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11/01/2023 | FRANCE | N°21PA03111

France | France, Cour administrative d'appel de Paris, 7ème chambre, 11 janvier 2023, 21PA03111


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. A... B... a demandé au Tribunal administratif de Paris de prononcer la décharge, en droits et pénalités, des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu, de contribution exceptionnelle sur les hauts revenus et de prélèvements sociaux auxquelles il a été assujetti au titre de l'année 2011.

Par un jugement n° 1816833/1-3 du 7 avril 2021, le Tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête et un mémoire, enregistrés les 7 jui

n 2021 et 23 septembre 2022, M. B..., représenté par Me Goldstein, demande à la Cour :

1°) d'ann...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. A... B... a demandé au Tribunal administratif de Paris de prononcer la décharge, en droits et pénalités, des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu, de contribution exceptionnelle sur les hauts revenus et de prélèvements sociaux auxquelles il a été assujetti au titre de l'année 2011.

Par un jugement n° 1816833/1-3 du 7 avril 2021, le Tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête et un mémoire, enregistrés les 7 juin 2021 et 23 septembre 2022, M. B..., représenté par Me Goldstein, demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1816833/1-3 du 7 avril 2021 du Tribunal administratif de Paris ;

2°) de prononcer la décharge de ces impositions et leur restitution ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 5 000 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Il soutient que :

- le jugement attaqué est entaché d'irrégularités au motif qu'il est insuffisamment motivé, qu'il ne reproduit pas les dispositions de l'article 151 nonies du code général des impôts et qu'il reprend pour l'essentiel les motifs de l'arrêt n° 15PA04493 du 30 décembre 2016 de la Cour administrative d'appel de Paris ;

- le service a méconnu les dispositions des articles L. 57 et L. 76 B du livre des procédures fiscales ;

- le droit de reprise de l'administration fiscale était prescrit à la date de notification de la proposition de rectification du 14 novembre 2014 dès lors que la plus-value d'apport taxée, réalisée en 2001, n'était en réalité pas éligible au sursis d'imposition prévu à l'article 150-0 B du code général des impôts ;

- en raison de l'absence de risque de perte en capital au titre de son investissement dans la SEP de VM et de l'existence d'un avantage financier très significatif, la plus-value d'apport réalisée en 2001 constituait un revenu d'activité insusceptible de bénéficier d'un sursis d'imposition ;

- en raison également de l'existence d'une activité particulière qu'il a déployée en vue de l'accroissement de la valeur des titres, la plus-value d'apport réalisée en 2001 constituait un revenu d'activité ;

- en raison de l'activité qu'il a déployé dans la SEP de VM, les droits qu'il détenait dans cette société en participation revêtaient un caractère professionnel, ce qui les rendait inéligibles au sursis d'imposition prévu par l'article 150-0 B du code général des impôts ;

- il n'a pas opté pour le régime du sursis d'imposition ;

- à titre subsidiaire, le service a commis une erreur dans le calcul du montant imposable de la plus-value en litige ;

- les pénalités qui lui ont été appliquées par substitution de base légale ne sont pas fondées dès lors que les droits sur lesquels elles sont assises doivent être déchargés ;

- à titre subsidiaire, la pénalité de 10 % fondée sur les dispositions du a du 1 de l'article 1728 du code général des impôts n'est pas justifiée par le défaut de production d'une déclaration d'ensemble des revenus, et elle n'a pas été motivée avant la mise en recouvrement conformément à l'article L. 80 D du livre des procédures fiscales ;

- à titre infiniment subsidiaire, les dispositions du III de l'article 1758 A du code général des impôts s'opposent, en vertu du principe de l'application immédiate de la loi répressive nouvelle plus douce, au cumul des majorations de 10 % prévues par le I du même article et par le a du 1 de l'article 1728 du même code et appliquées aux cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu et de contribution exceptionnelle sur les hauts revenus.

Par des mémoires en défense, enregistrés respectivement les 21 octobre 2021 et 4 octobre 2022, le ministre de l'économie, des finances et de la relance conclut au rejet de la requête.

Il soutient que :

- les moyens soulevés par le requérant ne sont pas fondés ;

- sa demande de substitution de base légale des pénalités prévues au a du 1 de l'article 1728 et au I de l'article 1758 A du code général des impôts est fondée.

