 juin 2022, indique que " [l']état de santé [de Mme A...] nécessite un suivi régulier dont le défaut de prise en charge pourrait entraîner des conséquences d'une extrême gravité " et qu' " en l'absence de prise en charge adéquate, les complications peuvent comprendre la cécité, l'insuffisance rénale terminale, les infarctus, les accidents vasculaires cérébraux et les amputations ", ces éléments se bornent toutefois à exposer de manière générale les complications extrêmes liées au diabète en l'absence de traitement médical sans établir pour autant, y compris par les autres documents médicaux produits en première instance comme en appel, qu'en cas d'arrêt de son traitement médicamenteux, le pronostic vital de Mme A... serait engagé ou qu'elle serait effectivement exposée, à plus ou moins brève échéance, à l'un des risques ainsi décrits. Dans ces conditions, le préfet de police ne peut être regardé comme ayant méconnu les dispositions précitées du 9° de l'article L. 611-3 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. Par suite, le moyen tiré de la méconnaissance de ces dispositions doit être écarté.

8. Il résulte de tout ce qui précède que Mme A... n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le magistrat désigné par le président du Tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande. Par voie de conséquence, ses conclusions à fin d'injonction sous astreinte ainsi que celles relatives aux frais d'instance doivent également être rejetées.

D É C I D E :

Article 1er : Mme A... n'est pas admise, à titre provisoire, au bénéfice de l'aide juridictionnelle.

Article 2 : Le surplus des conclusions de la requête de Mme A... est rejeté.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à Mme B... A... et au ministre de l'intérieur et des outre-mer.

Copie en sera adressée au préfet de police.

Délibéré après l'audience du 21 février 2023, à laquelle siégeaient :

- M. Jardin, président de chambre,

- Mme Hamon, présidente assesseure,

- M. Desvigne-Repusseau, premier conseiller,

Rendu public par mise à disposition au greffe le 15 mars 2023.

Le rapporteur,

M. DESVIGNE-REPUSSEAU

Le président,

C. JARDIN

La greffière,

C. BUOT

La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur et des outre-mer en ce qui le concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

N° 22PA03003 2


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Paris
Formation : 7ème chambre
Numéro d'arrêt : 22PA03003
Date de la décision : 15/03/2023
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : M. JARDIN
Rapporteur ?: M. Marc DESVIGNE-REPUSSEAU
Rapporteur public ?: Mme BREILLON
Avocat(s) : LOISON

Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.paris;arret;2023-03-15;22pa03003 ?
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