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25/01/2023 | FRANCE | N°21PA05823

France | France, Cour administrative d'appel de Paris, 2ème chambre, 25 janvier 2023, 21PA05823


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. A... C... a demandé au Tribunal administratif de Montreuil d'annuler la décision implicite par laquelle le préfet de la Seine-Saint-Denis lui a refusé la délivrance d'un titre de séjour portant la mention " vie privée et familiale ".

Par une ordonnance n° 2100946/11 du 8 octobre 2021, le président de la 11ème chambre du Tribunal administratif de Montreuil a rejeté sa demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête enregistrée le 15 novembre 2021, M. C..., représenté par

Me Cyril Patureau, demande à la Cour :

1°) d'annuler cette ordonnance n° 2100946/11 du 8 octobr...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. A... C... a demandé au Tribunal administratif de Montreuil d'annuler la décision implicite par laquelle le préfet de la Seine-Saint-Denis lui a refusé la délivrance d'un titre de séjour portant la mention " vie privée et familiale ".

Par une ordonnance n° 2100946/11 du 8 octobre 2021, le président de la 11ème chambre du Tribunal administratif de Montreuil a rejeté sa demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête enregistrée le 15 novembre 2021, M. C..., représenté par Me Cyril Patureau, demande à la Cour :

1°) d'annuler cette ordonnance n° 2100946/11 du 8 octobre 2021 du Tribunal administratif de Montreuil ;

2°) d'annuler la décision contestée devant le tribunal ;

3°) d'enjoindre au préfet de la Seine-Saint-Denis de lui délivrer un titre de séjour portant la mention " vie privée et familiale " dans le délai d'un mois suivant la notification de la décision à intervenir, sous astreinte de 50 euros par jour de retard, subsidiairement, de réexaminer sa situation administrative dans les mêmes conditions de délai et d'astreinte ;

4°) et de mettre à la charge de l'Etat une somme de 1 500 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Il soutient que :

- l'ordonnance attaquée est irrégulière dès lors que le premier juge a, à tort, retenu son défaut d'intérêt à agir contre la décision attaquée ;

- la décision implicite de rejet est entachée d'un défaut de motivation ;

- elle méconnaît les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et les dispositions du 7° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile.

Par une ordonnance du 18 octobre 2022, la clôture d'instruction a été fixée le 14 novembre 2022.

La requête présentée par M. C... a été communiquée au préfet de la Seine-Saint-Denis qui n'a pas produit en défense.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- le code des relations entre le public et l'administration ;

- le code de justice administrative.

Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

A été entendu au cours de l'audience publique le rapport de Mme B....

Considérant ce qui suit :

1. M. C..., ressortissant algérien né le 15 mai 1978, a été mis en possession d'un titre de séjour portant la mention " salarié " depuis 2016. Le 6 août 2020, il a sollicité, à titre principal, la délivrance d'une carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " sur le fondement des dispositions du 7° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et, à titre, subsidiaire, le renouvellement de sa carte de séjour temporaire portant la mention " salarié " sur le fondement des dispositions des articles L. 313-10 et L. 313-14 du même code. Par un arrêté du 7 octobre 2020, le préfet de la Seine-Saint-Denis a décidé de lui délivrer une carte de séjour pluriannuelle portant la mention " salarié " valable jusqu'en 2024. M. C... a contesté devant le Tribunal administratif de Montreuil la décision implicite par laquelle le préfet lui a refusé la délivrance d'un titre de séjour portant la mention " vie privée et familiale ". Par une ordonnance n° 2100946/11 du 8 octobre 2021, dont le requérant relève appel, le président de la 11ème chambre du Tribunal administratif de Montreuil a rejeté la demande de M. C... comme irrecevable.

Sur la régularité de l'ordonnance attaquée :

2. Aux termes de l'article R. 222-1 du code de justice administrative : " (...) les présidents de formation de jugement des tribunaux (...) peuvent, par ordonnance : (...) / 4° Rejeter les requêtes manifestement irrecevables, lorsque la juridiction n'est pas tenue d'inviter leur auteur à les régulariser ou qu'elles n'ont pas été régularisées à l'expiration du délai imparti par une demande en ce sens ".