Les parties ont été informées, en application des dispositions de l'article R. 611-7 du code de justice administrative, de ce que l'arrêt était susceptible d'être fondé sur le moyen relevé d'office tiré de ce que les conclusions du requérant tendant à la restitution des impositions contestées et des pénalités correspondantes, qui doivent être regardées comme des conclusions relevant du contentieux du recouvrement, sont irrecevables dès lors que M. B... n'a pas, avant de saisir la juridiction administrative, formé auprès de l'administration fiscale une réclamation préalable sur le fondement de l'article L. 281 du livre des procédures fiscales.

Par un mémoire, enregistré le 17 novembre 2022, M. B..., représenté par Me Goldstein, a répondu au moyen d'ordre public.

Il soutient qu'il abandonne ses conclusions tendant à la restitution des impositions et des pénalités contestées.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;

- la loi n° 99-1172 du 30 décembre 1999 ;

- la loi n° 2016-1918 du 29 décembre 2016 ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. C...,

- et les conclusions de Mme Breillon, rapporteure publique.

Considérant ce qui suit :

1. Lors de la constitution, le 28 mai 2001, de la société anonyme La Compagnie du Bocage (CDB), M. B... lui a fait apport de 100 000 actions qu'il détenait dans la société Legris Industries ainsi que de 391 732 parts de la société en participation (SEP) de VM lui ouvrant droit à 911 944 actions de la société Legris Industries. En contrepartie de ces apports, l'intéressé a reçu 50 597 200 actions de la société CDB, dont la valeur unitaire a été fixée à un euro. La société CDB a réduit son capital social en procédant, le 8 décembre 2011, au rachat partiel de ces titres auprès de M. B... pour un montant total de 5 millions d'euros. A la suite d'une vérification de la comptabilité de la société CDB puis d'un contrôle sur pièces du foyer fiscal de M. et Mme B..., l'administration a soumis à l'impôt sur le revenu, à la contribution exceptionnelle sur les hauts revenus et aux contributions sociales, au titre de l'année 2011, la plus-value d'échange réalisée en décembre 2011 par M. B..., qui a été regardée comme ayant bénéficié du sursis d'imposition prévu à l'article 150-0 B du code général des impôts jusqu'à la cession des titres correspondants. M. B... relève appel du jugement par lequel le Tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande tendant à la décharge de ces impositions et des pénalités correspondantes.

Sur le désistement partiel :

2. M. B... a, dans son mémoire enregistré le 17 novembre 2022, expressément abandonné ses conclusions tendant à la restitution des impositions et des pénalités contestées. Le désistement partiel de M. B... est pur et simple. Rien ne s'oppose à ce qu'il en soit donné acte.

Sur la régularité du jugement attaqué :

3. En premier lieu, aux termes de l'article L. 9 du code de justice administrative : " Les jugements sont motivés ".

4. M. B... soutient que le jugement attaqué est insuffisamment motivé quant à sa réponse aux moyens tirés de ce que la plus-value litigieuse ne pouvait pas relever du régime des plus-values de cessions de valeurs mobilières, eu égard à l'absence de risque de perte en capital lors de l'opération de rachat et à la modicité de son investissement par rapport à la rémunération qu'il en a retirée, et de ce que cette plus-value relevait de la catégorie des bénéfices non commerciaux eu égard à l'activité qu'il avait déployée en vue d'accroître la valeur des titres. Toutefois, il résulte du point 5 du jugement attaqué que les premiers juges, qui n'étaient pas tenus de répondre à tous les arguments invoqués devant eux, ont suffisamment énoncé les motifs les ayant conduits à considérer que la plus-value litigieuse n'était pas de nature professionnelle et ne revêtait pas le caractère d'un revenu d'activité. Par ailleurs, si les premiers juges ont repris à l'identique les motifs de l'arrêt n° 15PA04493 du 30 décembre 2016 de la Cour administrative d'appel de Paris, comme le soutient M. B..., cette circonstance ne constitue pas à elle seule un défaut de motivation.

5. En second lieu, le deuxième alinéa de l'article R. 741-2 du code de justice administrative prévoit que la décision juridictionnelle " contient (...) les visas des dispositions législatives ou réglementaires dont elle fait application / (...) ".

6. M. B... soutient que le Tribunal administratif de Paris a entaché le jugement attaqué d'irrégularité en ayant omis de reproduire les dispositions de l'article 151 nonies du code général des impôts. Si les motifs de ce jugement ne reproduisent pas le texte de ces dispositions, le point 5 du jugement mentionne néanmoins cet article dont le Tribunal administratif de Paris a fait application. Le jugement attaqué satisfait ainsi aux dispositions citées au point précédent.

