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16/12/2022 | FRANCE | N°21PA02819

France | France, Cour administrative d'appel de Paris, 2ème chambre, 16 décembre 2022, 21PA02819


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

La société Action Totale Sécurité Privée (ATSP) a demandé au Tribunal administratif de Montreuil de prononcer la décharge, en droits et pénalités, des suppléments d'impôt sur les sociétés auxquelles elle a été assujettie au titre des exercices clos en 2014, 2015 et 2016 ainsi que de l'amende prononcée sur le fondement de l'article 1759 du code général des impôts.re des frais exposés.

Par un jugement nos 1909427/9, 1909428/9 du 25 mars 2021, le Tribunal administratif de Montreuil rejeté c

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Procédure devant la Cour :

Par une requête enregistrée le 25 mai 2021, la ...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

La société Action Totale Sécurité Privée (ATSP) a demandé au Tribunal administratif de Montreuil de prononcer la décharge, en droits et pénalités, des suppléments d'impôt sur les sociétés auxquelles elle a été assujettie au titre des exercices clos en 2014, 2015 et 2016 ainsi que de l'amende prononcée sur le fondement de l'article 1759 du code général des impôts.re des frais exposés.

Par un jugement nos 1909427/9, 1909428/9 du 25 mars 2021, le Tribunal administratif de Montreuil rejeté ces demandes.

Procédure devant la Cour :

Par une requête enregistrée le 25 mai 2021, la société ATSP, représentée par Me Jean-Claude Drié, demande à la Cour :

1°) d'annuler ce jugement du 25 mars 2021 du Tribunal administratif de Montreuil ;

2°) de prononcer la décharge des impositions contestées devant le tribunal ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 6 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- la procédure est irrégulière dès lors que la proposition de rectification ne lui a pas été régulièrement notifiée ;

- l'article L. 76 B du livre des procédures fiscales a été méconnu en raison de l'absence de communication des documents fondant les impositions en litige ;

- les comptabilités présentées étaient sincères et probantes et la méthode de reconstitution des recettes est viciée ;

- l'administration n'était pas fondée à refuser la déductibilité de taxe sur la valeur ajoutée de certaines charges et à notifier, en conséquence, un profit sur le Trésor ;

- c'est à tort que l'administration a refusé la déduction du résultat fiscal de certaines charges ;

- la décharge des majorations doit être prononcée par voie de conséquence de la décharge des impositions en litige ;

- l'amende de l'article 1759 du code général des impôts n'est pas fondée ;

- l'administration n'a pas démontré les manquements délibérés et les manœuvres frauduleuses des pénalités fondées sur l'article 1729 a) et c) du même code ;

- l'amende prononcée au titre de l'article 1737 de ce même code n'est pas fondée.

Par un mémoire en défense enregistré le 7 juillet 2021, le ministre de l'économie, des finances et de la relance conclut au rejet de la requête.

Il soutient que :

- les moyens soulevés par la société ATSP ne sont pas fondés ;

- à titre subsidiaire la pénalité appliquée sur le fondement de l'article 1729 a) du code général des impôts pourrait être substituée à celle prononcée sur le fondement de l'article 1729 c) de ce même code.

Par une ordonnance du 17 janvier 2022, la clôture d'instruction a été fixée au 7 février 2022.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme A...,

- les conclusions de M. Sibilli, rapporteur public.

Considérant ce qui suit :

1. La société ATSP, qui exerce une activité de surveillance, de gardiennage, de protection des biens et des personnes et de conseil en sécurité, a fait l'objet d'une vérification de comptabilité portant sur la période du 1er avril 2013 au 31 mars 2016, étendue au 31 décembre 2016 pour la taxe sur la valeur ajoutée. A l'issue de cette procédure, l'administration lui a notifié des rappels de taxe sur la valeur ajoutée au titre de la période du 1er avril 2014 au 31 décembre 2016, des cotisations supplémentaires d'impôt sur les sociétés au titre des trois exercices vérifiés, suivant une procédure contradictoire, et des contributions sur les activités privées de sécurité au titre des exercices clos en 2014, 2015 et 2016, assortis de majorations. Par un jugement du 25 mars 2021, dont la société ATSP relève appel, le Tribunal administratif de Montreuil a rejeté sa demande tendant à la décharge, en droits et pénalités, des impositions supplémentaires à l'impôt sur les sociétés qui lui ont été assignées et de l'amende qui lui a été infligée à raison de sommes distribuées.

