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10/02/2023 | FRANCE | N°22PA03508

France | France, Cour administrative d'appel de Paris, 4ème chambre, 10 février 2023, 22PA03508


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. C... B... a demandé au tribunal administratif de Montreuil, d'une part, d'annuler l'arrêté du 27 août 2021 par lequel le préfet de la Seine-Saint-Denis a refusé de lui renouveler son titre de séjour, l'a obligé à quitter le territoire français dans le délai de trente jours et a fixé le pays à destination duquel il pourra être éloigné à l'expiration de ce délai, d'autre part, d'enjoindre au préfet de lui délivrer une carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " o

u, à défaut, " salarié ", sous astreinte de 100 euros par jour de retard, ou, à défa...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. C... B... a demandé au tribunal administratif de Montreuil, d'une part, d'annuler l'arrêté du 27 août 2021 par lequel le préfet de la Seine-Saint-Denis a refusé de lui renouveler son titre de séjour, l'a obligé à quitter le territoire français dans le délai de trente jours et a fixé le pays à destination duquel il pourra être éloigné à l'expiration de ce délai, d'autre part, d'enjoindre au préfet de lui délivrer une carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " ou, à défaut, " salarié ", sous astreinte de 100 euros par jour de retard, ou, à défaut, de réexaminer sa situation dans le délai d'un mois à compter de la notification du jugement à intervenir, sous la même astreinte, et, dans l'attente de ce réexamen, de lui délivrer une autorisation provisoire de séjour l'autorisant à travailler, enfin, de mettre à la charge de l'Etat le versement de la somme 2 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Par un jugement n° 2113551 du 29 juin 2022, le tribunal administratif de Montreuil a rejeté sa demande.

Procédure devant la Cour :

I. Par une requête et un mémoire, enregistrés sous le n° 22PA03508 le 27 juillet 2022 et le 23 janvier 2023, M. B..., représenté par Me Langlois, demande à la Cour :

1°) d'annuler ce jugement ;

2°) d'annuler, pour excès de pouvoir, cet arrêté ;

3°) d'enjoindre au préfet de la Seine-Saint-Denis de lui délivrer une carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " ou, à défaut, " salarié ", sous astreinte de 100 euros par jour de retard, ou, à défaut, de réexaminer sa situation dans le délai d'un mois à compter de la notification du jugement à intervenir, sous la même astreinte, et, dans l'attente de ce réexamen, de lui délivrer une autorisation provisoire de séjour l'autorisant à travailler ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 2 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Il soutient que :

- le jugement attaqué, qui est insuffisamment motivé et omet de répondre au moyen tiré de l'erreur de fait et de la méconnaissance des dispositions de l'article L. 114-5 du code des relations entre le public et l'administration, est entaché d'irrégularité ;

- la décision portant refus de renouvellement de titre de séjour est insuffisamment motivée ;

- elle est entachée d'un défaut de consultation préalable de la commission du titre de séjour en application de l'article L. 435-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- elle est entachée d'un défaut d'examen particulier de sa situation personnelle ;

- elle est entachée d'une erreur de droit dès lors que le préfet a méconnu l'étendue de sa compétence en refusant de régulariser sa situation au regard du séjour ;

- elle est entachée d'erreurs de fait ;

- elle méconnaît les dispositions de l'article L. 421-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- elle est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation au regard des dispositions de l'article L. 435-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- elle méconnaît les dispositions de la circulaire du 28 novembre 2012 dont il peut se prévaloir en application de l'article L. 312-3 du code des relations entre le public et l'administration ;

- elle méconnaît les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- elle est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation de ses conséquences sur sa situation personnelle ;

- la décision portant obligation de quitter le territoire français est illégale par voie de conséquence de l'illégalité de la décision portant refus de renouvellement de titre de séjour ;

- elle est intervenue au terme d'une procédure irrégulière au regard des dispositions des articles R. 611-1 et R. 611-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- elle est entachée d'un défaut d'examen particulier de sa situation personnelle ;

- elle est entachée d'une erreur de droit dès lors que le préfet s'est estimé, à tort, en situation de compétence liée pour prendre une telle mesure ;

