Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
M. B... A... a demandé au tribunal administratif de Montreuil d'annuler l'arrêté du 6 juillet 2020 par lequel le préfet de la Seine-Saint-Denis a refusé de lui délivrer un titre de séjour, l'a obligé à quitter le territoire français dans le délai de trente jours, a fixé le pays de destination et lui a interdit le retour sur le territoire français pour une durée de deux ans.
Par un jugement n° 2008071 du 25 novembre 2021 le tribunal administratif de Montreuil a rejeté sa requête.
Procédure devant la Cour :
Par une requête enregistrée le 30 décembre 2021, M. B... A..., représenté par Me Decroix-Delondre, demande à la Cour :
1°) d'annuler le jugement n° 2008071 du 25 novembre 2021 du tribunal administratif de Montreuil ;
2°) d'annuler l'arrêté du 6 juillet 2020 du préfet de la Seine-Saint-Denis portant refus de délivrance d'un titre de séjour, obligation de quitter le territoire français dans le délai de trente jours, fixant le pays de destination et interdisant son retour sur le territoire français pour une durée de deux ans ;
3°) d'enjoindre au préfet de la Seine-Saint-Denis de lui délivrer le certificat de résidence sollicité, ou à défaut, de réexaminer sa situation ;
4°) de mettre à la charge de l'État le versement d'une somme de 1 500 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Il soutient que :
- il justifie d'une ancienneté de séjour de dix ans lui permettant d'obtenir un titre de séjour sur le fondement de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et de l'article 6-1 de l'accord franco-algérien ; le préfet n'a pas examiné sa situation au regard de son ancienneté de séjour et a commis une erreur de droit en retenant qu'au regard d'une précédente mesure d'éloignement, sa résidence en France ne pouvait être prise en compte antérieurement au 27 février 2015 ;
- sa vie privée et familiale étant constituée en France, la décision est entachée d'erreur manifeste d'appréciation.
La requête a été communiquée au préfet de la Seine-Saint-Denis, qui n'a pas présenté de mémoire en défense.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968 relatif à la circulation, à l'emploi et au séjour des ressortissants algériens et de leurs familles ;
- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- le code de justice administrative.
Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Le rapport de Mme C... a été entendu au cours de l'audience publique.
Considérant ce qui suit :
1. M. B... A..., ressortissant algérien né en 1978, entré en France en février 2006 selon ses déclarations, a sollicité le 24 septembre 2018 la régularisation de sa situation administrative par la délivrance d'un certificat de résidence d'un an portant la mention " vie privée et familiale ". Par un arrêté du 6 juillet 2020, le préfet de la Seine-Saint-Denis a rejeté sa demande, l'a obligé à quitter le territoire français dans le délai de trente jours et lui a interdit le retour sur le territoire français pour une durée de deux ans. M. A... a contesté cet arrêté devant le tribunal administratif de Montreuil, lequel a rejeté sa requête par un jugement du 25 novembre 2021, dont il relève appel devant la Cour.
Sur la légalité de l'arrêté contesté :
Sans qu'il soit besoin d'examiner les autres moyens de la requête ;
2. Aux termes de l'article 6 de l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968 : " (...) Le certificat de résidence d'un an portant la mention " vie privée et familiale " est délivré de plein droit : / 1) au ressortissant algérien, qui justifie par tout moyen résider en France habituellement depuis plus de dix ans ou plus de quinze ans si, au cours de cette période, il a séjourné en qualité d'étudiant (...). ".
