La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

15/03/2023 | FRANCE | N°21PA03188

France | France, Cour administrative d'appel de Paris, 7ème chambre, 15 mars 2023, 21PA03188


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. C... D... B... et Mme A... D... B... ont demandé au Tribunal administratif de Paris de prononcer la décharge, en droits et pénalités, des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu et de contributions sociales auxquelles ils ont été assujettis au titre des années 2011 et 2012.

Par un jugement n° 1813827/1-3 du 7 avril 2021, le Tribunal administratif de Paris a prononcé la réduction de ces impositions et a rejeté le surplus de leur demande.

Procédure devant la Cour :

Par

une requête et un mémoire, enregistrés les 9 juin 2021 et 29 septembre 2021, M. et Mme D... B....

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. C... D... B... et Mme A... D... B... ont demandé au Tribunal administratif de Paris de prononcer la décharge, en droits et pénalités, des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu et de contributions sociales auxquelles ils ont été assujettis au titre des années 2011 et 2012.

Par un jugement n° 1813827/1-3 du 7 avril 2021, le Tribunal administratif de Paris a prononcé la réduction de ces impositions et a rejeté le surplus de leur demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête et un mémoire, enregistrés les 9 juin 2021 et 29 septembre 2021, M. et Mme D... B..., représentés par Me Madrid, demandent à la Cour :

1°) d'annuler l'article 3 du jugement n° 1813827/1-3 du 7 avril 2021 du Tribunal administratif de Paris ;

2°) de prononcer la décharge des impositions restant en litige ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 8 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

4°) de condamner l'Etat aux dépens.

M. et Mme D... B... soutiennent que :

- le Tribunal administratif de Paris n'a pas répondu au moyen tiré de ce que le service n'a pas fait droit à leur demande tendant à obtenir une copie des réponses du service à leurs observations sur les propositions de rectification des 28 novembre 2014 et 22 juillet 2015 ;

- s'agissant des propositions de rectification des 28 novembre 2014 et 22 juillet 2015, qui portent sur des rehaussements non liés à des demandes d'assistance administrative ou à des droits de communication auprès du ministère public, les dispositions dérogatoires des articles L. 188 A et L. 12 du livre des procédures fiscales ne leur sont pas applicables et l'examen de leur situation fiscale personnelle ne pouvait donc pas s'étendre au-delà du délai d'un an ; en outre, ces propositions de rectification ont été irrégulièrement notifiées dès lors que le délai d'un an prévu par l'article L. 12 du livre des procédures fiscales ne pouvait pas été prorogé au-delà du 16 novembre 2014 ;

- s'agissant de la proposition de rectification du 26 février 2016, celle-ci n'indique pas, en méconnaissance des articles L. 54 B, L. 55 et L. 57 du livre des procédures fiscales, les motifs justifiant que la durée de l'examen de leur situation fiscale personnelle devait être portée à deux ans ; elle méconnaît les dispositions de l'article L. 12 du livre des procédures fiscales ; en outre, la prorogation du délai de trente jours prévue à l'article L. 16 A du livre des procédures fiscales est inopposable en l'absence de réponse de M. et Mme D... B... ;

- le service n'a pas répondu à leurs observations sur les propositions de rectification des 28 novembre 2014 et 22 juillet 2015 ;

- le service n'a pas répondu à leur demande tendant à obtenir une copie des réponses à leurs observations sur les propositions de rectification des 28 novembre 2014 et 22 juillet 2015 ;

- ils justifient de l'origine et du caractère non imposable des crédits portés sur leurs comptes bancaires ;

- la majoration de 40 % pour manquement délibéré n'est ni motivée ni justifiée.

Par des mémoires en défense, enregistrés les 10 septembre 2021 et 8 mars 2022, le ministre de l'économie, des finances et de la relance conclut au non-lieu à statuer à hauteur des dégrèvements partiels accordés à hauteur d'une somme globale de 178 528 euros au titre de la cotisation supplémentaire d'impôt sur le revenu à laquelle les requérants ont été assujettis au titre de l'année 2012 ainsi qu'à hauteur d'une somme globale de 62 762 euros au titre des cotisations supplémentaires de contributions sociales mises à leur charge au titre de la même année, et au rejet du surplus des conclusions de la requête.