Sur la régularité de la procédure d'imposition :

2. En premier lieu, aux termes de l'article L. 57 du livre des procédures fiscales : " L'administration adresse au contribuable une proposition de rectification qui doit être motivée de manière à lui permettre de formuler ses observations ou de faire connaître son acceptation. (...) ".

3. Il résulte de l'instruction que la proposition de rectification du 27 juillet 2017 a été adressée le jour même au siège social de la société et retournée à l'administration le lendemain avec la mention " destinataire inconnu à l'adresse ". Si la société ATSP soutient que le défaut de délivrance du pli est imputable à une erreur de La Poste, le courrier du service clientèle de la Poste du 29 décembre 2017, qui fait état de ce que le pli a été retourné à l'expéditeur suite à un " incident ", est insuffisamment circonstancié pour imputer le défaut de distribution à un dysfonctionnement de ce service, alors que l'administration fait valoir sans être contredite, en défense, que la plupart des pièces de procédure adressées à la société lui ont été retournées avec la même mention. Par suite, la société ATSP n'est pas fondée à soutenir que la proposition de rectification lui aurait été irrégulièrement notifiée.

4. En second lieu, aux termes de l'article L. 76 B du livre des procédures fiscales : " L'administration est tenue d'informer le contribuable de la teneur et de l'origine des renseignements et documents obtenus de tiers sur lesquels elle s'est fondée pour établir l'imposition faisant l'objet de la proposition prévue au premier alinéa de l'article L 57 ou de la notification prévue à l'article L 76. Elle communique, avant la mise en recouvrement, une copie des documents susmentionnés au contribuable qui en fait la demande ". (...) "..

5. La société ATSP a formé sa demande de communication des informations et documents obtenus de tiers le 10 octobre 2017, soit postérieurement à la mise en recouvrement des impositions en litige, intervenue le 29 septembre 2017. Dès lors, l'administration n'était pas tenue d'accéder à cette demande en application des dispositions de l'article L. 76 B du livre des procédures fiscales.

6. Il résulte de ce qui précède que la société ATSP n'est pas fondée à soutenir que la procédure d'imposition serait irrégulière.

Sur le bien-fondé des impositions :

7. La seule circonstance que l'administration aurait à tort écarté la comptabilité de la société comme non probante est, à elle seule, sans incidence sur le bien-fondé des impositions en litige.

En ce qui concerne la charge de la preuve :

8. Aux termes de l'article R. 194-1 du livre des procédures fiscales : " Lorsque, ayant donné son accord à la rectification ou s'étant abstenu de répondre dans le délai légal à la proposition de rectification, le contribuable présente cependant une réclamation faisant suite à une procédure contradictoire de rectification, il peut obtenir la décharge ou la réduction de l'imposition, en démontrant son caractère exagéré. (...) ".

9. La société ATSP n'a pas présenté d'observations dans le délai de trente jours qui courait à compter de la notification de la proposition de rectification réputée faite le 28 juillet 2017. Elle doit ainsi être considérée comme ayant tacitement accepté les rectifications en matière d'impôt sur les sociétés, et supporte en conséquence la charge d'établir, en application des dispositions précitées de l'article R. 194-1 du livre des procédures fiscales, le caractère exagéré des cotisations à l'impôt sur les sociétés en litige.

