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01/03/2023 | FRANCE | N°21PA05954

France | France, Cour administrative d'appel de Paris, 2ème chambre, 01 mars 2023, 21PA05954


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. A... B... a demandé au Tribunal administratif de Paris d'annuler l'arrêté du 11 juin 2021 par lequel le préfet de police lui a refusé le renouvellement de son titre de séjour, l'a obligé à quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays de destination.

Par un jugement n° 2115031/1-3 du 20 octobre 2021, le Tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête, enregistrée le 22 novembre 2021, M. B..., rep

résenté par Me Thelma Cariti-Brankov, demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 2115031/...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. A... B... a demandé au Tribunal administratif de Paris d'annuler l'arrêté du 11 juin 2021 par lequel le préfet de police lui a refusé le renouvellement de son titre de séjour, l'a obligé à quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays de destination.

Par un jugement n° 2115031/1-3 du 20 octobre 2021, le Tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête, enregistrée le 22 novembre 2021, M. B..., représenté par Me Thelma Cariti-Brankov, demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 2115031/1-3 du 20 octobre 2021 du Tribunal administratif de Paris ;

2°) d'annuler l'arrêté du 11 juin 2021 du préfet de police ;

3°) d'enjoindre au préfet de police de lui délivrer un titre de séjour portant la mention " salarié " dans un délai d'un mois à compter de la notification de l'arrêt ou, à titre subsidiaire, de réexaminer sa situation dans un délai deux mois, et de le munir dans cette attente d'un récépissé l'autorisant à travailler dans un délai de huit jours à compter de la notification de l'arrêt ;

4°) de l'admettre au bénéfice de l'aide juridictionnelle à titre provisoire ;

5°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 1 200 euros à verser à son conseil sur le fondement combiné des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991, sous réserve qu'il renonce à percevoir la part contributive de l'Etat.

Il soutient que :

- le Tribunal a omis de répondre au moyen tiré de l'erreur manifeste d'appréciation au regard de l'article L. 421-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- l'arrêté méconnaît les dispositions de l'article L. 114-5 du code des relations entre le public et l'administration ;

- il méconnaît les dispositions de l'article L. 421-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- il méconnaît les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- il est entaché d'une erreur manifeste d'appréciation.

Par un mémoire en défense, enregistré le 20 décembre 2022, le préfet de police conclut au rejet de la requête.

Il soutient que les moyens soulevés par le requérant ne sont pas fondés.

Par un courrier du 24 juin 2022, les parties ont été informées, en application de l'article R. 611-7 du code de justice administrative, de ce que la Cour était susceptible de relever d'office le moyen d'ordre public tiré de ce que le préfet de police s'est fondé sur l'article L. 421-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile au lieu de faire application de l'article 3 de l'accord franco-marocain.

Par un mémoire, enregistré le 24 juin 2022, le préfet de police a présenté des observations en réponse au moyen d'ordre public.

Par une ordonnance du 20 décembre 2022, la clôture d'instruction a été fixée au 11 janvier 2023.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- l'accord franco-marocain du 9 octobre 1987 modifié ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- le code des relations entre le public et l'administration ;

- le code du travail ;

- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;

- le code de justice administrative.

Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Le rapport de M. C... a été entendu au cours de l'audience publique.

Considérant ce qui suit :

1. M. B..., ressortissant marocain né le 19 juin 1992, admis au séjour dans le cadre de l'article L. 423-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, a sollicité le renouvellement de son titre de séjour et un changement de statut en qualité de " salarié " sur le fondement des dispositions de l'article L. 421-1 du même code. Par arrêté du 11 juin 2021, le préfet de police lui a refusé le renouvellement de son titre de séjour, lui a fait obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays de destination. M. B... relève appel du jugement du 20 octobre 2021 par lequel le Tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande tendant à l'annulation de cet arrêté.

Sur l'admission provisoire à l'aide juridictionnelle :

2. Aux termes de l'article 18 de la loi du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridictionnelle : " L'aide juridictionnelle peut être demandée avant ou pendant l'instance ". Aux termes de l'article 20 de cette loi : " Dans les cas d'urgence, sous réserve de l'application des règles relatives aux commissions ou désignations d'office, l'admission provisoire à l'aide juridictionnelle peut être prononcée soit par le président du bureau ou de la section compétente du bureau d'aide juridictionnelle, soit par la juridiction compétente ou son président. (...) ".

