Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
M. A... B... a demandé au Tribunal administratif de Nouvelle-Calédonie :
1°) d'annuler la décision implicite de rejet, née du silence gardé pendant deux mois par le président de l'assemblée de la province Nord de la Nouvelle-Calédonie sur sa demande du 13 juillet 2020 tendant à la reconstitution de sa carrière, à son affectation sur un poste de directeur adjoint en adéquation avec ses capacités professionnelles, au retrait de la mention de ses activités syndicales dans son dossier administratif et notamment dans son entretien annuel, au versement de l'indemnité de sujétion afférente aux fonctions de chargé de mission à laquelle il a droit, et à l'attribution d'un montant de 2 768 410 francs CFP au titre des pertes de revenus ainsi que d'une somme de 1 500 000 francs CFP en réparation du préjudice moral engendré par la discrimination et le harcèlement dont il a fait l'objet ;
2°) de condamner la province Nord de la Nouvelle-Calédonie à lui verser une somme correspondant au montant de l'indemnité de sujétion afférente aux fonctions de chargé de mission à laquelle il a droit depuis le 18 décembre 2017, date à laquelle le versement de cette prime lui a été illégalement refusé, ainsi qu'une somme totale de 4 268 410 francs CFP destinée à réparer les conséquences dommageables de la discrimination et du harcèlement dont il a fait l'objet en raison de ses activités syndicales.
Par un jugement n° 2000353 du 29 avril 2021, le Tribunal administratif de Nouvelle-Calédonie a condamné la province Nord de la Nouvelle-Calédonie à verser à M. B... une somme correspondant au montant de l'indemnité de sujétion afférente aux fonctions de chargé de mission, égale à 1/12ème de la valeur de 48 points INM, qui lui est due depuis le 18 décembre 2017, sur les bases définies au point 7 de ce jugement, a renvoyé M. B... devant la province Nord de la Nouvelle-Calédonie afin qu'il soit procédé à la liquidation de cette somme, a mis à la charge de la province Nord de la Nouvelle-Calédonie une somme de 150 000 francs CFP au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, et a rejeté le surplus des conclusions de la requête de M. B... ainsi que les conclusions de la province Nord de la Nouvelle-Calédonie présentées au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Procédure devant la Cour :
Par une requête, enregistrée le 29 juin 2021, la province Nord de la Nouvelle-Calédonie, représentée par Me Bras, demande à la Cour :
1°) d'annuler les articles 1er, 2 et 3 de ce jugement du 29 avril 2021 ;
2°) de rejeter la demande présentée par M. B... devant le Tribunal administratif de Nouvelle-Calédonie ;
3°) de mettre à la charge de M. B... une somme de 4 000 euros en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle soutient que :
- la décision du 18 décembre 2017 par laquelle la province Nord de la Nouvelle-Calédonie a refusé de lui attribuer une prime de chargé de mission de direction est devenue définitive faute d'avoir été contestée dans le délai de deux mois, et ne peut plus être remise en cause plus de trois ans après son édiction ;
- M. B... n'établit pas que cette décision serait constitutive d'une sanction déguisée du fait de ses activités syndicales ;
- le Tribunal administratif de Nouvelle-Calédonie ayant jugé que la responsabilité de la province Nord de la Nouvelle-Calédonie n'était pas engagée dès lors que les faits invoqués par M. B..., qui ont conduit, selon lui, à la non-reconduction de ses fonctions en tant que directeur adjoint de la direction du développement économique et de l'environnement, étaient motivés par des considérations étrangères à tout harcèlement moral ainsi qu'à toute discrimination syndicale, ce tribunal, qui n'a pas qualifié la décision du 18 décembre 2017 de sanction déguisée, aurait dû par conséquent rejeter les conclusions de M. B... tendant au versement de la prime de chargé de mission en l'absence de toute illégalité fautive ;
- en tout état de cause, M. B..., qui a été affecté auprès du directeur de l'aménagement et du foncier, ne peut prétendre à cette prime dès lors que son versement n'est qu'une faculté, qu'en vertu des dispositions combinées de l'article 3 de la délibération n° 03/APN du 30 janvier 2009, seuls les chargés de mission affectés auprès du secrétaire général et des secrétaires généraux peuvent bénéficier de cette prime, que M. B... n'a pas été affecté en tant que chargé de mission mais a été mis en charge de missions et qu'enfin, les missions qui lui ont été confiées étaient temporaires et n'étaient pas assimilables à un niveau N-2.