- elle méconnaît les dispositions du 9° de l'article L. 611-3 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- elle méconnaît les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- elle est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation de ses conséquences sur sa situation personnelle ;

- la décision fixant le délai de départ volontaire est illégale par voie de conséquence de l'illégalité des décisions portant refus de renouvellement de titre de séjour et obligation de quitter le territoire français ;

- elle est entachée d'un défaut de motivation ;

- elle est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation de ses conséquences sur sa situation personnelle ;

- la décision fixant le pays de destination est illégale par voie de conséquence de l'illégalité des décisions portant refus de renouvellement de titre de séjour et obligation de quitter le territoire français ;

- elle est entachée d'un défaut de motivation ;

- elle méconnaît les stipulations de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et les dispositions de l'article L. 721-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile.

Par un mémoire en défense, enregistré le 12 janvier 2023, le préfet de la Seine-Saint-Denis conclut au rejet de la requête.

Il soutient que :

- M. B... ne peut utilement se prévaloir des dispositions de l'article L. 435-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, ni, en tout état de cause, de celles de la circulaire du 28 novembre 2012 du ministre de l'intérieur ;

- les autres moyens soulevés par le requérant ne sont pas fondés.

II. Par une requête et un mémoire, enregistrés sous le n° 22PA04508 le 18 octobre 2022 et le 23 janvier 2023, M. B..., représenté par Me Langlois, demande au juge des référés de la cour, statuant sur le fondement des dispositions de l'article L. 521-1 du code de justice administrative :

1°) de suspendre l'exécution de l'arrêté du 27 août 2021 ;

2°) d'enjoindre au préfet de la Seine-Saint-Denis de lui délivrer un récépissé ou une autorisation de séjour l'autorisant à travailler, sous astreinte de 100 euros par jour de retard ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 2 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Il soutient que la condition d'urgence est remplie et que les moyens susvisés sont propres à créer, en l'état de l'instruction, un doute sérieux quant à la légalité des décisions attaquées.

Par un mémoire en défense, enregistré le 12 janvier 2023, le préfet de la Seine-Saint-Denis conclut au rejet de la requête.

Il soutient que les conditions prévues par les articles R. 811-15 et R. 811-17 du code de justice administrative ne sont pas réunies.

Vu les autres pièces des dossiers.

Vu :

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- le code des relations entre le public et l'administration ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. d'Haëm, rapporteur,

- les conclusions de Mme Jayer, rapporteure publique,

- et les observations de Me Langlois, avocate de M. B....

Considérant ce qui suit :

1. Les requêtes nos 22PA03508 et 22PA04508 de M. B... présentent à juger des questions semblables et ont fait l'objet d'une instruction commune. Il y a lieu de les joindre pour statuer par un seul arrêt.

Sur les conclusions de la requête n° 22PA03508 :

2. M. B..., ressortissant malien, né le 20 juin 1968 et entré en France le 22 mai 2011, s'est vu délivrer une carte de séjour temporaire pour raisons médicales, valable du 21 décembre 2015 au 20 décembre 2016. Par un arrêté du 30 janvier 2018, le préfet de la Seine-Saint-Denis a refusé de lui renouveler son titre de séjour et l'a obligé à quitter le territoire français. Par un jugement n° 1801540 du 5 novembre 2018, le tribunal administratif de Montreuil a annulé cet arrêté et enjoint au préfet de réexaminer la demande de M. B.... Celui-ci s'est vu délivrer une carte de séjour temporaire portant la mention " salarié ", valable du 24 décembre 2019 au 23 décembre 2020, et en a sollicité le renouvellement le 3 novembre 2020. Par un arrêté du 27 août 2021, le préfet de la Seine-Saint-Denis a refusé de lui renouveler son titre de séjour, l'a obligé à quitter le territoire français dans le délai de trente jours et a fixé le pays à destination duquel il pourra être éloigné à l'expiration de ce délai. M. B... fait appel du jugement du 29 juin 2022 par lequel le tribunal administratif de Montreuil a rejeté sa demande tendant à l'annulation de cet arrêté.