Sur le bien-fondé du jugement attaqué :

En ce qui concerne la régularité de la procédure d'imposition :

7. En premier lieu, aux termes de l'article L. 76 B du livre des procédures fiscales, dans sa rédaction applicable à la présente procédure : " L'administration est tenue d'informer le contribuable de la teneur et de l'origine des renseignements et documents obtenus de tiers sur lesquels elle s'est fondée pour établir l'imposition faisant l'objet de la proposition prévue au premier alinéa de l'article L. 57 ou de la notification prévue à l'article L. 76. Elle communique, avant la mise en recouvrement, une copie des documents susmentionnés au contribuable qui en fait la demande ". Il incombe à l'administration, quelle que soit la procédure d'imposition mise en œuvre, et au plus tard avant la mise en recouvrement, d'informer le contribuable dont elle envisage soit de rehausser, soit d'arrêter d'office les bases d'imposition, de l'origine et de la teneur des renseignements obtenus auprès de tiers qu'elle a utilisés pour fonder les impositions, avec une précision suffisante pour permettre à l'intéressé de demander que les documents qui contiennent ces renseignements soient mis à sa disposition avant la mise en recouvrement des impositions qui en procèdent, afin qu'il puisse vérifier l'authenticité de ces documents et en discuter la teneur ou la portée. Cette obligation s'impose à l'administration pour les seuls renseignements effectivement utilisés pour fonder les rectifications.

8. Il ressort des mentions mêmes de la proposition de rectification du 14 novembre 2014 adressée à M. B... que, pour fonder la rectification contestée, l'administration fiscale s'est appuyée sur les éléments qu'elle a obtenus dans le cadre de la vérification de comptabilité de la société CDB au titre des exercices clos en 2011, 2012 et 2013. Par ailleurs, cette proposition de rectification exposait de manière suffisamment claire et précise la teneur de ces éléments. Ainsi, la proposition de rectification a donné l'origine et la teneur des renseignements ainsi obtenus avec une précision suffisante pour permettre au contribuable de demander que ces renseignements soient mis à sa disposition avant la mise en recouvrement des impositions qui en procèdent. Par suite, le moyen tiré de ce que le service aurait méconnu les dispositions précitées de l'article L. 76 B du livre des procédures fiscales, doit être écarté.

9. En second lieu, aux termes de l'article L. 57 du livre des procédures fiscales, dans sa rédaction applicable à la présente procédure : " L'administration adresse au contribuable une proposition de rectification qui doit être motivée de manière à lui permettre de formuler ses observations ou de faire connaître son acceptation / (...) ". Il résulte de ces dispositions que, pour être régulière, une proposition de rectification doit comporter, outre la désignation de l'impôt concerné, de l'année d'imposition et de la base des rectifications, ceux des motifs sur lesquels l'administration entend se fonder pour justifier les rectifications envisagées qui sont nécessaires pour permettre au contribuable de formuler ses observations de manière entièrement utile.

10. Il résulte de l'instruction que la proposition de rectification, après avoir rappelé le contenu des articles 150-0 A à 150-0 E du code général des impôts relatifs à la taxation des gains de cessions de valeurs mobilières ou de droits sociaux des personnes physiques, comportait la désignation de la catégorie de revenus faisant l'objet de la rectification envisagée, les motifs de cette dernière, ainsi que la période d'imposition à laquelle cette rectification se rattachait et le montant de la rectification envisagée. A ce dernier égard, la proposition de rectification comportait les indications relatives au mode de calcul de la plus-value en litige. Dans ces conditions, et contrairement à ce que soutient M. B..., la proposition de rectification était suffisamment motivée pour lui permettre de formuler utilement ses observations ou de faire connaître son acceptation de la rectification qui lui était proposée. Par suite, le moyen tiré d'une méconnaissance des dispositions précitées de l'article L. 57 du livre des procédures fiscales doit être écarté.