En ce qui concerne la reconstitution des recettes :

10. Il résulte de la proposition de rectification que la société ATSP n'a pas présenté de comptabilité pour l'exercice clos en 2014 et n'a pas justifié, par la présentation de factures, de la taxe sur la valeur ajoutée déductible portée sur ses déclarations sur la période correspondant aux exercices 2015 et 2016, pour des montants respectifs de 171 710 euros et de 54 644 euros. Dans ces conditions, l'administration était fondée à estimer que la comptabilité de la société n'était ni fiable, ni probante. Au demeurant, pour reconstituer le chiffre d'affaires imposable de la société, qui n'avait pas opté pour l'exigibilité de la taxe d'après les débits et pour laquelle la taxe était dès lors exigible sur les encaissements, s'agissant de prestations de services, l'administration s'est bornée à relever les discordances apparaissant entre les éléments déclarés et les montants crédités sur les comptes bancaires de la société. La société requérante ne démontre pas le caractère vicié de cette méthode de rectification en se bornant à indiquer que sa comptabilité était fiable alors qu'elle n'a pas été en mesure de justifier des discordances relevées.

En ce qui concerne le profit sur le Trésor :

11. L'administration a réintégré dans les résultats taxables de la société 75 588 euros, 175 900 euros et 57 596 euros, respectivement au titre des exercices clos en 2014, 2015 et 2016, résultant de l'absence de déclaration par la société de la totalité de ses contributions sur les activités privées de sécurité et de la taxe sur la valeur ajoutée collectée, ainsi que de la déduction de cette taxe sans justificatifs ou à raison de dépenses dénuées d'intérêt pour la société.

12. En premier lieu, si la société ATSP conteste avoir déduit fictivement de la taxe sur la valeur ajoutée, elle ne produit aucune facture de nature à justifier la différence entre les montants de taxe sur la valeur ajoutée déclarés et ceux enregistrés dans sa comptabilité, alors qu'il résulte de l'instruction qu'une partie de la taxe déductible déclarée par elle ne correspondait à aucune facture, aucune charge enregistrée ni aucun décaissement.

13. En deuxième lieu, en vertu des dispositions combinées des articles 271, 272 et 283 du code général des impôts, un contribuable n'est pas en droit de déduire de la taxe sur la valeur ajoutée dont il est redevable à raison de ses propres opérations, la taxe mentionnée sur une facture établie à son nom par une personne qui ne lui a fourni aucun bien ou aucune prestation de services. Dans le cas où l'auteur de la facture était régulièrement inscrit au registre du commerce et des sociétés et assujetti à la taxe sur la valeur ajoutée, il appartient à l'administration, si elle entend refuser à celui qui a reçu la facture le droit de déduire la taxe qui y était mentionnée, d'établir qu'il s'agissait d'une facture fictive ou d'une facture de complaisance et que le contribuable le savait ou ne pouvait l'ignorer. Si l'administration apporte des éléments suffisants permettant de penser que la facture ne correspond pas à une opération réelle, il appartient alors au contribuable d'apporter toutes justifications utiles sur la réalité de cette opération.

14. L'administration a refusé la déduction de taxe sur la valeur ajoutée sur des factures émises par les sociétés sous-traitantes Barth Assistance et Hamex, au motif que ces factures étaient fictives ou de complaisance, ou en raison de l'absence de toute facture s'agissant de la société Hamex. D'une part, il est constant que la société Hamex n'est pas enregistrée au registre du commerce et des sociétés et en tout état de cause, la facture de cette société enregistrée en comptabilité pour un montant de 12 882 euros le 25 juin 2013 n'a pas été produite. D'autre part, la société requérante, qui ne justifie d'aucun contrat de sous-traitance, ne conteste pas sérieusement, en se bornant à indiquer que la société Barth Assistance aurait pu elle-même avoir recours à la sous-traitance, les constats de l'administration selon lesquels cette société, qui n'avait déclaré qu'un seul salarié auprès de l'URSAFF, ne disposait pas des moyens humains pour effectuer les missions confiées et n'avait déposé aucune déclaration fiscale ou de taxe sur la valeur ajoutée, alors au surplus qu'il résulte de l'instruction et n'est pas contesté que le règlement des factures émises au nom de cette société a été effectué au bénéfice de tiers. La société ATSP ne produit ainsi aucun élément de nature à justifier que ces factures correspondaient à des prestations réellement exécutées par les sociétés émettrices et devaient être déduites de son bénéfice imposable.