Par un mémoire en défense, enregistré le 4 octobre 2021, M. B..., représenté par la SELARL Reuter-de Raissac-Patet, demande à la Cour :
1°) de rejeter la requête ;
2°) par la voie de l'appel incident :
a) d'annuler l'article 4 du jugement du 29 avril 2021 en tant qu'il rejette ses conclusions tendant au retrait de la mention de ses activités syndicales dans son dossier administratif ainsi que celles tendant à l'octroi de dommages-intérêts au titre des pertes de revenus et au titre du préjudice moral résultant du harcèlement moral dont il a été l'objet ;
b) de condamner la province Nord de la Nouvelle-Calédonie à lui verser une indemnité de 2 768 410 francs CFP en réparation de ses pertes de revenus ;
c) de condamner la province Nord de la Nouvelle-Calédonie à lui verser une indemnité de 1 500 000 francs CFP en réparation du préjudice moral qu'il a subi ;
3°) d'enjoindre à la province Nord de la Nouvelle-Calédonie de procéder à la reconstitution de sa carrière, de l'affecter à un poste de directeur adjoint en adéquation avec ses capacités professionnelles, de retirer de son dossier administratif toute référence à ses activités syndicales ;
4°) de mettre à la charge de la province Nord de la Nouvelle-Calédonie une somme de 250 000 francs CFP en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Il soutient que :
- les moyens soulevés par la province Nord de la Nouvelle-Calédonie ne sont pas fondés ;
- depuis que la province Nord de la Nouvelle-Calédonie ne l'a pas renouvelé dans ses fonctions de directeur adjoint à la direction du développement économique et de l'environnement en 2014, elle a rejeté à six reprises ses candidatures à des postes différents en raison de ses activités syndicales ;
- il justifie des capacités professionnelles nécessaires à l'exercice des fonctions de directeur adjoint à la direction du développement économique et de l'environnement ainsi que pour occuper des postes pour lesquels il a de réelles responsabilités à la hauteur de son évolution de carrière ;
- son éviction du poste de directeur adjoint et le rejet de ses six candidatures ultérieures ont été justifiés par ses activités syndicales ;
- la mention de ses activités syndicales ne doit en aucun cas apparaître dans son dossier administratif, et notamment dans son appréciation générale au titre de l'année 2013, et sa notation professionnelle doit être exclusivement fondée sur sa manière de servir ;
- il a subi un préjudice financier qu'il évalue à hauteur de la somme de 2 768 410 francs CFP correspondant aux rémunérations qu'il aurait dû percevoir en tant que directeur adjoint depuis 2015 ;
- il a subi un préjudice moral qu'il estime à hauteur de la somme de 1 500 000 francs CFP en raison du fait qu'il exerce depuis plus de cinq ans des missions professionnelles qui ne lui correspondent pas et qu'il a ainsi perdu confiance en lui et se sent dévalorisé.
Par un mémoire en réplique, enregistré le 2 mai 2022, la province Nord de la Nouvelle-Calédonie, conclut aux mêmes fins que la requête par les mêmes moyens et au rejet de l'appel incident :
Elle soutient, en outre, que :
- la demande présentée par M. B... devant le Tribunal administratif de Nouvelle-Calédonie et tendant au versement de la prime de chargé de mission de direction est irrecevable dès lors que l'expiration du délai de recours concernant la décision du 18 décembre 2017, dont l'objet est purement pécuniaire, fait obstacle à l'exercice d'un recours en indemnisation du fait de l'illégalité de cette décision ;
- l'appel incident de M. B... est irrecevable dès lors qu'il soulève un litige distinct de celui résultant de l'appel principal et que, par conséquent, l'appel incident constitue en réalité un appel principal formé après l'expiration du délai d'appel ;
- les moyens soulevés à l'appui de l'appel incident ne sont pas fondés.
Par un nouveau mémoire en défense, enregistré le 23 mai 2022, M. B... conclut aux mêmes fins que son précédent mémoire par les mêmes moyens.
Il soutient, en outre, que son appel incident n'est pas irrecevable.