En ce qui concerne le bien-fondé des impositions supplémentaires :

S'agissant de la prescription du droit de reprise :

11. D'une part, aux termes du 1 du I de l'article 150-0 A du code général des impôts, dans sa rédaction applicable à la date de l'opération d'échange en litige : " Sous réserve des dispositions propres aux bénéfices industriels et commerciaux, aux bénéfices non commerciaux et aux bénéfices agricoles ainsi que de l'article 150 A bis, les gains nets retirés des cessions à titre onéreux, effectuées directement ou par personne interposée, de valeurs mobilières, de droits sociaux, de titres mentionnés au 1° de l'article 118 et aux 6° et 7° de l'article 120, de droits portant sur ces valeurs, droits ou titres ou de titres représentatifs des mêmes valeurs, droits ou titres, sont soumis à l'impôt sur le revenu lorsque le montant de ces cessions excède, par foyer fiscal, 50 000 F par an / (...) ". Aux termes de l'article 150-0 B de ce code, dans sa rédaction applicable à la date de l'opération d'échange en litige : " Les dispositions de l'article 150-0 A ne sont pas applicables, au titre de l'année de l'échange des titres, aux plus-values réalisées dans le cadre (...) d'un apport de titres à une société soumise à l'impôt sur les sociétés / (...) ". Aux termes de l'article 150-0 D du même code, dans sa rédaction applicable à la date de cession des titres reçus à l'occasion de l'opération d'échange du 28 mai 2001 : " 1. Les gains nets mentionnés au I de l'article 150-0 A sont constitués par la différence entre le prix effectif de cession des titres ou droits, net des frais et taxes acquittés par le cédant, et leur prix effectif d'acquisition par celui-ci (...) / (...) / 9. En cas de vente ultérieure ou de rachat mentionné au 6 du II de l'article 150-0 A de titres reçus à l'occasion d'une opération mentionnée à l'article 150-0 B, (...) le gain net est calculé à partir du prix ou de la valeur d'acquisition des titres échangés, diminué de la soulte reçue ou majoré de la soulte versée lors de l'échange / (...) ". Il résulte de la combinaison de ces dispositions que les règles d'imposition des gains nets retirés des cessions à titre onéreux de valeurs mobilières ne sont pas applicables, au titre de l'année de l'échange des titres, aux plus-values réalisées dans le cadre d'un apport de titres à une société soumise à l'impôt sur les sociétés, et qu'y est substituée l'imposition de plein droit des plus-values effectivement réalisées l'année de la cession des titres reçus lors de l'échange. Par ailleurs, il résulte des dispositions de l'article 150-0 B du code général des impôts citées ci-dessus, éclairées par les travaux préparatoires de la loi du 30 décembre 1999 de finances pour 2000 dont elles sont issues, que le législateur a entendu inclure dans le champ du sursis d'imposition les plus-values d'échange procédant de l'ensemble des opérations d'apport à une société soumise à l'impôt sur les sociétés, qu'elles portent sur des titres représentatifs d'un capital social ou sur des parts de sociétés de personnes.

12. D'autre part, aux termes de l'article 8 du code général des impôts, dans sa rédaction applicable à la date de l'opération d'échange en litige : " Sous réserve des dispositions de l'article 6, les associés des sociétés en nom collectif et les commandités des sociétés en commandite simple sont, lorsque ces sociétés n'ont pas opté pour le régime fiscal des sociétés de capitaux, personnellement soumis à l'impôt sur le revenu pour la part de bénéfices sociaux correspondant à leurs droits dans la société (...) / Il en est de même, sous les mêmes conditions : / (...) / 2° Des membres des sociétés en participation (...) ". Aux termes du I de l'article 151 nonies de ce code, dans sa rédaction applicable à la date de l'opération d'échange en litige : " Lorsqu'un contribuable exerce son activité professionnelle dans le cadre d'une société dont les bénéfices sont, en application des articles 8 et 8 ter, soumis en son nom à l'impôt sur le revenu dans la catégorie des bénéfices agricoles réels, des bénéfices industriels ou commerciaux ou des bénéfices non commerciaux, ses droits ou parts dans la société sont considérés notamment pour l'application des articles 38, 72 et 93, comme des éléments d'actif affectés à l'exercice de la profession ". Si tout membre d'une société en participation qui a pour objet une activité imposable dans la catégorie des bénéfices industriels et commerciaux, des bénéfices agricoles ou des bénéfices non commerciaux doit, en principe, être présumé y exercer une activité professionnelle, fût-ce sans l'avoir révélé aux tiers, il en va, en revanche, différemment lorsqu'une ou plusieurs personnes autres que l'intéressé, qu'il s'agisse des associés ou non, ont été désignées pour gérer la société. Dans ce cas, il ne peut être regardé comme exerçant personnellement l'activité mise en société que si sa participation effective à cette activité est établie.