15. En troisième lieu, l'administration a refusé la déductibilité de taxe sur la valeur ajoutée portant sur des factures téléphoniques d'appels à l'étranger au motif que la société n'exerçait son activité qu'en Ile-de-France et que ces dépenses étaient donc étrangères à son intérêt. Pour les motifs exposés au point 19., le ministre était fondé à refuser la déductibilité de cette taxe.

En ce qui concerne les charges déductibles :

16. En premier lieu, d'une part aux termes de l'article 39 du code général des impôts : " 1. Le bénéfice net est établi sous déduction de toutes charges, celles-ci comprenant (...) notamment : 1° Les frais généraux de toute nature (...) 5. Sont également déductibles les dépenses suivantes : (...) e. Les cadeaux de toute nature, à l'exception des objets de faible valeur conçus spécialement pour la publicité ; f.) Les frais de réception, y compris les frais de restaurant et de spectacles. (...) Les dépenses ci-dessus énumérées peuvent également être réintégrées dans les bénéfices imposables dans la mesure où elles sont excessives et où la preuve n'a pas été apportée qu'elles ont été engagées dans l'intérêt direct de l'entreprise ".

17. Si, en vertu des règles gouvernant l'attribution de la charge de la preuve devant le juge administratif, applicables sauf loi contraire, il incombe, en principe, à chaque partie d'établir les faits qu'elle invoque au soutien de ses prétentions, les éléments de preuve qu'une partie est seule en mesure de détenir ne sauraient être réclamés qu'à celle-ci. Il appartient, dès lors, au contribuable, pour l'application des dispositions précitées du code général des impôts, de justifier tant du montant des charges qu'il entend déduire du bénéfice net défini à l'article 38 du code général des impôts que de la correction de leur inscription en comptabilité, c'est-à-dire du principe même de leur déductibilité. Le contribuable apporte cette justification par la production de tous éléments suffisamment précis portant sur la nature de la charge en cause, ainsi que sur l'existence et la valeur de la contrepartie qu'il en a retirée. Dans l'hypothèse où le contribuable s'acquitte de cette obligation, il incombe ensuite à l'administration, si elle s'y croit fondée, d'apporter la preuve de ce que la charge en cause n'est pas déductible par nature, qu'elle est dépourvue de contrepartie, qu'elle a une contrepartie dépourvue d'intérêt pour le contribuable ou que la rémunération de cette contrepartie est excessive. En vertu de ces principes, lorsqu'une entreprise a déduit en charges une dépense réellement supportée, conformément à une facture régulière relative à un achat de prestations ou de biens dont la déductibilité par nature n'est pas contestée par l'administration, celle-ci peut demander à l'entreprise qu'elle lui fournisse tous éléments d'information en sa possession susceptibles de justifier la réalité et la valeur des prestations ou biens ainsi acquis. La seule circonstance que l'entreprise n'aurait pas suffisamment répondu à ces demandes d'explication ne saurait suffire à fonder en droit la réintégration de la dépense litigieuse, l'administration devant alors fournir devant le juge tous éléments de nature à étayer sa contestation du caractère déductible de la dépense. Le juge de l'impôt doit apprécier la valeur des explications qui lui sont respectivement fournies par le contribuable et par l'administration.

18. D'autre part, en vertu des dispositions combinées des articles 38 et 209 du code général des impôts, le bénéfice imposable à l'impôt sur les sociétés est celui qui provient des opérations de toute nature faites par l'entreprise, à l'exception de celles qui, en raison de leur objet ou de leurs modalités, sont étrangères à une gestion normale. Constitue un acte anormal de gestion l'acte par lequel une entreprise décide de s'appauvrir à des fins étrangères à son intérêt.