3. M. B..., déjà représenté par un avocat, ne justifie pas du dépôt d'une demande d'aide juridictionnelle auprès du bureau d'aide juridictionnelle compétent et n'a pas joint à son appel une telle demande. Aucune situation d'urgence ne justifie qu'il soit fait application, en appel, des dispositions de l'article 20 de la loi du 10 juillet 1991. Sa demande d'aide juridictionnelle provisoire ne peut, dans ces conditions, qu'être rejetée.

Sur la régularité du jugement :

4. M. B... soutient que le Tribunal a omis de répondre au moyen tiré de ce que le préfet de police aurait commis une erreur manifeste d'appréciation au regard de l'article L. 421-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. D'une part, il ne ressort pas de sa demande présentée devant le Tribunal qu'il aurait soulevé un tel moyen. D'autre part, et en tout état de cause, les premiers juges n'étaient pas tenus de répondre à ce moyen inopérant dès lors que les dispositions de l'article L. 421-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile dont il se prévaut ne s'appliquent pas aux ressortissants marocains qui sollicitent un titre de séjour pour exercer une activité salariée, régis exclusivement par les stipulations de l'article 3 de l'accord franco-marocain du 9 octobre 1987.

Sur les conclusions à fin d'annulation :

5. Aux termes de l'article 3 de l'accord franco-marocain du 9 octobre 1987 en matière de séjour et d'emploi : " Les ressortissants marocains désireux d'exercer une activité professionnelle salariée en France, pour une durée d'un an au minimum, et qui ne relèvent pas des dispositions de l'article 1er du présent Accord, reçoivent, après le contrôle médical d'usage et sur présentation d'un contrat de travail visé par les autorités compétentes, un titre de séjour valable un an renouvelable et portant la mention " salarié " éventuellement assortie de restrictions géographiques ou professionnelles. / (...) ". Aux termes de l'article 9 du même accord : " Les dispositions du présent Accord ne font pas obstacle à l'application de la législation des deux États sur le séjour des étrangers sur tous les points non traités par l'Accord. / (...) ". Aux termes de l'article L. 421-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " L'étranger qui exerce une activité salariée sous contrat de travail à durée indéterminée se voit délivrer une carte de séjour temporaire portant la mention " salarié " d'une durée maximale d'un an. / La délivrance de cette carte de séjour est subordonnée à la détention préalable d'une autorisation de travail, dans les conditions prévues par les articles L. 5221-2 et suivants du code du travail. / (...) ".

6. Aux termes de l'article R. 5221-2 du code du travail : " Pour entrer en France en vue d'y exercer une profession salariée, l'étranger présente : (...) ; / 2° Un contrat de travail visé par l'autorité administrative ou une autorisation de travail ". Aux termes de l'article L. 5221-5 du même code : " Un étranger autorisé à séjourner en France ne peut exercer une activité professionnelle salariée en France sans avoir obtenu au préalable l'autorisation de travail mentionnée au 2° de l'article L. 5221-2. (...) ". Aux termes de l'article R. 5221-15 de ce même code : " Lorsque l'étranger est déjà présent sur le territoire national, la demande d'autorisation de travail mentionnée à l'article R. 5221-11 est adressée au préfet de son département de résidence ". En vertu de l'article R. 5221-17 du même code : " La décision relative à la demande d'autorisation de travail mentionnée à l'article R. 5221-11 est prise par le préfet. Elle est notifiée à l'employeur ou au mandataire qui a présenté la demande, ainsi qu'à l'étranger ".

7. D'une part, le préfet de police demande à ce que les stipulations précitées de l'article 3 de l'accord franco-marocain du 9 octobre 1987 soient substituées aux dispositions de l'article L. 421-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, non applicables aux ressortissants marocains, sur lesquelles il a fondé à tort le rejet litigieux de la demande de titre de séjour de M. B.... Il y a lieu de procéder à la substitution de base légale demandée dès lors qu'elle n'a pour effet de priver l'intéressé d'aucune garantie et que l'administration dispose du même pouvoir d'appréciation, sur le fondement des dispositions de l'article R. 5221-20 du code du travail.