Par un nouveau mémoire en réplique, enregistré le 25 mai 2022, la province Nord de la Nouvelle-Calédonie conclut aux mêmes fins que son précédent mémoire par les mêmes moyens.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- la loi organique n° 99-209 du 19 mars 1999 ;
- la loi du pays n° 2014-9 du 18 février 2014 ;
- l'arrêté n° 1065 du 22 août 1953 ;
- la délibération n° 79 du 22 mai 1985 ;
- la délibération n° 81 du 24 juillet 1990 ;
- la délibération n° 234 du 13 décembre 2006 ;
- la délibération n° 393 du 25 juin 2008 ;
- la délibération n° 74/CP du 12 février 2009 ;
- la délibération n° 2009-03/APN du 30 janvier 2009 ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de M. C...,
- les conclusions de Mme Breillon, rapporteure publique,
- et les observations de Me Benkrid, substituant Me Bras, avocate de la province Nord de la Nouvelle-Calédonie.
Considérant ce qui suit :
1. Il résulte de l'instruction que, par un arrêté du 6 juillet 2011, le président de l'assemblée de la province Nord de la Nouvelle-Calédonie a nommé M. B..., ingénieur 3ème grade du corps des ingénieurs du statut particulier des personnels techniques de la Nouvelle-Calédonie, en tant que directeur adjoint à la direction du développement économique et de l'environnement à compter du 1er juillet 2011. Par un courrier du 30 juin 2014, le même président a informé l'intéressé de son intention de ne pas le renouveler dans ses fonctions qui ont pris fin le 1er novembre 2014. Par une note de service du 31 octobre 2014, M. B... a été affecté temporairement en renfort au service de l'aménagement et de la gestion de l'eau (SAGE) de la direction de l'aménagement et du foncier (DAF) à compter du 1er novembre 2014, puis, par une note de service du 13 avril 2015, l'intéressé a été affecté, à compter du 1er avril 2015, auprès du directeur de l'aménagement et du foncier afin de réaliser diverses missions. La demande du 14 décembre 2017 par laquelle M. B... a sollicité le versement d'une indemnité mensuelle de sujétion à raison des fonctions qu'il exerce depuis le 1er avril 2015, a été rejetée le 18 décembre 2017. Estimant faire l'objet de discrimination et de harcèlement en raison de ses activités syndicales depuis que la province Nord de la Nouvelle-Calédonie a refusé, en 2014, de le renouveler dans les fonctions de directeur adjoint à la direction du développement économique et de l'environnement, M. B... a demandé le 13 juillet 2020 au président de l'assemblée de cette province de reconstituer sa carrière, de l'affecter à un poste de directeur adjoint en adéquation avec ses capacités professionnelles, de retirer la mention de ses activités syndicales qui figure dans son dossier administratif, de lui verser l'indemnité de sujétion afférente aux fonctions de chargé de mission à laquelle il estime avoir droit, et de lui attribuer une somme totale de 4 268 410 francs CFP en vue de réparer les conséquences dommageables de cette discrimination et de ce harcèlement. La province Nord de la Nouvelle-Calédonie fait appel du jugement du 29 avril 2021 en tant que le Tribunal administratif de Nouvelle-Calédonie a fait droit à la demande de M. B... tendant à ce que lui soit versé une indemnité correspondant à l'indemnité de sujétion qui lui est due depuis le 18 décembre 2017.
Sur l'appel principal de la province Nord de la Nouvelle-Calédonie :
En ce qui concerne la recevabilité des conclusions de la demande de M. B... auxquelles le Tribunal administratif de Nouvelle-Calédonie a fait droit :
2. D'une part, le principe de sécurité juridique, qui implique que ne puissent être remises en cause sans condition de délai des situations consolidées par l'effet du temps, fait obstacle à ce que puisse être contestée indéfiniment une décision administrative individuelle qui a été notifiée à son destinataire, ou dont il est établi, à défaut d'une telle notification, que celui-ci a eu connaissance. En une telle hypothèse, si le non-respect de l'obligation d'informer l'intéressé sur les voies et les délais de recours, ou l'absence de preuve qu'une telle information a bien été fournie, ne permet pas que lui soient opposés les délais de recours fixés par le code de justice administrative, le destinataire de la décision ne peut exercer de recours juridictionnel au-delà d'un délai raisonnable. En règle générale et sauf circonstances particulières dont se prévaudrait le requérant, ce délai ne saurait, sous réserve de l'exercice de recours administratifs pour lesquels les textes prévoient des délais particuliers, excéder un an à compter de la date à laquelle une décision expresse lui a été notifiée ou de la date à laquelle il est établi qu'il en a eu connaissance. Cette règle, qui a pour seul objet de borner dans le temps les conséquences de la sanction attachée au défaut de mention des voies et délais de recours, ne porte pas atteinte à la substance du droit au recours, mais tend seulement à éviter que son exercice, au-delà d'un délai raisonnable, ne mette en péril la stabilité des situations juridiques et la bonne administration de la justice, en exposant les défendeurs potentiels à des recours excessivement tardifs. Il appartient dès lors au juge administratif d'en faire application au litige dont il est saisi, quelle que soit la date des faits qui lui ont donné naissance.