Il soutient que :

- par une décision du 7 mars 2022, il a accordé un dégrèvement partiel de la cotisation supplémentaire d'impôt sur le revenu auxquelles M. et Mme D... B... ont été assujettis au titre de l'année 2012 correspondant à une somme de 116 837 euros en droits et à une somme de 61 691 euros en pénalités, ainsi qu'un dégrèvement partiel des cotisations supplémentaires de contributions sociales mises à leur charge au titre de la même année correspondant à une somme de 41 075 euros en droits et à une somme de 21 687 euros en pénalités ;

- les moyens soulevés par les requérants ne sont pas fondés.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. E...,

- et les conclusions de Mme Breillon, rapporteure publique.

Considérant ce qui suit :

1. A l'issue d'un examen contradictoire de leur situation fiscale personnelle portant sur les années 2011 et 2012, M. et Mme D... B... ont été assujettis à des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu et de contributions sociales au titre de ces années en conséquence de la réintégration dans leur revenu imposable de revenus d'origine indéterminée. M. et Mme D... B... font appel du jugement en tant que le Tribunal administratif de Paris a rejeté le surplus de leur demande tendant à la décharge, en droits et pénalités, de ces impositions.

Sur l'étendue du litige d'appel :

2. Il résulte de l'instruction que, par une décision du 7 mars 2022 postérieure à l'introduction de la requête, le directeur chargé de la direction spécialisée de contrôle fiscal Ile-de-France a prononcé le dégrèvement partiel de la cotisation supplémentaire d'impôt sur le revenu à laquelle M. et Mme D... B... ont été assujettis au titre de l'année 2012 à hauteur, en droits et pénalités, d'une somme globale de 178 528 euros, ainsi que le dégrèvement partiel des cotisations supplémentaires de contributions sociales mises à leur charge au titre de la même année à hauteur, en droits et pénalités, d'une somme globale de 62 762 euros. Les conclusions de la requête relatives à ces impositions sont, dans cette mesure, devenues sans objet.

Sur la régularité du jugement attaqué :

3. A l'appui de leur demande, M. et Mme D... B... ont soutenu que l'administration fiscale n'avait pas répondu à leur demande tendant à obtenir une copie des réponses du service à leurs observations sur les propositions de rectification des 28 novembre 2014 et 22 juillet 2015. Toutefois, un tel moyen est, en l'espèce, inopérant dès lors qu'il résulte de l'instruction que les intéressés ont présenté leur demande au stade de la réclamation préalable, soit après la mise en recouvrement des impositions contestées. Ainsi, la circonstance que le Tribunal administratif de Paris ne s'est pas prononcé sur ce moyen est sans incidence sur la régularité de son jugement. Par suite, le moyen tiré de l'irrégularité du jugement attaqué doit être écarté.

Sur le surplus des conclusions à fin de décharge :

En ce qui concerne la régularité de la procédure d'imposition :

S'agissant de la durée du contrôle :

4. Aux termes de l'article L. 12 du livre des procédures fiscales, dans sa rédaction applicable à la présente procédure : " Dans les conditions prévues au présent livre, l'administration des impôts peut procéder à l'examen contradictoire de la situation fiscale des personnes physiques au regard de l'impôt sur le revenu, qu'elles aient ou non leur domicile fiscal en France, lorsqu'elles y ont des obligations au titre de cet impôt / A l'occasion de cet examen, l'administration peut contrôler la cohérence entre, d'une part les revenus déclarés et, d'autre part, la situation patrimoniale, la situation de trésorerie et les éléments du train de vie des membres du foyer fiscal / Sous peine de nullité de l'imposition, un examen contradictoire de la situation fiscale personnelle ne peut s'étendre sur une période supérieure à un an à compter de la réception de l'avis de vérification / (...) / Cette période est prorogée du délai accordé, le cas échéant, au contribuable et, à la demande de celui-ci, pour répondre aux demandes d'éclaircissements ou de justifications pour la partie qui excède les deux mois prévus à l'article L. 16 A / Elle est également prorogée des trente jours prévus à l'article L. 16 A et des délais nécessaires à l'administration pour obtenir les relevés de compte lorsque le contribuable n'a pas usé de sa faculté de les produire dans un délai de soixante jours à compter de la demande de l'administration ou pour recevoir les renseignements demandés aux autorités étrangères, lorsque le contribuable a pu disposer de revenus à l'étranger ou en provenance directe de l'étranger / La période mentionnée au troisième alinéa est portée à deux ans en cas de découverte, en cours de contrôle, d'une activité occulte. Il en est de même lorsque, dans le délai initial d'un an, les articles L. 82 C ou L. 101 ont été mis en œuvre ".