19. L'administration a remis en cause la déductibilité de certains frais d'indemnités kilométriques, de frais de déplacement en dehors de l'Ile-de-France et d'appels téléphoniques à l'étranger, en raison de l'absence de production de justificatifs comptables ou de justification de l'intérêt de ces dépenses pour la société, qui exerçait son activité en Ile-de-France. La société requérante n'apporte aucun justificatif, tant sur la réalité des déplacements ayant occasionné le versement des indemnités kilométriques, pour lesquelles l'administration avait relevé dans la proposition de rectification des incohérences entre les sommes déduites et les pièces justificatives produites lors du contrôle, que sur l'intérêt, pour son exploitation, des dépenses engagées hors de la région Ile-de-France ou à raison d'appels à l'étranger.

20. En second lieu, pour les motifs exposés au point 14., l'administration était en droit de refuser la déductibilité des factures de sous-traitance.

21. Il résulte de ce qui précède que la société ATSP n'est pas fondée à contester les réintégrations qui ont été opérées pour la détermination de son résultat fiscal.

Sur les pénalités :

22. Compte tenu de ce qui précède, la société ATSP n'est pas fondée à demander la décharge, par voie de conséquence, des pénalités relatives aux cotisations supplémentaires à l'impôt sur les sociétés mises à sa charge.

Sur les amendes :

En ce qui concerne l'amende de l'article 1759 du code général des impôts :

23. Aux termes de l'article 117 du code général des impôts : " Au cas où la masse des revenus distribués excède le montant total des distributions tel qu'il résulte des déclarations de la personne morale visées à l'article 116, celle-ci est invitée à fournir à l'administration, dans un délai de trente jours, toutes indications complémentaires sur les bénéficiaires de l'excédent de distribution. / En cas de refus ou à défaut de réponse dans ce délai, les sommes correspondantes donnent lieu à l'application de la pénalité prévue à l'article 1759 " et aux termes de l'article 1759 de ce code : " Les sociétés et les autres personnes morales passibles de l'impôt sur les sociétés qui versent ou distribuent, directement ou par l'intermédiaire de tiers, des revenus à des personnes dont, contrairement aux dispositions des articles 117 et 240, elles ne révèlent pas l'identité, sont soumises à une amende égale à 100 % des sommes versées ou distribuées. (...) ".

24. Il résulte de ce qui a été dit au point 9. que la société ATSP n'a pas répondu dans le délai de trente jours, à compter de la date à laquelle la proposition de rectification lui a été notifiée, à la demande de désignation des bénéficiaires des revenus réputés distribués. Par ailleurs, cette demande, qui portait sur les seuls retraits d'espèces d'un montant de 36 000 euros sans contrepartie au titre de l'exercice clos en 2016, dont la société ne conteste pas le refus d'inscription en charges, était justifiée dès lors qu'il ne résulte pas de l'instruction que l'administration aurait eu connaissance de l'identité des bénéficiaires. Par suite, en application des dispositions des articles 117 et 1759 du code général des impôts, l'administration était en droit de soumettre la société ATSP à une amende de 100 % des revenus distribués

En ce qui concerne les pénalités de l'article 1729 du code général des impôts :

25. Aux termes de l'article 1729 du code général des impôts : " Les inexactitudes ou les omissions relevées dans une déclaration ou un acte comportant l'indication d'éléments à retenir pour l'assiette ou la liquidation de l'impôt ainsi que la restitution d'une créance de nature fiscale dont le versement a été indûment obtenu de l'Etat entraînent l'application d'une majoration de : / a. 40 % en cas de manquement délibéré ; (...) / c. 80 % en cas de manœuvres frauduleuses (...) ".