3. D'autre part, l'expiration du délai permettant d'introduire un recours en annulation contre une décision expresse dont l'objet est purement pécuniaire fait obstacle à ce que soient présentées des conclusions indemnitaires ayant la même portée.
4. Si la province Nord de la Nouvelle-Calédonie fait valoir que M. B... a eu connaissance de la décision du 18 décembre 2017 refusant de lui attribuer l'indemnité mensuelle de sujétion prévue par la délibération n° 393 du 25 juin 2008 relative au régime indemnitaire des personnels d'encadrement et assimilés, dès le mois de janvier 2018 en constatant sur son bulletin de paie que l'indemnité sollicitée ne lui avait pas été versée, cette circonstance n'est pas par elle-même suffisante pour attester d'une telle connaissance. En revanche, il résulte de l'instruction que M. B... n'a fait état de la décision du 18 décembre 2017, qui a un objet exclusivement pécuniaire, qu'à l'appui de sa réclamation indemnitaire formée le 13 juillet 2020. Ainsi, l'intéressé doit être regardé comme n'ayant eu connaissance de cette décision que le 13 juillet 2020. Par conséquent, contrairement à ce que fait valoir la province Nord de la Nouvelle-Calédonie, cette décision, qui ne comportait pas la mention des voies et délais de recours, n'était pas devenue définitive à la date d'enregistrement de la demande de M. B... présentée devant le Tribunal administratif de Nouvelle-Calédonie, soit le 22 octobre 2020. Par suite, la province Nord de la Nouvelle-Calédonie n'est pas fondée à soutenir que les conclusions de première instance de M. B... tendant à ce qu'elle soit condamnée à lui verser une somme représentative d'un arriéré d'indemnités de sujétion, qui sont fondées sur l'illégalité de la décision initiale du 18 décembre 2017, seraient irrecevables.
En ce qui concerne le bien-fondé du jugement attaqué :
5. Aux termes de l'article 1er de la délibération du congrès n° 393 du 25 juin 2008 relative au régime indemnitaire des personnels d'encadrement et assimilés : " Les agents exerçant dans les services et directions (...) des provinces (...) des fonctions entraînant une sujétion spécifique liée à l'encadrement de personnels, peuvent bénéficier d'indemnités, telles que prévues par la présente délibération, dans la limite des montants prévus par la présente délibération en fonction de leur niveau hiérarchique / (...) ". Aux termes de l'article 2 de cette délibération : " Chacune des indemnités prévues aux articles suivants peut être versée, dans la limite des montants prévus par la présente délibération, dans chaque collectivité ou établissement public, visés par l'article 1er, en application : / (...) / - d'une délibération de l'assemblée délibérante, s'agissant (...) des assemblées de province / (...) ". Aux termes de l'article 4 de la même délibération : " Les personnels visés à l'article 1er peuvent bénéficier d'une indemnité mensuelle de sujétion dans la limite des plafonds suivants : / Niveaux hiérarchiques : / (...) / N-2 / Indemnité [Le montant maximal de l'indemnité mensuelle de sujétion est égal au 1/12ème de la valeur du nombre de points d'indice nouveau majoré de la grille locale des traitements convertie en monnaie locale et affectée d'un coefficient de majoration applicable aux fonctionnaires territoriaux] : / (...) / 48 / (...) / Le niveau hiérarchique N correspond : / - pour (...) les provinces (...) : aux agents responsables d'une entité organisationnelle réglementairement constituée, placés sous l'autorité directe du secrétaire général, du secrétaire général adjoint, du directeur général des services de la collectivité / (...). ". Aux termes de l'article 5 de la même délibération : " Chaque collectivité (...) définit, dans les limites posées par la présente délibération : / - la correspondance entre le niveau hiérarchique et la dénomination des fonctions / - le montant de l'indemnité attribué à chaque niveau hiérarchique ". Aux termes de son article 7 : " Les personnels exerçant les fonctions de chargé de mission : / (...) / 2- auprès d'un responsable classé au niveau N peuvent bénéficier d'une indemnité dans la limite du montant versé pour un agent placé au niveau hiérarchique N-2. ".