3. M. A... soutient qu'il réside habituellement en France depuis plus de dix ans et qu'il a fourni les pièces en justifiant, remplissant les conditions pour obtenir un certificat de résidence sur le fondement des stipulations précitées de l'article 6 de l'accord franco-algérien. Il ressort de la décision contestée que le préfet de la Seine-Saint-Denis s'est borné à opposer à la demande du requérant, au vu de ses dix ans de résidence habituelle en France, la circonstance qu'il a fait l'objet d'une mesure d'éloignement le 24 juin 2015, dont il a déduit qu'il " ne saurait se prévaloir d'une présence sur le territoire national en violation de la loi " et qu'il ne pouvait être regardé comme séjournant en France depuis une date antérieure au 27 février 2015. Or, l'existence de cette mesure d'éloignement et la circonstance que M. A... n'a pas déféré à l'obligation qui lui était faite de quitter la France sont sans incidence sur la prise en compte de ses années de présence sur le territoire en vue d'apprécier le caractère habituel de sa résidence en France au sens des stipulations précitées. M. A... est donc fondé à soutenir que l'arrêté contesté est ainsi entaché d'une erreur de droit et que, dès lors, le préfet de la Seine-Saint-Denis n'a pas examiné sa situation au regard de son ancienneté de résidence sur le territoire français.
4. Il résulte de ce qui précède que M. A... est fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Montreuil a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 6 juillet 2020 du préfet de la Seine-Saint-Denis. Il y a donc lieu de faire droit aux conclusions de la requête qui tendent à l'annulation de ce jugement et de cette décision.
Sur les conclusions à fins d'injonction :
5. Aux termes du premier alinéa de l'article L. 911-1 du code de justice administrative : " Lorsque sa décision implique nécessairement qu'une personne morale de droit public (...) prenne une mesure d'exécution dans un sens déterminé, la juridiction, saisie de conclusions en ce sens, prescrit, par la même décision, cette mesure assortie, le cas échéant, d'un délai d'exécution. ". Aux termes du premier alinéa de l'article L. 911-2 du même code : " Lorsque sa décision implique nécessairement qu'une personne morale de droit public (...) prenne à nouveau une décision après une nouvelle instruction, la juridiction, saisie de conclusions en ce sens, prescrit, par la même décision juridictionnelle, que cette décision doit intervenir dans un délai déterminé. ".
6. Compte tenu du motif de l'annulation prononcée ci-dessus, le présent arrêt n'implique pas la délivrance d'un titre de séjour, mais seulement que le préfet de la Seine-Saint-Denis réexamine la demande de M. A... dans un délai de trois mois.
Sur les frais liés à l'instance :
7. Il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, sur le fondement des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, de mettre à la charge de l'État (ministère de l'intérieur et des Outre-mer) une somme de 1 000 euros à verser à M. A....
DÉCIDE :
Article 1er : Le jugement n° 2008071 du tribunal administratif de Montreuil du 25 novembre 2021 et l'arrêté du 6 juillet 2020 du préfet de la Seine-Saint-Denis refusant à M. B... A... la délivrance d'un titre de séjour, lui faisant obligation de quitter le territoire français dans le délai de trente jours, fixant le pays de destination de cette mesure et interdisant le retour en France de l'intéressé pour une durée de deux ans, sont annulés.
Article 2 : Il est enjoint au préfet de la Seine-Saint-Denis de réexaminer la demande de M. B... A... dans un délai de trois mois à compter de la notification du présent arrêt.
Article 3 : L'Etat versera à M. B... A..., une somme de 1 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Article 4 : Le surplus des conclusions de la requête est rejeté.
Article 5 : Le présent arrêt sera notifié à M. B... A..., au ministre de l'intérieur et des Outre-mer et au préfet de la Seine-Saint-Denis.
Délibéré après l'audience du 10 janvier 2023, à laquelle siégeaient :
- M. Diémert, président de la formation de jugement en application des articles L. 234-3 (1er alinéa) et R. 222-6 (1er alinéa) du code de justice administrative,
- Mme Renaudin, première conseillère,
- M. Gobeill, premier conseiller.
Rendu public par mise à disposition au greffe le 2 février 2023.
La rapporteure,
M. RENAUDINLe président,
S. DIÉMERT
La greffière,
C. POVSE
La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur et des Outre-mer en ce qui le concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
N° 21PA06693 2