5. Il résulte de ces dispositions que les délais qu'elles prévoient, impartis au contribuable pour compléter sa réponse à une demande d'éclaircissements ou de justifications, à sa demande ou à la suite d'une mise en demeure de l'administration, et nécessaires à l'administration pour recevoir les renseignements demandés aux autorités étrangères lorsque le contribuable a pu disposer de revenus à l'étranger ou en provenance directe de l'étranger, ou obtenir les relevés de comptes non produits par le contribuable dans le délai imparti, se cumulent en principe, eu égard aux objets différents qu'ils poursuivent, pour le décompte de la durée de prorogation de la période de contrôle d'un an prévue par les dispositions de l'article L. 12 du livre des procédures fiscales. Il en va toutefois différemment lorsque plusieurs de ces délais courent de manière concomitante, le délai d'un an prévu par ces dispositions n'étant alors prorogé qu'à concurrence du nombre de jours pendant lesquels ces délais ne se recouvrent pas. Pour l'appréciation de la durée maximale prévue par les dispositions précitées de l'article L. 12 du livre des procédures fiscales, l'examen contradictoire de situation fiscale personnelle à l'issue duquel l'administration adresse au contribuable une proposition de rectification doit être regardé comme achevé à la date de l'envoi de cette proposition. Enfin, la prorogation des délais, destinée à permettre à l'administration de réunir l'ensemble des informations sur la situation du contribuable, s'applique à l'ensemble de la procédure de contrôle.

6. Il résulte de l'instruction que M. et Mme D... B... ont reçu le 8 octobre 2013 l'avis d'examen contradictoire de leur situation fiscale personnelle au titre des années 2011 et 2012 et que le contrôle s'est achevé, pour ces années, par l'envoi de trois propositions de rectification, portant sur des rehaussements distincts, qui leur ont été adressées respectivement les 28 novembre 2014, 22 juillet 2015 et 26 février 2016. La période d'un an de durée maximale d'examen de leur situation fiscale personnelle, qui expirait en principe le 8 octobre 2014, a été prorogée d'un an dans le cadre du droit de communication, prévu aux articles L. 82 C et L. 101 du livre des procédures fiscales, qui a été exercé auprès de l'autorité judiciaire les 26 novembre 2013 et 3 février 2014. Par ailleurs, si les autorités espagnoles et portugaises, saisies chacune de deux demandes d'assistance administrative internationale le 29 mai 2014, ont répondu le 27 octobre 2014 pour l'Espagne et le 27 février 2015 pour le Portugal, le délai de réponse de ces autorités pouvant être pris en compte pour la prorogation de la période d'un an de durée maximale de l'examen de la situation fiscale personnelle de M. et Mme D... B... est de seulement 132 jours dès lors qu'il résulte de l'instruction que la période comprise entre le 8 octobre 2014 et les dates des réponses des autorités espagnoles et portugaises recouvre la période d'un an supplémentaire qui a été déclenchée par l'exercice du droit de communication auprès de l'autorité judiciaire et qui court à compter du 8 octobre 2014. Enfin, la période d'un an a été également prorogée par le délai de trente jours imparti aux requérants pour répondre à la mise en demeure qu'ils ont reçue le 6 novembre 2015 en application de l'article L. 16 A du livre des procédures fiscales, dès lors que ce délai ne recouvre pas la période d'un an supplémentaire déclenchée par la mise en œuvre du droit de communication auprès de l'autorité judiciaire qui s'étend du 8 octobre 2014 au 8 octobre 2015, la circonstance invoquée par les requérants que ceux-ci n'ont pas répondu à la mise en demeure étant sans incidence sur la prise en compte du délai de trente jours prévu à l'article L. 16 A. En revanche, la période d'un an de durée maximale d'examen de la situation fiscale personnelle des requérants n'a pas pu être prorogée par le délai de trente jours imparti aux intéressés pour répondre aux deux mises en demeure qu'ils ont reçues respectivement les 7 août 2014 et 1er avril 2015 en application de l'article L. 16 A du livre des procédures fiscales, dès lors que ce délai recouvre, pour la première mise en demeure, la période de 132 jours qui s'étend du 29 mai 2014 au 8 octobre 2014 et, pour la seconde mise en demeure, la période d'un an supplémentaire résultant de la mise en œuvre du droit de communication auprès de l'autorité judiciaire qui s'étend du 8 octobre 2014 au 8 octobre 2015. Dans ces conditions, et sans qu'il y ait lieu d'opérer une distinction entre les rectifications trouvant leur source dans les renseignements demandés aux autorités espagnoles et portugaises et ceux n'ayant pas nécessité d'investigations d'une telle nature, la période d'un an a été prorogée d'un an et 162 jours et s'est achevée le 18 mars 2016, soit après l'envoi des propositions de rectification des 28 novembre 2014, 22 juillet 2015 et 26 février 2016. Par suite, le moyen tiré de ce que le contrôle fiscal a été irrégulièrement prolongé en méconnaissance des dispositions précitées de l'article L. 12 du livre des procédures fiscales, doit être écarté.