6. Aux termes de l'article 2 de la délibération n° 2009-03/APN du 30 janvier 2009 portant application au sein de la province Nord de la délibération de congrès n° 393 du 25 juin 2008 relative au régime indemnitaire des personnels d'encadrement et assimilés et de la délibération n° 64/CP du 17 novembre 2008 relative au régime indemnitaire lié à l'exercice de certains emplois fonctionnels de la Nouvelle-Calédonie : " En application de l'article 2 de la délibération du 25 juin 2008 susvisée, le montant de l'indemnité de sujétion est égal à 1/12e de la valeur du nombre de points d'indice nouveau majoré de la grille locale des traitements converti en monnaie locale, fixé pour chaque niveau hiérarchique, et affecté d'un coefficient de majoration applicable aux fonctionnaires territoriaux : (...) - N - 2 : 48 / (...) ". Aux termes de l'article 5 de cette délibération : " En application de l'article 5 de la délibération du 25 juin 2008 susvisée, la correspondance entre les niveaux hiérarchiques est définie de la manière suivante : / - N : directeur ; / - N - 1 : directeur adjoint et chargé de mission auprès du secrétaire général et des secrétaires généraux adjoints ; / - N - 2 : chef de service. ".
7. Il résulte de la combinaison des dispositions précitées que les personnels exerçant, au sein de l'administration de la province Nord de la Nouvelle-Calédonie, des fonctions de chargé de mission auprès d'un directeur bénéficient d'une indemnité mensuelle de sujétion dont le montant est égal à 1/12ème de la valeur du nombre de points d'indice nouveau majoré (INM) de la grille locale des traitements converti en monnaie locale, fixé pour les personnels exerçant, au sein de la même administration, des fonctions de chef de service.
8. Ainsi qu'il a été dit au point 1, M. B... a été directement rattaché auprès du directeur de l'aménagement et du foncier à partir du 1er avril 2015 afin d'effectuer, à la demande de ce directeur, " [le] pilotage du projet de service de la [DAF] ", " [le] pilotage des procédures [de cette direction] ", ainsi que " l'établissement d'un livret d'accueil [au sein de la même direction] ". Il résulte également de l'instruction que sa fiche de poste, telle qu'elle résulte de l'entretien annuel d'échange au titre de l'année 2019, est intitulée " chargé de mission auprès de la DAF ", et indique que ces fonctions consistent à réaliser, auprès du directeur de l'aménagement et du foncier, " [des] opérations ou missions internes ou externes relevant de la [DAF] ". Ainsi, M. B... doit être regardé comme étant au nombre des " personnels exerçant [des] fonctions de chargé de mission " au sens et pour l'application de l'article 7 de la délibération n° 393 du 25 juin 2008 précitée, sans qu'y fassent obstacle les circonstances invoquées par la province Nord de la Nouvelle-Calédonie selon lesquelles il n'avait été affecté que " temporairement " à la DAF et que la note de service qui l'affecte " ne le nomme pas comme " chargé de missions " mais " en charge de missions " ce qui est différent ", dès lors que la délibération n° 393 du 25 juin 2008 précitée ne fait pas du caractère temporaire ou permanent de l'affectation un critère d'attribution de l'indemnité en cause et qu'au-delà de la différence de formulation, les termes de " chargé de mission " et de personne " en charge de missions " sont synonymes et recouvrent une même réalité. Il résulte de l'instruction que M. B... était affecté auprès d'un directeur de l'administration de la province Nord de la Nouvelle-Calédonie, c'est-à-dire auprès d'un responsable classé au niveau N selon l'article 5 de la délibération n° 2009-03/APN du 30 janvier 2009. L'intéressé a ainsi droit, à compter de la date qu'il demande, à savoir le 18 décembre 2017, au bénéfice de l'indemnité mensuelle de sujétion égale à 1/12ème de la valeur de 48 points INM prévue par la délibération n° 393 du 25 juin 2008 et la délibération n° 2009-03/AN du 30 janvier 2009.