8. D'autre part, l'accord franco-marocain renvoie, sur tous les points qu'il ne traite pas, à la législation nationale, en particulier aux dispositions pertinentes du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et du code du travail pour autant qu'elles ne sont pas incompatibles avec les stipulations de l'accord et nécessaires à sa mise en œuvre. Il en va notamment ainsi, pour le titre de séjour " salarié " mentionné à l'article 3 de l'accord précité, délivré sur présentation d'un contrat de travail " visé par les autorités compétentes ", des dispositions des articles R. 5221-17 et suivants du code du travail, qui précisent les modalités selon lesquelles et les éléments d'appréciation en vertu desquels le préfet se prononce, au vu notamment du contrat de travail, pour accorder ou refuser une autorisation de travail.

9. En premier lieu, pour refuser de renouveler le titre de séjour de M. B... sous la qualité désormais revendiquée de salarié, le préfet de police a relevé que si le requérant avait produit un contrat de travail et des bulletins de paie de la société NB et EK Le Goût des choses pour occuper un emploi de serveur, il n'avait pas produit d'autorisation de travail. Contrairement à ce que soutient le requérant, en relevant qu'il n'avait pas produit une telle autorisation, le préfet de police n'a pas entendu lui opposer l'incomplétude de son dossier de demande de renouvellement de titre de séjour, mais a constaté qu'il ne détenait pas une autorisation de travail à la date de l'arrêté en litige. Dans ces conditions, le requérant n'est pas fondé à soutenir que le préfet de police aurait méconnu les dispositions de l'article L. 114-5 du code des relations entre le public et l'administration.

10. En deuxième lieu, s'il ressort des pièces du dossier que M. B... a obtenu en 2019 un titre de séjour en qualité de conjoint de ressortissant français, valable jusqu'au 3 juin 2020, il ne conteste pas ne plus remplir les conditions pour le renouvellement de son titre de séjour " vie privée et familiale ", la communauté de vie avec son épouse ayant cessé. Par conséquent, l'autorisation de travail dont il disposait auparavant, afférente à ce titre de séjour en vertu des dispositions précitées du code du travail, n'était plus valable au-delà de la durée de validité de ce titre de séjour ou de ses récépissés de demandes de titre. Par ailleurs, il ressort des pièces du dossier que si le requérant avait conclu un contrat de travail à durée indéterminée sous couvert de cette précédente autorisation de travail, il n'avait en sa possession, pour la délivrance d'un nouveau titre de séjour, aucune autorisation de travail ni demande d'autorisation de travail pour cet emploi et qu'il ne disposait ainsi pas, à la date de la décision attaquée, d'une autorisation de travail en cours de validité délivrée par les services compétents. Le préfet de police pouvait, sur ce seul motif, lui refuser le titre de séjour demandé en qualité de salarié.

11. Enfin, M. B... reprend en appel, à l'identique et sans élément nouveau, le moyen soulevé en première instance tiré de la méconnaissance des stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales. Dans ces conditions, le requérant n'apporte pas d'élément de nature à remettre en cause l'appréciation motivée qui a été portée par le tribunal. Par suite, le moyen doit être écarté par adoption des motifs retenus à bon droit par le tribunal au point 9 de son jugement.

12. Il résulte de tout ce qui précède que M. B... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Paris a rejeté le surplus de sa demande dirigée contre l'arrêté du 11 juin 2021. Il y a lieu, par voie de conséquence, de rejeter sa requête en toutes ses conclusions y compris les conclusions à fins d'injonction et celles présentées sur le fondement de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 et de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

DÉCIDE :

Article 1er : M. B... n'est pas admis à titre provisoire au bénéfice de l'aide juridictionnelle.

Article 2 : Le surplus des conclusions de la requête de M. B... est rejeté.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à M. A... B... et au ministre de l'intérieur et des outre-mer.

Copie en sera adressée au préfet de police.

Délibéré après l'audience du 15 février 2023, à laquelle siégeaient :

- Mme Brotons, président de chambre,

- M. Magnard, premier conseiller,

- M. Segretain, premier conseiller.

Rendu public par mise à disposition au greffe le 1er mars 2023.

Le rapporteur,

A. C...Le président,

I. BROTONS

Le greffier,

C. MONGIS

La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur et des outre-mer en ce qui le concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

2

N° 21PA05954


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Paris
Formation : 2ème chambre
Numéro d'arrêt : 21PA05954
Date de la décision : 01/03/2023
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : Mme BROTONS
Rapporteur ?: Mme Sonia BONNEAU-MATHELOT
Rapporteur public ?: Mme PRÉVOT
Avocat(s) : CARITI-BRANKOV

Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.paris;arret;2023-03-01;21pa05954 ?
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