S'agissant de la motivation de la proposition de rectification du 26 février 2016 et de l'absence alléguée de " réponse aux observations du contribuable " :

7. D'une part, aux termes de l'article L. 55 du livre des procédures fiscales, dans sa rédaction applicable à la présente procédure : " Sous réserve des dispositions de l'article L. 56, lorsque l'administration des impôts constate une insuffisance, une inexactitude, une omission ou une dissimulation dans les éléments servant de base au calcul des impôts, droits, taxes, redevances ou sommes quelconques dues en vertu du code général des impôts (...), les rectifications correspondantes sont effectuées suivant la procédure de rectification contradictoire définie aux articles L. 57 à L. 61 A / (...) ". Aux termes de l'article L. 57 du livre des procédures fiscales, dans sa rédaction applicable à la présente procédure : " L'administration adresse au contribuable une proposition de rectification qui doit être motivée de manière à lui permettre de formuler ses observations ou de faire connaître son acceptation / (...) / Lorsque l'administration rejette les observations du contribuable sa réponse doit également être motivée ".

8. D'autre part, aux termes de l'article L. 56 du livre des procédures fiscales, dans sa rédaction applicable à la présente procédure : " La procédure de rectification contradictoire n'est pas applicable : / (...) / 4° Dans les cas de taxation ou évaluation d'office des bases d'imposition ". Aux termes de l'article L. 69 de ce livre, dans sa rédaction applicable à la présente procédure : " (...) sont taxés d'office à l'impôt sur le revenu les contribuables qui se sont abstenus de répondre aux demandes d'éclaircissements ou de justifications prévues à l'article L. 16 ". Aux termes de l'article L. 76 du même livre, dans sa rédaction applicable à la présente procédure : " Les bases ou éléments servant au calcul des impositions d'office et leurs modalités de détermination sont portées à la connaissance du contribuable trente jours au moins avant la mise en recouvrement des impositions (...) ".

9. Il résulte de l'instruction que les bases d'impositions contestées par les contribuables ont été établies selon la procédure de taxation d'office prévue par l'article L. 69 du livre des procédures fiscales, dont la régularité n'est pas contestée. Ainsi, le caractère suffisant de la motivation de la proposition de rectification du 26 février 2016 qui a été adressée à M. et Mme D... B... doit, par suite, être apprécié au regard des dispositions précitées de l'article L. 76 du livre des procédures fiscales et non des dispositions de l'article L. 57 du même livre qui ne sont applicables que lorsque la procédure de rectification contradictoire est applicable. Or, les dispositions de l'article L. 76 n'exigent pas que la proposition de rectification du 26 février 2016 expose les motifs de droit et de fait ayant conduit le vérificateur à proroger la période d'un an de durée maximale d'examen de la situation fiscale personnelle des requérants. Par ailleurs, s'il est établi que l'administration fiscale a répondu les 24 mars 2015 et 2 octobre 2015 aux observations de M. et Mme D... B... sur les propositions de rectification des 28 novembre 2014 et 22 juillet 2015, le service n'était pas tenu, compte tenu de la mise en œuvre de la procédure de taxation d'office, de répondre aux observations de M. et Mme D... B.... Par suite, les moyens tirés de ce que, d'une part, la proposition de rectification du 26 février 2016 n'a pas motivé la prorogation de la durée du contrôle fiscal et que, d'autre part, l'administration fiscale n'a pas répondu aux observations des requérants sur les propositions de rectification des 28 novembre 2014 et 22 juillet 2015, doivent en tout état de cause être écartés.