3. Aux termes de l'article L. 313-5-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile alors en vigueur : " L'étranger titulaire d'une carte de séjour temporaire ou d'une carte de séjour pluriannuelle doit être en mesure de justifier qu'il continue de remplir les conditions requises pour la délivrance de cette carte. L'autorité administrative peut procéder aux vérifications utiles pour s'assurer du maintien du droit au séjour de l'intéressé et, à cette fin, convoquer celui-ci à un ou plusieurs entretiens. Si l'étranger cesse de remplir l'une des conditions exigées pour la délivrance de la carte de séjour dont il est titulaire, fait obstacle aux contrôles ou ne défère pas aux convocations, la carte de séjour peut lui être retirée ou son renouvellement refusé par une décision motivée ". Aux termes de l'article R. 313-36 alors applicable du même code : " Sauf dispositions réglementaires contraires, l'étranger qui sollicite le renouvellement d'une carte de séjour temporaire présente, outre les pièces mentionnées à l'article R. 313-4-1, les pièces prévues pour une première délivrance et justifiant qu'il continue de satisfaire aux conditions requises pour celle-ci ".

4. M. C... a sollicité, le 6 août 2020, la délivrance, à titre principal, d'un titre de séjour " vie privée et familiale " et, à titre subsidiaire, le renouvellement de son titre de séjour " salarié ". Il a demandé l'annulation de la décision implicite par laquelle préfet de la Seine-Saint-Denis lui a refusé la délivrance d'un titre de séjour portant la mention " vie privée et familiale ", révélée par la délivrance d'un titre de séjour portant la mention " salarié ". La circonstance que le requérant ait obtenu, le 7 octobre 2020, une carte de séjour pluriannuelle portant la mention " salarié " valable jusqu'en 2024 ne fait pas obstacle à ce qu'il puisse soumettre au juge de l'excès de pouvoir la décision implicite de rejet par laquelle le préfet de la Seine-Saint-Denis lui a refusé la délivrance, qu'il demandait à titre principal, d'un titre de séjour portant la mention " vie privée et familiale ", dès lors que les conditions posées pour la délivrance de ces deux titres ainsi que leur renouvellement ne sont pas identiques. M. C... dispose, en conséquence, d'un intérêt lui donnant qualité pour agir à l'encontre de la décision attaquée. Par suite, la demande présentée par le requérant devant le tribunal était recevable.

5. Il résulte de ce qui précède que M. C... est fondé à soutenir que, c'est à tort que, par l'ordonnance attaquée, le président de la 11ème chambre du Tribunal administratif de Montreuil a rejeté sa demande comme irrecevable.

6. Il y a lieu d'évoquer et de statuer immédiatement sur la demande de M. C... présentée devant le Tribunal administratif de Montreuil.

Sur la demande présentée par M. C... devant le Tribunal :

7. Aux termes de l'article R. 311-12, désormais R. 432-1, du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Le silence gardé par l'administration sur les demandes de titres de séjour vaut décision implicite de rejet ". Aux termes de l'article R. 311-12-1, désormais R. 432-2, du même code : " La décision implicite mentionnée à l'article R. 311-12 naît au terme d'un délai de quatre mois ". Aux termes de l'article L. 232-4 du code des relations entre le public et l'administration : " Une décision implicite intervenue dans les cas où la décision explicite aurait dû être motivée n'est pas illégale du seul fait qu'elle n'est pas assortie de cette motivation. / Toutefois, à la demande de l'intéressé, formulée dans les délais du recours contentieux, les motifs de toute décision implicite de rejet devront lui être communiqués dans le mois suivant cette demande (...) ".

8. La décision refusant la délivrance d'une carte de séjour à un étranger constitue une mesure de police qui est au nombre de celles qui doivent être motivées en application de l'article L. 211-2 du code des relations entre le public et l'administration. Par suite, en application des dispositions précitées de l'article L. 232-4 du même code, il est loisible à l'étranger auquel est opposé implicitement, après quatre mois, un rejet de sa demande de titre de séjour de demander, dans le délai du recours contentieux, les motifs de cette décision implicite de rejet. En l'absence de communication de ces motifs dans le délai d'un mois, la décision implicite se trouve entachée d'illégalité.