26. En premier lieu, l'administration a appliqué la pénalité de 40 % aux rehaussements du résultat imposable de la société résultant du rejet des charges relatives aux factures téléphoniques à raison d'appels à l'étranger et aux indemnités kilométriques non justifiées. Elle a motivé l'application de cette pénalité par la circonstance que la société ne pouvait ignorer qu'elle n'était pas fondée à déduire des charges en l'absence de factures ou d'intérêt pour la société à engager ces dépenses et que les manquements en matière de charges téléphoniques et de déplacement étaient répétés et portaient sur des montants significatifs. Dans ces conditions, l'administration a démontré que la société ATSP avait, de manière délibérée, minoré son résultat imposable à l'impôt sur les sociétés.

27. En second lieu, les pénalités pour manœuvres frauduleuses ont pour objet de sanctionner des agissements destinés à égarer ou à restreindre le pouvoir de contrôle de l'administration. Le recours à des factures fictives est constitutif par lui-même de manœuvres frauduleuses, de nature à justifier, par application de l'article 1729 du code général des impôts, une majoration de 80 % à raison de ces factures fictives, dont l'existence est démontrée en l'espèce par l'administration ainsi que cela a été dit au point 14. du présent arrêt s'agissant des factures établies au nom de la société sous-traitante Barth Assistance.

En ce qui concerne l'amende établie sur le fondement du 1. du I. de l'article 1737 du code général des impôts :

28. Aux termes de l'article 1737 du code général des impôts : " I. - Entraîne l'application d'une amende égale à 50 % du montant : 1. Des sommes versées ou reçues, le fait de travestir ou dissimuler l'identité ou l'adresse de ses fournisseurs ou de ses clients, les éléments d'identification mentionnés aux articles 289 et 289 B et aux textes pris pour l'application de ces articles ou de sciemment accepter l'utilisation d'une identité fictive ou d'un prête-nom ; (...) ". Il résulte de ces dispositions que l'administration peut mettre l'amende ainsi prévue à la charge de la personne qui a délivré la facture, ou à la charge de la personne destinataire de la facture, si elle établit que la personne concernée a, soit travesti ou dissimulé l'identité, l'adresse ou les éléments d'identification de son client ou de son fournisseur, soit accepté l'utilisation, en toute connaissance de cause, d'une identité fictive ou d'un prête-nom.

29. L'administration démontre, ainsi qu'il lui incombe, que la société requérante a sciemment produit des factures établies par un prestataire, la société Barth-Assistance, dont elle ne pouvait ignorer qu'elle n'avait pas pu réaliser les prestations correspondantes et qu'elle n'avait pas non plus été la bénéficiaire des sommes acquittées en règlement des factures. Elle était ainsi fondée à appliquer aux montants portés sur ces factures l'amende prévue à l'article 1737 du code général des impôts.

30. Il résulte de tout ce qui précède, que la société ATSP n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Montreuil a rejeté sa demande. Sa requête, y compris les conclusions présentées au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, doit dès lors être rejetée.

DECIDE :

Article 1er : La requête de la société ATSP est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à la société ATSP et au ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique.

Copie en sera adressée au chef des services fiscaux chargé de la direction de contrôle fiscal d'Ile-de-France.

Délibéré après l'audience du 7 décembre 2022, à laquelle siégeaient :

- Mme Brotons, président de chambre,

- Mme Topin, président assesseur,

- M. Magnard, premier conseiller.

Rendu public par mise à disposition au greffe le 16 décembre 2022.

Le rapporteur,

E. A...Le président,

I. BROTONS

Le greffier,

C. MONGIS

La République mande et ordonne au ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique en ce qui le concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

2

N° 21PA02819


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Paris
Formation : 2ème chambre
Numéro d'arrêt : 21PA02819
Date de la décision : 16/12/2022
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Composition du Tribunal
Président : Mme BROTONS
Rapporteur ?: Mme Emmanuelle TOPIN
Rapporteur public ?: M. SIBILLI
Avocat(s) : SELAS DS AVOCATS

Origine de la décision
Date de l'import : 18/12/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.paris;arret;2022-12-16;21pa02819 ?
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