S'agissant de la demande de communication des réponses aux observations des contribuables :

10. Aux termes de l'article L. 76 B du livre des procédures fiscales, dans sa rédaction applicable à la présente procédure : " L'administration est tenue d'informer le contribuable de la teneur et de l'origine des renseignements et documents obtenus de tiers sur lesquels elle s'est fondée pour établir l'imposition faisant l'objet de la proposition prévue au premier alinéa de l'article L. 57 ou de la notification prévue à l'article L. 76. Elle communique, avant la mise en recouvrement, une copie des documents susmentionnés au contribuable qui en fait la demande ". Il incombe à l'administration, quelle que soit la procédure d'imposition mise en œuvre, et au plus tard avant la mise en recouvrement, d'informer le contribuable dont elle envisage soit de rehausser, soit d'arrêter d'office les bases d'imposition, de l'origine et de la teneur des renseignements obtenus auprès de tiers qu'elle a utilisés pour fonder les impositions, avec une précision suffisante pour permettre à l'intéressé de demander que les documents qui contiennent ces renseignements soient mis à sa disposition avant la mise en recouvrement des impositions qui en procèdent. Cette obligation ne s'impose à l'administration que pour les renseignements effectivement utilisés pour fonder les rectifications et ne se limite pas aux renseignements et documents obtenus de tiers par l'exercice du droit de communication. Si l'administration peut, en dépit du caractère distinct des procédures d'imposition, légalement utiliser des éléments d'information recueillis par elle chez un autre contribuable, il lui appartient d'indiquer au contribuable la nature, l'origine et la teneur des renseignements obtenus auprès des tiers.

11. M. et Mme D... B... soutiennent que, malgré leur demande formulée le 3 janvier 2018, soit au demeurant après la mise en recouvrement des impositions en litige, le service ne leur a pas communiqué une copie de ses réponses à leurs observations portant sur les propositions de rectification des 28 novembre 2014 et 22 juillet 2015. Toutefois, l'administration fiscale établit, dans la présente instance, que, par un courrier reçu le 21 juin 2018, elle leur a bien adressé une copie de ces documents, lesquels ne constituent d'ailleurs pas des documents obtenus de tiers au sens et pour l'application des dispositions précitées de l'article L. 76 B du livre de procédures fiscales. Par suite, ce moyen doit en tout état de cause être écarté.

En ce qui concerne le bien-fondé des impositions :

S'agissant de la charge de la preuve :

12. Aux termes de l'article L. 192 du livre des procédures fiscales : " (...) / la charge de la preuve incombe (...) / au contribuable (...) en cas de taxation d'office à l'issue d'un examen contradictoire de la situation fiscale personnelle en application des dispositions des articles L. 16 et L. 69 ". M. et Mme D... B..., qui ont fait l'objet d'un examen contradictoire de leur situation fiscale personnelle, ont été taxés d'office à raison de revenus d'origine indéterminée au titre des années 2011 et 2012 en application des dispositions des articles L. 16 et L. 69 du livre des procédures fiscales. Par suite, il leur appartient d'apporter la preuve que les revenus ainsi taxés proviennent d'une quelconque source de profit ou d'activité.