13. Enfin, aux termes de l'article 79 du code général des impôts, dans sa rédaction applicable à l'année d'imposition en litige : " Les traitements, indemnités, émoluments, salaires, pensions et rentes viagères concourent à la formation du revenu global servant de base à l'impôt sur le revenu ". Aux termes de l'article 82 de ce code, dans sa rédaction applicable à l'année d'imposition en litige : " Pour la détermination des bases d'imposition, il est tenu compte du montant net des traitements, indemnités et émoluments, salaires, pensions et rentes viagères, ainsi que de tous les avantages en argent ou en nature accordés aux intéressés en sus des traitements, indemnités, émoluments, salaires, pensions et rentes viagères proprement dits (...) ".

14. Les gains nets retirés par une personne physique de la cession à titre onéreux de bons de ou d'actions souscription d'actions sont en principe imposables suivant le régime des plus-values de cession de valeurs mobilières des particuliers institué par l'article 150-0 A du code général des impôts, y compris lorsque ces bons ou actions ont été acquis ou souscrits auprès d'une société dont le contribuable était alors dirigeant ou salarié, ou auprès d'une société du même groupe. Il en va toutefois autrement lorsque, eu égard aux conditions de réalisation du gain de cession, ce gain doit être regardé comme acquis, non à raison de la qualité d'investisseur du cédant, mais en contrepartie de ses fonctions de salarié ou de dirigeant et constitue, ainsi, un revenu imposable dans la catégorie des traitements et salaires en application des articles 79 et 82 du code général des impôts, réalisé et disponible l'année de la cession de ces bons ou actions.

15. En premier lieu, M. B... soutient qu'en raison de l'activité qu'il a déployée au sein de la SEP de VM, les droits qu'il y détenait revêtaient un caractère professionnel entraînant l'imposition de la plus-value litigieuse sur le fondement de l'article 151 nonies du code général des impôts et que, n'ayant encouru aucun risque de perte en capital compte tenu de la modicité, limité à 1 000 francs, de son apport à la SEP lors de la constitution de cette dernière en 1987, il est fondé à estimer que la plus-value d'apport litigieuse, réalisée en mai 2001, constituait un revenu d'activité.

16. Il résulte de l'instruction, et notamment des stipulations de l'article 9 des statuts de la SEP de VM, que le gérant de cette dernière est la SCS P.J Legris et Compagnie. Si M. B... soutient qu'il a déployé au sein de la SEP de VM une activité de nature à le faire regarder comme en ayant été le gérant de fait, l'intéressé ne l'établit pas en faisant état de son apport en industrie qui n'est d'ailleurs nullement mentionné dans les statuts de la SEP et ne peut pas se déduire de la modicité de l'apport initial, en effet limité à 1 000 francs, alors surtout que ce montant reflète, en réalité, le fait que le rachat de 49,80 % des titres de la société Potain, seul objet social de la SEP de VM, n'a nécessité que le paiement d'un franc symbolique. Ainsi, l'intéressé n'établit pas avoir exercé une activité professionnelle au sein de la SEP de VM, alors que cette SEP, constituée en 1987 et ayant réalisé son objet social dès le 17 avril 1989, date à laquelle elle avait acquis les actions de la société Potain, s'est ensuite bornée à détenir des titres de la société Legris Industries. La circonstance, invoquée par M. B..., tirée de ce qu'il était l'associé principal de la SEP de VM n'est pas non plus, à elle seule, de nature à établir qu'il en aurait été le véritable gérant ni qu'il y aurait exercé une activité professionnelle, la documentation administrative référencée 5 H-1112 n°s 15 et 16 du 2 mars 1998 et l'instruction administrative référencée BOI-RSA-GER-10-10-10-20 n° 130 du 12 septembre 2012 se bornant, en tout état de cause, à préciser que " le fait de posséder un nombre important de parts peut venir corroborer un rôle de gestion étendu ". M. B... relève, en outre, que l'acquisition de la totalité des titres de la société Potain aurait, en réalité, nécessité 58 millions de francs que seul le groupe Legris Industries aurait financés et que, lui-même n'ayant investi dans cette opération qu'à concurrence de 1 000 francs, sa participation au sein de la SEP du VM à hauteur de 33 % ne peut s'analyser que comme un intéressement à la performance du groupe ou comme la rémunération d'un apport en industrie, pour en déduire que la plus-value litigieuse est, en réalité, constitutive d'un revenu d'activité. Si M. B... soutient, à ce titre, qu'il a exercé des fonctions de direction au sein de la société Legris Industries au moins jusqu'en 2001, année de l'apport litigieux à la société CDB, il ne résulte pas de l'instruction que la plus-value en cause puisse être regardée comme ayant, pour l'intéressé, la nature d'un intéressement à la performance (" management package ") du groupe Legris Industries, en l'absence de toute contrepartie mise à sa participation à la SEP de VM à hauteur de 33 % pour un apport limité à 1 000 francs, notamment en l'absence de condition d'exercice, par M. B..., de fonctions au sein du groupe Legris Industries. Enfin, la plus-value d'échange en cause n'entrant ainsi pas dans les prévisions de l'article 151 nonies du code général des impôts, qui a trait aux plus-values professionnelles, M. B... ne peut utilement se prévaloir de la documentation administrative référencée 4 F-3-03 du 20 mars 2003 relative au régime des plus ou moins-values professionnelles en cas de cessation d'activité. Par ailleurs, le requérant ne peut utilement se prévaloir du bénéfice de l'instruction référencée BOI-BIC-RICI-10-50 n° 70, dès lors que sa situation n'entre pas dans les prévisions de cette instruction qui est relative au crédit d'impôt pour dépenses de formation des dirigeants.