En ce qui concerne la régularité du jugement attaqué :

3. Contrairement à ce que soutient le requérant, le tribunal administratif, qui a considéré, au point 5 du jugement attaqué, qu'il ressortait des pièces produites en défense par le préfet que M. B... avait accusé réception du courrier du 1er décembre 2020 des services préfectoraux lui demandant de produire des pièces complémentaires pour l'instruction de sa demande, a ainsi répondu, par une motivation suffisante, au moyen tiré de ce que M. B... n'aurait pas été destinataire de ce courrier et qu'en conséquence, la décision attaquée portant refus de renouvellement de son titre de séjour serait entachée d'une erreur de fait. Par ailleurs, si, dans son mémoire complémentaire enregistré devant le tribunal administratif le 14 juin 2022, M. B... a également fait référence, à l'appui de ce moyen, aux dispositions de l'article L. 114-5 du code des relations entre le public et l'administration, il s'est borné à contester la valeur probante des pièces produites par le préfet en défense, argumentation que le tribunal a écartée au point 5 du jugement en estimant établie la réception par l'intéressé du courrier du 1er décembre 2020. Par suite, le moyen tiré de ce que ce que le jugement serait entaché d'irrégularité doit être écarté.

En ce qui concerne la légalité de la décision portant refus de renouvellement de titre de séjour :

4. En premier lieu, la décision attaquée, qui vise, notamment, les dispositions de l'article L. 421-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, mentionne que M. B... a sollicité le 3 novembre 2020 le renouvellement de sa carte de séjour temporaire en qualité de salarié et indique " que la demande de pièces complémentaires adressée à l'intéressé le 1er décembre 2020, et dont les éléments devaient parvenir au plus tard le 18 décembre 2020, est restée sans réponse à ce jour ", de sorte que l'intéressé ne peut prétendre au renouvellement de son titre en qualité de salarié. Elle fait état également de ce que l'intéressé, célibataire et sans charge de famille, ne justifie pas en France, d'une situation personnelle et familiale à laquelle la présente décision porterait une atteinte disproportionnée au regard du but poursuivi. Par ailleurs, si M. B... soutient que cette décision ne vise pas les dispositions des articles L. 425-9 et L. 435-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ou ne mentionne pas son état de santé, ni la durée de son séjour en France ou encore son insertion professionnelle, il ne ressort pas des pièces du dossier que M. B... aurait sollicité, lors de sa demande de renouvellement de son titre de séjour en qualité de salarié, la délivrance d'un titre de séjour sur le fondement de ces dispositions. Par suite, la décision contestée, qui comporte l'énoncé des considérations de droit et de fait qui la fondent, est suffisamment motivée.

5. En deuxième lieu, il résulte de ce qui précède que M. B... n'ayant pas sollicité, lors de sa demande de renouvellement de son titre de séjour en qualité de salarié, la délivrance d'un titre de séjour sur le fondement des dispositions de l'article L. 435-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, il ne peut utilement faire valoir que, dès lors qu'il justifie résider habituellement en France depuis plus de dix ans, le préfet aurait dû préalablement saisir la commission du titre de séjour en application de ces dispositions.

6. En troisième lieu, aux termes de l'article L. 421-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " L'étranger qui exerce une activité salariée sous contrat de travail à durée indéterminée se voit délivrer une carte de séjour temporaire portant la mention " salarié " d'une durée maximale d'un an. / La délivrance de cette carte de séjour est subordonnée à la détention préalable d'une autorisation de travail, dans les conditions prévues par les articles L. 5221-2 et suivants du code du travail. / Par dérogation aux dispositions de l'article L. 433-1, elle est prolongée d'un an si l'étranger se trouve involontairement privé d'emploi. Lors du renouvellement suivant, s'il est toujours privé d'emploi, il est statué sur son droit au séjour pour une durée équivalente à celle des droits qu'il a acquis à l'allocation d'assurance mentionnée à l'article L. 5422-1 du code du travail ".