13. Si l'administration ne peut régulièrement taxer d'office, en application de l'article L. 69 du livre des procédures fiscales, les sommes dont elle n'ignore pas qu'elles relèvent d'une catégorie précise de revenus, elle peut en revanche procéder à cette taxation d'office si, au vu des renseignements dont elle disposait avant l'envoi de la demande de justifications fondée sur l'article L. 16 du livre des procédures fiscales et des réponses apportées par le contribuable à cette demande, la nature des sommes en cause, et donc la catégorie de revenus à laquelle elles seraient susceptibles de se rattacher, demeure inconnue. Il est toutefois loisible au contribuable régulièrement taxé d'office sur le fondement de l'article L. 69 du livre des procédures fiscales d'apporter devant le juge de l'impôt la preuve que ces sommes, soit ne constituent pas des revenus imposables, soit se rattachent à une catégorie précise de revenus.

S'agissant du compte portugais n° 003.10255576220 ouvert à la banque Santander Totta :

14. Il résulte de l'instruction, et notamment des pièces produites par M. et Mme D... B..., que les sommes de 2 451,04 euros et 2 491,67 euros créditées respectivement les 15 mars 2011 et 15 septembre 2011, ainsi que celle de 1 125 euros créditée le 7 septembre 2012, sur leur compte portugais n° 003.10255576220, constituent la rémunération de leurs dépôts bancaires dès lors que ces sommes sont inscrites sur les relevés bancaires sous le libellé " calculo dos juros ". Ainsi, les requérants établissent que ces sommes revêtent le caractère d'intérêts bancaires. Par suite, c'est à tort que l'administration fiscale a taxé lesdites sommes, dont l'origine et la nature sont justifiées, en tant que revenus d'origine indéterminée au titre des années 2011 et 2012.

S'agissant du compte portugais n° 000.38080310001 ouvert à la banque Santander Totta :

Quant aux rachats partiels de contrats d'assurance vie :

15. Il résulte de l'instruction, et notamment des pièces produites par M. et Mme D... B..., que ceux-ci ont souscrit auprès de la banque Santander Totta plusieurs contrats d'assurance vie, dont certains étaient encore en cours d'exécution en 2011 et 2012. Ces contrats stipulent que des rachats partiels seront réalisés, à des échéances variables suivant les contrats, par l'apport de sommes inscrites au crédit du compte portugais n° 000.38080310001. Les requérants soutiennent que les sommes globales de 19 723,68 euros et 16 827,13 euros inscrites au crédit de ce compte respectivement en 2011 et 2012 proviennent des rachats partiels de leurs contrats d'assurance vie. Par les états financiers établis par la banque Santander Totta, qui, s'ils ne sont pas nominatifs, mentionnent toutefois le numéro de police ainsi que le capital correspondant à chacun des contrats souscrits par les requérants et permettent ainsi d'identifier les sommes remises en cause par le service, M. et Mme D... B... établissent que les sommes globales de 19 723,68 euros en 2011 et 16 827,13 euros en 2012 trouvent leur origine dans les rachats partiels des contrats d'assurance vie n° 32/000067, n° 32/000068, n° 32/000069, n° 32/000070, n° 32/000071, n° 35/054626, n° 32/026487, n° 32/026488, n° 32/026489, n° 32/026724, n° 32/026725, n° 32/026726, n° 32/026727 et n° 37/012364. Par suite, c'est à tort que l'administration fiscale a taxé ces sommes, dont l'origine et la nature sont justifiées, en tant que revenus d'origine indéterminée au titre des années 2011 et 2012.

Quant aux sommes prélevées sur le compte courant d'associé de la SCI Funchal :

16. Si les sommes inscrites au crédit d'un compte courant d'associé d'une société soumise à l'impôt sur les sociétés ont, par application des dispositions des articles 108 et 109 du code général des impôts, sauf preuve contraire apportée par l'associé titulaire du compte, le caractère de revenus imposables dans la catégorie des revenus de capitaux mobiliers, la même présomption ne joue pas lorsque le compte courant d'associé est ouvert dans une société civile immobilière relevant de l'article 8 du même code. Dans ce cas, les sommes inscrites au crédit d'un compte courant d'associé ont, lorsqu'elles résultent de prélèvements sur les résultats sociaux, le caractère de revenus imposables dans la même catégorie que celle dont relèvent ces résultats.