17. En deuxième lieu, si M. B... soutient que la plus-value litigieuse constitue en réalité un avantage taxable dans la catégorie des traitements et salaires, ce moyen doit toutefois être écarté pour les mêmes motifs que ceux exposés au point précédent.

18. En dernier lieu, si M. B... soutient que le service n'était pas en droit de lui opposer la circonstance qu'il n'avait pas opté pour le régime du sursis d'imposition prévu par l'article 150-0 B du code général des impôts alors qu'il avait indiqué, dans un courrier électronique du 29 novembre 2004, que ce " mécanisme du report d'imposition [est] automatique et ne [nécessite] aucune formalité particulière ", cette circonstance est en tout état de cause sans incidence sur le bien-fondé des impositions contestées dès lors qu'il résulte de l'instruction que l'administration fiscale n'a fait état de ce courrier électronique, parmi d'autres éléments, que pour justifier l'application de la majoration de 40 % prévue à l'article 1729 du code général des impôts initialement appliquée.

19. Il résulte de ce qui vient d'être dit que la plus-value litigieuse, qui n'a pas le caractère d'un revenu d'activité ou d'une plus-value professionnelle entrant dans les prévisions de l'article 151 nonies du code général des impôts, était éligible au sursis d'imposition prévu à l'article 150-0 B du même code, de sorte qu'en application de l'article L. 169 du livre des procédures fiscales, le droit de reprise de l'administration n'était pas prescrit lorsque le service a notifié au foyer fiscal de M. B... la proposition de rectification du 14 novembre 2014.

S'agissant du montant de la plus-value :

20. En premier lieu, M. B... soutient que le calcul de la plus-value d'échange est erroné au motif qu'à tout le moins, les 391 732 parts de la SEP de VM ne pouvant pas bénéficier du sursis d'imposition, leur prix de revient doit être évalué à leur valeur de marché au moment de l'apport effectué en 2001, soit 45 597 200 euros, ce qui correspond à la valorisation des 911 944 actions de la société Legris Industries qui lui ont été attribuées en contrepartie de l'apport, par ses soins, de 391 732 parts qu'il détenait dans la SEP du VM, tandis que le service a retenu un prix de revient unitaire égal à 20 francs (3,05 euros) pour tous les titres de la société Legris Industries, y compris ceux issus de l'apport des 391 732 parts de la SEP de VM.

21. Compte tenu de ce qui a été dit au point 12, la totalité de la plus-value d'échange réalisée en mai 2001, y compris en tant qu'elle procède des titres de la société Legris Industries apportés par l'intermédiaire des 391 732 parts de la SEP de VM, doit être regardée comme ayant bénéficié du sursis d'imposition de plein droit prévu par l'article 150-0 B du code général des impôts. Par ailleurs, et en tout état de cause, il résulte de l'instruction que les 911 944 actions de la société Legris Industries ont été attribuées à M. B... en contrepartie des 391 732 parts qu'il détenait dans la SEP de VM dont le prix de revient est égal à son apport initial réalisé en 1987, soit 1 000 francs (152,45 euros). En supposant, comme le soutient le requérant, que le prix de revient unitaire des 100 000 autres titres de la société Legris Industries s'élève à la somme de 19,75 euros, le prix de revient unitaire moyen de l'ensemble des 1 011 944 titres de la société Legris Industries s'établirait à 1,95 euros, soit : 1 975 152 / 1 011 944, 1 975 152 euros représentant le prix de revient des 100 000 titres au prix unitaire de 19,75 euros, majoré de 152 euros. Ainsi, M. B... n'est pas fondé à se plaindre de ce que le service a, pour calculer la plus-value d'échange litigieuse, retenu un prix de revient unitaire moyen de 3,05 euros (20 francs).