7. D'une part, il ne ressort pas des pièces du dossier que le préfet n'aurait pas procédé à un examen particulier de la situation de M. B... avant de rejeter sa demande de renouvellement de son titre de séjour en qualité de salarié, alors que, de surcroît, il l'a invité, par un courrier du 1er décembre 2020, à compléter son dossier en produisant le " pack employeur " de son nouvel employeur, ou qu'il aurait méconnu l'étendue de sa compétence en refusant de lui renouveler son titre de séjour en l'absence de réponse de l'intéressé.

8. D'autre part, M. B... ne saurait sérieusement soutenir qu'il n'aurait jamais été destinataire de cette demande de pièces complémentaires, alors qu'il ressort des pièces produites par le préfet que ce courrier du 1er décembre 2020, adressé par lettre recommandée avec avis de réception, a été présenté à la dernière adresse connue de l'intéressé le 15 décembre 2020 et que le pli a été retiré le 19 décembre suivant par l'intéressé qui a signé l'avis de réception. Par suite, le moyen tiré de l'erreur de fait qui entacherait la décision attaquée, doit être écarté.

9. Enfin, si M. B... fait valoir qu'employé en qualité d'agent de service, sous contrat à durée déterminée, par la société " PEI Paris " du 4 novembre 2019 au 8 décembre 2019 et par la société " Atalian " du 1er novembre 2019 au 31 décembre 2019, il a été involontairement privé d'emploi au terme de ces contrats, il ressort des pièces du dossier qu'à la date de la décision attaquée, il bénéficiait d'un contrat de travail à durée indéterminée, en qualité d'agent de propreté, auprès de la société " Pullita ". Par suite, le moyen tiré de ce qu'à cette date, il se serait trouvé involontairement privé d'emploi et que son titre de séjour aurait alors dû être prolongé d'un an en application des dispositions de l'article L. 421-1 précité, ne peut être qu'écarté.

10. En quatrième lieu, ainsi qu'il a été dit au point 4, il ne ressort pas des pièces du dossier que M. B... aurait sollicité, lors de sa demande de renouvellement de son titre de séjour en qualité de salarié, la délivrance d'un titre de séjour sur le fondement des dispositions de l'article L. 435-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. Par suite, il ne peut utilement faire valoir qu'en refusant de renouveler son titre de séjour, le préfet aurait commis une erreur manifeste d'appréciation de sa situation au regard de ces dispositions.

11. En cinquième lieu, en instituant le mécanisme de garantie de l'article L. 312-3 du code des relations entre le public et l'administration, le législateur n'a pas permis de se prévaloir d'orientations générales dès lors que celles-ci sont définies pour l'octroi d'une mesure de faveur au bénéfice de laquelle l'intéressé ne peut faire valoir aucun droit, alors même qu'elles ont été publiées sur l'un des sites mentionnés à l'article D. 312-11 du même code. Dès lors qu'un étranger ne détient aucun droit à l'exercice par le préfet de son pouvoir de régularisation, il ne peut utilement se prévaloir, sur le fondement de ces dispositions, des orientations générales contenues dans la circulaire du ministre de l'intérieur du 28 novembre 2012 pour l'exercice de ce pouvoir. Par suite et en tout état de cause, le moyen tiré de la méconnaissance de cette circulaire est inopérant.

12. En dernier lieu, aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " 1. Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale (...). / 2. Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale ou à la protection des droits et libertés d'autrui ".