9. M. C... soutient que la décision par laquelle le préfet de la Seine-Saint-Denis lui a implicitement refusé la délivrance d'un titre de séjour portant la mention " vie privée et familiale " est entachée d'un défaut de motivation dès lors que le préfet n'a pas répondu à sa demande de communication des motifs de cette décision. Il ressort des pièces du dossier que le conseil de

M. C... a sollicité, le 6 août 2020, auprès du préfet, la délivrance, à titre principal, d'une carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " sur le fondement des dispositions du 7° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et, à titre subsidiaire, le renouvellement de sa carte de séjour temporaire portant la mention " salarié " sur le fondement des dispositions des articles L. 313-10 et L. 313-14 du même code. Une décision implicite de rejet est née du silence gardé sur cette demande pendant quatre mois. Par un courrier du 15 décembre 2020, réceptionné par la préfecture le 21 décembre 2020, le requérant a sollicité du préfet la communication des motifs de cette décision implicite née le 6 décembre 2020. Il est constant que le préfet de la Seine-Saint-Denis, qui n'a pas produit de mémoire en défense, n'a pas répondu à cette demande dans le délai d'un mois. Par suite, M. C... est fondé à soutenir que la décision contestée est entachée d'un défaut de motivation.

10. Il résulte de ce qui précède, et sans qu'il soit besoin de statuer sur les autres moyens de la demande, que M. C... est fondé à demander l'annulation de la décision par laquelle le préfet de la Seine-Saint-Denis a implicitement refusé de lui délivrer un titre de séjour portant la mention " vie privée et familiale ".

Sur les conclusions à fin d'injonction :

11. Eu égard au motif d'annulation de l'arrêté attaqué ci-dessus retenu, le présent arrêt implique seulement qu'il soit enjoint au préfet de la Seine-Saint-Denis de procéder, dans un délai de deux mois à compter de la notification du présent arrêt, au réexamen de la demande de M. C.... Il n'y a pas lieu d'assortir cette injonction d'une astreinte.

Sur les frais liés au litige :

12. Il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de l'Etat la somme réclamée au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

DECIDE :

Article 1er : L'ordonnance n° 2100946/11 du 8 octobre 2021 du président de la 11ème chambre du Tribunal administratif de Montreuil est annulée.

Article 2 : La décision par laquelle le préfet de la Seine-Saint-Denis a implicitement refusé de délivrer à M. C... un titre de séjour portant la mention " vie privée et familiale " est annulée.

Article 3 : Il est enjoint au préfet de la Seine-Saint-Denis de réexaminer la situation de M. C... dans le délai de deux mois suivant la notification du présent arrêt.

Article 4 : Le surplus de ses conclusions d'appel est rejeté.

Article 5 : Le présent arrêt sera notifié à M. A... C..., au ministre de l'intérieur et des outre-mer et au préfet de la Seine-Saint-Denis.

Délibéré après l'audience du 11 janvier 2023 à laquelle siégeaient :

- Mme Brotons, président de chambre,

- Mme Topin, président assesseur,

- M. Magnard, premier conseiller,

Rendu public par mise à disposition au greffe le 25 janvier 2023.

Le rapporteur,

Signé

E. B...Le président,

Signé

I. BROTONS

Le greffier,

Signé

A. MOHAMAN YERO

La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur et des outre-mer en ce qui le concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

2

N° 21PA05823


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Paris
Formation : 2ème chambre
Numéro d'arrêt : 21PA05823
Date de la décision : 25/01/2023
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : Mme BROTONS
Rapporteur ?: Mme Emmanuelle TOPIN
Rapporteur public ?: Mme PRÉVOT
Avocat(s) : PATUREAU

Origine de la décision
Date de l'import : 29/01/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.paris;arret;2023-01-25;21pa05823 ?
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