22. En second lieu, si M. B... soutient que le prix de revient des titres de la société Legris Industries est de 0,94 euros ou, à titre subsidiaire, de 0,91 euros, le calcul du prix revendiqué par le requérant est erroné dès lors qu'il résulte de l'instruction que ce prix ne correspond pas à un prix de revient unitaire des titres de la société Legris Industries mais procède du rapport entre le prix de revient global de ces titres et leur valeur vénale totale.

Sur les pénalités :

23. D'une part, aux termes du I de l'article 1758 A du code général des impôts, dans sa rédaction applicable à la date du fait générateur des pénalités litigieuses : " I. - Le retard ou le défaut de souscription des déclarations qui doivent être déposées en vue de l'établissement de l'impôt sur le revenu ainsi que les inexactitudes ou les omissions relevées dans ces déclarations, qui ont pour effet de minorer l'impôt dû par le contribuable ou de majorer une créance à son profit, donnent lieu au versement d'une majoration égale à 10 % des droits supplémentaires ou de la créance indue / (...) ". Dans sa rédaction issue du I de l'article 20 de la loi n° 2016-1918 du 29 décembre 2016 de finances rectificative pour 2016, l'article 1758 A prévoit à son III que la majoration prévue au I s'applique à l'exclusion de celle prévue au a du 1 de l'article 1728 du code général des impôts, et à son I que cette majoration est portée à 20 % en cas de dépôt tardif effectué dans les trente jours d'une mise en demeure.

24. D'autre part, aux termes du 1. de l'article 1728 du code général des impôts, dans sa rédaction applicable à la date du fait générateur des pénalités litigieuses : " 1. Le défaut de production dans les délais prescrits d'une déclaration ou d'un acte comportant l'indication d'éléments à retenir pour l'assiette ou la liquidation de l'impôt entraîne l'application, sur le montant des droits mis à la charge du contribuable ou résultant de la déclaration ou de l'acte déposé tardivement, d'une majoration de : / a. 10 % en l'absence de mise en demeure ou en cas de dépôt de la déclaration ou de l'acte dans les trente jours suivant la réception d'une mise en demeure, notifiée par pli recommandé, d'avoir à le produire dans ce délai / (...) ".

25. Il résulte de l'instruction que le Tribunal administratif de Paris a fait droit à la demande de substitution de base légale sollicitée par l'administration fiscale tendant à ce que soient mises à la charge de M. B... une pénalité de 10 % au titre du I de l'article 1758 A du code général des impôts et une pénalité de 10 % au titre du a du 1 de l'article 1728 du même code, en lieu et place de la majoration de 40 % prévue au a de l'article 1729 dudit code appliquée initialement.

26. En premier lieu, si M. B... conteste la pénalité de 10 % qui lui a été infligée sur le fondement du I de l'article 1758 A du code général des impôts par voie de conséquence du caractère infondé des impositions contestées, il résulte de ce qui a été dit aux points 8 à 22 que ce moyen ne peut qu'être écarté.

27. En second lieu, pour contester le cumul des nouvelles majorations admises par le Tribunal administratif de Paris, M. B... se prévaut, pour la première fois en appel, au nom du principe d'application immédiate de la loi répressive plus douce, des dispositions du III de l'article 1758 A du code général des impôts selon lesquelles la majoration prévue au I de l'article 1758 A est exclusive de celle prévue au a du 1 de l'article 1728. Si le législateur a, en contrepartie de cette interdiction de cumul, porté de 10 à 20 % la majoration applicable en cas de dépôt tardif effectué dans les trente jours d'une mise en demeure, il ne résulte pas de l'instruction que l'administration fiscale ait mis en demeure le requérant de déposer une déclaration spéciale des plus-values dans un délai de trente jours. Par suite, M. B... est fondé à soutenir qu'en vertu du principe d'application immédiate de la loi répressive plus douce, et sans qu'il soit besoin d'examiner les autres moyens dirigés contre cette pénalité, c'est à tort que le service lui a infligé, au titre de l'année 2011, la pénalité de 10 % sur le fondement des dispositions du a du 1 de l'article 1728 du code général des impôts en sus de celle prévue au I de l'article 1758 A du même code.