13. M. B... se prévaut de la durée de son séjour en France depuis le 22 mai 2011 ainsi que de son insertion professionnelle depuis au moins l'année 2015 et fait valoir qu'il a fixé le centre de ses intérêts dans ce pays, que son frère y réside, que ses parents sont décédés et qu'il n'a plus d'attaches au Mali. Il se prévaut également de son état de santé et soutient qu'un défaut de prise en charge médicale pourrait avoir, pour lui, des conséquences d'une exceptionnelle gravité et qu'il ne peut bénéficier effectivement d'un traitement et d'un suivi appropriés dans son pays d'origine. Toutefois, en produisant un certain nombre de contrats de travail à durée déterminée ou indéterminée, en qualité d'agent de service ou d'agent de propreté, auprès de plus d'une dizaine d'entreprises différentes ainsi que des bulletins de salaire et des certificats de travail pour la période comprise entre l'année 2015 et l'année 2021, le requérant ne saurait être regardé comme justifiant d'une insertion professionnelle ancienne et stable sur le territoire, ni d'une qualification professionnelle spécifique ou particulière. En outre, M. B... n'établit pas davantage que son état de santé justifierait son admission au séjour en France. En particulier, si l'intéressé fait valoir qu'il souffre d'hypertension artérielle, d'épigastralgies chroniques et d'hypercholestérolémie et qu'il bénéficie d'un traitement comportant, notamment, un bêtabloquant, le Temerit, et un hypolipidémiant, l'Atorvastatine, qui ne sont pas disponibles dans son pays d'origine, ni les données générales fournies par le requérant sur le système de santé et les offres de soins prévalant au Mali, ni les certificats médicaux qu'il produit, notamment celui établi le 5 novembre 2021 par un médecin généraliste, rédigé en des termes succincts, ne permettent d'établir, en l'absence d'éléments précis, objectifs et récents sur la nature, l'étiologie, la gravité et l'évolution des pathologies de l'intéressé, qu'un défaut de prise en charge médicale pourrait entraîner, pour lui, des conséquences d'une exceptionnelle gravité, ni, en tout état de cause, qu'un traitement et un suivi appropriés à ses pathologies seraient indisponibles dans son pays d'origine. De même, si M. B... fait valoir qu'il souffre d'un syndrome féromo-patellaire, il ressort des pièces du dossier que l'intéressé a bénéficié en 2013 d'une opération du genou gauche à raison de ce syndrome. Sur ce point, le requérant se borne à verser un certificat médical établi le 10 avril 2018 par un chirurgien orthopédique, envisageant une viscosupplémentation qui " pourrait soulager les douleurs " articulaires de l'intéressé, qui ne saurait permettre de démontrer qu'un défaut de prise en charge médicale pourrait avoir, pour lui, des conséquences d'une exceptionnelle gravité. Par ailleurs, si M. B... fait état de la présence en France de son frère, il n'établit pas, ni même n'allègue, que sa présence auprès de lui revêtirait pour lui un caractère indispensable et n'apporte, de plus, aucun élément précis sur les autres liens de toute nature qu'il aurait noués en France. Enfin, le requérant n'établit, ni n'allègue sérieusement aucune circonstance particulière de nature à faire obstacle à ce qu'il poursuive normalement sa vie à l'étranger et, en particulier, au Mali où il ne démontre pas qu'il serait dépourvu de toute attache et où lui-même a vécu jusqu'à l'âge de quarante-deux ans. Ainsi, compte tenu de l'ensemble des circonstances de l'espèce, la décision en litige n'a pas porté au droit de M. B... au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée par rapport aux buts en vue desquels cette mesure a été prise. Par suite, le moyen tiré de la méconnaissance des stipulations précitées doit être écarté. Pour les mêmes motifs, le moyen tiré de l'erreur manifeste dans l'appréciation des conséquences de cette décision sur la situation personnelle de l'intéressé doit être également écarté.

En ce qui concerne la légalité de la décision portant obligation de quitter le territoire français :

14. En premier lieu, il résulte de ce qui précède que le moyen tiré de ce que la décision portant obligation de quitter le territoire français doit être annulée par voie de conséquence de l'annulation de la décision portant refus de renouvellement de titre de séjour, ne peut qu'être écarté.

15. En deuxième lieu, aux termes de l'article L. 611-3 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Ne peuvent faire l'objet d'une décision portant obligation de quitter le territoire français : / (...) 9° L'étranger résidant habituellement en France si son état de santé nécessite une prise en charge médicale dont le défaut pourrait avoir pour lui des conséquences d'une exceptionnelle gravité et si, eu égard à l'offre de soins et aux caractéristiques du système de santé du pays de renvoi, il ne pourrait pas y bénéficier effectivement d'un traitement approprié (...) ". Aux termes de l'article R. 611-1 du même code : " Pour constater l'état de santé de l'étranger mentionné au 9° de l'article L. 611-3, l'autorité administrative tient compte d'un avis émis par un collège de médecins à compétence nationale de l'Office français de l'immigration et de l'intégration (...) ". Aux termes de l'article R. 611-2 de ce code : " L'avis mentionné à l'article R. 611-1 est émis dans les conditions fixées par arrêté du ministre chargé de l'immigration et du ministre chargé de la santé au vu : / 1° D'un certificat médical établi par le médecin qui suit habituellement l'étranger ou un médecin praticien hospitalier ; / 2° Des informations disponibles sur les possibilités de bénéficier effectivement d'un traitement approprié dans le pays d'origine de l'intéressé (...) ".