9. Il résulte de ce qui précède que la province Nord de la Nouvelle-Calédonie n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par les articles 1er et 2 du jugement attaqué, le Tribunal administratif de Nouvelle-Calédonie l'a condamnée à verser à M. B... une somme correspondant au montant de l'indemnité de sujétion afférente aux fonctions de chargé de mission, égale à 1/12ème de la valeur de 48 points INM, qui lui est due depuis le 18 décembre 2017, sur les bases définies au point 7 de ce jugement, et a renvoyé M. B... devant elle afin qu'il soit procédé à la liquidation de cette indemnité.
En ce qui concerne les conclusions dirigées contre la condamnation de la province Nord de la Nouvelle-Calédonie prononcée au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :
10. La province Nord de la Nouvelle-Calédonie, qui demande également l'annulation de l'article 3 du jugement attaqué par lequel le Tribunal administratif de Nouvelle-Calédonie l'a condamnée à payer à M. B... la somme de 150 000 francs CFP au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, ne fournit toutefois aucun élément de nature à remettre en cause l'évaluation du montant des frais exposés en première instance retenu par les premiers juges. Par suite, ces conclusions ne peuvent qu'être rejetées.
Sur l'appel incident de M. B... :
11. Un appel incident est recevable, sans condition de délai, s'il ne soumet pas au juge un litige distinct de celui soulevé par l'appel principal. Il ressort des pièces du dossier que l'appel principal de la province Nord de la Nouvelle-Calédonie est seulement dirigé contre les articles 1er, 2 et 3 du jugement attaqué, relatifs respectivement à sa condamnation de verser à M. B... une somme correspondant au montant de l'indemnité de sujétion afférente aux fonctions de chargé de mission, au renvoi de M. B... devant elle afin qu'il soit procédé à la liquidation de cette indemnité et à la charge des frais non compris dans les dépens. L'appel incident de M. B... tend, d'une part, à l'annulation de l'article 4 de ce jugement, qui rejette ses conclusions tendant au retrait de la mention de ses activités syndicales dans son dossier administratif ainsi que celles tendant à l'octroi de dommages-intérêts au titre des pertes de revenus et au titre du préjudice moral résultant du harcèlement moral dont il dit avoir été l'objet et, d'autre part, à ce qu'il soit fait droit à ses conclusions indemnitaires. Dès lors, cet appel incident soulève un litige distinct de celui faisant l'objet de l'appel principal de la province Nord de la Nouvelle-Calédonie. Par ailleurs, cet appel, qui doit être ainsi regardé comme un appel principal, est tardif dès lors qu'il ressort des pièces du dossier qu'il a été présenté plus de deux mois après la notification à M. B..., le 4 mai 2021, du jugement attaqué. Par suite, ainsi que la province du Nord de la Nouvelle-Calédonie le fait valoir, l'appel de M. B... n'est pas recevable. Dès lors, cet appel et, par voie de conséquence, les conclusions de M. B... à fin d'injonction, doivent être rejetés.
Sur les frais liés au litige :
12. Il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de rejeter les conclusions des parties présentées au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
DÉCIDE :
Article 1er : La requête de la province Nord de la Nouvelle-Calédonie est rejetée.
Article 2 : Les conclusions de M. B... présentées par la voie de l'appel incident, ses conclusions à fin d'injonction ainsi que celles présentées au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.
Article 3 : Le présent arrêt sera notifié au président de l'assemblée de la province Nord de la Nouvelle-Calédonie et à M. A... B....
Copie en sera adressée au haut-commissaire de la République en Nouvelle-Calédonie.
Délibéré après l'audience du 24 janvier 2023, à laquelle siégeaient :
- M. Jardin, président de chambre,
- M. Segrétain, premier conseiller,
- M. Desvigne-Repusseau, premier conseiller,
Rendu public par mise à disposition au greffe le 14 février 2023.
Le rapporteur,
M. DESVIGNE-REPUSSEAULe président,
C. JARDIN
La greffière,
L. CHANA
La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur et des outre-mer en ce qui le concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
N° 21PA03600 2