28. Il résulte de tout ce qui précède que M. B... est seulement fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande tendant à la décharge de la pénalité de 10 % qui lui a été infligé sur le fondement des dispositions du a du 1 de l'article 1728 du code général des impôts au titre de l'année 2011.

Sur les frais liés au litige :

29. Dans les circonstances de l'espèce, il n'y a pas lieu de faire droit aux conclusions de M. B... présentées sur le fondement des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

D E C I D E :

Article 1er : Il est donné acte du désistement partiel des conclusions de M. B... tendant à la restitution, en droits et pénalités, des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu, de contribution exceptionnelle sur les hauts revenus et de prélèvements sociaux auxquelles il a été assujetti au titre de l'année 2011.

Article 2 : M. B... est déchargé de la pénalité de 10 % qui lui a été infligé sur le fondement des dispositions du a du 1 de l'article 1728 du code général des impôts au titre de l'année 2011.

Article 3 : Le jugement n° 1816833/1-3 du 7 avril 2021 du Tribunal administratif de Paris est réformé en ce qu'il a de contraire à l'article 2 du présent arrêt.

Article 4 : Le surplus des conclusions de la requête de M. B... est rejeté.

Article 5 : Le présent arrêt sera notifié à M. A... B... et au ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique.

Copie en sera adressée au directeur chargé de la direction spécialisée de contrôle fiscal Centre-Ouest.

Délibéré après l'audience du 29 novembre 2022, à laquelle siégeaient :

- M. Jardin, président de chambre,

- Mme Hamon, présidente assesseure,

- M. Desvigne-Repusseau, premier conseiller,

Rendu public par mise à disposition au greffe le 11 janvier 2023.

Le rapporteur,

M. DESVIGNE-REPUSSEAU

Le président,

C. JARDIN

La greffière,

L. CHANA

La République mande et ordonne au ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique en ce qui le concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

2

N° 21PA03111


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Paris
Formation : 7ème chambre
Numéro d'arrêt : 21PA03111
Date de la décision : 11/01/2023
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Analyses

19-01-04-015-04 CONTRIBUTIONS ET TAXES. - GÉNÉRALITÉS. - AMENDES, PÉNALITÉS, MAJORATIONS. - NON-CUMUL DE LA MAJORATION DE 10 % POUR INEXACTITUDE OU OMISSION DÉCLARATIVES (ART. 1758 A DU CGI, DANS SA RÉDACTION ISSUE DU I DE L'ARTICLE 20 DE LA LOI N° 2016-1918 DU 29 DÉCEMBRE 2016 DE FINANCES RECTIFICATIVE POUR 2016, ET APPLICABLE DEPUIS LE 1ER JANVIER 2017) AVEC LA MAJORATION DE 10 % POUR DÉFAUT OU RETARD DE PRODUCTION D'UNE DÉCLARATION FISCALE (ART. 1728 DU CGI) - LOI RÉPRESSIVE NOUVELLE PLUS DOUCE - EXISTENCE, EN L'ABSENCE DE MISE EN DEMEURE DU CONTRIBUABLE DE DÉPOSER UNE DÉCLARATION [RJ1].

19-01-04-015-04 Si, en contrepartie de l'interdiction de cumul de la majoration de 10 % prévue au I de l'article 1758 A du CGI avec la majoration de 10 % prévue au a du 1 de l'article 1728 du CGI, en vigueur depuis le 1er janvier 2017, le législateur a porté de 10 à 20 % la majoration prévue au I de l'article 1758 du CGI applicable en cas de dépôt tardif effectué dans les trente jours d'une mise en demeure, la majoration de 10 % prévue au a du 1 de l'article 1728 du code général des impôts n'est pas applicable en sus de celle prévue au I de l'article 1758 A du même code, en vertu du principe d'application immédiate de la loi répressive plus douce, au contribuable qui n'a pas été mis en demeure de déposer une déclaration spéciale des plus-values dans un délai de trente jours.


Références :

[RJ1]

Comp. CAA Versailles, 19 octobre 2021, M. Joffre, n° 20VE01265, C+ ;

TA Montreuil, 10 mars 2020, M. Joffre, n° 1805394, C+.


Composition du Tribunal
Président : M. JARDIN
Rapporteur ?: M. Marc DESVIGNE-REPUSSEAU
Rapporteur public ?: Mme BREILLON
Avocat(s) : SELARL REINHART MARVILLE TORRE

Origine de la décision
Date de l'import : 15/01/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.paris;arret;2023-01-11;21pa03111 ?
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