16. D'une part, il résulte de l'ensemble des dispositions précitées que, dès lors qu'elle dispose d'éléments d'information suffisamment précis permettant d'établir qu'un étranger, résidant habituellement en France, présente un état de santé susceptible de le faire entrer dans la catégorie qu'elles prévoient des étrangers qui ne peuvent faire l'objet d'une mesure d'éloignement, l'autorité préfectorale doit, lorsqu'elle envisage de prendre une telle mesure à son égard, recueillir préalablement l'avis du collège de médecins de l'office français de l'immigration et de l'intégration (OFII). En l'espèce, M. B... n'établit pas, ni même n'allègue sérieusement, avoir, notamment par la production d'éléments suffisamment circonstanciés à l'appui de sa demande de renouvellement de titre de séjour en qualité de salarié présentée le 3 novembre 2020, informé le préfet de la

Seine-Saint-Denis de la nature et de la gravité des pathologies dont il souffre et qui, selon lui, auraient dû conduire cette autorité à solliciter l'avis du collège de médecins de l'OFII. En outre, la seule circonstance que l'intéressé avait bénéficié antérieurement d'un titre de séjour pour raisons médicales ne permet pas de considérer que le préfet disposait, à la date de cette demande ou à la date de l'arrêté attaqué, d'éléments d'information suffisamment précis devant le conduire à saisir pour avis ce collège. Par suite, le moyen tiré de ce qu'en l'absence d'un tel avis, la mesure d'éloignement litigieuse aurait été édictée au terme d'une procédure irrégulière ne peut qu'être écarté.

17. D'autre part, il ne ressort pas des pièces du dossier que le préfet n'aurait pas procédé à un examen particulier de la situation personnelle de M. B..., avant de prononcer à son encontre la mesure d'éloignement attaquée, ni qu'il se serait estimé en situation de compétence liée pour prendre à son encontre une telle mesure.

18. Enfin, ainsi qu'il a été dit au point 13, il ne ressort pas des pièces versées au dossier qu'un défaut de prise en charge médicale de M. B... pourrait entraîner, pour lui, des conséquences d'une exceptionnelle gravité, ni, en tout état de cause, qu'un traitement et un suivi appropriés à ses pathologies seraient indisponibles dans son pays d'origine.

19. En dernier lieu, pour les mêmes motifs que ceux exposés au point 13, les moyens tirés de la méconnaissance des stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et de l'erreur manifeste dans l'appréciation des conséquences de la mesure d'éloignement en litige sur la situation personnelle de M. B..., doivent être écartés.

En ce qui concerne la légalité de la décision fixant le délai de départ volontaire :

20. En premier lieu, il résulte de ce qui précède que le moyen tiré de ce que la décision accordant un délai de départ volontaire à M. B... doit être annulée par voie de conséquence de l'annulation de la décision portant refus de renouvellement de titre de séjour et de celle portant obligation de quitter le territoire français, ne peut qu'être écarté.

21. En second lieu, aux termes de l'article L. 612-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " L'étranger faisant l'objet d'une décision portant obligation de quitter le territoire français dispose d'un délai de départ volontaire de trente jours à compter de la notification de cette décision. / L'autorité administrative peut accorder, à titre exceptionnel, un délai de départ volontaire supérieur à trente jours s'il apparaît nécessaire de tenir compte de circonstances propres à chaque cas. / Elle peut prolonger le délai accordé pour une durée appropriée s'il apparaît nécessaire de tenir compte de circonstances propres à chaque cas. L'étranger est informé par écrit de cette prolongation ".