17. Les requérants soutiennent que, d'une part, les sommes de 25 000 euros, 10 000 euros et 20 000 euros inscrites au crédit de leur compte portugais n° 000.38080310001 respectivement les 8 avril 2011, 27 juillet 2011 et 27 juin 2012, correspondent à des prélèvements effectués par chèques sur le compte courant d'associé de la SCI Funchal, dont ils sont les associés et qui est, selon eux, soumise au régime des sociétés de personnes, et que, d'autre part, les résultats sociaux au titre des exercices clos en 2011 et 2012 ont été imposés en matière d'impôt sur le revenu dans la catégorie des revenus fonciers. Toutefois, il résulte de l'instruction, et n'est d'ailleurs pas contesté, que, lors du contrôle, le service s'est procuré le 12 mai 2014 une copie du compte courant d'associé de la SCI Funchal qui ne fait apparaître aucun mouvement au cours des années d'imposition en litige. Ainsi, M. et Mme D... B... n'apportent pas la preuve que les sommes en litige, qui ne provenaient pas du compte courant d'associé ouvert dans les écritures de la SCI Funchal, revêtiraient le caractère de revenus fonciers. Par suite, c'est à bon droit que l'administration fiscale a taxé les sommes en litige, dont la nature n'est pas justifiée, en tant que revenus d'origine indéterminée au titre des années 2011 et 2012.

Quant aux transferts de compte à compte :

18. Il résulte de l'instruction, et notamment d'une attestation de la banque Santander Totta produite par M. et Mme D... B..., que la somme de 116 150,01 euros inscrite au crédit du compte portugais n° 000.38080310001 le 31 mai 2012 trouve son origine dans un virement de compte à compte dans l'apport provenant du débit du compte à terme n° 003.10319176020 dont M. D... B... était le titulaire. Ainsi, les intéressés apportent la preuve que la somme de 1 150,01 euros ne revêt aucun caractère imposable, l'administration fiscale ayant dégrevé, par une décision du 7 mars 2022, le crédit en litige à hauteur d'une somme de 115 000 euros. Par suite, c'est à tort que l'administration fiscale a taxé la somme de 1 150,01 euros, dont l'origine et la nature sont justifiées, en tant que revenu d'origine indéterminée au titre de l'année 2012.

Quant aux primes versées par la société Brasserie de l'Athénée :

19. M. et Mme D... B... soutiennent que, d'une part, les sommes de 30 000 euros et 6 600 euros inscrites au crédit du compte portugais n° 000.38080310001 respectivement les 27 juillet 2011 et 5 septembre 2012, correspondent à des primes versées par la société " Brasserie de l'Athénée ", dont M. D... B... était le dirigeant et le principal associé, et que, d'autre part, ces sommes sont présumées constitutives de revenus de capitaux mobiliers dès lors qu'elle émane d'une société soumise à l'impôt sur les sociétés. Toutefois, l'administration fiscale fait valoir, sans être contredite, que le contrôle n'a pas mis en évidence que les associés de la société par actions simplifiée " Brasserie de l'Athénée " auraient décidé d'attribuer une prime à M. D... B... au titre des années 2011 et 2012. Par suite, c'est à bon droit que l'administration fiscale a taxé les sommes en litige, dont la nature n'est pas justifiée, en tant que revenus d'origine indéterminée au titre des années 2011 et 2012.

S'agissant des comptes bancaires détenus en France à la BNP, à la BCP et à la Caixa Geral de Depositos :

20. Si M. et Mme D... B... soutiennent que les versements en espèces effectués sur leurs comptes bancaires ouverts en France pour un montant global de 57 590 euros en 2011 et 34 700 euros en 2012, correspondent au solde progressif du compte courant d'associé de M. D... B... ouvert dans les écritures de la société " Brasserie de l'Athénée ", dont il était le dirigeant et l'associé majoritaire, ils n'en justifient pas par les pièces produites dans la présente instance. Par suite, c'est à bon droit que l'administration fiscale a taxé ces sommes, dont l'origine et la nature ne sont pas justifiées, en tant que revenus d'origine indéterminée au titre des années 2011 et 2012.