22. D'une part, il résulte des dispositions précitées que le préfet n'est pas tenu de motiver les raisons pour lesquelles il n'accorde pas un délai supérieur au délai de droit commun de trente jours lorsque le ressortissant étranger n'a pas sollicité un délai supérieur à trente jours. En l'espèce, M. B... n'établit pas, ni même n'allègue d'ailleurs, avoir demandé à bénéficier d'un délai supérieur à trente jours. Par suite, le moyen tiré du défaut de motivation qui entacherait la décision fixant le délai de départ doit être écarté.

23. D'autre part, M. B... ne justifie d'aucune circonstance particulière de nature à rendre nécessaire la prolongation de ce délai de trente jours qui lui a été accordé pour quitter volontairement le territoire. Par suite, en fixant le délai de départ volontaire à trente jours, le préfet n'a commis aucune erreur manifeste dans l'appréciation des conséquences de cette mesure sur la situation personnelle de l'intéressé.

En ce qui concerne la légalité de la décision fixant le pays de destination :

24. En premier lieu, il résulte de ce qui précède que le moyen tiré de ce que la décision fixant le pays de destination doit être annulée par voie de conséquence de l'annulation de la décision portant refus de renouvellement de titre de séjour et de celle portant obligation de quitter le territoire français, ne peut qu'être écarté.

25. En deuxième lieu, en indiquant que M. B... n'établissait pas être exposé à des peines ou traitements contraires à la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales en cas de retour dans son pays d'origine, le préfet a suffisamment motivé sa décision.

26. En dernier lieu, aux termes de l'article L. 721-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Un étranger ne peut être éloigné à destination d'un pays s'il établit que sa vie ou sa liberté y sont menacées ou qu'il y est exposé à des traitements contraires aux stipulations de l'article 3 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales du 4 novembre 1950. ". Aux termes des stipulations de cet article 3 : " Nul ne peut être soumis à la torture ni à des peines ou traitements inhumains ou dégradants ".

27. Il ne ressort pas des pièces versées au dossier qu'un défaut de prise en charge médicale de M. B... pourrait entraîner, pour lui, des conséquences d'une exceptionnelle gravité, ni, en tout état de cause, qu'un traitement et un suivi appropriés à ses pathologies seraient indisponibles dans son pays d'origine. Par suite, en décidant, par l'arrêté attaqué, que l'intéressé pourra être reconduit à destination du Mali, le préfet n'a pas méconnu les dispositions et stipulations précitées.

28. Il résulte de tout ce qui précède que M. B... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Montreuil a rejeté sa demande. Par voie de conséquence, ses conclusions aux fins d'injonction et d'astreinte ainsi que celles présentées au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative doivent être rejetées.

Sur les conclusions de la requête n° 22PA04508 :

29. Le présent arrêt réglant l'affaire au fond, les conclusions de la requête n° 22PA04508 à fin de suspension sont devenues sans objet. Par suite, il n'y a pas lieu de statuer sur ces conclusions.

DÉCIDE :

Article 1er : La requête n° 22PA03508 de M. B... est rejetée.

Article 2 : Il n'y a pas lieu de statuer sur la requête n° 22PA04508 de M. B....

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à M. C... B... et au ministre de l'intérieur et des outre-mer.

Copie en sera transmise au préfet de la Seine-Saint-Denis.

Délibéré après l'audience du 27 janvier 2023, à laquelle siégeaient :

- Mme Heers, présidente de chambre,

- M. d'Haëm, président assesseur,

- Mme d'Argenlieu, première conseillère.

Rendu public par mise à disposition au greffe le 10 février 2023.

Le rapporteur,

R. d'HAËMLa présidente,

M. A...

La greffière,

A. GASPARYAN

La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur et des outre-mer en ce qui le concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

2

N° 22PA03508-22PA04508


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Paris
Formation : 4ème chambre
Numéro d'arrêt : 22PA03508
Date de la décision : 10/02/2023
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : Mme HEERS
Rapporteur ?: M. Rudolph D’HAEM
Rapporteur public ?: Mme JAYER
Avocat(s) : LANGLOIS

Origine de la décision
Date de l'import : 19/02/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.paris;arret;2023-02-10;22pa03508 ?
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