21. Il résulte de tout ce qui précède que M. et Mme D... B... sont seulement fondés à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Paris a rejeté leur demande tendant à la réduction, en droits et pénalités, des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu et de contributions sociales auxquelles ils ont été assujettis à concurrence d'une somme de 24 666,39 euros au titre de l'année 2011 et d'une somme de 19 102,14 euros au titre de l'année 2012.

En ce qui concerne le surplus des pénalités :

22. En se bornant à soutenir que la pénalité de 40 % qui leur a été infligée sur le fondement de l'article 1729 du code général des impôts au titre des années 2011 et 2012 n'est ni motivée ni justifiée, M. et Mme D... B... n'assortissent leur moyen d'aucune précision permettant d'en apprécier le bien-fondé. Par suite, ce moyen doit être écarté.

Sur les frais liés au litige :

23. Il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de l'Etat une somme de 1 500 euros au titre des frais exposés par M. et Mme D... B... et non compris dans les dépens. En revanche, leurs conclusions tendant à la condamnation de l'Etat au paiement des dépens ne peuvent qu'être rejetées dès lors que la présente instance n'a donné lieu à aucun dépens à la charge des requérants.

D E C I D E :

Article 1er : Il n'y a pas lieu de statuer sur les conclusions de M. et Mme D... B... tendant à la décharge de la cotisation supplémentaire d'impôt sur le revenu à laquelle ils ont été assujettis au titre de l'année 2012 à hauteur des montants dégrevés, en cours d'instance, de 116 837 euros en droits et de 61 691 euros en pénalités.

Article 2 : Il n'y a pas lieu de statuer sur les conclusions de M. et Mme D... B... tendant à la décharge des cotisations supplémentaires de contributions sociales auxquelles ils ont été assujettis au titre de l'année 2012 à hauteur des montants dégrevés, en cours d'instance, de 41 075 euros en droits et de 21 687 euros en pénalités.

Article 3 : La base d'imposition des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu et de contributions sociales auxquelles M. et Mme D... B... ont été assujettis au titre de l'année 2011 est réduite d'une somme de 24 666,39 euros.

Article 4 : M. et Mme D... B... sont déchargés des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu et de contributions sociales auxquelles ils ont été assujettis au titre de l'année 2011 correspondant à la réduction de la base d'imposition définie à l'article 3 ci-dessus, ainsi que des pénalités correspondantes.

Article 5 : La base d'imposition des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu et de contributions sociales auxquelles M. et Mme D... B... ont été assujettis au titre de l'année 2012 est réduite d'une somme de 19 102,14 euros.

Article 6 : M. et Mme D... B... sont déchargés des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu et de contributions sociales auxquelles ils ont été assujettis au titre de l'année 2012 correspondant à la réduction de la base d'imposition définie à l'article 5 ci-dessus, ainsi que des pénalités correspondantes.

Article 7 : Le jugement n° 1813827/1-3 du 7 avril 2021 du Tribunal administratif de Paris est réformé en ce qu'il a de contraire aux articles 3 à 6 du présent arrêt.

Article 8 : L'Etat versera à M. et Mme D... B... une somme de 1 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 9 : Le surplus des conclusions de la requête de M. et Mme D... B... est rejeté.

Article 10 : Le présent arrêt sera notifié à M. C... D... B..., à Mme A... D... B... et au ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique.

Copie en sera adressée au directeur chargé de la direction spécialisée de contrôle fiscal Ile-de-France.

Délibéré après l'audience du 21 février 2023, à laquelle siégeaient :

- M. Jardin, président de chambre,

- Mme Hamon, présidente assesseure,

- M. Desvigne-Repusseau, premier conseiller,

Rendu public par mise à disposition au greffe le 15 mars 2023.

Le rapporteur,

M. DESVIGNE-REPUSSEAU

Le président,

C. JARDIN

La greffière,

C. BUOT

La République mande et ordonne au ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique en ce qui le concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

2

N° 21PA03188


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Paris
Formation : 7ème chambre
Numéro d'arrêt : 21PA03188
Date de la décision : 15/03/2023
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Composition du Tribunal
Président : M. JARDIN
Rapporteur ?: M. Marc DESVIGNE-REPUSSEAU
Rapporteur public ?: Mme BREILLON
Avocat(s) : MADRID

Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.paris;arret;2023-03-15;21pa03188 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award